Premier tour de l’élection du lauréat du Grand Prix 2017 de la ville d’Angoulême !!!

Le Grand prix 2017 de la ville d’Angoulême va-t-il encore déclencher les ires des uns ou des autres ? Une fois encore, les femmes semblent être les oubliées des électeurs… Qui sont les électeurs ? En fait, c’est assez ouvert : tout/e auteur/autrice de bande dessinée professionnel/le, quelle que soit sa nationalité, dont les œuvres sont traduites en français et diffusées dans l’espace francophone…

Quatre auteurs sont en tête à l’issue du premier tour :

-       Cosey

-       Manu Larcenet

-       Chris Ware

-       Alan Moore (a demandé à disparaitre de la liste du second tour car il ne souhaite plus recevoir de distinction).

Le second tour aura donc lieu entre le 18 janvier et le 22 janvier. Le nom du nouveau Grand Prix sera annoncé le mercredi 25 janvier 2017 à 18 heures à la médiathèque de l’Alpha lors de la cérémonie d’ouverture de la 44e édition du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême. Et nous y serons !

Qui aura gagné, je ne sais pas mais qui est l’auteur que j’aime le plus parmi les trois en course ? Les trois sont des grands auteurs, les trois sont étonnants et passionnants… Un petit faible, peut-être, pour Cosey mais, très très courte avance sur Larcenet… Et si Chris Ware gagne, je ne vais pas pleurer c’est promis !!!

Quant aux femmes, il faudra encore attendre un peu pour trouver qui succèdera à Florence Cestac !

BD et mémoires de femmes vietnamiennes…

Je viens de lire pour préparer le festival international de la bande dessinée d’Angoulême, le troisième volume de Mémoires de Viet Kieu de Clément Baloup, Les mariées de Taïwan. Je suis le travail de Clément Baloup depuis quelques années et j’avoue que cette dernière lecture m’a profondément touché.

Tout d’abord, sa narration graphique est de plus en plus efficace, il maitrise on métier d’auteur de mieux en mieux et il ose faire ce qu’il n’aurait pas fait avant. Ici, il intercale dans son récit inspiré du réel mais marqué par la fiction, des pages témoignages de femmes qu’il a rencontrées. Cela fonctionne admirablement bien et c’est bouleversant !

C’est d’ailleurs sur le fond de cet album que mes remarques seraient les plus positives : je ne connaissais pas du tout le destins de ces femmes vietnamiennes, « vendues » pour trois sous soixante, arrachées à leurs familles, abandonnées par leur pays, exploitées et souvent maltraitées par leur famille d’accueil et leur mari…Quand on lit cet ouvrage, on mesure à quel point, dans certains pays – mais la liste est de plus en plus longue – les femmes sont tout simplement maltraitées ! Et que fait-on pour changer cela ? Qui ose réagir ? N’y aurait-il qu’un auteur de bande dessinée pour prendre la parole ?Je ne veux pas être catégorique, bien sûr, et je sais bien qu’il y a quelques journalistes et grands-reporters qui en parlent… mais pas assez !

Merci Clément Baloup de ce travail, de ce courage, de cette obstination à travailler sur la mémoire d’un peuple ballotté par l’histoire et les trahisons de toutes natures. Merci pour le destin de Linh raconté dans cette bade dessinée documentaire, merci de donner la parole à celles qui sont oubliées de tous… et à très bientôt à Angoulême pour un entretien qui s’annonce passionnant à défaut d’optimiste !

Franc-Maçonnerie et Bande dessinée : Les enquêtes du commissaire Marcas…

Je sais bien que certains lecteurs n’ont jamais accroché aux romans du cycle des enquêtes de Marcas, policier et Maître Franc-Maçon, cycle romanesque de Giacometti et Ravenne. Pourtant, j’ai plutôt apprécié ces romans qui mêlent Histoire et modernité, polar et humanité, Franc-Maçonnerie et société contemporaine…

Maintenant, cette série est adaptée en bande dessinée et c’est Eric Albert qui a entièrement dessiné le second épisode en trois volumes – tous parus – Le Frère de sang.

Pour faire simple, il s’agit bien d’une histoire policière avec un fond ésotérique et historique car on va parler d’alchimie, de Nicolas Flamel, de La Fayette, de Franc-Maçonnerie, bien sûr, et tout cela avec une aventure de qualité, très bien dessinée et qui tient le lecteur en haleine du début à la fin ! Il y aura des meurtres, plutôt cruels, à différentes époques… oui, comme dans un polar !!!

Oui ce n’est qu’une fiction, qu’un bon polar, mais ça fait du bien et c’est, du moins à mon avis, bien meilleur que de très nombreuses séries à la télévision, mais je sais que ce n’est pas une référence ! Enfin, le personnage de Marcas me plaît bien et il permet de percevoir ce que peut représenter la Franc-Maçonnerie pour certains Frères et là je n’oserais pas faire de généralisation car j’ai bien compris que tout n’était pas unanimement partagé !

La guerre de 14-18 en BD !

La célébration et les hommages aux combattants du premier conflit mondial, la Guerre de 14-18, continuent et se prolongeront jusqu’en 2020 car il y a fort à parier que l’on fera bien un petit quelque chose pour le Traité de Versailles… En attendant, certaines publications BD ont abordé et raconte encore la guerre, la Marne, la Somme, Verdun… dans ces multiples publications, j’ai repéré une série atypique car elle a choisi de prendre un angle essentiellement humain et a donc laissé de côté les aspects politiques et militaires…Eric Corbeyran, le scénariste de la série 14-18, a décidé de poser en quelque sorte son objectif sur un village, sur un groupe de jeunes gens. Ils vivent heureux, jusqu’en 1914, ont des amourettes, voire des amours, boivent un peu, se chahutent gentiment, constituent une bonne bande de jeunes… Ils sont sur le point de devenir de bons adultes, d’honnêtes citoyens, d’entrer dans la vie active… et, malheureusement pour eux, c’est dans la guerre qu’ils vont entrer…Ces huit jeunes hommes vont constituer le panel de Corbeyran et Le Roux, le dessinateur de la série. Ils vont les suivre année après année, dans ce terrible conflit. On suivra aussi, c’est logique, les copines, femmes et familles de ces huit jeunes gens… Et on va les voir évoluer au cours de cette guerre qui va définitivement les transformer, peut-être même leur faire perdre leur humanité…Ce qui est remarquable dans cette série, c’est que le choix de montrer les humains avant toutes choses transforme le récit et nous éloigne de la chronologie stricte. D’ailleurs, les auteurs jouent avec efficacité de petits récits d’après-guerre si bien que l’on voit certains changements profonds chez ces êtres humains…

Même si nous ne sommes pas dans un récit historique, on verra quand même successivement le départ à la guerre, l’espérance d’une issue rapide, les premiers combats, la bataille de la Marne sera évoquée, on aura l’épisode des tranchées à creuser, des gaz toxiques, des offensives stériles, de Verdun, de la Somme et même des femmes dans les usines d’armement !Comme il y a un groupe conséquent de personnages, cela permet aux auteurs de raconter de très nombreuses situations, des plus légères aux plus dramatiques. On va même avoir la découverte des tirailleurs algériens par ces jeunes métropolitains qui ne connaissent pas grand-chose de l’Empire colonial français…

Je trouve cette série très complète, très riche en informations, en éléments historiques, profondément humaine et porteuses, même, d’éléments de réflexion sur la guerre, la vie, la mort, Dieu, la paix, l’amour, l’enfance, le travail, l’autorité…

Certes, on n’échappera pas aux clichés mais ils ne sont là que pour poser certaines scènes. Si le sergent est autoritaire, bête et parfois même méchant, c’est pour que le groupe de jeunes soit face à ses responsabilités et que l’on puisse voir comment certains seront obligés de prendre les choses en mains, pas pour mettre en place de l’antimilitarisme… Si certains ordres d’officiers sont criminels c’est parce que durant cette guerre il y eut de la part des généraux et officiers de très nombreuses erreurs dont certaines furent indiscutablement criminelles… Oui, cette guerre a mis en exergue tout ce que l’humanité a de meilleur et de pire !

Voilà, 6 albums sont déjà sortis sur les 10 prévus, ce n’est pas une lecture légère et douce, c’est bien un récit durant la boucherie de 14-18 mais c’est passionnant, bien dessiné, bien construit et je ne peux que vous en conseiller la lecture. Je pense que compte tenu de la cruauté de certaines séquences, il vaut mieux réserver cette lecture pour des lecteurs de 14 ans et plus…

 

Hermann Président !!!

Dans quelques jours, Hermann sera le président du festival international de la bande dessinée d’Angoulême car, en 2016, c’est bien lui qui a eu le Grand prix de la ville d’Angoulême. Il n’est plus temps de savoir si la sélection comportait ou pas assez de femmes, si certaines n’auraient pas dû être placées avant lui, car ce qui est certain c’est que cet auteur est un grand de la bédé, indiscutablement !Pour ceux qui ne le connaissent pas ou pas assez, rappelons qu’il est l’auteur d’un nombre incroyable de séries et albums. Pensez donc : Bernard Prince et Comanche avec Greg au scénario, Jugurtha avec Jean-Luc Vernal au scénario, Jeremiah (dessin et scénario, une série qui continue encore, tome 34 sorti en octobre 2015), les Tours de Bois-Maury… sans oublier tous les one-shot dont certains sont de véritables chef d’œuvre, comme Lune de guerre que j’avais adoré !Je viens de lire un de ses derniers ouvrages, Le passeur, une bande dessinée scénarisée par son fils, Yves H. Je sais que certains n’apprécient pas toujours les scénarios d’Yves H mais j’avoue que j’ai bien apprécié cet album, noir à souhait, ce qui permet à Hermann de mettre son dessin en valeur lui qui aime tant les ouvrages aux limites de la désespérance…Un couple est en quête d’un lieu idyllique, le fameux Paradise. Au départ, on y croit même si une fois encore on est dans un monde post-apocalyptique, une des grandes passions d’Hermann. On comprend assez vite que Sam et Samantha vont bien avoir du mal à trouver une issue favorable à leur quête mais on a quand même envie de les suivre jusqu’au bout tant l’invitation graphique d’Hermann est puissante !L’éditeur nous annonce que le scénariste Yves H signe là son ouvrage le plus noir. Oui, certainement mais n’est-ce pas l’un des plus sombres de toute la bande dessinée ? Si ce n’était pas le cas, en tous cas, on n’en est pas loin du tout… et j’adore, je vous le concède ! Un grand album noir pourtant en couleur avec des dessins d’Hermann d’une très grande qualité… Quant au passeur, on a bien compris qu’il est celui qui fait passer sur l’autre rive… Non ?

J’espère que dans quelques jours Hermann saura quand même nous embarquer dans son exposition à Angoulême, qu’il imprimera sa marque à cette édition du festival et que l’on pourra dire que 2017 était bien l’année d’Hermann comme j’avais pu écrire que l’édition de 2011 était celle de mon ami Baru !

Alice Matheson et les zombies…

Une histoire de zombies de plus ! Voilà ce que pourrait être la réaction d’un lecteur qui trouverait le premier tome de la série Alice Matheson, avant qu’il en commence la lecture… Oui, ça a bien le goût et l’aspect du zombi ! Oui, on pourrait se croire dans du déjà vu ! Sauf que…

Si le lecteur regarde d’un peu plus près la quatrième de couverture, il va être saisi d’un doute… Ce n’est peut-être pas du zombi mais de l’Urgences ! Oui, hôpital, infirmière, seringue… A moins que nous soyons dans une « simple » histoire d’ange de la mort… Oui, la bonne et douce infirmière qui abrège les souffrances du malade condamné par la science !

Mais, là encore, si le lecteur n’entre pas dans la série, il ne mesurera pas son erreur, erreur relative ou absolue, en fait c’est vous qui déciderez le moment venu, c’est-à-dire quand vous serez au cœur de l’histoire…Dans Alice Matheson, il y a un peu de Walking dead – oui, il y a bien des zombies – mais aussi un peu de XIII – quelles sont les origines mystérieuses de cette infirmière spéciale, Alice Matheson – et encore une pointe de la série Urgences – oui on est dans un hôpital qui se repait de ses histoires sentimentales, qui gèrent ses tensions et jalousies, avec ses heurts et ses sourires – sans oublier une petite pointe de Docteur House car il faut mener les recherches pour comprendre d’où viennent ces zombies sauvages…Mais, comme une bonne série – et on ne va pas apprendre à Jean-Luc Istin comment construire un tel ouvrage – ne peut pas rester dans les basiques, il y aura aussi quelques incursions sur l’euthanasie, sur la violence, sur l’amour, sur l’argent, sur les ascendances…

Même si cette série bédé est indiscutablement violente par bien des aspects, que l’on ne peut certainement pas la mettre dans toutes mes mains, que sa lecture doit être réservée à un public adolescents plus et jeunes adultes, je dois vous avouer que j’ai beaucoup aimé !!!Le scénario de Jean-Luc Istin et repris à partir du tome 4 par Stéphane Betbeder, un scénariste prolixe que j’ai découvert et apprécié avec Le retour de Dorian Gray. Les dessinateurs sont plusieurs ce qui permet au lecteur de ne pas attendre trop longtemps la sortie des suites… Pour autant, le lecteur n’est pas choqué ou déstabilisé par le passage de la narration graphique de Philippe Vandaële  à celles de Zivorad Radivojevic, de Federico Pietrobon, de Lucio Leoni ou d’Emanuela Negrin… Pour le prochain album, le sixième, on retrouvera Philippe Vandaële… et on clôturera ainsi la première saison de cette série…

Le fait de parler de saison, comme pour une série de TV, montre bien que la parentalité avec Urgence ou Dr House n’est pas seulement une vue du critique, c’est probablement structurel, voulu délibérément par les auteurs, dès le premier album !

Voilà donc une série, proposée durant cette première Nuit de la lecture à Chalon et j’espère que certains auront bien envie d’aller la découvrir !

Prix France Info de la Bande Dessinée 2017

Un premier prix 2017 en bande dessinée vient de tomber et c’est un excellent choix !

En effet, Love story à l’iranienne vient de recevoir une très belle distinction avec le Prix France-Info de la BD 2017 ! Ce prix récompense chaque année un ouvrage de bédé et le jury est composé de journalistes de la station.

Il me semble que cette distinction est parfaitement méritée car l’ouvrage est d’une très grande qualité et il permet d’entrer en contact avec la jeunesse iranienne, de comprendre comme elle s’approprie la vie, l’amour, les relations humaines dans un pays où la loi, la religion et L’État restreignent assez considérablement les libertés au quotidien…

Il s’agit bien d’un reportage et non d’une fiction même si les noms des jeunes Iraniens ont été changés pour les protéger… La bande dessinée explore avec beaucoup d’attention, de talent et de soins ce genre du reportage et alors que l’on est à l’ère de l’image on mesure que le dessin permet de faire passer beaucoup en respectant totalement la personne humaine… Ici, on frôle la perfection !

Les auteurs sont en fait trois, deux scénaristes et un dessinateur. Jane Deuxard est le pseudonyme d’un couple de journalistes. Ils n’utilisent pas le pseudo pour se protéger, eux ou leur vie privée, non, seulement pour poursuivre leur travail en Iran, pays où il n’est pas aisé de travailler pour un journaliste. Sur cette terre des mille et une nuits, ils ont tissé de nombreux liens, ont établi la confiance avec des représentants de la population, en particulier les jeunes… Leur travail est remarquable et cela permet un ouvrage de qualité qui nous apporte une mine d’informations, on finit par oublier les conditions pour que la parole puisse se libérer ainsi, pour que ces jeunes racontent leur vie…

Love story à l’iranienne est une bande dessinée par Serge Deloupy et son graphisme, sa narration dessinée est entièrement au service du propos… Cela donne une très belle bande dessinée à lire et relire… Après tout, en France, la vie n’est pas si moche que cela… Il y aurait peut-être quelque chose à explorer de ce côté-là, des combats à mener pour conserver notre art de vivre… Qui sait ?

 

Bandes dessinées et indentité nationale ?

Depuis quelques mois, cela ne vous a pas échappé, la question lancinante et persistante n’est plus « Est-ce que tu as trouvé du travail ? » mais « Qu’est-ce qu’un français ? ».  Il est important de savoir ce qui nous unit, ce qui nous rassemble dans la communauté française, ce qui empêcherait d’autres de rentrer dans ce groupe, les Français !Je sais bien que tout le monde ne raisonne pas ainsi et j’exagère le propos en transformant cela en provocation… car, au fait, vous sauriez répondre à la question, vous donneriez une définition du Français ? L’identité nationale puisque c’est bien de cela qu’il s’agit n’est certainement pas une valeur figée dans le temps et c’est ce qui a poussé Thierry Gloris à écrire une série de cinq bandes dessinées consacrées à 5 batailles essentielles de notre histoire : Castillon, Valmy, la Bérézina, Camerone et Dunkerque !

Sans vouloir écrire un récit national, mythique et fondateur, il nous propose à travers ces cinq combats, des femmes et des hommes mus par un état d’esprit, animés par l’envie de vivre ensemble, prêts à mourir ensemble… Ils donnent naissance, sans toujours sans rendre compte, à une Nation en mouvement… Cette série Champs d’honneur mérite donc un coup de projecteur pour tenter non de comprendre mais plutôt d’approcher la notion d’identité nationale…

Alors, révisons un peu notre histoire… Castillon ? C’’est en quelque sorte la fin de la guerre de cent ans. Au départ, un conflit familial, une dispute autour d’une couronne… A la fin, une bataille en Aquitaine qui sera le point de départ définitif des Anglais du sol français. Mais quand ils étaient arrivés, suite au mariage entre Aliénor d’Aquitaine et Henri II d’Angleterre, on ne parlait pas de France. Cette bataille de Castillon permet au roi, Charles VII d’assoir son pouvoir sur des fiefs qui n’étaient alors que très éloignés du pouvoir central… c’est aussi un des premiers grands combats avec artillerie, arme qui sera un atout royal à Marignan en 1515… Ah, j’ai oublié de préciser la date de Castillon, le 17 juillet 1453… pas loin d’un 14 juillet !Valmy ? Peut-être un peu plus connu, mais bataille que l’on ne connait pas très bien malgré tout. Nous sommes en septembre 1792. Sur le plan strictement militaire, ce n’est pas un gros évènement, beaucoup de monde sur le terrain, peu de victimes – une c’est toujours trop mais cette fois-ci les combats furent très limités – et au bilan une date forte quand même pour la France révolutionnaire. Il faut dire que cette bataille laisse à la France le sentiment d’avoir vaincu les armées professionnelles et des rois d’Europe et c’est bien à partir de ce moment-là que l’on se débarrasse en France du Roi, que l’on abroge la Monarchie, que la France devient Républicaine… Si la France avait perdu Valmy… mais, là, c’est une tout autre histoire !La Bérézina, novembre 1812, est une bataille paradoxale. D’une part, elle démontre les limites de ce petit empereur : il n’est pas invincible, il se fait avoir par le Tsar russe, il sacrifie de très nombreux jeunes soldats, il s’enlise en Russie et il commence à signer là la fin de son Empire… Mais, d’autre part, la Bérézina est une victoire sanglante et tragique car au prix d’énormes sacrifices de soldats qui donnent leurs vies pour en sauver d’autres, Napoléon parvient à franchir cet obstacle aquatique, il préserve une partie de son armée, rejoint son Empire : il a perdu la Campagne de Russie mais gagné la Bérézina !

 

Camerone ? Alors là on est encore dans le plus confidentiel car en dehors des légionnaires qui célèbrent toujours cette bataille, le reste des Français ignore tout de cette bataille, de cette campagne au Mexique. Pourtant, alors que la mission était anodine, une unité de la Légion va se battre jusqu’à la mort pour permettre à un convoi logistique de passer à travers les forces mexicaines… cela ne changera pas l’issue de la campagne mais l’honneur est sauf : ils ont rempli leur mission ! Cameron est une défaite, au sens militaire, aucun doute, mais c’est le symbole de l’abnégation du militaire, du légionnaire en particulier…

Je ne vous parlerai pas du dernier volet qui n’est pas encore sorti mais les quatre premiers volumes sont très bien réalisés. Il y a un dessinateur différent à chaque bataille, Gabriele Parma pour Castillon, Emiliano Zarcone pour Valmy, Andréa Mutti pour La Bérézina et Joël Mouclier pour Camerone… A chaque fois on suit la bataille par des personnages qui vivent l’évènement et cela n’a rien de didactique, on est dans le récit, dans l’histoire, dans le destin humain et national et ça passe très très bien !

Enfin, côté historique, c’est soigné, précis, étayé, et le fait que Thierry Gloris soit historien de formation, qu’il soit passionné par la question n’y est pas étranger… Très beau travail !

Préparons Angoulême… Seuls !

La série Seuls est une série très particulière dans le monde de la bande dessinée. En effet, le travail de Fabien Vehlmann, le scénariste, et de Bruno Gazzotti, le dessinateur, ressemble à une série jeunesse, enchante les jeunes lecteurs d’une douzaine d’années et recueille l’assentiment des parents et autres prescripteurs qui l’offrent sans aucune réticence aux lecteurs assoiffés et impatients de la découvrir et d’avancer dans l’histoire…

Pourtant, elle parle de la mort, de la violence, de la société, du pouvoir, des relations homme-femme, du travail, des stéréotypes inégalitaires… Oui, tout dans cette série est fort, dur, intellectuel, truffé de références livresques et religieuses, philosophique et sociologique, anthropologique et métaphysique… et, les adultes qui y glissent leur petit nez en sortent séduits : oui, Seul est une très grande série de bande dessinée pour un très large public !Il est vrai que nous sommes dans une société où la mort est un sujet tabou, du coup, Fabien Vehlmann a inventé une histoire où les choses ne sont pas dites instantanément. Ici, tout est progressif et c’est pour cela que l’histoire est divisée en cycles… Dans le premier – tomes 1 à 5 – on va découvrir que des enfants se réveillent, un matin, dans une ville vide. On découvre des personnages qui vont être nos amis durant de nombreux albums…

Il y a Leïla, belle au caractère ombrageux ; Dodji, sombre et mystérieux ; Terry, le plus jeune au caractère soupe-au-lait et très joueur ; Camille, la bonne élève parfaite ou presque qui a toujours peur de ne pas avoir une bonne note à l’école ; Yvan, le porteur de lunettes, le fils de riches, celui qui aurait pu ne jamais rencontrer Leïla ou Dodji… Cinq enfants qui ne seront pas seuls dans cette série mais que l’on va suivre, ce sont eux, les héros !Seuls dans une ville, il faut survivre, il faut donc manger, se déplacer, affronter l’inconnu, tenter de comprendre ce qui a bien pu se passer… Les dangers seront nombreux à commencer par un tigre, un rhinocéros, des singes très agressifs, un lanceur de couteaux… Je ne vais pas tout vous raconter, vous livrer les secrets du scénariste car en lisant, vous découvrirez très bien tout cela…Ce qui est certain, par contre, c’est que les éléments vont se préciser au fur et à mesure. Dans le second cycle – tomes 6 à 9 – on va commencer à en savoir un peu plus ce qui est arrivé aux enfants. Tout ne deviendra pas plus simple pour autant… J’aime d’ailleurs énormément le personnage d’Anton avec ses théories, ses calculs, ses réflexions… Par sa voix, le scénariste nous fait réfléchir à la vie, à la mort, aux limbes, à la vie après la mort, à la conscience, à la mémoire, au grand passage…

Cette série est un ovni dans l’univers de la bande dessinée mais un grand œuvre magnifiquement construit, digne de la littérature, c’est donc une grande lecture, c’est à lire et à partager, ce peut être une source d’échange au sein de la famille et en dehors, bref, c’est du très très bon, de l’incontournable !

Donc, assister à l’avant-première du film tiré de cette série et rencontrer et interviewer les auteurs seront certainement des moments très forts du prochain festival international de la bande dessinée d’Angoulême !

Montreuil ou le grand voyage au pays des livres merveilleux… Episode 3

Montreuil, comme tous les salons et les festivals, c’est l’occasion de rencontres. Parfois, nous les journalistes et critiques, on enchaine tellement ces rencontres calibrées et réalisées à la chaine, que l’on finirait presque par oublier les personnes qui viennent devant nous, timides, prudentes et qui peinent à parler devant un micro… Heureusement, il arrive que l’on rencontre un auteur que l’on a déjà interviewé, dans le passé, un passé lointain même, et qui s’en souvient, dont on se souvient aussi, parce que certaines rencontres laisses des souvenirs qui ne disparaissent pas…Cette année, j’avais coché Lylian sur ma liste. Lylian, vous ne connaissez pas ? C’est un auteur de bandes dessinées qui travaille depuis longtemps… Je me souviens de ma première rencontre avec lui, c’était autour de sa première bande dessinée, L’éveil du Kurran, il en était le coscénariste avec Nori et c’était Dune qui était au dessin. Il s’agissait d’une histoire parue dans la collection Tohu Bohu, un label que j’aimais beaucoup et dont je regrette la disparition… C’était sa première interview sur sa première bande dessinée… et il s’en souvenait bien !Après on retrouve Lylian dans une série qui est restée – si je ne me trompe pas – sans suite, Mina Loween, toujours avec Nori en coscénariste et Lillycat au dessin. Cet album n’a pas dû lui laisser un souvenir impérissable car il ne le cite plus dans sa bibliographie sur son site. Il faut attendre quelques années pour le relire dans une histoire que j’ai beaucoup aimée, Le révérend (2 volumes), un western assez classique mais diablement efficace…Enfin, Lylian devient l’adaptateur en bande dessinée des romans de Pierre Bottero, une proposition qui lui a été faite et qu’il a acceptée sans se douter que ce travail allait lui prendre beaucoup de temps… Les satisfactions sont grandes, certes, puisque cette œuvre est elle-même grandiose et que la réception par le public est excellente. Le premier album de La quête d’Ewilan sort en 2013 et le quatrième vient de sortir aux éditions Glénat. Parallèlement, il s’attaque à un autre cycle de Pierre Bottero, Le pacte des Marchombres, avec Ellana… Je pense que Lylian va rester longtemps encore en compagnie des personnages de Bottero et je ne vais pas m’en plaindre car je trouve que l’adaptation est de qualité…Heureusement, Lylian trouve encore le temps de lancer quelques autres projet et c’est avec beaucoup de plaisir que j’ai découvert quelques jours avant le salon de Montreuil son adaptation de Blanche-Neige dessinée par Nathalie Vessillier. Un travail basé sur l’histoire des Frères Grimm et pas celle de Walt Disney, une reine mère cruelle à souhait, des nains égaux à eux-mêmes et un tout fascinant qui fait redécouvrir Blanche-Neige… Un dessin qui ne laissera personne indifférent !Donc, pendant ce salon, j’ai interviewé dans un premier temps Nathalie Vessillier pour son dessin de Blanche-Neige, puis Lylian pour toutes ses bandes dessinées d’adaptation… Et, il se souvenait de notre rencontre autour de sa première BD, L’éveil du Kurran. C’était sa première interview, en fait… et pour Nathalie Vessillier, ce fut cette année, à Montreuil, sa première interview… S’en souviendra-t-elle dans 12 ans ? Allez savoir !Mais pour moi, deux belles rencontres en 2016 !!!