Le festival de Shelton : 1ère partie du vendredi 30 janvier 2015

Les nuits sont courtes durant le festival d’Angoulême. Le soir, on est fatigué, on cherche un peu d’énergie pour écrire un texte ou deux, on range les sons et images du jour, on prépare ses rencontres du lendemain et on s’écroule… Le lendemain matin arrive toujours trop vite et il faut déjà repartir au travail. Je parle bien de travail car avec mes étudiants on n’arrête pas et on sent bien que la fatigue est là doublée d’une bonne crève car on a en plus attrapé froid dès le premier jour…

Ce matin, ils sont quatre à prendre le chemin d’une conférence de presse sur Les Chevaliers du Zodiaque tandis que je m’apprête à rencontrer André Taymans. Voici un auteur que je connais depuis très longtemps et que j’ai toujours plaisir à retrouver. Il faut dire que j’ai une fille qui se prénomme Charlotte et elle a grandi presque en même temps que la Charlotte, héroïne de Taymans. Il s’agissait d’une très belle série énigmatique pour enfants de primaire et elle a certainement aidé André à devenir l’auteur performant qu’il est devenu. A cette même époque, il dessinait les aventures de Bouchon, un sympathique petit cochon qui amusait les enfants qui ne savaient pas encore lire. Oui, on l’oublie parfois mais Taymans a commencé sa carrière avec de très bons albums pour la jeunesse…

Il a aussi, il y a quelques années, raconté pour Okapi – mais je ne le lisais pas – Les tribulations de Roxane. Cette Roxane fera par la suite des apparitions dans le cycle de Caroline Baldwin, avant de revenir maintenant dans un cycle spécifique chez Paquet, avec ce premier album, La main de Pangboche, objet de notre rencontre…

Avec Taymans, on a en face de soi un grand de la bande dessinée franco-belge, un dessinateur classique capable de s’adapter à toutes les tranches d’âge, un passionné de la montagne, un homme profond et agréable, bref, tous les éléments sont réunis pour faire une bonne émission.

En termes techniques, il faut avouer que nous sommes un peu gênés par un bruit de compresseur d’air, de canon à air chaud ou autre groupe électrogène car le bungalow des éditions Paquet est situé contre cette maudite machine… Certes, on s’entend mieux qu’au cœur de la foule, mais les interviews seront difficilement exploitables, il va falloir nettoyer et abréger. C’est réellement un problème car je n’aurais rien à ôter de la discussion avec Taymans. Sa présentation de sa nouvelle série est impeccable, il parle avec passion de la montagne, avec délice de son héroïne, avec mystère de son intrigue… C’est aussi l’occasion de parler d’un album sans lendemain que j’avais adoré chez lui, Ban Mânis, un récit one-shot basé sur la vie d’une alpiniste Suisse… Et, à la fin, il y avait déjà une petite allusion au Yéti…

Oui, il est bien question du Yéti ici et cela permet de faire un petit hommage rapide à Hergé et son Tintin au Tibet, album magnifique qui laisser entendre que l’abominable homme des neige était bien doté d’un cœur ce dont les Tibétains et autres Népalais ne doutent pas un instant !

Nous n’aurons pas le temps d’atteindre le sommet des dieux que déjà il faut redescendre sur terre et se précipiter dans un autre lieu, aux éditions Soleil, pour la grande rencontre prévue avec Christophe Arleston !

J’ai découvert Christophe Arleston, il y a fort longtemps, avec une série jeunesse, Tandori, qui était dessiné par Curd Ridel. C’était en 1993. Cette série me faisait beaucoup rire et elle avait un petit quelque chose d’Astérix, Tandori étant une sorte d’Astérix des Indes… Puis, quatre ans plus tard, un de mes fils me plongeait de force ou presque dans Lanfeust de Troy, dessiné par Tarquin. Ce fut un coup de foudre car je trouve que le premier cycle de huit albums de cette série est un chef d’œuvre de la bande dessinée… Le temps a passé et je n’avais jamais rencontré ce scénariste. L’année dernière cela avait failli se faire puis au dernier moment, l’interview a été annulée…

Quand on arrive chez Soleil, l’attachée de presse, avec une petite grimace, m’annonce qu’il n’est pas là, qu’il est en retard, qu’elle n’a pas d’autre information… Je suis glacé et pessimiste. Encore une fois, cette rencontre tant espérée va tomber à l’eau. On attend… L’attachée de presse revient assez vite nous rassurer. Il arrive, il n’aura qu’un quart d’heure de retard…

OK, on va le rencontrer, mais du coup il ne restera que quinze minutes avec nous… A voir, on va prendre notre temps et on verra bien… et nous allons discuter presque trois quarts d’heure ensemble ! Ce fut un moment fort de la journée et l’équipe retiendra que cet homme est un vrai grand : qualité du propos impeccable, vue d’ensemble étonnante de la bande dessinée, recul sur son travail, affection pour ses dessinateurs, passion pour ses livres mais avec lucidité, humanisme profond qui transparait en continu, simplicité avec mes étudiants… Quel beau moment !!!

On a bien essayé de parler de tout ce qui le concernait mais comme c’est trop vaste, il a fallu se limiter à trois domaines. On a commencé par l’univers de Lanfeust ce qui semblait incontournable. Il a pu ainsi nous raconter les débuts de la série phare, le premier tirage du premier album, les premières dédicaces au salon de Maisons-Laffitte… Nous sommes là devant lui, captés par les anecdotes, les détails, les souvenirs… Il raconte tellement bien que l’on a presque l’impression que le dessinateur Tarquin est aussi là avec nous. Fascinant !

Dans un deuxième temps, on parle de la série Léo Loden, née au début des années quatre-vingt-dix, avec un dessinateur toulousain, Serge Carrère. Là aussi on parle de la genèse de la série, des grands virages, des choix, de l’avenir… Christophe nous explique que le dernier album, Brouillades aux embrouilles, est un album qui aborde le sujet du trafic d’armes dans la cité phocéenne et comme le sujet est un peu d’actualité avec ce qui s’est déroulé à Paris en Janvier, il n’en parle pas trop pour éviter de faire croire qu’il s’agirait d’un album de circonstances. En fait, comme il faut un an pour faire un album, c’est l’affaire Merah (mars 2012) qui avait provoqué l’envie d’aborder ce thème grave et citoyen, ce qui n’empêche nullement, la dose d’humour habituelle de cette série policière…

Enfin, dans une troisième partie d’interview nous allons dans l’univers d’Ekhö, série en cours dessinée par Alessandro Barbucci. Nous sommes ici dans une fantaisie contemporaine et j’avoue que la série fonctionne parfaitement bien avec deux personnages, Fourmille et Yuri, qui à l’issue d’un voyage en avion pour New York se retrouve dans une monde miroir du nôtre, un monde à l’ancienne, avec petits écureuils qui parlent et mènent tout le monde à la baguette, les Preshauns… Cette série regorge d’allusions et citations au monde de l’image, en particulier le cinéma… A travers cette série, on comprend de mieux en mieux comment Arleston dialogue avec ses dessinateurs, comment il trouve pour chacun l’histoire qui lui convient le mieux, comment la série est copilotée…

A la fin de l’entretien, nous sommes encore comme assommés par tant d’informations, d’histoires, de gentillesse. Nous ne sommes pas avec celui qui a vendu plus de douze millions d’albums de bande dessinée, nous ne sommes pas avec un des grands scénaristes de la bédé, nous sommes juste avec un homme qui répond paisiblement et simplement à nos questions… Vraiment un beau moment que chacun va garder dans sa mémoire pour longtemps !

Redescente sur terre, la journée n’est pas terminée et il est temps de poursuivre nos entretiens. C’est au tour de Nicolas Otéro, le dessinateur de la série Amerikkka aux éditions Paquet. Cette série scénarisée par Roger Martin est une histoire policière, liée fortement au KKK (Ku Klux Klan), qui permet un grand voyage aux Etats-Unis, de mieux comprendre le racisme dans ce vaste pays et de vivre une aventure étonnante et mystérieuse par album (9 sont parus à ce jour, on en annonce un dernier…). Les deux agents spéciaux qui luttent contre le KKK, Angela et Steve sont solides et bien construits ce qui rend la série très agréable à lire.

Nicolas est un dessinateur sympathique et dynamique, c’est avec cette série qu’il a commencé en 1992, juste en sortant de son école lyonnaise, Emile Cohl, ville dans laquelle il vit encore. L’entretien est rapide, pas à cause du manque d’intérêt de la série ou du dessinateur, mais simplement parce que nous faisons cela au cœur du stand Paquet. Tandis que je l’interview, et qu’un des étudiants filme, le reste de l’équipe canalise le public pour qu’il ne rentre pas dans le champ de la caméra. Toute une opération complexe qui ne peut pas se prolonger trop longtemps quand même… Et dans ce cas, dix minutes, c’est déjà très long… Mais Nicolas se prête au jeu et ce sera la seconde interview diffusée à la radio cette année, dans l’émission envoyée dès notre retour d’Angoulême avec celle de Lewis Trondheim…

Le « client »suivant est Jean Dytar, un auteur complet que peu connaissent, et je trouve cela très injuste. C’est une des raisons qui a motivée cette rencontre. Faire connaitre un auteur trop confidentiel alors que le talent est bien là. Il a publié chez Delcourt, dans la collection Mirage, La vision de Bacchus.

On ne résume pas un tel album qui nous plonge au cœur de la création artistique. On doit le lire, tout simplement mais pour vous situer les choses, on peut dire que nous sommes à Venise en 1510. Nous sommes avec un peintre, Giorgione, atteint de la peste, sur le point de mourir. Avant, il a une dernière tâche à accomplir, finir une toile ! Et c’est là que la bande dessinée s’ouvre en quelque sorte, qu’elle va naviguer entre histoire de la peinture, réflexion sur la création, vie intime des artistes, difficulté de la vie humaine et, même, d’une certaine façon, intrigue policière… Le livre est prenant et touchant, l’auteur que nous avons devant nous aussi !

Jean Dytar est à la fois un auteur et un pédagogue (il est enseignant d’arts plastiques au quotidien) et j’ai l’impression qu’il parle à mes étudiants comme un prof : il explique, montre, justifie, revient sur certains éléments… On se laisse prendre et on se dit qu’il faudra réviser avant la prochaine interro, ou relire l’album avant d’écrire la critique… C’est aussi toujours, pour moi, un émerveillement de voir ces auteurs aussi disponibles pour les interviews. Certes, ils défendent leurs œuvres, mais ils répètent des dizaines de fois les mêmes choses avec tant de patience et gentillesse… Jean prend le temps de dédicacer un album pour le projet Chacun sa bulle, là aussi, avec beaucoup de disponibilité. Merci !

Notre auteur suivant est Turf pour son premier volume du Voyage improbable, aux éditions Delcourt. Là, le ton change. Turf est direct, tonique, rapide dans ses réponses et plus déjanté que notre enseignant de Jean Dytar. En quelques minutes, nous ne sommes plus dans la salle de presse des éditions Delcourt mais sur une navette spatiale improbable, un phare breton blanc et rouge propulsé par erreur et circonstances au bout de l’univers… Et, même pas peur ! Non mais…

Interviewer Turf est toujours comme une petite récréation car il ne se prend pas au sérieux tout en proposant des histoires, certains diraient des fables,  d’une grande qualité avec de multiples références littéraires et cinématographiques, profondément humaines aussi, bien sûr. Ce phare en mouvement devient un huis-clos grave et plein d’humour. Le lecteur ne s’ennuie pas du tout, et, maintenant, il attend avec impatience le second volet de ce diptyque ! Mais attention, si Turf répond vite et bien aux questions, il dessine plus lentement et on verra bien quand arrivera la fin de cette histoire…

L’auteur suivant est un scénariste, Alain Ayroles, et, je l’avoue sans détour, c’est un de ceux qui m’a apporté le plus de jubilation de lecteur. C’est lui qui a scénarisé l’incroyable série Garulfo (avec Bruno Maïorana au dessin) et la folle épopée théâtralisée en bédé De cape et de crocs (avec Jean-Luc Masbou au dessin). C’est deux séries sont si fortes, si drôles, si prenantes, si bien construites… qu’il ne vous reste plus qu’à les lire si vous ne les connaissez pas. Les deux séries sont terminées, en quelques sortes, si ce n’est que pour la seconde, De cape et de crocs, les auteurs ont voulu offrir au public une sorte de conclusion en guise de prologue (ou le contraire, allez savoir) avec deux albums racontant la vraie vie d’Eusèbe, le lapin blanc que les amateurs de la série connaissent bien. Enfin, on va savoir ce qu’il a vécu avant la série, comprendre pourquoi il est devenu ce qu’il est, et j’avoue que dès le premier volume j’en ai eu pour mon argent !

Alain Ayroles est un scénariste méticuleux, construit et méthodique. Dans l’interview, il est aussi comme cela et ne laisse rien sans réponse, explique calmement tout, donne des détails sur son travail avec Masbou, sur la série, sur les personnages. Les étudiants présents regrettent un peu qu’il n’y ait pas plus de chaleur dans les propos car certains sont totalement fans de la série et auraient voulu rencontrer un des personnages plus que l’auteur. C’est l’occasion pour eux de bien comprendre qu’un auteur n’est pas un personnage de bandes dessinées. C’est un artiste et il peut y avoir de grands écarts entre le créateur du personnage et le héros lui-même. Là nous étions avec Alain Ayroles pas avec Armand Raynal de Maupertuis (les amateurs de la série comprendront !).

Comme la journée fut très longue, nous parlerons de Charlie Adlard, de Carloni, des Carnets de Cerise, de Taniguchi, de l’épisode des Galeries Lafayette et des éditions Rue de Sèvres dans un prochain article…

(A suivre)

Photos de Michel, pierre et Cécile

Cécile enquête après la marche des auteurs de bandes dessinées…

Au festival d’Angoulême, le samedi est la journée la plus importante du festival. C’est le jour où les festivaliers et les auteurs sont les plus nombreux bien sûr. Pendant que certains artistes font des dédicaces ou répondent à des interviews… d’autres en profitent pour marcher contre la réforme du RAAP en 2016 : le régime de retraite complémentaire des auteurs.

Lewis Trondheim, auteur de la série Donjon, explique que cette loi uniformise le système des retraites en Europe et qu’elle traite les artistes comme des entreprises dont ils seraient l’unique patron et l’unique salarié. Le taux de 8% de cotisation est trop élevé !

Christophe Arleston, scénariste de Lanfeust de Troy, s’inquiète que plus le statut des auteurs sera précaire, plus les individus pouvant prétendre devenir auteurs seront d’origine des classes aisées. Ce serait dommage que les auteurs des nouvelles générations ne fassent tous partie que d’une même catégorie sociale.

Gaëlle Hersent, auteur de Sauvage avec Jean-David Morvan, (notamment scénariste de Sillage), a aussi marché. Son ami -sur la photo ci-dessous-, illustrateur jeunesse, explique que si les jeunes auteurs sont souvent en situation précaire, c’est que les maisons d’édition publient énormément d’auteurs, et leurs forfaits, leurs rémunérations, sont de ce fait, plus minces.

Nadia Gibert, éditrice chez Rue de Sèvre, anciennement chez Casterman, confirme que l’édition est une industrie qu’il faut faire tourner, au détriment d’une sélection qualitative des projets BD et du prestige du statut d’auteur.

Au final, le Festival de la BD a malgré tout continué à Angoulême dans la festivité, la bonne humeur et surtout l’humour. C’est dans l’espace presse de Delcourt qu’une heure plus tard, Lewis Trondheim ajoute que non, les organisateurs du festival n’ont pas été prévenus de la manifestion et que oui, il aimerait communiquer d’avantage avec eux dans le cadre des préparatifs du festival par exemple.

Le festival de Shelton : Jeudi 29 janvier 2015

En fait, c’est bien le jeudi que commence réellement le festival. Pour moi, depuis des années, il commence par un rituel, la conférence de Guy Delcourt aux journalistes et libraires. Ce moment est important pour trois raisons. D’une part, il y a un bilan assez précis sur l’année écoulée dans la bande dessinée, tous éditeurs confondus. Puis, d’autre part, il y a des présentations plus ciblées sur les ouvrages qui ont marqué l’année passée chez Delcourt et des annonces de ceux qui devraient sortir dans l’année qui démarre. En sortant, on a de véritables envies de lectures… du moins pour ceux qui n’en avaient pas avant !

Depuis que Soleil et Tomkam sont entrés dans le groupe Delcourt, il faut avouer que cette grande présentation couvre encore un champ beaucoup plus vaste… D’ailleurs un certain nombre d’indicateurs vont prouver que Delcourt est en train de devenir, sinon le grand de la bédé, un des piliers de cet univers narratif…

Que retenir cette année ? En 2014, les ventes totales de bandes dessinées ont baissé de 4, 6 %. Un tel chiffre peut sembler négatif mais en réalité les professionnels le relativisent car l’année 2013 avait été boostée par les ventes du nouvel album des aventures d’Astérix. Donc, en fait, il faut considérer que malgré la crise, les ventes de bandes dessinées sont plutôt stables, voire en légère augmentation. Ce qui ne signifie pas que la bédé soit en bonne santé car tous les indicateurs ne sont pas aussi positifs…

Deux grands groupes se partagent la tête, Média Participations (28,3 %) et Groupe Delcourt (28,2 %). Média Participations, grand groupe de presse et d’éditions représente, en bande dessinées les maisons suivantes : Dargaud, Le Lombard, Dupuis, Kana Manga, Blake et Mortimer, Lucky Comics… Delsol de son côté regroupe Delcourt, Soleil et Tomkam.

Si on regarde les chiffres de plus près, si on prend les labels un par un, on constate que Delcourt, pour la première fois est en tête (11,3 %) devant Glénat (10,1 %). Enfin, pour être complet ou presque, quittons les aspects financiers pour ne regarder que les sorties de l’année 2014 et là on peut annoncer 778 titres pour le groupe Delcourt et 762 pour Média Participations. Et tous cela est beaucoup trop, d’où des vrais problèmes de diffusion, de ventes et de revenus pour les nombreux auteurs de ces livres… Là est la véritable crise de la bande dessinée. Trop de parutions annuelles !

Dans les meilleures ventes on trouve sans trop de surprises : Le tome 23 des aventures de Blake et Mortimer, le tome 8 de Joe Bar Team, le tome 19 de Largo Winch, le tome 19 du Chat, le nouveau Lucky Luke, Happy Parents de Zep, le tome 23 de XIII, le tome 17 des Légendaires, le tome 14 de Kid Paddle, le tome 35 de Boule et Bill, L’Arabe du futur de Riad Sattouf, le tome 9 des Sisters, le tome 11 des Blagues de Toto… et si j’ai pris le soin d’en noter plusieurs c’est  pour bien montrer que ce qui est le plus vendu n’est pas nécessairement ce que l’on croit… Certains auteurs sont cités comme les grands de la bédé mais n’apparaissent pas des cas palmarès commerciaux. C’est ainsi, il faut le savoir !

Dans le top 20 des publications bédés pour la jeunesse, le groupe Delcourt est fier de ses partions présentes : Légendaires, Blagues de Toto, Petits diables, Rose écarlate, Carnets de Cerise… Les Carnets de Cerise ont fait l’objet à Angoulême d’une exposition spéciale d’une grande richesse et d’une qualité pédagogique inhabituelle…

Les annonces du groupe Delcourt pour l’année 2015 sont assez conséquentes et il est difficile, à ce stade, de percevoir une baisse de régime : Rahan, Un village français, OSS 117, les Nains, les Elfes, les Maitres inquisiteurs, Gourmandises, 3 nouveaux Walking Dead, Centaurus… Mais on aura le temps de vous parler de celles qui nous aurons plu le moment venu… Une matinée a passé, très vite et il est temps de passer à des rencontres individuelles avec des auteurs pour réaliser les premières émissions de radio. Je ne suis pas là pour chômer… En sortant, la déception n’est pas dans la bande dessinée mais cette énorme pluie qui tombe et qui va nous accompagner toute la journée imbibant nos manteaux de façon irrémédiable…

Le premier à se présenter devant notre micro – pas un « nous » de politesse mais c’est parce que je serai toujours accompagné d’un ou plusieurs étudiants tout au long de ce festival – est David Ratte. Je l’avais rencontré par le passé pour son travail biblique et humoristique, cette fois-ci, c’est pour cette incroyable fable Mamada aux éditions Paquet ! David est chaleureux, drôle comme ses albums, simple, profondément humain. La discussion est libre, paisible et une étudiante peut participer au débat sans avoir trop peur. C’est ainsi que l’on peut apprendre à interviewer car ce n’est pas si simple…

Le thème de sa série est assez originale : une femme, chef de village de la tribu des Himbas, en Namibie, se retrouve – magie de la fable – transportée en plein Paris.

Dans le même temps ou presque, un groupe de Parisiens se retrouve au cœur de son village… Humour, magie, réflexions anthropologiques et philosophiques, bref, tout y est pour séduire les lecteurs de tous les âges avec un conte comme Voltaire aurait pu en avoir l’idée…

Le second de cet après-midi est Callixte pour son album Le bombardier blanc, premier volume d’une série qu’il espère longue, Gilles Durance, aux éditions Paquet. Cette fois-ci nous sommes dans une série aéronautique, une des spécialités éditoriales de Pierre Paquet. Dans la période d’après-guerre, au moment où des hommes cherchent du travail alors que leurs compétences sont restreintes : piloter, faire la guerre, expertise logistique, certains ont tenté leur chance dans l’aviation civile. Ce fut difficile et parfois ils se sont trouvés embarqués dans des affaires plus complexes. Barbouzes, espions, mercenaires, agents spéciaux… c’est bien avec eux que vous avez rendez-vous dans cette série… Bien dessinée, technique mais sans excès, profondément humaine, Callixte nous livre une belle histoire comme je mes aime et elle est bien tirée d’un fait réel, durant la fameuse guerre dite du Biafra… Je découvre que l’une de mes étudiantes, Axelle, se passionne pour ces histoires aériennes…

Les entretiens se succèdent et on a à peine le temps de respirer entre deux rencontres. Oui, je sais bien, certains croient que le festival d’Angoulême est une séquence vacances. En fait, pas du tout, car en quelques minutes, on change de stand, on oublie tout ce qui vient de se passer, on plonge dans un autre univers, on doit reprendre ses esprits et inviter l’auditeur qui n’est pas devant nous à entrer dans une rencontre paisible et sereine, lui donner l’envie avec nous de découvrir une personne, une œuvre, un album…

C’est Benoît Peteers que nous avons la chance de croiser juste après Callixte pour son album Revoir Paris, un travail publié chez Casterman avec François Schuiten au dessin. Benoît n’est pas qu’un scénariste c’est un tintinologue averti, un passionné de bédé et d’images, un homme d’une richesse culturelle étonnante et une personne que j’écouterais des heures durant si les autres n’attendaient pas à quelques pas. En quelques minutes, il transmet sa passion de son travail, le plaisir qu’il a d’avoir un dessinateur comme François, sa conception de la narration en bande dessinée, l’amour de la ville de Paris… Bref, quelques minutes d’une intensité folle… Pourquoi ne pas avoir deux heures avec lui ? Tout simplement parce que tout le monde souhaite le rencontrer, d’autant plus qu’il a écrit un ouvrage sur Taniguchi, le maitre du manga à qui une exposition rend hommage cette année… Donc, il faut savoir se contenter d’une « petite » rencontre…

Et voici un des temps forts de notre journée avec Wilfrid Lupano. Il fait partie des auteurs attendu, au moins au palmarès du festival et son dernier ouvrage, Un océan d’amour, chez Delcourt, est une petite merveille. Mais c’est pour un autre titre qu’il est en compétition, Les vieux fourneaux, chez Dargaud. Un océan d’amour est une longue histoire, plus de 200 pages dessinées admirablement bien par Gregory Panaccione, qui raconte l’amour fou d’une femme et d’un homme. Lui, l’homme, est marin pécheur. Elle, la femme, est épouse de marin pêcheur. Dit comme cela, vous pourriez vous attendre à un récit à l’eau de rose, à un plongeon dans la mièvrerie la plus fade… et vous auriez entièrement tort ! Ce récit sans aucun texte est au contraire à la fois une histoire de la vie quotidienne, un récit dramatique, un regard burlesque sur la vie, une aventure humoristique, une déclaration universelle d’amour absolu, bref une des plus belles bandes dessinées humanistes des dix dernières années !!! Wilfrid Lupano, qui reste d’une grande modestie, prouve là que son talent pour raconter des histoires est tout simplement immense et que d’albums en albums, il explore avec des dessinateurs différents, toutes les narrations possibles qu’offre la bande dessinée, dont celle qui s’abstient de mettre du texte. Et ça fonctionne merveilleusement bien !!!

Dans un deuxième temps d’interview, nous parlons de l’affaire Charlie Hebdo, de l’intolérance des religieux fondamentalistes, thème de sa première série que j’ai adorée, Alim le tanneur.

C’est dur parfois d’avoir raison des années avant que les faits viennent confirmer votre point de vue… C’est probablement le bon moment pour découvrir cette très belle série en trois volumes…

Ensuite, arrive la rencontre avec une jeune auteure, c’est son premier album en bande dessinée, Gaëlle Hersent. Elle est accompagnée de Jean-David Morvan, le coscénariste de Sauvage, aux éditions Delcourt.

Avec sa petite voix fine et délicate, Gaëlle nous explique la genèse du projet car c’est elle qui a trouvé cette idée tirée d’un fait réel. Elle voulait raconter en bédé une histoire d’enfant loup quand elle entendu des éléments sur la vie de Marie-Angélique Le Blanc, femme qui durant une période de sa vie a vécu comme une sauvage dans la forêt… Jean-David Morvan et Aurélie Bévière ont alors écrit le scénario en se basant sur une biographie presque inconnue de Serge Aroles. De plus, Aurélie Bévière a beaucoup écumé les documents de cette période pour mettre à jour certains éléments biographiques qui vont rendre ce travail bédé unique en son genre, porteur de nouveauté sur cette Marie-Angélique qui a vécu entre 1712 et 1775.

Cet ouvrage est une preuve de plus que la biographie est un art devenu classique en bande dessinée et que le fait d’être sur ce support n’empêche nullement les recherches pointues, les hypothèses sérieuses, les avancées historiques… Par ailleurs, une fois de plus aussi, ce Sauvage démontre que certains auteurs – ici Gaëlle Hersent – n’ont pas besoin de coup d’essai pour offrir aux lecteurs des chefs d’œuvre. Bref, du grand art !

Merci aussi à Gaëlle d’avoir pris le temps de nous dédicacer deux ouvrages. On a bien conscience que dessiner, quasiment à la chaine, n’est pas si agréable que cela et nous vous en sommes encore plus reconnaissant !

Mais comme Jean-David Morvan était avec nous, sans blesser Gaëlle en la faisant passer au deuxième plan, nous en avons profité aussi pour parler un peu de Sillage, série que nous étions plusieurs à aimer. De ce côté-là tout va bien. Les parutions se poursuivent au rythme régulier d’une nouveauté par an et, tout doucement, nous approchons de la fin de cet univers… Enfin, il faudra quand même attendre l’album 30 et nous n’en sommes qu’au dix-septième volume ! Une parenthèse sympathique autour d’une série qui nous accompagne depuis longtemps (premier volume en 1998).

Enfin, dernière interview de la journée avec un monsieur que je ne connaissais pas mais qui, par deux fois, m’avait ému profondément. En effet, Benjamin Renner est à la fois le coréalisateur du film d’animation Ernest et Célestine dont j’ai déjà longuement parlé et l’auteur d’un merveilleux ouvrage de bédé, Le grand méchant Renard, aux éditions Delcourt. Nous sommes face un homme qui malgré sa jeunesse a déjà engrangé de l’expérience, du succès et il est resté très accessible. Nous discutons paisiblement, les étudiants interviennent sans appréhension, il se livre, parle de ses différents métiers et de sa dernière histoire…

Son Renard est un personnage qui n’arrive pas à être méchant, qui est trop gentil et son modèle pour la construction du personnage, Benjamin n’est pas allé le chercher trop loin : je suis trop gentil depuis toujours, je n’arrive pas à être méchant, parfois cela pose quelques problèmes…

Alors que la journée a été longue et bien remplie, il reste encore une conférence de presse à aller suivre, celle de Pierre Paquet, éditeur. Je suis d’autant plus intéressé par ce qu’il va dire que je dois en rentrant le soir lire son autobiographie en bande dessinée qui vient de sortir et l’interviewer dès samedi matin…

Je découvre un homme paisible, très accueillant, ayant une perception simple du monde de la bande dessinée et heureux d’être le plus petits des grands éditeurs, à moins qu’il soit le plus grand des petits, peu importe, il est heureux de toute évidence d’être ce qu’il est… C’est du moins l’image qu’il donne ce soir-là ! Je reviendrai sur cet éditeur, sa maison et son travail mais en l’écoutant je découvre que la série d’albums illustrés qui a accompagné un de mes enfants, Victor qui pète, série à l’arrêt depuis la mort de son scénariste Dylan Pelot, va probablement reprendre du service dans les mois qui viennent… Je pense que mon fils sera heureux d’apprendre cela même si, normalement, à vingt ans, on devrait lire des choses plus sérieuses…

Voici donc le moment de clore le récit de ce jeudi 29 janvier 2015, premier jour officiel du festival international de la bande dessinée d’Angoulême…

(A suivre)

Une collection qui grandit de festival en salon et réciproquement ! Quand Shelton continue sa quête manuelle…

Vous le savez, du moins ceux qui me suivent depuis longtemps, j’aime voir travailler les mains, en particulier celles des dessinateurs de bande dessinée. En voici quelques-unes en action durant le dernier festival d’Angoulême…

André Taymans et son dernier album publié chez Paquet

Et maintenant, Etienne Le Roux…

dans son excellent travail sur la Guerre de 14-18 en compagnie d’un scénariste de talent, Eric Corbeyran.

Et que dire des mains de Gaëlle Hersent, certes débutantes mais o combien talentueuses…

… dans un Sauvage qui va marquer les lecteurs, n’en doutons pas !

Des jeunes mains pleines d’expérience au travail sur du papier alors qu’on avait l’habitude de les voir en animation, voici celle de Benjamin Renner

à l’œuvre avec son grand méchant Renard !

J’aime les mains fermes et efficaces de Turf qui nous emmènent en voyage, même si c’est improbable !

Et, pourtant, son dessin est d’une finesse incroyable !

Remarquez, quitte à aller dans un autre monde, autant se laisser guider par les mains de Philippe Ogaki…

et la planète où il nous emmène est assez spéciale !

Soudain, les mains pédagogiques et efficaces de Jean Dytar arrivent et on observe en silence l’artiste…

et on lit avec passion cet ouvrage atypique, fin et pétri d’histoire de la peinture.

Et il est alors temps de rire un peu avec les mains de Charlie Adlard

visiblement encore dans le monde des vivants…

Mais après des mains britanniques, pourquoi ne pas tourner notre regard sur des mains du sud, de Toulouse, avec celles de Serge Carrère ?

Cela nous fait au moins de bonnes mains policières…

Les mains changent-elles avec la nationalité du dessinateur ? A regarder celle de Muralt, Suisse alémanique, je ne suis pas certain…

par contre, ce sont bien des mains aéronautiques !

Mais rien ne vaut les mains automobiles ? Regardez celles de Carloni ! On hésite, pilote ou dessinateur ?

mais, en fait, dessiner des voitures n’est pas synonyme de fan de voitures de courses !

Celles de Monfery aiment l’animation mais parfois, elles s’égarent avec brio sur du papier…

pour le plus grand plaisir des lecteurs !

Comme quoi, les mains en action, cela fait rêver ! Non ?

Le festival de Shelton : Mercredi 28 janvier 2015

Puisque cette année je partais avec un groupe d’étudiants motivés et compétents, il est bien normal que je ne vous parle pas de toutes les rencontres avec des auteurs, histoire de leur laisser un peu de travail. D’un autre côté, je ne peux pas rester silencieux et impassible, j’aime trop la bande dessinée et les auteurs. J’ai donc décidé de vous faire un petit résumé de toutes ces rencontres du festival international de la bande dessinée d’Angoulême 2015, le quarante-deuxième du nom, celui qui se tenait en janvier 2015, mois des attentats, en particulier celui du 7 janvier qui a frappé Charlie Hebdo !

Il était donc normal que tout commence avec un hommage aux victimes des attentats, un visuel signé de nombreux héros avec la participation des auteurs et éditeurs, tous solidaires dans cette dramatique occasion. Le maire d’Angoulême en a profité pour dire combien sa ville était concernée dans son ADN par la liberté de la presse, les développements de la caricature et de l’humour. Cela sentait un peu la récupération, mais, au moins par solidarité avec les victimes et leurs familles, on se taisait tous…

Durant tout le festival, il y eu des badges Je suis Charlie, des affichages de unes de Charlie Hebdo et une très grande exposition souvenir au Musée de la bande dessinée. Pour le reste, ce fut un festival comme les autres, si ce n’est que, plan vigie pirate renforcé exige, nous devions être contrôlés à chaque entrée dans un des lieux du festival, c’est-à-dire de très nombreuses fois par jours…

Enfin, pour clore sur cet aspect Charlie, citons que les festivaliers purent acheter en avant-première un ouvrage, La BD est Charlie, dont tous les droits sont reversés aux familles de toutes les victimes des attentats de janvier 2015. De très nombreux auteurs de bande dessinée dessinent et avouons que certains dessins font rire à en pleurer. En guise de préface, un extrait de Cavanna dont je retiens les mots suivants :

«  Rien n’est sacré. Pas même le bon goût… Rien n’est tabou, rien n’est sacré… Le rire est brutal, provocateur, imprévisible, injuste, sans pitié. Il ne venge, ne punit ni ne juge. Il s’en fout… »

Et c’est alors que commencèrent ces nombreuses rencontres qui vont faire de ce festival un temps fort et merveilleux… Alors, comme toutes ces rencontres ou presque sont préparées avec les attachées de presse qui font un travail remarquable, je commencerai par remercier Claire, Sandrine, Maud, Kathy, Sabrina, Emmanuelle, Maureen, Marité, Doriane et toute l’équipe du festival ! Vous nous avez facilité le travail, vous avez enjoué nos journées par vos sourires, vous nous avez soutenus aux moments les plus tendus… Merci !!!

Pour moi tout a commencé le mercredi après-midi, au Mercure, avec une rencontre avec Lewis Trondheim, un peu comme une avant-première de festival. Certes on a parlé de la série Donjon et de sa fin, de la revue Papiers, de la collection Shampooing, du métier d’éditeur, d’auteur et, comme il s’agit bien de Trondheim, de toilettes. En effet, il a bien expliqué qu’il fallait avoir de bonnes bandes dessinées dans les toilettes, celles que l’on peut lire le temps d’un bon caca… C’est cela l’humour de Trondheim et avouons que ça fonctionne bien et qu’il a fait le plaisir de mon équipe d’étudiants !

Avec une telle ouverture de festival, la suite ne pouvait que bien se dérouler et ce fut le cas !

(A suivre)1

1 : Il ne s’agit pas là d’une référence cachée au magazine illustre édité par Casterman, mais seulement de vous mettre en appétence pour la suite comme certains auteurs le faisaient durant ma jeunesse dans le magazine Pilote !

 

Angoulême 2015 – Back to the 90′s

Lorsque l’on parle des dessins animés de notre enfance, il est difficile de ne pas évoquer les célèbres Chevaliers du zodiaque. Qui n’a jamais eu envie de revêtir une armure et de rejoindre Seiya et ses amis. Le Festival d’Angoulême a donc organisé une conférence sur cette célèbre série, le vendredi 30 janvier à l’espace Le Nil. Une occasion de retomber dans notre enfance, époque ou l’on regardait cette série.

   

 

 

 

Le manga Saint Seiya fut créé par Masami Kuramada dans les années 80. On découvre alors des adolescents se battant à l’aide de leur armure pour protéger une jeune déesse, Athena. Il s’inscrivait dans l’idée de l’époque de viriliser l’homme japonais, et de forcer le ou les protagonistes de l’histoire à se surpasser. C’est ce qu’on appelle alors le « Neketsu ». A cette époque-là, on peut remarquer une émergence de mangas ayant les mêmes codes. Dragon Ball, Ken le survivant, City Hunter, sont des classiques qui naissent grâce à cet élan. L’essence même du Neketsu se retrouvent encore maintenant dans de nombreux shonens connus, tels que Naruto ou One Piece.

C’est donc en Décembre 1985 que parait les premiers chapitres dans le Shonen Weekly Jump, un hebdomadaire publiant principalement des mangas pour jeunes garçons japonais. Les adolescents peuvent alors lire un chapitre par semaine. Très rythmé grâce à ce concept de publications, le manga gagne le cœur des lecteurs puisque celui-ci continuera d’être paru pendant au moins 5 ans. Dans cet hebdomadaire, les abonnés peuvent voter pour leur manga préféré. Saint Seiya occupe la première place de nombreuses fois, ce qui explique donc sa pérennité.

Les atouts de ce manga ? La bienveillance des personnages, leur volonté de fer, leur soif de Justice, mais surtout les Chevaliers incarnent le dépassement de soi, l’envie de devenir plus fort malgré l’adversité. L’éternel débat pour savoir qui sera le plus fort est au centre de l’intrigue, et amène les lecteurs à pouvoir échanger leur opinion entre eux.

Un an après le début de Saint-Seiya, le manga est adapté sous format télévisuelle par le Toei animation, célèbre studio qui a diffusé sur les écrans des animes cultes tel que Goldorak ou Ulysse 31. L’adaptation à la télévision permet de conquérir un nouveau public: la gente féminine. Des traits plus fins dans les dessins, des jeunes garçons attirants qui se battent pour sauver une princesse en détresse, l’anime plait autant que le manga.

Et c’est enfin en 1988, que le dessin animé arrive sur les télévisions françaises. Aucun doute, la série connait un franc succès dès ses premières diffusions. Les Chevaliers du Zodiaque est une série animée très accessible, beaucoup moins référencée aux arts martiaux, par rapport à des animes comme Ken le survivant.

Après quelques années de diffusion, la série s’arrête. Grande déception pour les fans de la première heure, d’autant plus que le dernier « arc » du manga n’a pas été adaptée à la télévision. C’est alors que commence l’effervescence des produits dérivés. Figurines des personnages, sacs, t-shirts, on retrouve les chevaliers partout. Ils sont dans tous les esprits. Surfant sur le succès du merchandising, un spin off est publié, Lost Canvas (15 tomes parus à ce jour). Il est adapté aussitôt à la télévision. Les Chevaliers d’or étant les préférés du public, ce n’est pas une surprise, l’histoire se centre en particulier sur eux. En 2012, une nouvelle série est diffusée à la télévision, celle-ci suit l’intrigue de la première série, quelques années après. Un nouveau manga va également être publié la semaine prochaine, Saint Seiya Saintia Sho. Cette fois le public découvrira une autre histoire parallèle à celle qu’ils ont pu connaitre. Au printemps 2015, les japonais pourront découvrir une nouvelle série télévisée pour adultes sur les chevaliers d’or.

Les Chevaliers du zodiaque envahissent aussi le grand écran, en effet un film sur l’histoire d’Athéna sortira au cinéma le 25 février 2015. L’équipe Chacun sa bulle a d’ailleurs eu la chance de le voir en avant-première, et nous vous avons préparé une petite critique.

Nos chevalier d’or, d’argent et de bronze ne sont pas prêts de tomber dans l’oubli, d’autant plus que ceux qui le regardaient à l’époque le font découvrir à leurs enfants. La série qui était à la base une série de niche, devient alors une série « parent-enfant ». Seiya, Athéna et les chevaliers d’or ont encore quelques années de célébrités devant eux.

 

Lexique :

Shonen : manga ayant un public principalement masculin

Arc : suite de tome ayant la même intrigue, l’arc est manga ce qu’une saison est au série télévisée

Spin-off : série reprenant une histoire passée ou parallèle par rapport à la série de base

 

LES CHEVALIERS DE MORPHEE

Mon enfance télévisuelle peut se résumer au club Dorothée.

Le rituel du samedi matin est simple :

Petit déjeuner devant Dragon Ball, Olive et Tom et bien sûr les Chevaliers du Zodiaque.

J’ai eu l’occasion d’assister ce vendredi 30 janvier à l’avant première du dernier film des chevaliers du zodiaque : La légende du sanctuaire. Le film raconte l’histoire de la bataille entre les chevaliers d’or et de bronze dans le but de sauver Athèna. Un segment de la série qui avait été beaucoup apprécié chez les fans. Mon pressentiment s’est avéré juste : « Déception ton nom est sanctuaire ! »

Les personnages n’ont pas réussi à capter mon affection. J’étais si marqué par les « miens » que ceux là me semblaient fades… tandis que le scénario du film pas à la hauteur de mes souvenirs…

Je pense que la plus grande partie du budget est passée dans les effets visuels des combats qui, eux, sont dynamiques et spectaculaires et relèvent le niveau général.

J’espérais avoir un moment de nostalgie mais Morphée me guettait toute la soirée de projection. Là aussi, un dur combat !

 

 

Angoulème 2015 – Métier éditrice… Rencontre avec Nadia Gibert

Nadia Gibert ? Vous ne connaissez pas ? Métier ? Editrice !

Nous voilà Rue de Sèvres, devant l’affiche du dernier Jirô Taniguchi, Elle s’appelait Tomoji…

Installation rapide, on discute tout d’abord de l’œuvre du grand maître puis l’échange se poursuit sur le métier d’éditeur et les problèmes de l’édition de la bédé en général.

L’édition, c’est tout un métier. Quand on vient au festival de la BD d’Angoulême, on pense souvent instantanément aux auteurs, je dirai même aux dessinateurs. La magie du dessin, la fascination pour les dédicaces… Les grands noms des maisons d’éditions sont bien présents, ne dit-on pas qu’il s’agit d’un salon d’éditeurs ! Mais qui pense à tous les métiers qui gravitent autour ? Nadia Gibert précise bien que l’auteur est au départ, « il est l’étincelle qui allume le feu que l’éditeur va entretenir », et l’éditeur n’est pas seul. C’est toute une équipe…

Son travail : sélectionner, faciliter, corriger, accompagner de la conception à la réalisation et même au-delà ! Nadia nous l’explique en long et en large : la confiance est au cœur de la relation dessinateur-éditeur.  D’après elle, quand on offre à un artiste de publier son projet, la maison d’éditions se doit de pouvoir accompagner son œuvre : il faut pour cela qu’elle corresponde à la ligne éditoriale, que l’éditeur en charge soit en mesure de juger correctement les propositions, et qu’il aime ce projet.

N’oublions donc pas, ce délicat travail qu’est celui de l’édition, lorsque nous apprécions une bonne bande dessinée, lorsque nous dévorons avec jubilation l’album qui saura nous réjouir…

 

Angoulême 2015 – Caractère de bulles, Bulles de caractère

S’il y a bien un élément propre à Angoulême c’est la bulle. Bulle de paroles, bulles de dessins, bulles d’organisation, bulles en carton, et parfois mêmes bulles de savon. Mais quand on parle de « Bulles » ici au festival, on pense bien évidemment aux chapiteaux installés dans toute la ville, accueillant les exposants, auteurs et visiteurs. En bref, un incontournable.

Une des plus célèbres, c’est bien sur Le monde des bulles. C’est là que les visiteurs et journalistes vont avoir l’occasion de rencontrer auteurs et éditeurs.

Les visiteurs, impatients, attendent pour faire dédicacer leur album

Librairie éphémère, stand de dédicaces, master class, tous ces éléments liés à la bande dessinés se mélangent. Les visiteurs ont l’embarras du choix. Pour nous, journalistes c’est aussi une Bulle ou nous allons passer la moitié du temps. Toutes les maisons d’éditions sont centralisées ici, il n’est donc pas étonnant que pour nos interviews, ce soit ici que l’on se rencontre. Derrière les murs de la Bulle, l’ambiance est souvent détendue et amicale.

D’ailleurs l’équipe Chacun sa bulle n’a pas pu s’empêcher de remarquer le caractère propre à chaque maison d’éditions. Une maison d’éditions avec un caractère ? Plutôt étrange comme concept. Pourtant quand on en parle avec l’attaché de presse de chez Paquet, elle est bien forcée de constater que l’affirmation est assez vraie. D’autant plus que chez eux, le caractère tendrait vers la gentillesse et la sympathie, du côté des auteurs mais également du staff. Peu de moyen certes, mais l’envie de bien faire est de rigueur. Chez Delcourt-Soleil, une des plus grandes maisons d’éditions, on est plus branchée vers la réflexion. Mais cela n’empêche pas également d’être très accueillants. Du côté de Casterman, l’ambiance tendrait vers un côté « bobo-chics ». Et bien sûr pour Fluide Glacial une seule phrase résumerait bien le caractère : du bon vin et de la bande dessiné !

Angoulême 2015 – L’Asie, une invité remarquée

DES BULLES HAUTES EN COULEUR

Amatrice de culture asiatique depuis longtemps, c’est avec plaisir et impatience que j’ai été visiter les bulles Little Asia et le Pavillon Chinois.

La première bulle est accueillante et très colorée. Une multitude d’auteurs et de styles sont représentés dans cette bulle, des auteurs chinois aux auteurs taïwanais et des styles les plus sérieux aux plus amusants. Les auteurs les plus importants sont représentés par des blocs transparents où se mêlent illustrations et objets représentant l’univers de chaque artiste.

On peut apercevoir leur caricatures sur ces blocs, chacune avec également des styles très différents. Quelques photos prises, des albums feuilletés, on se dirige vers le Pavillon Chinois.

Dessin à l'encre

Dessin à l’encre en direct

Après l’attente sous la pluie et la fouille de rigueur, on accède enfin à la bulle. Bulle est le mot adéquat : une immersion dans un décor qui nous transporte en Chine. On aperçoit à travers une arche une homme peindre un paysage traditionnel à l’encre. On admire un peu les techniques puis on se déplace dans la bulle. La Chine, malgré son contexte politique, est un pays qui commence à s’ouvrir au 9ème art, et de nombreux talents sont encore à découvrir, tous avec leur originalité. C’est sans doute ces nouveaux talents, frais et originaux qui ont permis la collaboration franco­chinoise pour la création du label Urban China.

LABEL, DISCOURS ET BUFFET : UN ACCORD IMPORTANT

La délégation chinoise

2ème jour du festival, la salle de presse est en pleine émulation. Les photographes s’activent, les caméra enregistrent. Et pour cause : le festival d’Angoulême reçoit une délégation chinoise en vue d’un accord signé entre les maisons d’édition Dargaud (France) et Comicfan (Chine).

Le but de l’événement est de célébrer la création du label Urban China, dédié à la bande dessinée chinoise, les man hua.

L’ambiance est solennelle, discours après discours, les différents protagonistes de cet accord vantent les mérites de cette collaboration qui dépasse des frontières à la fois géographiques et politiques.

L’alternance entre discours et traduction est rythmée par les déclenchements des appareils : les photographes compulsifs ne perdent pas une miette de ce moment marquant du festival.

On se déplace vers la table ou stylos et contrats patientent depuis une heure, Jin Cheng, pdg de la maison d’édition ComicFan et François Pernot directeur général de Média Participations (possesseur de Dargaud) échangent quelques sourires, les imposants contrats sont signés dans une ambiance plutôt détendue.

A noter que Jin Cheng est un meilleur élève que son homologue français : il fait mine de relire tout le contrat sous les yeux étonnés de François Pernot : « Ah ? Vous vérifiez vous ? ». Rires et clics de photographes.

« Ah ? Vous vérifiez vous ? »

Cette matinée se termine sur un buffet couvert de spécialités chinoise pendant environ 10 minutes. Temps qu’il a fallut pour que la gourmandise prenne le pas sur le protocole.

La salle se vide, on prend un dernier cocktail au Cognac et des miettes de beignet au crabe pour finir de célébrer ce rapprochement artistique franco-chinois.

Histoire à suivre en attendant que les man hua investissent nos rayons !

 

 

Angoulême 2015 – Ils nous regardent du haut de leurs cases

Le 42ème festival international de la bande dessinée d’Angoulème n’est pas commun. Ne peut pas l’être. Faisant suite aux attentats des 7 et 9 janvier dernier, ce haut lieu de la bande dessinée et plus largement de la liberté d’expression, se devait de revêtir une tenue différente que celle prévue.

Et au lancement de ce festival, c’est à l’hôtel de ville qu’un rideau se relève, dévoilant une bannière, emblème de cette 42ème édition. Une soixantaine de personnages, connus de tous pour la plupart, s’élèvent au dessus d’Angoulême pour nous crier d’une seule et même voix :

« Rapprochons nous du dessin pour que le dessin nous rapproche ! »

Ces mots se joignent à ceux qui ont pris tant d’importance ces dernières semaines : Je Suis Charlie. Et c’est avec cette conviction, cette foi en la liberté d’expression que démarre ces 4 jours de festival. S’ils nous regardent du haut de leur cases, Spirou, Gaston et les autres peuvent être fiers : nous entendons leur voix.

3 SEMAINES POUR UN HOMMAGE

Petits et grands étaient présents pour visiter l’exposition

3 semaines, c’est le temps qu’il aura fallu pour mettre en place l’exposition qui se tient actuellement au musée de la bande dessinée jusqu’au 8 mars 2015, en hommage à Charlie Hebdo. 3 semaines pour tenter de réunir et de mettre en valeur au mieux le travail de ce journal et de ses contributeurs.

Pour en parler, nous avons tout simplement choisi de laisser à chaque membre de notre groupe la liberté que nous sommes plus que jamais prêt à défendre : la liberté d’expression. Vous pourrez donc trouver ci-après, nos impressions respectives sur « Une histoire de Charlie ».

«Je tient tout particulièrement à saluer la réactivité des organisateurs de cette exposition, qui en trois semaines, sont parvenus à mettre en place un véritable hommage, pluriel et juste, à l’instar de Charlie Hebdo. Hommage destiné à tous, petits et grands, adepte de Charlie ou non. Le tout, c’est de ne pas oublier. » Pierre

« Exposer Charlie est maintenant devenu un devoir de mémoire. Il y a quelques temps inconnu pour certains, maintenant Charlie est une icône de la liberté de la presse française. Aspect qui est d’ailleurs bien mis en valeur lors de cette exposition par l’affluence des lycéens, collégiens ou écoliers. Une occasion également de se retrouver autour d’un mur d’expression libre, ou chacun peut illustrer et partager ses idées. »  Axelle

« En entrant, une ambiance calme rendrait presque hommage à toutes les victimes des évènements tragiques de ces dernières semaines. Puis en visitant, on découvre les débuts du journal, toujours aussi drôle et satirique au long de ses années. Passant de la politique à la religion sans jamais perdre ses bases de tolérance, le journal a toujours exprimé sa façon de penser. On visite encore, avec un peu le vague à l’âme puis l’on finit par se rappeler l’humour que contenaient ces dessins. Il faut savoir rire de tout et surtout continuer à exprimer ses idées. » Amélia

« Des vingtaines d’affiches aux couleurs, illustrations et sujets différents, toutes publiées au nom de Charlie Hebdo ou ses anciens pseudonymes, permettent à ceux qui ne connaissaient pas l’œuvre des victimes du drame, ou les nostalgiques de cette dernière, de l’apprécier en partie. Le grand mur d’ardoise quant à lui arbore les dessins et écrits de tout type de personnes, petits et grands de tous horizons, venant rendre hommage à ces artistes dont la mort nous laisse sans voix. Cette réunion fait chaud au cœur, tant l’on peut admirer l’unité qui se forme ici même, au Festival de la BD. »  Mathias

« Hommage à Charlie Hebdo, aux 17 victimes des attentats de ce début d’année 2015 et une leçon de vie et de tolérance ; voilà ce que nous propose le musée international de la bande dessiné en ce 42ème Festival. Une rétrospective touchante sur l’œuvre entière de l’hebdomadaire, de ses origines à ce qu’il est maintenant et ce qu’il continuera d’être. Le plus impressionnant reste bien sur l’immense mur en ardoise où des milliers d’anonymes, armés de craies blanches, laissent messages et dessins sous une seule et même conviction : la liberté d’expression. » Noé

« J’ai apprécié L’expo Charlie comme une rétrospective en image du travail des journalistes du magazine. Le mur d’expression libre est vraiment impressionnant. Je suis impatiente de voir à quoi il ressemblera à la fin de cette exposition. » Cécile

« Charlie hebdo a beau avoir été décrié et montré du doigt pendant de nombreuses années, les évènements passés ont gravé dans les mémoires charlie hebdo comme un média de libre penseur. Cette exposition permet à tout le monde de découvrir et redécouvrir qui était mais surtout qui est charlie hebdo. Le fait marquant pour moi est le nombre de jeunes enfants et adolescents qui semblent avoir eux aussi conscience que la liberté d’expression est un bien précieux et qu’il faut continuer à se battre pour le préserver. » Christophe

Chacun sa bulle interviewé par France3 !