Max et Leonora de Julotte Roche
Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Histoire , Arts, loisir, vie pratique => Arts (peinture, sculpture, etc...)
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La descente aux enfers des peintres surréalistes Max Ernst et Leonora Carrington : digne d’un polar !
Julotte Roche signe un récit d’une rare intensité, à la croisée de l’enquête, du témoignage et de la chronique villageoise. À travers les fragments de mémoire, les archives, les confidences et les silences, elle recompose l’histoire d’un couple mythique du surréalisme : Max Ernst et Leonora Carrington, réfugiés à la veille de la Seconde Guerre mondiale dans le petit village de Saint-Martin-d’Ardèche.
Max Ernst, peintre allemand exilé, figure majeure du surréalisme, rencontre en 1936 à Londres la jeune Leonora Carrington, 19 ans, issue de l’aristocratie anglaise, étudiante rebelle et fascinée par l’art. Ensemble, ils fuient Paris et s’installent en Ardèche, dans une maison isolée baptisée Les Clapas, où ils vivent une parenthèse de liberté, de création et d’amour.
Le couple s’intègre à la vie du village de Saint-Martin-d’Ardèche, au début vécu comme le théâtre d’un rêve, entre excentricité et marginalité : les villageois les considèrent de « fadas ». Ils se lient avec Fonfon, tenancière de bistrot, qui peu à peu y cherchera des intérêts financiers, organisent des spectacles surréalistes, vivent nus, peignent, écrivent, sculptent. Max façonne LopLop, son double-oiseau, dans les murs de la maison. Leonora écrit des contes étranges. Ils accueillent des visiteurs, des jeunes curieux, des artistes. La maison devient un sanctuaire de création, mais aussi un lieu de tensions, de jalousies et de rumeurs.
Avec la guerre, tout bascule. Max, ressortissant allemand, est interné aux camps de Largentière puis des Milles près d’Aix-en-Provence. Leonora, seule, sombre dans la détresse psychique, fuit vers l’Espagne, est internée à son tour, droguée au psychotropes. La maison est indiquée vendue dans des conditions troubles à un notable local, qui aurait abusé de la faiblesse du couple. Max, libéré, revient brièvement, découvre la spoliation, puis s’exile aux États-Unis grâce à l’aide de Peggy Guggenheim, qu’il épouse. Leonora, après un passage par Lisbonne, s’installe au Mexique, où elle deviendra une figure majeure de la peinture surréaliste.
Le récit explore aussi la mémoire du lieu : la maison des Clapas, ses sculptures, ses fresques, ses secrets. Max y revient en 1950, puis dans les années 60 et 70, mais ne peut la récupérer. Des tentatives de classement, de rachat, de restitution échouent. La maison est finalement inscrite à l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques en 1991. Les œuvres murales subsistent, figées dans les murs, témoins d’un amour et d’une époque.
Cela redonne voix à ceux que l’on a voulu oublier, et éclaire d’un jour nouveau la trajectoire de deux artistes majeurs du XXe siècle. Parce qu’il interroge, sans manichéisme, les petites lâchetés, les complicités, les silences. Et surtout, parce qu’il nous rappelle que l’art, même dans la tourmente, continue de créer des mondes.
On peut saluer le travail de recueil de témoignage tant qu’il en était encore temps de le recueillir, mais ce livre se lit tel un roman. L’amateur d’histoire considérerait que ce travail aurait tout mérite a être repris par un historien de métier, aussi bien dans l'intérêt de l'histoire de l'art que de l'histoire locale, ce qui n’enlève aucun intérêt à la lecture de cet ouvrage.
Les éditions
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Max et Leonora [Texte imprimé], récit d'investigation Julotte Roche
de Roche, Julotte
le Temps qu'il fait
ISBN : 9782868534651 ; 8,29 € ; 18/06/2009 ; 173 p. Broché
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