Le dévoué de Viet Thanh Nguyen

Le dévoué de Viet Thanh Nguyen
(The committed)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Nav33, le 7 avril 2022 (Inscrit le 17 octobre 2009, 76 ans)
La note : 8 étoiles
Visites : 1 510 

Colonisateurs et colonisés dans le Paris des années 1980

C'est la suite du roman Le sympathisant (https://critiqueslibres.com/i.php/vcrit/52689) .
A la fin de ce précédent roman le narrateur et « héros » Vo Dahn (Le Capitaine) fuyait le Vietnam comme boat people en compagnie de son ami Bon .
Nous les retrouvons tous les deux à Paris où il se font héberger par la « tante » de Vo Dahn. Cette soi-disant tante était en fait l’intermédiaire par laquelle Vo Dahn communiquait avec son compatriote communiste et ami d’enfance Man au Vietnam, tandis que lui espionnait la communauté Vietnamienne réfugiée aux États Unis . Cette tante est aussi la vraie tante de Man , troisième homme du trio d'amis d'enfance avec Bon et Vo Dahn. Man et Vo Dahn sont communistes à l'insu de Bon qui est viscéralement anticommuniste suite à l'exécution de son père alors qu'il était enfant. Man est aussi le Commissaire ou l'homme-sans-visage , défiguré par le Napalm qui a dirigé le camp de rééducation dans lequel les deux autres amis ont été détenus . Mais cette identité est inconnue de Bon et celui-ci veut tuer l'homme-sans-visage. C'est l'objet d'une intrigue tortueuse et cornélienne à laquelle est confronté Vo Dahn. A cette intrigue se superpose une deuxième.
En effet les multiples relations , et accessoirement amants de la « tante » dans l'intelligentsia parisienne de l'époque, ouvrent un marché fabuleux de consommateurs de drogues pour Vo Dahn et Bon qui sont enrôlés dans une mafia dirigée par un autre réfugié asiatique « Le Boss ». Vo Dahn sera ainsi impliqué dans une guerre des gangs contre un réseau maghrébin.
Le lecteur est donc entraîné dans un polar dans le Paris des années 1980 , sous le regard de notre narrateur Franco-Vietnamien-Américain. La peinture qui est faite de nos compatriotes est extrêmement savoureuse et ironique à nos dépens. Elle comprend entre autre autres la fascination pour Johnny Halliday , les crottes de chiens sur les trottoirs, les turpitudes sexuelles de notables parisiens et les discours révolutionnaires d'un ancien combattant sur les barricades de mai 68 se prenant pour un compagnon d'armes du Viet Cong (Vo Dahn lui fait quand même remarquer que sa propre guerre a conduit à la mort de 3 millions de Vietnamiens). Il s'agit surtout de la confrontation des anciens colonisateurs et colonisés au passé souvent édulcoré et euphémisé par les uns et souvent ressenti comme perdurant dans leur vie présente par les autres.
De manière cocasse le déroulement de l'action du polar est accompagné de discussions politiques littéraires et philosophiques. Comme dans sa précédente vie d'espion , Vo Dahn se trouve à nouveau obligé d'exécuter des actes de violence extrême. La mystérieuse échappatoire qu'en final il trouve à nouveau est le Rien. On ne comprend pas bien s'il s'agit de nihilisme ou finalement de non-violence. Au départ dans le roman Le Sympathisant il s'agissait d'un jeu de mots qui fonctionnait au mieux dans la version originale anglaise « Nothing is more important than independance and freedom» (citation de Ho Chi Minh). On pouvait lire la phrase en lui donnant deux sens différents. Rien n'est plus important que l'indépendance et la liberté – ou – « Rien » est plus important que l'indépendance et la liberté.
On peut lire Le Dévoué sans avoir lu précédemment Le Sympathisant , car les éléments nécessaires à la compréhension sont brièvement rappelés dans le 2ème roman , mais à mon avis c'est plus difficile et moins intéressant .

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