La somme de nos folies de Shih-Li Kow
Catégorie(s) : Littérature => Asiatique

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une bonne surprise
L'auteur est malaise, mais écrit en anglais.
Le roman se passe dans un petit village de Malaisie : Lubok Sayong, situé entre deux rivières et trois lacs, ce qui le rend inondé souvent à la saison des pluies; qui peut être terrifiante. Justement, ça commence par un déluge et une inondation catastrophique. Mami Beevi, dont la modeste maison est envahie par les eaux boueuses, profite de ce déluge pour sortir son poisson neurasthénique qui tournait en rond dans son aquarium et lui rend sa liberté. Naïm, éleveuse de sangsues, tente de les sauver de la noyade en les accrochant à son corps. Le potier Ismet pêche au filet tandis que ses poteries dérivent au fil de l'eau : il ne sauvera rien de sa production…
L'histoire est racontée en alternance par deux narrateurs, Auyong, un vieux Chinois revenu de tout qui observe ce petit monde et Mary Anne, une jeune orpheline de onze ans qui avait été adoptée par une sœur défunte de Mami Beevi et que cette dernière recueille après le déluge, car sa sœur habitait la grande maison de leur père, qui avait quatre femmes (nous sommes dans un pays musulman), dont elle hérite pour la transformer en chambres d'hôtes pour touristes...
Dépaysement garanti avec ce roman qui évoque les traditions, la vie quotidienne aussi bien que les histoires contées, notamment par Mami Beevie, et dont on ne sait pas si elles sont vraies ou imaginaires, sans doute un mélange des deux. Drôlerie, humour loufoque, tendresse, ironie outrancière sont au rendez-vous. Le roman est complexe, mais les événements sont si burlesques qu'on les enchaîne avec gourmandise. Les personnages sont pittoresques : Mary Anne, la jeune orpheline qui n'a pas les yeux dans sa poche est également chaperonnée par l’extraordinaire Miss Boonsidik, une "lady boy" (comprenons un transsexuel) servante de la grande maison, et entourée par Auyong, vieil ami célibataire de Mami Beevi, directeur d’une conserverie de litchis. On aperçoit aussi des touristes (le couple d'Américains Miller), une amie de Mary Anne, Mary Beth (dans l'orphelinat de filles, toutes sont prénommés Mary suivi d'un autre nom).
Le roman nous plonge dans une Malaisie contemporaine où le modernisme côtoie la tradition, où l'attrait des grandes villes à l'européenne fait des ravages chez les jeunes, où les hommes et femmes politiques ne se font voir que par des largesses avant les élections, où les différentes communautés (Tamouls, Malais, Chinois) vivent "ensemble" sans vraiment se mêler, le racisme ayant encore de beaux jours devant lui, sans parler des minorités sexuelles comme les lady boys que des militaires voudraient rééduquer. Bref, on ne s'ennuie pas une seconde dans ce roman mené tambour battant de main de maître.
On suit avec passion l'alternance des récits du vieil homme et de la pré-adolescente, qui parfois rapportent les mêmes faits, l'un avec la finesse d'observation de celui qui a beaucoup vécu, l'autre avec la puissance imaginative de celle qui n'a pas connu sa mère et, sortant de l'orphelinat, interprète à sa manière "innocente"ce qui se passe autour d'elle.
Une belle surprise, mais qui n'étonne pas chez l'éditeur Zulma, découvreur de talent..
Les éditions
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La somme de nos folies
de Kow, Shih-Li Grellier, Frédéric (Traducteur)
Zulma
ISBN : 9782843048302 ; EUR 21,50 ; 23/08/2018 ; 366 p. ; Broché
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Les chroniques de Lubok Sayong

Critique de Fanou03 (*, Inscrit le 13 mars 2011, 45 ans) - 25 février 2021
Shih-Li Kow prêche l’ouverture et la tolérance, y compris pour les différences sexuelles. Elle rend aussi hommage à la richesse des contacts qu’on peut trouver dans les petites villes et dans les provinces, a contrario de l’anonymat des mégalopoles. Enfin elle met à l’honneur les contes, puisque ce récit, quoi qu’ancré dans le réel, est baigné de légende et de faits quelques peu étranges, à l’image des histoires qui sont enjolivées à l’envi par Mami Beevi, un des personnages haut-en-couleur du roman.
La Maison vernaculaire

Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 62 ans) - 8 février 2021
La maison de Mami Beevi n’y échappe pas. Elle décide donc de rendre sa liberté à son étrange poisson qui vivait dans son aquarium de 2 m de long.
Elle peut compter sur son ami Ayong, propriétaire d’une conserverie de litchis.
Ce qui va bouleverser la vie de Mami Beevi n’est pourtant pas la grande crue mais la mort accidentelle de sa demi-sœur Assunta qui venait d’adopter (ou plutôt qui avait décidé d’être son « sponsor ») Mary Anne une orpheline de 11 ans.
Mami Beevi récupère la fillette à sa sortie de l’hôpital ainsi que la Grande Maison qui appartenait à leur père Saïd Hameed, occupée par Assunta, fille de la troisième épouse, qu’elle considérait comme un peu comme sa propre fille.
La Grande Maison deviendra une maison d’hôte, peuplée de bibelots, de souvenirs et d’histoires, de contes et de légendes racontées par Mami. Mary Anne finira par y trouver sa place, malgré l’éloignement de sa meilleure amie Mary Beth.
"Est-ce que c’est vrai, presque vrai ou complètement faux ?... Ma mère est une star de cinéma. Vous ne le saurez jamais et je ne saurai jamais si vous me croyez…. mais bon, tant qu’on y est, et comme c’est moi qui raconte, je vous dirai juste que ma mère est une star de cinéma et que je vois des anges aux endroits les plus bizarres… les meilleures histoires de Mami étaient celles qui étaient presque vraies..."
Un récit très intéressant qui permet de visiter ce pays discret, de découvrir comment s’entremêlent traditions et modernités, comment cohabitent les différentes ethnies, les différentes religions.
"Le thé triple couche : c’est raciste, noir en bas, jaune au milieu et marron en haut.
Je mélangeai mon thé et les trois couches se fondirent en une teinte moka. On fait comme si le monde vivait en harmonie."
Je ne connaissais pas non plus le sort des lady-boys ; enfermés par certaines familles dans des pensionnats et soumis à des entraînements militaires, mais acceptés dans d’autres comme Miss Boonsidik dans la Grande Maison.
Une lecture vraiment très agréable même si le roman s’essouffle un peu, je regrette juste une fin un peu trop prévisible.
Banjir sampai balik Cina

Critique de Koudoux (SART, Inscrite le 3 septembre 2009, 56 ans) - 28 décembre 2020
Dès les premières pages, le ton est donné.
Mélangeant souvenirs et légendes, l’auteur nous plonge avec humour dans sa Malaisie multiculturelle.
L'histoire est racontée par Auyong, un homme d'affaires local et Mary Anne, une jeune orpheline.
C’est une première pour moi, je n’avais jamais lu de littérature Malaisienne et j’ai beaucoup aimé.
C’est un coup de cœur, un livre à lire !
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