Les Indiens d'Amérique du Nord de George Catlin

Les Indiens d'Amérique du Nord de George Catlin
( Letters and notes on the manners, customs and conditions of the North American Indians : written during eight years'travel (1832-1839) amongst the mildest)

Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances

Critiqué par Heyrike, le 26 novembre 2002 (Eure, Inscrit le 19 septembre 2002, 56 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 4 étoiles (49 069ème position).
Visites : 4 916  (depuis Novembre 2007)

Peintre, explorateur et ethnologue............?

George Catlin est un avocat, passionné par la peinture, qui s'ennuie ferme. Jusqu'au jour où il croise des chefs indiens partis représenter leurs tribus auprès du Grand-Père Blanc à Washington. Une vision, digne des plus grands shamans, lui indiquera la route à suivre, qui donnera un sens à sa vie : partir à la rencontre des tribus indiennes vivant à l’ouest du Mississippi, et ainsi croquer le portrait des « sauvages » et cela grâce à ses qualités de peintre. Il abandonnera femme et enfant pour réaliser son rêve d'aventure pendant 8 ans de 1832 à 1839.
Il rapportera de ses expéditions de nombreux portraits et croquis des différentes tribus parmi lesquels il séjournera. Ainsi que des lettres qui seront réunies dans un volume intitulé "Les Indiens d'Amérique du Nord" dans lequel il va nous conter toutes les expériences auxquelles il fut confronté et surtout son point de vue sur la condition et les traits de caractères des tribus indiennes. Analyse qui, bien entendu, est faite avec l’approche et les repères d’un homme blanc civilisé, dépourvu de toute initiation sérieuse sur les peuples premiers. Loin de pouvoir comprendre les sauvages qu'il rencontre, il se bornera à décrire les comportements des indiens selon ses observations subjectives, négligeant des aspects qui sont les fondements mêmes de l'âme des amérindiens.
Malgré cela, tout au long du récit, il semble être lucide sur le sort des différentes tribus vivant dans ces contrées, vouées à disparaître, petit à petit, à force de déplacements, de contamination par la variole et surtout de consommation de whisky. Dénonçant ainsi certaines pratiques des marchands de fourrure pourvoyeurs de "l'eau de feu", et celles du gouvernement américain dans sa politique vis à vis des indiens. Il fait part de son désaveu d'une pratique inhumaine et abjecte concernant des êtres injustement accablés de malheur.
En revanche, il n’est pas capable de se dissocier totalement des préjugés sur ces tribus (même si à plusieurs reprises il dénonce certaines idées reçues sur ce sujet). En les qualifiant de sauvages brutaux et cruels, en raillant leurs coutumes qu’il considère ridicules et absurdes, allant même jusqu'à tenir des propos où transparaît une note de racisme en filigrane, il ne fait qu'obéir à une vision issue des civilisations occidentales qui ne reconnaît pas aux peuples primitifs l'humanité dont ils pensent être les seuls détenteurs.
Il commet plusieurs textes dans lesquels il qualifie les Indiens d‘êtres oisifs incapables d’exploiter les ressources minières du pays qu'ils occupent et invite le gouvernement à remédier à ce manquement dommageable pour l'économie. Plus loin il se félicite du travail de ces missionnaires prompts à convertir les sauvages et à éduquer leurs enfants dans des écoles spécialisées (quand on connaît la triste réalité sur ces écoles, il y a de quoi faire dresser les cheveux sur la tête).
Il aura même la fabuleuse vision de la création d'un parc naturel où serait protégées la faune et la flore, mais surtout les Indiens que les générations futures pourraient venir contempler sur leurs fiers destriers en train de chasser le bison.
Son récit se poursuit en étant empreint d'un manque évident de compréhension des coutumes des tribus rencontrées. Il prétend que les squaws sont des femmes serviles et esclaves de leurs maris polygames, ce qui est une erreur totale d'appréciation du rôle majeur qu'occupaient les femmes au sein de l’organisation de la vie d'une tribu. Lui si fier de sa civilisation raffinée et cultivée va jusqu'à profaner une tombe de chef indien sans aucun scrupule.
Evoquant les soldats stationnés dans les forts qui jalonnent la frontière de l'Ouest, il vantera leur fière allure et leur rôle de pacificateurs défenseurs des valeureux pionniers. Politiquement il encourage Washington à entrer en contact avec les diverses tribus de l'Ouest afin de promouvoir les bienfaits de la civilisation raffinée et cultivée et ceci dans le but de convertir les Indiens à leur mode de vie. Et d’ajouter que pour les convaincre, il suffit d'afficher la suprématie militaire, comme force dissuasive, contre toute tentative de refuser d'abandonner leur mode de vie ancestral ou de résister à la marche du progrès. Persuadé qu'il est que les Indiens ont tout à gagner en adoptant le mode de vie des blancs, tandis qu'eux n'ont visiblement rien à apporter à ce monde civilisé si puissant, qu'il peut détruire des peuples sans vergogne.
Sans être hostile aux indiens, qu’il admire pour leur bravoure et leur fière allure lorsqu’ils chevauchent leurs superbes montures ou pratiquent les jeux qu’ils affectionnent comme le jeu de balle, il n’en reste pas moins qu’il considère ces peuples comme issus d’un autre âge et que rien ne pourra enrayer leur disparition inéluctable, et il conserve une foi aveugle quant à la volonté qu’a le gouvernement de sauver ces peuples.
La dernière lettre sera néanmoins un plaidoyer en faveur des indiens, il affirmera que tout doit être entrepris afin de préserver ces peuples contre tous les ravages des hommes blancs cupides et peu soucieux du respect des traités signés entre le gouvernement et ceux-ci. Malgré tout, même s'il signale la mauvaise attitude du gouvernement américain, il n'ira pas jusqu'à fustiger les hommes politiques, le politiquement correct existait déjà.
Certes le récit de George Catlin ne peut en aucun cas être un ouvrage de référence sur la condition des Amérindiens avant 1840, mais il peut être lu pour comprendre quel pouvait être l'état d’esprit d'un homme blanc, qui tout en étant suffisamment lucide sur le sort réservé aux indiens par ces compatriotes, n'en reste pas moins convaincu que les indiens sont des individus que l'on doit traiter comme des grands enfants incapables de s’occuper d’eux même.
Reste quand même les portraits des personnages rencontrés lors de ses pérégrinations qui restent captivants et témoignent d'un passé prestigieux.

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Une tragédie

6 étoiles

Critique de CC.RIDER (, Inscrit le 31 octobre 2005, 65 ans) - 10 décembre 2021

De 1832 à 1839, Georges Catlin sillonna les grands espaces de l’ouest américain, en remontant le Missouri et en allant jusqu’aux Rocheuses, à la recherche des tribus indiennes les moins touchées par la « civilisation » qui se ruait déjà vers eux. À une trentaine d’années de distance, il partit sur les traces des grands explorateurs Lewis et Clarck et, comme Audubon, il fut aussi un peintre de paysages et de portraits de chefs Peaux Rouges. Ses tableaux, rassemblés dans un musée, figurent parmi les rares documents permettant de se faire une idée de la vie des tribus indiennes juste avant l’invasion yankee et la fin de cette civilisation singulière. En effet les Indiens d’Amérique passèrent d’une population de 16 millions d’habitants à seulement 2 en fort peu de temps, victimes du whisky, de la variole et de la guerre. D’abord repoussés au-delà du Mississippi, puis de plus en plus loin vers l’ouest, sur des territoires de plus en plus déserts, tous firent néanmoins un excellent accueil à Catlin.
« Les Indiens d’Amérique du Nord » est un essai anthropologique d’une lecture un peu laborieuse. En effet, cet ouvrage illustré de nombreuses reproductions de tableaux de l’auteur et composé de 58 lettres suivies d’un appendice consacré à un plaidoyer en faveur des Indiens et d’un réquisitoire enflammé à l’encontre des Visages Pâles, ne suit ni un ordre chronologique vu que ce n’est en aucun cas un récit de voyage classique, ni une forme thématique. Le résultat donne une accumulation de redites comme la chasse aux bisons qui est décrite à de multiples reprises. Sans parler des longues descriptions de paysages. Paradoxalement, le lecteur en apprendra moins sur les us et coutumes de ces populations disparues que dans les ouvrages de la collection « Terre Humaine » par exemple. Il découvrira cependant que la viande de chien, les queues de castor et les langues de bisons figurent parmi les plats les plus recherchés de leur gastronomie, que l’Indien est superstitieux et qu’il a un grand sens de l’honneur. Il place autour de sa taille et un peu partout sur ses vêtements les scalps pris sur ses ennemis tués au combat. Plus il peut en exhiber, plus il sera considéré comme un guerrier respecté. Il garde en permanence une bourse à médecine qui contient des gris-gris censés le protéger. Il pratique la polygamie, seule organisation permettant de compenser les pertes en hommes des perpétuelles guerres entre tribus. On passera sur les supplices d’initiation très bien décrits pour ne pas choquer les âmes sensibles. Il ressort de ce témoignage une impression mitigée. Bien sûr, ces pauvres gens furent broyés impitoyablement, comme par un rouleau compresseur. Mais ils eurent une certaine part dans leur destinée. Leur chasse au bison était avec aussi peu respectueuse du maintien de l’espèce que celle des chasseurs yankee (Buffalo Bill). Ils contribuèrent pour une part à la disparition de l’animal qui était garant de leur survie. Ils ne surent pas se fédérer, étant perpétuellement en guerre les uns contre les autres. Très peu parvinrent à passer du statut de chasseur-cueilleur à celui de cultivateur. Ils furent aussi d’une grande naïveté dans les négociations des traités de paix, véritables marchés de dupes. Une tragédie et un génocide dont les Américains resteront éternellement responsables.

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