Les chemins parcourus de Edith Wharton

Les chemins parcourus de Edith Wharton
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Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Saule, le 3 mai 2005 (Bruxelles, Inscrit le 13 avril 2001, 58 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (41 348ème position).
Visites : 5 380  (depuis Novembre 2007)

Un portrait impersonnel

Edith Wharton allie intelligence, érudition et un génie incontestable pour la fiction. Elle me fascine. Auteur prolifique, elle a créé nombres d'oeuvres romanesques amusantes, d'apparence légères mais qui ne le sont pas toujours, par exemple lorsqu'elle parle du tragique de la destinée humaine prise entre des aspirations contraires. Elle allie un talent de conteuse avec une érudition hors pair et une prescience de l'âme humaine. On se retrouve toujours un peu dans ses histoires.

Je me faisais une fête de la découvrir dans son autobiographie. Malheureusement elle ne s'y dévoile pas du tout, les aspects intimes sont écartés (que ce soit son mariage raté, ses amours,..). Il reste la façade, celle de la femme érudite et passionnée d'art et de beau (architecture, littérature). Elle a d'ailleurs débuté sa carrière d'écrivain avec des ouvrages d'architecture et de voyages.

Le premier chapitre de cette autobiographie, ses souvenirs d'enfance, est le plus réussi. On découvre une petite fille sensible et intelligente, dévoreuse de livre, assoiffée de beauté et qui ne peut partager sa vie intérieure intense avec personne. Sur ses livres et leur création elle nous dit peu et c'est bien dommage. Heureusement il y a un chapitre brillant sur la création littéraire ou elle raconte comment ses personnages de fiction s'imposaient à elle, avec un nom. Un nom qu'elle ne pouvait pas changer, sous peine de perdre le personnage ! A la lire on a l'impression que parfois les personnages lui dictaient leur histoire.

Ensuite pendant de longs chapitres son autobiographie prend les allures d'un carnet mondain : elle cite une quantité invraisemblable de gens brillants avec lesquelles elle avait en commun la passion du beau et de la conversation. Parmi ceux-ci Henry James occupait une place très importante, mais il y a aussi Roosevelt avec qui elle était intime. Une anecdote amusante : le choc lorsqu'elle découvre Proust et le plaisir qu'elle a eu à le faire découvrir à Henry James, surtout que Proust mettait à mal les théories assez rigides de James sur le roman. Elle parle beaucoup de ses voyages aussi. Edith Wharton était une aventureuse dans l'âme. J'ai souri en lisant qu'elle avait fait le pèlerinage de Compostelle.

Pendant la guerre de 1914 elle se trouve bloquée à Paris et elle prendra en main un centre de la croix rouge d'aide aux réfugiés auquel elle donne un essor important, grâce à ses relations en Amériques. C'est un autre aspect sympathique de cette grande dame.

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Les éditions

  • Les chemins parcourus [Texte imprimé], autobiographie par Edith Wharton trad. de l'américain par Jean Pavans
    de Wharton, Edith Pavans, Jean (Traducteur)
    10-18 / 10-18
    ISBN : 9782264031891 ; 4,35 € ; 02/05/2001 ; 381 p. ; Poche
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Brillant, sinon passionnant

7 étoiles

Critique de Cuné (, Inscrite le 16 février 2004, 56 ans) - 12 septembre 2005

Plutôt qu’une réelle autobiographie, Edith Wharton évoque tout au long de ces pages divers moments de son existence, en donnant une grande part à sa vie sociale et amicale.
Elle livre avec clarté ses méthodes d’écriture, raconte ce qui l’a nourri intellectuellement, et ponctue son discours de plusieurs petites anecdotes toutes plus savoureuses les unes que les autres.
Pour autant, elle n’échappe pas au côté fastidieux des listes de noms inconnus, de louanges acerbes ou de descriptions soporifiques.
De plus, Jean Pavans qui a par ailleurs assuré la traduction, nous livre en post-face quelques clefs sur ce qui a été laissé de côté par Edith Wharton, dont certains points sont abordés par elle-même dans un précédent essai d’autobiographie non achevé, fourni en annexe.
Mais basta ! Je ne voulais ici qu’expliquer que ce n’est pas un livre qu’on dévore d’un bout à l’autre, que j’ai lu en diagonale plusieurs passages, mais, par contre, de nombreux autres m’ont comblées :
Ainsi, lorsqu’elle donne son avis sur « l’amateur doué », page 137, tout le chapitre ( VIII) sur Henry James, qui est un pur bonheur, ce qui a été son action pendant la première guerre mondiale, et çà et là, quelques phrases marquantes pas intrinsèquement, mais par ce qu’elles laissent entendre de leur auteure, la logique de sa pensée que je trouve éminemment piquante.
Edith Wharton ne me touche pas comme peut le faire Gabrielle Roy, par exemple, elle est trop pragmatique pour me rejoindre; mais je suis assez fascinée par sa rigueur intellectuelle, par ses lectures formatrices qui me semblent tellement austères et rigides. C’est très révélateur que son premier ouvrage, écrit à quatre mains, ait eu comme sujet l’architecture intérieure !...
A lire si vous êtes fan, ou comme témoignage d’un esprit féminin brillant et atypique de la fin du 19° siècle.

Une anecdote pour le plaisir : Henry James était un fervent amateur de promenades en voiture (très récemment inventées), mais avait un sens de l’orientation totalement déficient :

Page 227
[…] Tandis que j’hésitais, et que je sondais l’obscurité, James aperçut un vieillard branlant qui s’était arrêté pour nous regarder : « Attendez un instant, ma chère. Je vais lui demander où nous sommes. » Et, se penchant, il lui fit signe d’approcher.
« Mon brave homme, auriez-vous la bonté de venir ici, s’il vous plait ? Un peu plus près, voilà… » Et, comme le vieillard s’avançait : « Mon ami, pour vous le dire en deux mots, cette dame et moi-même arrivons directement de Slough, c’est-à-dire, pour être plus strictement exact, que nous venons de traverser Slough en chemin, car en fait nous venons en voiture de Rye, qui était notre point de départ, pour nous rendre à Windsor ; et, la nuit nous ayant surpris, nous vous serions fort obligés si vous nous disiez où nous sommes maintenant par rapport, mettons, à High Street, qui, comme vous le savez sûrement, mène au Castle, une fois qu’on a laissé à main gauche la rue qui descend vers la gare. »
Je ne fus pas surprise de voir cette extraordinaire demande être accueillir par un silence, et une mine abasourdie sur le vieux visage ridé qui se penchait vers la portière ; ni d’entendre James continuer :
« Bref (invariable prélude chez lui à une nouvelle série de ramifications explicatives), bref, mon brave, ce que je voudrais vous demander en un mot est ceci : en supposant que nous avons déjà (ce que j’ai toute raison de croire) dépassé la rue qui descend vers la gare (qui, en ce cas, à vrai dire, ne se serait probablement pas trouvée vers notre gauche, mais vers notre droite, où sommes-nous en ce moment par rapport à…
- Oh, je vous en prie, interrompis-je, en me sentant moi-même absolument incapable de supporter une autre parenthèse, demandez-lui donc où se trouve King’s Road.
- - Ah ?... King’s Road ? En effet ! Très bien ! Pourriez-vous, en fait, mon brave, nous dire où, par rapport à notre position actuelle, se trouve exactement King’s Road ?
- - V’s’y êtes » Répondit le vieillard par la portière. […]


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