Kid Expo, l’évènement familial et ludique qu’il ne fallait pas manquer…

Il y a quelques jours se tenait à Paris l’évènement familial Kid Expo. C’était la huitième édition et force est de constater que les années passant, Kid Expo est en passe de devenir la véritable grande fête des familles et des enfants !

Certes, certains pourraient un peu rapidement et vu de l’extérieur penser qu’il ne s’agit là que d’une foire commerciale où de grandes marques chercheraient seulement à vendre des produits à offrir à Noël, à commencer bien sûr par les jouets nouveaux ou anciens, technologiques ou pédagogiques, français ou pas…

En fait, Kid Expo c’est de toute évidence beaucoup plus qu’une foire commerciale. En effet, le parc des expos de la Porte de Versailles ouvre deux halls complets dont un entièrement transformé en aire de jeux et de pratiques sportives. On peut nager, shooter, courir, sauter, tirer à la carabine, faire du roller, de la trottinette, du vélo, du poney car les différentes fédérations sont là pour promouvoir un sport non pour vendre un quelconque produit de consommation. Et j’en ai vu des enfants prendre du plaisir en se laissant initier à ces activités.

Durant le week-end, de grands champions sont venus pour partager avec les enfants, et c’est ainsi que Frederick Bousquet s’est mis dans l’eau avec les enfants et les parents pour une belle séance de plaisir aquatique partagé…

Mais Kid Expo, c’est aussi une aire de jeu étonnante avec les grandes marques. Comment ne pas citer ces petites briques de couleur en plastique qui permettent aux grands et aux petits de partager leur créativité dans une ambiance intergénérationnelle surprenante. Certains entrent dans le jeu, d’autres regardent, mais c’est certain que ce jeu créé en 1949 a encore de beaux jours devant lui !

Heureusement, les jeunes créateurs sont aussi là avec la possibilité de jouer des parties entières avec parents et enfants, et même les grands parents qui étaient très nombreux. Je ne pourrais pas citer tous les jeux que j’ai ainsi essayé mais comment ne pas vous parler de ceux qui m‘ont le plus marqué. Souk, un jeu où il faut non seulement faire preuve de stratégie pais où il faut oser faire un pari sur ses propres résultats (à partir d’une dizaine d’années), Croc, le jeu où il faut tenter de nager plus vite que les autres pour ne pas se faire happer par le requin affamé (dès 7 ans, à mon avis car j’ai joué avec un jeune de cet âge samedi dernier et il a adoré), Quelle histoire, la façon de se plonger dans l’histoire avec un grand H tout en jouant (le mémo à partir de trois ans, le jeu de cartes à partir de 8 ans, les jeux sur tablette pour toute la famille)… Oui, Kid Expo est bien une véritable zone de partage du jeu et on pouvait y passer une journée entière sans jamais s’ennuyer !

Mais il y avait aussi des stands plus ouverts sur les questions parentales et éducatives, administratives et techniques, alimentaires et touristiques. C’est ainsi que la FEPEM (fédération du particulier employeur) informait les parents sur la façon de respecter la loi avec la nounou de leurs enfants, la mairie de Paris abordait toutes les questions autour de l’accueil du jeune enfant dans la capitale, Approuvé par les familles expliquait sa démarche communautaire dans laquelle les familles deviennent informatrices des autres familles… Bref, on pouvait tout savoir sur tout !

Il n’est donc pas étonnant de voir que plus de 170000 personnes se sont déplacées pour passer généralement une journée entière à Kid Expo cette année. J’ai vu de nombreux parents qui m’ont expliqué qu’ils avaient fait la surprise à leurs enfants. Oui, une journée à Kid Expo c’est du même ordre qu’une journée dans un parc d’attraction… Non, c’est peut-être même mieux !

« KidExpo attire chaque année un public de plus en plus nombreux. Education, vie pratique, loisirs, jeux et jouets sont autant de thèmes que KidExpo décline en ateliers, permettant aux parents et aux enfants de faire le plein d’idées pour toute l’année. Le succès de cette 8ème édition renforce la position de KidExpo, le plus grand rendez-vous familial », commente Sophie Desmazières, Fondatrice.

Quelle affaire pour seulement 30 deniers !!!

La bande dessinée est un art narratif complexe, hybride et qui a atteint une certaine maturité qui lui permet depuis quelques années d’aborder tous les sujets ou presque. Il n’est donc point étonnant de la voir s’engouffrer dans les thèmes complotistes après avoir été s’aventurer dans l’ésotérisme, l’uchronie, et les deux combinés !

Jean-Pierre Pécau, après avoir livré les secrets de l’histoire de l’humanité dans Histoire secrète, série remarquable qui n’est que de la fiction, je le rappelle à tous les lecteurs, a décidé de se relancer dans une incroyable aventure jouant sur l’histoire, le complot, l’ésotérisme, l’espionnage et le sentiment… Oui, il a voulu faire tout à la fois pour une grande fiction dessinée par celui qui est devenu au fil des années son ami, Igor Kordey. Il faut dire qu’ils ont écrit ensemble plus de trente albums de bande dessinée (en particulier Histoire secrète), ce qui n’est pas rien vous en conviendrez !

Le thème est simple, d’une certaine façon. Beaucoup se souviennent de l’histoire de Judas. Il trahit son ami Jésus pour trente deniers puis, désespéré, il jette ces pièces et va se pendre. Mais il y a d’autres versions : « Il existe encore de nos jours à Jérusalem un terrain vague que ni les croisés, ni les Turcs, ni les autorités israéliennes n’ont voulu rendre constructible : c’est le champ du potier ou le champ du sang. On dit que c’est ici que Judas se suicida après avoir acheté ce lopin de terre avec les 30 pièces d’argent de sa trahison. C’est une légende bien sûr, mais on peut noter que nulle plante ne pousse sur cet arpent de terre sèche et que les animaux l’évitent… » Et c’est ainsi que la série commence !!!

Que sont devenues ces 30 pièces d’argent ? D’où viennent-elles ? N’auraient-elles pas des pouvoirs particuliers ? Pourquoi certains hommes se sont-ils alliés pour les récupérer ? Pourquoi sont-elles si dangereuses ?

Mais comme il ne s’agit pas d’un ouvrage historique sur les 30 deniers, il fallait que Jean-Pierre Pécau trouve un moteur incroyable pour plonger ses personnages dans une aventure incroyable, pour bousculer, contraindre le lecteur à lire le premier album jusqu’à la dernière bulle, mettre le lecteur dans un tel état qu’il ne pourra plus vivre paisiblement jusqu’à la sortie du dernier album de la série… et il y en aura probablement beaucoup (le chiffre exact ne semble pas encore fixé). On va donc se retrouver en compagnie de Xavier Gral, un homme qui a déjà terminé sa carrière d’agent secret français, qui a perdu son épouse dans des conditions particulières que l’on découvre au fur et à mesure, et qui a une fille, Laureline. Cette dernière est gravement malade, en phase quasi terminale diraient les médecins si on leur demandait leur avis. Xavier est prêt à tout pour sa fille et c’est justement ce que vont exploiter certains en mettant sur sa route la détentrice d’un des deniers, celui qui permet sinon de vaincre la maladie, du moins de prolonger la vie des malades, le fameux denier qu’avait utilisé François Mitterrand pour terminer son deuxième mandat.

Je vois votre surprise mais je vous rappelle que nous sommes bien dans une fiction complotiste où tout est possible, explicable et que ce que vous allez lire dans ces albums n’est en aucun cas la vérité historique, quoi que…

Xavier va donc tout faire pour sauver sa fille et quand la « guérisseuse » est assassinée, que le denier est volé, notre ancien agent est définitivement prêt à reprendre du service pour avoir l’usage de ce denier qui représente la vie de sa fille…

Dans le second album paru, Xavier va découvrir une société secrète, les Régents, un groupe de banquiers né sous la Renaissance en Italie et qui gère le monde des finances. Occasion de comprendre les finances internationales de Law jusqu’aux traders d’aujourd’hui, mais là encore, attention, ce n’est que de la fiction. Quoi que, on peut imaginer le jeune Jérôme Kerviel ait eu en sa possession un denier d’abondance et que le jour où il se l’est fait voler il ait tout perdu… simple hypothèse, bien sûr !

Dans ce second volume, on a la confirmation que les deniers sont probablement plus que trente et que les candidats à la possession sont nombreux et prêts à tout, y compris le crime !

A partir de là, surtout dès le début du troisième volume, les lecteurs fanatiques d’espionnage, de complot, de magouilles cachées, vont jubiler – et j’en suis – tandis que les lecteurs rationnels et classiques vont se sentir un peu perdus, largués… C’est l’une des raisons pour laquelle je suis persuadé que nous sommes fondamentalement en présence d’une bande dessinée pour adultes, voire même pour adultes avertis et préparés car les allusions historiques, politiques, religieuses, ésotériques sont très nombreuses !!!

Vous l’aurez bien compris, j’adore cette série et je suis dans l’attente de l’album suivant dès que j’en ai terminé un. Heureusement, Igor Kordey dessine vite et bien. Il lui faut environ deux mois pour dessiner un album ce qui permet au lecteur d’espérer ainsi une série qui serait terminée en deux ans. On est dans un tempo de série télévisée, ce que revendique totalement Jean-Pierre Pécau qui est persuadé que c’est le rythme de la création de ce début de vingt-et-unième siècle. Le lecteur ne veut plus prendre le temps d’attendre trop longtemps pour avoir la suite de ses histoires. De plus, les scénarios de Pécau sont si complexes que si le délai devient trop long, il faut envisager de tout relire avant de passer à la nouveauté, or, le nombre d’albums étant trop importants, une telle démarche est presque impossible pour une personne ayant un emploi du temps normal… Non ?

Venons-en pour terminer notre analyse de la série Les 30 deniers, à la narration graphique d’Igor Kordey ! Certains n’aiment pas son graphisme, mais tous reconnaissent qu’il est diablement efficace : tout ce qui est indispensable à la compréhension du récit est là, y compris dynamisme, violence, vitesse… oui, il est très fort et il sait plonger ses lecteurs immédiatement dans le tempo du récit de Pécau. C’est d’ailleurs fascinant comme ces deux auteurs travaillent, se complètent, s’enrichissent… Un duo total qui pourtant travaille beaucoup à distance. Igor habitait au Canada, puis maintenant en Croatie et donc c’est Internet qui fait le lien entre les deux. Pourtant, pour le lecteur, on a le sentiment d’une même envie de raconter, de dépayser, de distiller les indices, de plonger dans le mystère, de torturer en quelque sorte le lecteur, de le faire attendre, de le piéger, de le manipuler… Quel talent, tout simplement !!!

Voilà donc une belle idée de lecture, de cadeau, de partage…

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Série Les 30 deniers

Scénario de Jean-Pierre Pécau

Dessin d’Igor Kordey

Couleurs de Len O’Grady

 

Tome 1 : Savoir

ISBN : 9782756040967

 

Tome 2 : Oser

ISBN : 9782756040974

 

Tome 3 : Vouloir

ISBN : 9782756040981

Des livres pour la jeunesse… quand il fait froid !

Il y a des ouvrages que l’on ne peut lire qu’à certaines saisons, surtout quand il s’agit de livres principalement destinés à la jeunesse. En effet, comment expliquer à un enfant que c’est normal de lire une histoire de Père Noël en plein mois de juillet. Inversement, on évitera en plein hiver de lui faire découvrir les joies de la plage, de la mer, de la natation en eau vive…

Voilà pourquoi il est temps de vous préparer à lire certains contes d’hiver, c’est la saison et, à défaut de réchauffer le petit blotti dans son lit, il trouvera normal de voir évoquer la neige, le froid, le givre, les bonhommes de neige et, bien sûr, le Père Noël ! Trois ouvrages pour illustrer mon propos et vous donner envie de répondre à la demande d’histoires de votre petite tête blonde – ou pas – dès ce soir !

Je commencerai par Mon petit Père Noël de Gabrielle Vincent. Cette extraordinaire artiste est morte il y a maintenant déjà presque 15 ans et je me souviens toujours de sa douceur, de sa gentillesse, de sa simplicité. Je ne l’ai vue qu’une seule fois, au salon du livre jeunesse de Montreuil, mais c’est comme si c’était hier tant cette rencontre m’a touché ! Aujourd’hui, chaque fois que j’ouvre un de ses livres, je pense à elle et je passe un excellent moment.

Son petit Père Noël est une histoire d’une tendresse étonnante, d’une poésie incroyable, d’une profondeur comme rarement on en trouve dans les livres pour la jeunesse. Une petite fille voit un Père Noël descendre du ciel un 24 décembre. Rien de surprenant à cela, sauf que ce Père Noël n’a rien à donner ! Du coup, la fille touchée par ce dénuement, va lui offrir un cadeau… Rôle inversé, réflexion sur le bonheur d’offrir, une histoire à contrecourant du consumérisme qui nous submerge, surtout à l’approche des périodes de fête… Et c’est aussi les prémices des Noël de crise, allez savoir…

Le Père Castor, vous savez celui qui raconte sans arrêt ses histoires, celui qui a fasciné tant d’enfants, est une source permanente de contes en tous genres. J’avoue avoir même tendance à penser que ce label éditorial, cette collection crée en 1931 par Paul Faucher, a contribué à faire vivre le patrimoine culturel français… Arrivera-t-il à fêter son centenaire ? En tous cas, voici deux ouvrages qui prolongeront la vie d’ouvrages plus anciens…

Le Père Castor raconte ses histoires de Noël nous propose 14 histoires sur ce thème, toutes illustrées. Certaines sont ancrées dans le passé lointain et nous viennent des contes anciens tandis que d’autres sont plus contemporaines. Il en est de même avec les illustrations qui sont très différentes d’un conte à l’autre.

Il faut toujours dire si on a une petite préférée et je vais assumer mon choix en vous disant que j’ai beaucoup aimé Un Noël tombé du ciel, inspiré directement d’un conte polynésien. D’ailleurs, je dois bien avouer que dans ce cas-là, c’est un Noël sans neige… mais en Polynésie, de l’autre côté de la planète…

Enfin, pour clore ses histoires rafraichissantes, je vous propose d’ouvrir Le Père Castor raconte ses contes de l’hiver avec 7 histoires différentes à écouter en pull et chaussettes, ou dans son lit avec une bouillotte !

C’est dans ce dernier recueil que l’on trouve une version de la fameuse moufle, un conte russe, réapproprié, raconté et illustré par Robert Giraud et Olivier Latyk. J’aime beaucoup l’illustration car je la trouve à la fois moderne, dynamique et sympathique…

Si on fait le calcul de l’ensemble de ces histoires de saison, cela fait 22 récits et je m’aperçois que l’on pourrait presque faire une sorte de calendrier de l’Avent vivant : une histoire par jour durant les 22 jours qui précèdent Noël. N’est-ce point là une idée qui devrait être mise en œuvre dans toutes les familles ? Lire une histoire à l’enfant que l’on aime est quand même beaucoup plus sympathique que de le laisser manger tout seul un petit bout de chocolat industriel acheté dans un hypermarché. Non ? Voilà qui devrait changer dans certaines familles la préparation de Noël et pourquoi ne pas garder Mon petit Père Noël pour clore ce cheminement ? Dans tous les cas, trois beaux livres parfaitement adaptés à ces périodes hivernales qui précèdent les grandes fêtes de fin d’année !

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Mon petit Père Noël

Gabrielle Vincent

Editions Grasset Jeunesse

ISBN : 9782246499817

Le Père Castor raconte ses histoires de Noël

Editions Flammarion

ISBN : 9782081337350

Le Père Castor raconte ses contes de l’hiver

Editions Flammarion

ISBN : 9782081310292

Palmarès du festival BD de Chambéry 2014 !

Le festival de bandes dessinées de Chambéry a rendu son verdict, du moins en ce qui concerne les prix qu’il attribue chaque année. Certes, les journalistes et les médias ont retenu de façon un peu exclusive le bras d’honneur de Philippe Druillet (à prendre selon les uns au premier, au deuxième ou au centième degré), prix récompensant son œuvre entière, alors que le palmarès renferme quelques bonnes œuvres à découvrir pour ceux qui ne les auraient pas encore ouvertes, lues, dévorées…

Je vais donc me permettre deux coups de projecteur personnels en commençant par Patrick Sobral et ses Légendaires. Au départ de la série, il y a maintenant quelques années, j’avais discuté avec un auteur modeste, prudent et très sympathique. Il aimait ses personnages, il avait confiance mais était dans l’attente de la réception de sa série par le public. J’ai lu, j’ai aimé, j’ai été surpris de l’envol de la série et quand j’ai rencontré Patrick au dernier festival d’Angoulême j’ai discuté avec le même homme. Oui, malgré le succès de la série, malgré l’exposition qui a été consacrée à ses personnages, malgré les centaines et centaines de lecteurs, il est toujours simple, modeste et prend le succès pour un cadeau, pour une chance… Je continue à lire ses histoires avec le même plaisir et je suis profondément heureux de voir que critiques et public sont au rendez-vous, encore et toujours…

Le second coup de cœur est de voir Laurent Galandon à l’honneur, une fois de plus. Il s’agit d’un excellent scénariste, pétri d’humanisme et de sagesse, qui offre dans ses histoires des destins fascinants, des personnages crédibles que l’on aimerait avoir comme amis, le tout dans des albums que l’on prend beaucoup de plaisir à lire, que dis-je, à dévorer ! Citons quelques-unes de ces séries : L’envolée sauvage, L’enfant maudit, Le cahier à fleurs et sa petite dernière, objet du prix de Chambéry, Pour un peu de bonheur !

Récapitulatif du palmarès :

Prix du Public France 3 : Zhang Xiaoyu pour « le Temple Flottant »

Prix Jeunesse : Patrick Sobral, pour « Les légendaires »

Prix du Meilleur scénario : Laurent Galandon pour « un peu de bonheur », éditions Bamboo

Album de l’année : « Tyler Cross » de Brüno et Fabien Nury, éditions Dargaud

Prix Coup de cœur : Rick Leonardi, auteur américain de Spider man 2099

Prix de l’Ensemble de l’œuvre : Philippe Druillet

La photo est à mettre au crédit de Bruno Fournier.

Lignes de front, une série signée Jean-Pierre Pécau

Il est de bon ton de raconter aujourd’hui, sous toutes les formes possibles, des destinées marquées par la guerre de 14-18 – centenaire oblige – ou par le conflit de 39-45 – à cause du double anniversaire du débarquement et de la libération des grandes villes française – et il n’est pas étonnant de voir la bande dessinée s’engouffrer dans la brèche comme la littérature, les jeux vidéo, le cinéma, les téléfilms…

Les grands auteurs de bandes dessinées, ceux qui ne veulent pas se contenter de produire pour vendre, sont obligés de se torturer le cerveau droit, celui de la création, pour trouver un angle d’attaque original, un thème encore peu ou pas abordé ou un style atypique pour plonger le lecteur dans l’enfer de la guerre… Comme la production est très abondante, la recherche initiale est délicate et avouons que certains albums finissent par avoir un air de déjà lu, de déjà vu, de déjà passé dans nos mains !

Jean-Pierre Pécau que je considère comme un grand scénariste contemporain – Arcanes, Le Grand Jeu, Histoire secrète, Jour J… – aurait pu se contenter de nous offrir une énorme Uchronie comme il sait si bien les faire, une vision complotiste de la guerre comme il les aime, mais il a choisi un autre style pour raconter une grande aventure de la seconde guerre mondiale. Il a pris six jeunes gens qui se rencontrent lors des Jeux Olympiques de Berlin en 1936 et qui vont ensuite vivre cette guerre de l’intérieur. Ces/ses personnages sont un Français, un Australien, deux Allemands, un Anglais et une Américaine. Le cadre est ainsi posé et il fallait encore, pour parfaire l’environnement de cette série, une ambiance culturelle. Jean-Pierre Pécau a choisi la chanson universellement connue, Lili Marlène, qui va ainsi nous accompagner d’album en album…

Comme le mécanisme de la série implique une cadence infernale de sortie pour maintenir le lecteur dans le tempo de l’histoire, les dessinateurs seront différents d’un épisode à l’autre. Trois albums sont déjà sortis, et avec au crayon Brada, Benoît Dellac et Bane. Pour vous donner envie de découvrir cette série qui est en cours de parution et qui devrait compter huit albums, je vais vous donner quelques compléments d’information sur les trois premiers parus.

Le premier, Stonne, est constitué de deux parties, un chapitre qui a pour cadre les Jeux Olympiques à Berlin – c’est là que nous faisons connaissance de Joachim Klein-Combourd, Tim Page, Emile Soubise, Peter Yates, Magdalena Kopps et Cheryl Matthew – tandis que la seconde nous projette lors de la campagne de France où on retrouve Emile Soubise dans une unité française de blindés. J’ai trouvé la narration graphique très dynamique mais pas assez aboutie et finalisée. Un peu comme si le premier tome avait été terminé trop vite, comme si l’auteur et le dessinateur étaient pris par le temps !

Tandis que le second volume, Le vol de l’aigle, m’a donné une impression de plénitude, de perfection, de maîtrise. Le dessin de Benoît Dellac est pour moi de toute beauté et parfaitement adapté à cette journée du 18 août 1940 où les forces aériennes allemandes et anglaises s’affrontent violemment au-dessus de la Grande-Bretagne dans ce qui restera la Bataille d’Angleterre. On n’avait pas imaginé Benoît dans ce registre mais il excelle et on en redemande !

Enfin, dans le troisième volume de cette très bonne série, LRDG, on va aller entre Egypte et Lybie pour un épisode de la Guerre de Désert. Ce sera l’occasion pour Peter Yates de confirmer son caractère de chien, ses distances prises avec les règles et lois, sa volonté d’avancer quoi qu’il puisse arriver… Le dessin de Bane est de bonne qualité, assez classique malgré tout pour ce type de bande dessinée et le scénario de Jean-Pierre Pécau, lui, prend de l’épaisseur et on sent bien que l’auteur s’enfonce progressivement dans son histoire sans se laisser enfermer par l’Histoire.

Voilà donc un très bon travail, Lignes de front, qui permet en quelques pages de parcourir le second conflit mondial, avec originalité, avec un fond romanesque bien construit et agréable à lire, avec une excellente approche historique de chaque épisode. Bref, je ne vois là que des atouts pour lire, offrir, faire lire cette série bédé de très bonne tenue qui mérite d’être distinguée dans la masse de séries qui abordent la seconde guerre mondiale !

Confirmation du talent de ce scénariste contemporain, Jean-Pierre Pécau, que certains critiques et lecteurs n’ont pas encore lu et qui est un grand de la bande dessinée !

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Série Lignes de front

Scénariste : Jean-Pierre Pécau

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Tome 1 : Stonne

Dessin : Brada

Couleurs : Thorn

ISBN : 9782756032320

http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/41316

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Tome 2 : Le vol de l’aigle

Dessin : Benoît Dellac

Couleurs : Fernandez

ISBN : 9782756035093

http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/41505

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Tome 3 : LRDG

Dessin : Bane

Couleurs ; Thorn

ISBN : 9782756035116

http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/42227