Houellebecq économiste de Bernard Maris

Houellebecq économiste de Bernard Maris

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Economie, politique, sociologie et actualités , Sciences humaines et exactes => Essais

Critiqué par Falgo, le 21 janvier 2015 (Lentilly, Inscrit le 30 mai 2008, 84 ans)
La note : 8 étoiles
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Dérangeant à plus d'un titre

Toute l'actualité récente contribue à faire de ce livre un évènement. Bernard Maris aimait Houellebecq, affirmant: "Personne n'a comme Houellebecq l'intelligence du monde contemporain." Et il a été conséquent avec cette déclaration en écrivant ce livre qui relève chez l'écrivain ses points de vue économiques. Maris a fait l'éloge de ces perspectives en déclarant qu'un écrivain posséde les avantages sur les scientifiques d'une part de bien écrire, d'autre part de ressentir de manière plus aigue par sa sensibilté les mouvements sociaux à venir. Il faut ajouter que Maris n'aimait pas les économistes officiels et était ainsi prédisposé à créditer Houellebecq d'une vision bien supérieure à celle des académiques patentés.
La "vision" de Houellebecq est analysée (je résume) par Maris en plusieurs points:
- l'impulsion vers l'individualisme donnée par le capitalisme conduit le consommateur à développer des désirs toujours insatisfaits -de plus attisés par le système libéral - aux dépens du seul vrai désir humain: l'amour
- cette insatisfaction permanente est chauffée par le système qui génère chez l'individu "incertitude et angoisse" (p.65), ce qui fait de l'homme un malheureux
- pour tenter d'échapper à ce malheur constitutif, l'homme est conduit à consommer perpétuellement des "jouets" (p.74) au nombre desquels on peut compter le sexe
- ces jouets sont totalement inutiles mais demandent pour se les procurer toujours plus "d'argent" (p.97) et l'individu se trouve ainsi embarqué dans une course vers l'argent qui anihile chez lui la possibilité de vrais sentiments
- cette course sans fin est une pulsion de mort qui constitue l'achévement du capitalisme, en particulier parceque les hommes en deviennent incapables d'aimer les femmes, les traitant en objets sexuels sans consistance. Ainsi ils perdent "cette capacité de don sans laquelle l'amour ne peut exister" (p.123), corroborant l'opinion de Maris selon laquelle: "Il n'y a pas moins machiste, plus respectueux des femmes que Michel Houellebecq.", s'opposant de cette manière à nombre de déclarations de ceux qui n'ont pas - ou mal - lu l'écrivain.
Voici donc un livre qui amène à réfléchir d'abord sur le parcours intellectuel d'un écrivain majeur, ensuite sur les fondements économiques de notre société. Sur ce dernier point, ce livre n'est que le rappel d'une position et absolument pas son argumentation. Pour ce qu'il est donc, je trouve que la critique, extrèmement répandue, des conséquences et des excès du système présent ne débouche jamais sur la construction réaliste d'un système de remplacement. Et j'ai toujours trouvé chez Houellebecq (hors son dernier roman) cette attention au monde actuel qui est d'une grande utilité pour réfléchir. Comme Maris l'avait bien vu.

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