Théodore, j’adore !

La couverture beige, sobre, (bien qu’il ne faille pas nécessairement voir dans cette sobriété un critère de qualité), rappelle celle des éditions Champ Vallon. Là où  d’autres affichent « revue littéraire » on peut y lire, comme une volonté de se démarquer, que Théodore Balmoral est une « revue de littérature ». Ici en effet, pas de notes de lecture (à peine trois pages en fin du volume consacrées aux livres conseillés par la rédaction, mais il ne s’agit que d’une liste), d’éléments hétérogènes qui rappelleraient les magazines. Quand les auteurs parlent de livres (dans une partie intitulée « Ce qu’il reste des livres »), c’est pour convoquer des textes qui ont été déterminants, dans leur écriture ou tout simplement dans leur vie. C’est qu’on ne cède guère à l’éparpillement, pas plus qu’à l’événementiel chez Théodore Balmoral.

Théodore-balmoralThéodore Balmoral, c’est autre chose. Tirée à 500 exemplaires (c’est beaucoup pour une petite revue), elle peut s’enorgueillir de la présence de contributeurs prestigieux, ce qui lui vaut, Wikipédia de le rappeler, d’être comparée à la NRF. Dans le numéro 64, le dernier en date, à l’oocasion du 25e anniversaire de la revue, on peut, par exemple, lire Pierre Bergounioux, Christian Garcin, Gilles Ortlieb, Jacques Réda….  De grands noms y côtoient d’autres, moins connus ou débutants (liste complète disponible ici). Pas de dossier thématique à chaque nouvelle livraison, comme on peut en trouver ailleurs, dans d’autres revues, plutôt une impulsion initiale donnée par son directeur et rédacteur en chef, Thierry Bouchard, laissant une grande liberté formelle et thématique aux auteurs. Théodore Balmoral est avant tout une revue de création.

Ainsi, pour Thierry Bouchard, « il ne faudrait pas oublier qu’avant tout une revue de littérature, c’est donner à lire des contemporains. » Donner à lire, créer une brèche dans le présent pour, paradoxalement, proposer à la lecture ce qui s’écrit aujourd’hui et, partant, permettre de prendre le temps (c’est une revue semestrielle) de lire les auteurs dans l’instant de leur contemporaniéité, voilà ce qui est à l’œuvre dans Théodore Balmoral. En cela, pour reprendre les mots d’un livre de Gilles Ortlieb, on pourrait « y voir une façon de contre-pouvoir, l’expression d’une autre vérité possible, quelquefois un antidote au présent à travers une perception plus juste du temps, parce que rapportée à d’autres repères, d’autres étalonnages. »

Signalons que Théodore Balmoral est également une maison d’édition au catalogue de laquelle figurent à ce jour 11 livres.

Le plaisir du théâtre, le spectacle vivant…

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On va à un spectacle parfois avec un peu d’inconnu… On choisit une troupe, une salle, un auteur, une école, une date, une occasion, un festival… Cette fois-ci, la zone de mystère était l’auteur et la pièce… Angoisse cosmique ou le jour où Brad Pitt fut atteint de paranoïa d’un certain Christian Lollike… Brad Pitt fait maintenant du théâtre en France ? Et d’où sort-il ce Lollike ? Je ne savais absolument pas dans quelle galère je venais m’installer…

Un tube pour sauver l'univers...

Un tube pour sauver l'univers...

Christian Lollike est un auteur danois que peu de gens connaissent. Il faut dire que pour le rencontrer, il faut faire un effort considérable. Je n’ai vu qu’un malheureux petit texte traduit et les troupes de théâtres françaises ne le jouent qu’exceptionnellement… Heureusement, pour moi, c’est en allant passer la soirée à l’ENSATT, l’école nationale supérieure des arts et techniques du théâtre, que j’ai pu découvrir Christian Lollike et assister à une représentation de la pièce Angoisse Cosmique, texte qui n’avait encore jamais été joué en France. Une première en quelque sorte pour une équipe d’étudiants qui a pu, ainsi, montrer ses qualités professionnelles et nous réjouissant le cœur…

Angoissant après les évènements du Japon

Angoissant après les évènements du Japon

Je dis bien équipe, car nous n’avons pas vu que des acteurs ! Oui, le son et la lumière de ce spectacle étaient à la hauteur, comme le décor, les accessoires et les costumes. On dit souvent que l’ENSATT est une petite merveille parce qu’on y fait travailler ensemble tous les corps de métiers du théâtre, certes, mais cette fois le public pouvait s’en rendre compte, le palper, le vivre…

Côté pièce, en discutant après le spectacle avec quelques personnes, j’ai pu mesurer, nous avons pu constater, que chacun se construisait un univers, son univers. De quoi est-il question ? De l’avenir du monde ! Mais, au lieu de travailler la question avec des arguments scientifiques, on plonge dans une société riche avec un personnage clef qui va tenter de sauver le monde car la fin ultime menace… Sommes-nous en présence de Brad Pitt ? D’un personnage qui s’incarne en lui ? D’un fou en pleine paranoïa ? Qu’importe ! On a alors une multitude de petites saynètes, de rencontres, d’épisodes, qui poussent le spectateur à s’interroger lui aussi…

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Le metteur en scène, un ancien de l’ENSATT, Simon Delétang, ne s’est pas contenté du texte d’origine. Il joue avec ses personnages, son équipe étant plus nombreuse que les rôles imaginés par Christian Lollike, il utilise deux discours politiques des dernières présidentielles françaises et le nom de Nicolas Hulot est ainsi entendu… Oh ! Rien de politique dans cette pièce ! Ou, plus exactement, tout est politique ici, au sens propre du mot, car que ce soit avec sincérité ou pas, avec des mots politiquement corrects ou pas, dès que l’on se préoccupe de l’avenir de la planète bleue, on fait de la Politique…

Une équipe d’acteurs dynamique, qui a une énergie forte et qui nous la transmet, un texte accessible, un humour réel, une mise en scène plaisante qui nous plonge dans un univers ou la raison n’est pas le moteur, un son tonique qui veille à nous maintenir attentif, un spectacle où l’on ne sent pas le temps passer… Tout était au rendez-vous pour passer une soirée très agréable… en dehors d’une chaleur éreintante dans la salle, une chaleur qui était peut-être là pour concrétiser le réchauffement planétaire autrement qu’avec des mots… Allez savoir ? Ils sont tellement forts à l’ENSATT !

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Il faudrait encore évoquer mille autres petites choses essentielles dans ce spectacle, comme la qualité graphique du programme donné à l’entrée de la salle, mais comme vous pouvez encore aller le voir je vous donne les dates encore au programme :

Lundi 11 avril à 20h00, mardi 12 avril à 20h00, mercredi 13 avril à 15h00 (séance spéciale pour les scolaires) dans la salle de l’ENSATT, à Lyon, 4 sœur Bouvier, www.ensatt.fr

Vendredi 15 avril à 20h00, à la salle polyvalente de Luzinay, http://www.linternaute.com/agenda/evenement/254720/angoisse-cosmique-ou-le-jour-ou-brad-pitt-fut-atteint-de-paranoia/

Mercredi 20 avril à 20h30, jeudi 21 avril à 14h30 et 20h30, vendredi 22 avril à 14h30 et 20h30, à la salle polyvalente de Fleurieux-sur-Arbresle, http://www.fleurieux.arbresle.mairies69.net/Theatre-a-Fleurieux

Bonne soirée à tous et j’espère que vous ne laisserez pas passer une telle occasion de passer une excellente soirée au théâtre !!!