Vivre et aimer en guerre

C’est avec un grand plaisir que je retrouve des poèmes de Montaha, j’en ai déjà lu deux autres recueils et je ressens toujours la même émotion, les mêmes sensations, le même plaisir en lisant ces textes fluides, doux, tendres, pleins de musique même s’ils évoquent souvent des périodes bien difficiles de sa vie : la guerre, la violence, la spoliation, les amours défaits déçus, les frustrations, le manque de tout ou presque.

Montaha évoque le temps qui s‘enfuit emportant tous les bons souvenirs d’avant sans espoir que cet avant revienne un jour. « On tente de serrer le temps / par le cou / mais il se faufile / sous nos os / comme l’eau qui coule / sans espoir de retour ». Le temps a apporté la guerre, la guerre qui détruit aussi bien les villes et les villages que les familles et de nombreux membres de certaines familles. Montaha a vu ses enfants partir, elle les rejoint parfois dans leur lointain exil. « Mais à l’âge des promesses / à l’âge des plaisirs / la guerre a saisi mon pays / à la gorge / une guerre sans fin ». Une guerre sans fin et sans espoir aucun… « Où es-tu / toi qui pourrais / racheter une vie perdue ».

La guerre a emporté la paix, la joie de vivre, de vivre en famille, de vivre un amour mal choisi peut-être, le temps manquait, il fallait essayer de vivre, de survivre même pendant que l’amour s’effilochait. « Enseveli dans les tréfonds / de mon inconscient / ton amour a revêtu / ses habits de deuil ». « Mes larmes coulent / personne pour me sécher mon chagrin / personne pour me tendre la main ». La guerre a détruit le pays et ses habitants, l’amour est éteint, l’exil est la solution résiduelle. « Avec des miettes d’amour / mon cœur est devenu si lourd ».

« Ne m’abandonne plus / dans le désert de la vie » et si l’espoir renaissait ? Si l’amour réchauffait le cœur ? Enflammait les chairs ? insufflait une vie nouvelle au corps et au cœur ? L’amour s’il est assez fort peut surpasser tous les malheurs et ouvrir un chemin vers un nouvelle vie. « Et depuis nous vivons / en osmose absolue / à rêver sans trêve ». L’espoir n’est peut-être pas que rêve même si l’auteur semble bien peu y croire. « J’écris ce qui me brûle / pour expirer la douleur / braillant dans mes entrailles »

Montaha ne clôt pas son recueil dans le désespoir pas plus que dans l’espoir impossible, elle demande seulement un peu de chaleur humaine, une présence affective, pour ne pas sombrer dans une solitude morbide. « ne me quitte pas / ma vie s’étiole / quand tu t’en vas ». Un grand moment de souffrance que même la résilience n’atténue pas, seuls quelques souvenirs apportent un peu du bonheur d’avant…

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  Le jeu de tes doigts

  de Gharib, Montaha
  Bleu d'encre
  ISBN : 9782930725864 ; 01/06/2025 ; 44 p. 150 x 200