Ingénieurs de l'âme de Frank Westerman

Ingénieurs de l'âme de Frank Westerman
( Ingenieurs van de Ziel)

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Sahkti, le 16 juillet 2004 (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans)
La note : 6 étoiles
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Un roman hydraulique

Frank Westerman est ingénieur hydraulicien, il a vécu pendant quelques années à Moscou. Un jour, il décide de s'intéresser aux écrivains soviétiques, mais à cause de quelques mystères et de questions qu'il se pose, son travail prend une autre direction.

Westerman dévore "Le Golfe du Kara-Bogaz" de Paoustovski. La baie de Kara-Bougaz décrite par l'écrivain a disparu, or elle devrait se trouver au Turkménistan. Le film tiré du roman n'ayant jamais vu le jour, Westerman se demande comment un grand auteur soviétique peut ainsi parler d'un lieu qui n'existe pas. En effectuant ses premières recherches, Westerman se rend compte que la baie a bien existé, qu'elle a disparu au début des années 90 et que le projet pharaonique de détournement des principaux fleuves sibériens ou d'alimentation des déserts turkmènes avec l'eau septentrionale russe furent de véritables catastrophes écologiques et sociales. On ne compte plus les mers absentes et les dérivations de fleuves qui laissèrent meurtries les terres et les populations.

Soucieux d'en savoir plus sur cette baie disparue décrite par Paoustovski, Westerman part à la conquête du Turkménistan, en compagnie d'un guide bavard et connaisseur, qui lui raconte l'histoire de son pays, sa richesse mais aussi sa dépendance face aux multinationales qui l'utilisent comme leur propriété taillable et corvéable à merci. D'anecdotes en souvenirs, Westerman et son guide Niazov Turkmenbashi donnent un incroyable visage au Turkménistan, celui d'une humanité instable à la recherche d'un peu de bien-être quitte à en payer le prix de l'enfer.

Cet ouvrage de Frank Westerman, dont l'idée de départ était d'étudier les grands auteurs soviétiques, s'apparente davantage à un essai de géopolitique ou d'études hydrauliques. On sait que les grands travaux peuvent générer des dictatures, l'adage n'est ici pas démenti.
Westerman ne renonce cependant pas tout à fait à sa première idée et décide malgré tout de consacrer des pages aux écrivains qu'il aime tant ; il établira donc des comparaisons souvent intéressantes entre travaux littéraires et travaux hydrauliques. Etonnante étude que l'on pourrait qualifier de "roman hydraulique" et qui voit se succéder Paoustovski, Gorki, Gladkov, Chaguiniane, Averbakh ou Platonov Jasienski.
A travers leurs récits, c'est l'apologie des grands travaux qui est faite mais aussi une description de l'esclavagisme inhérent à ces travaux pharaoniques et à ceux qui les commandaient.

Intéressant, certes, mais pour être honnête, un peu lourd par moments, puis mal traduit (certaines tournures néerlandaises sont parfois alambiquées lorsqu'elles sont traduites en français et il y a pas mal de coquilles ou de fautes dans les noms des auteurs cités). Sans parler de la bibliographie très incomplète. Dommage mais cela n'enlève rien à l'intérêt de l'ouvrage.

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