Les repentirs de Marc Séguin

Les repentirs de Marc Séguin

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Libris québécis, le 9 février 2019 (Montréal, Inscrit(e) le 22 novembre 2002, 82 ans)
La note : 10 étoiles
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Vivre comme le vrai monde

Marc Séguin est un artiste peintre franco-ontarien né à Ottawa. Il a séduit New York avec ses tableaux, mais il séduit aussi par ses romans. Avec sa dernière œuvre, le héros, qui se prénomme Marc comme l’auteur, revisite son enfance, sa vie amoureuse avec Arielle et sa vie professionnelle.

Raconter un parcours donné n’est pas le comble de l’originalité. Mais l’auteur a monté une trame qui sort des sentiers battus par son authenticité. Il entremêle les jeunes années de son protagoniste avec les premières années de sa vie de couple. Il connaît une enfance normale avec une mère normale, le père ayant disparu tôt pour refaire sa vie. L’école, les amis, les vacances d’été, la distribution de porte en porte des journaux aux abonnés, les jeux dangereux sur la voie ferrée où Med, son ami, est happé par un train. Un suicide ou un bête accident tragique ? C’est un quotidien qui caractérise la prime jeunesse, hormis la mort de Med.

À première vue, rien à présager. C’est mal connaître Marc Séguin. Il aime se coltailler avec les profondeurs abyssales de la personnalité. Qui est son Marc qu’Arielle appelle affectueusement Ké ? Même si l’œuvre ne compte que 155 pages, le lecteur aura droit au tableau complet de la personnalité du héros. Le Marc en question se dresse avec fureur, tout intérieure, contre la société plébéienne. Il ne veut pas endosser l’uniforme de la conformité. Ce n’est pas pour se différencier. Il veut embraser un horizon tout azimut sans que rien ne l’ébranle. C’est tout un défi, surtout que, devenu adulte, il se marie en bonne et due forme avec une femme qui l’aime plus que tout. En fait, une femme qu’il connaît depuis l’âge de onze ans. Ils ont habité le même quartier, fréquenté la même école et partagé les mêmes jeux.

Arielle transforme son homme à son insu. Les contraires s’attirent, dit l’aphorisme. Marc condamne la société qu’il accuse de se mentir à elle-même pour fuir la réalité honteuse dans laquelle elle baigne. Sa femme lui enseigne la conciliation par son attitude. On participe tous à la même humanité avec ses forces et ses vides. Ces deux pôles caractérisent ce que nous sommes. Mais comment comblons-nous les vides pour se rejoindre ?

Marc est devenu un artiste peintre renommé comme son créateur. Il réalise au cours des ans que ses tableaux révèlent moins ce qu’il est que ce qui lui manque. L’art est un langage sans filtres qui traduit l’histoire des rescapés de la vie. C’est un radeau, celui de la Méduse de Géricault, qui transporte ce qui tient au cœur de l’humain. Marc Séguin place son héros dans l’angle du grand artiste qui s’est réconcilié avec sa tante. Il ne deviendra pas un moine, mais il se repentira de ne pas avoir assez aimé comme l’a écrit Réjean Ducharme : « Le péché le plus mortel, c’est de ne pas aimer assez. »

C’est une œuvre magnifique, bien écrite, bien ficelée, très émouvante. On peut étirer longuement la liste des épithètes.

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