Une église pour les oiseaux de Maureen Martineau

Une église pour les oiseaux de Maureen Martineau

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Débézed, le 13 avril 2022 (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 76 ans)
La note : 7 étoiles
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Boucherie chez les ploucs

Sordide ! Horrible ! Abominable ! Mais pas bestiale car même, selon l’enquêteur chargé de l’interrogatoire de Jessica, un animal ne commettrait jamais une pareil atrocité. En effet, Jessica et son chum ont monstrueusement assassiné l’émigré suisse qui voulait implanter un zoo dans l’église désaffecté d’un bourg perdu d’Estrie au Québec. Il n’a eu que le tort de commander une escort au mauvais moment. Jessica qui gagne un peu d’argent dont son chum est souvent démuni, en vendant ses charmes, s’est plainte à lui, à tort, d’avoir dû subir les baisers de son compagnon de gaudriole. Le chum n’aime pas du tout ça et comme il est sous l’emprise de l’alcool, de la drogue et de la jalousie, il décide de faire un sort au Suisse.

Pendant le massacre la « mairesse » du village se démène pour trouver l’argent nécessaire à la construction d’une bibliothèque, pour trouver une solution bloquanr le projet d’installation du zoo dans l’église, pour s’inquiéter de la situation de son fils sujet à des crises de schizophrénie et pour calmer ses colistiers pas tous en accord avec ses décisions. Les martinets ramoneurs ayant fait étape dans l’église au cours de leur migration vers le sud, s’inquiètent autant que le propriétaire du zoo : de plus en plus d’animaux, des plus petits aux plus gros, meurent brusquement. Une épidémie mixant les symptômes de la grippe aviaire et de la maladie de la vache folle semble affecter toute la région. Et pendant ce temps Jessica et son compagnon assassinent et découpent le pauvre Suisse au-dessus de l’appartement occupé par le fils de la mairesse qui entend tout, sait tout, mais n’est cru par personne.

Un fait divers plus noir que noir qui se déroule dans un trou perdu de campagne où règne la misère sociale, la misère affective, la misère sexuelle, la misère culturelle et la misère tout court, celle qui pourrait servir d’excuse à bien des êtres en manque de tout sauf de références à la violence endémique dans le secteur. Jessica n’est que le rejeton d’une famille où toutes ses tares ont largement débordé, aspergeant tous les membres de sa famille. Elle raconte comment elle a été embarquée à son insu dans cette atroce aventure mais son jugement n’est plus fiable, elle a peur de tout, elle n’a confiance en personne, elle ne sait plus où se situe la limite entre le bien et le mal. Ce n’est qu’un petit être sauvage qui a moins de jugement que les oiseaux qui cherchent une issue dans les nuages pour continuer leur migration et fuir cette zone mortifère.

Maureen Martineau, elle, ne craint pas de choquer, elle cogne comme un bûcheron mauricien agrémentant son texte de nombreux québécismes qui lui donnent une puissance, une saveur et une violence toute particulières. Les amateurs de cruauté physique et de crudités langagières y trouveront leur compte, j’en suis convaincu. Mais, la pauvre Jessica ne manque pourtant pas d’une certaine dose d’empathie et inspire la pitié au moins autant que le dégoût. En lisant ce livre, j’ai pensé au roman de Charles Williams, « Fantasia chez les ploucs », que je n’ai pas lu mais dont j’ai vu le film qui en a été tiré. Des pauvres ères qui ne semblent pas adaptés à la société dans laquelle ils essaient de vivre.

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