Ásta de Jón Kalman Stefánsson
(Saga Àstu)

Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone

Critiqué par Alma, le 30 novembre 2018 (Inscrite le 22 novembre 2006, - ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (22 864ème position).
Visites : 3 636 

« Se peut-il que , parfois, le bonheur soit votre malheur ? »

Un nouveau roman de Stefansson : un nouveau bonheur de lecture !

Je sais que chaque fois, je vais pénétrer dans un univers qui m'est à la fois géographiquement lointain mais humainement proche . Non que mes « malheurs » aient quelque chose à voir avec ceux des personnages qui peuplent ses romans, mais j'ai toujours pour eux une empathie qui transcende nos différences .

Ici encore, une galerie de personnages forts, troublants, attachants.
Autour d'Asta, l'héroïne présentée à différents stades de son parcours et de son père Sigvaldi  qui, au moment de mourir voit défiler des flashes sur des moments marquants de sa vie, s'entrecroisent des êtres aux destins bouleversés, marqués par l'abandon, la rupture ou la fuite .

Certes, la lecture d'ASTA requiert de l'attention …...
Des va-et-vient géographiques et chronologiques constants, la présence de lettres dont on se demande souvent qui en est le rédacteur ou quel en est le destinataire sont susceptibles de dérouter les lecteurs qui apprécient le confort de la linéarité dans un roman .
Il arrive aussi à plusieurs reprises que le narrateur fasse une intrusion dans l'histoire pour commenter ou justifier cette façon qu'il a de fragmenter son récit « Il est impossible de raconter une histoire sans s'égarer, sans emprunter des chemins incertains, sans avancer et reculer, non seulement une fois, mais au moins trois - car nous vivons en même temps à toutes les époques. »
Ce narrateur -qui a peut-être en lui quelque chose de Stefansson – devient même un personnage, secondaires, certes, mais qui permet à l'auteur de jeter un regard un peu désabusé sur le statut actuel de l'écrivain . S'il est le dépositaire des informations sur Asta dont il a décidé de faire son héroïne , il est appelé, dans cette histoire, à devenir un acteur indispensable au succès d'un nouveau programme touristique. Les rencontres avec l'initiateur de ce projet, facteurs d'un comique discret, révèlent le décalage entre l'image publique de l'écrivain et la réalité de sa vie .

Parlons aussi de la bande-son du roman ponctué régulièrement de phrases des morceaux de blues interprétées par Nina Simone et autres célèbres chanteuses américaines, qui sonnent comme un écho aux tourments des personnages. Je n'oublie pas non plus l'équilibre harmonieux entre la narration de faits précis et la réflexion plus générale sur la condition humaine ou sur le sens de la vie , ainsi qu'entre la prose poétique et l'énoncé plus brut de certains agissements .

Un roman polyphonique, riche, qui touche l'âme et fait vibrer le cœur .
Il renferme tout ce qu'il faut pour me parler intimement !

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"Tu es mon roman et j'ai l'intention de t'écrire !"

8 étoiles

Critique de Frunny (PARIS, Inscrit le 28 décembre 2009, 58 ans) - 19 décembre 2020

Jón Kalman Stefánsson (1963- ) est un romancier et poète islandais.
"Ásta : où se réfugier quand aucun chemin ne mène hors du monde ? " paraît chez Grasset en 2018.

L'Islande, terre méconnue, sauvage, pays des aurores boréales, des fantômes et du froid.
Des tourbières à perte de vue, une Nature omniprésente, écrasante.

"Keflavik est tellement loin de tout, que la route est trop longue pour que le bonheur puisse y arriver"

Un environnement favorable à la poésie et à l'écriture contemplative.
Mais c'est aussi, le développement exponentiel du tourisme et la disparition programmée de l'Islandais.
C'est dans cet environnement que nous suivons Sigvaldi, peintre en bâtiment, qui vient de chuter lourdement de son échelle et qui gît dangereusement sur le trottoir. A ses côtés, une vielle femme tente de le soulager .
Sigvaldi s'enfonce doucement dans sommeil définitif et nous livre des bribes décousues de sa vie.
Des moments de vie déchirants rythmés par des amours intenses, des passions contrariées, des abandons.
Asta, sa fille, se construit en l'absence d'une mère qui l'abandonne et d'un père qui a refait sa vie. Chérie par une nourrice qu'elle reconnaitra tardivement, elle va se heurter à l'Amour. Reproduit-elle les échecs de ses parents ?

Il s'agit là d'un roman "d'ambiance" où l'histoire n'est pas fondamentale. On suit Asta et sa famille sans chronologie temporelle.Une jeune fille qui expérimente les fjords de l'Ouest, la ville (Reykjavih) et Vienne.
L'Amour -ou plutôt sa difficile quête- comme fil conducteur.
Une bande son des plus savoureuse : Miles Davis, Nina Simone, Cole Porter, Ella Fitzgerald et Billie Holiday.
Un vibrant hommage est rendu aux poètes et romanciers islandais.
L'auteur interpelle le lecteur à plusieurs reprises, l'impliquant dans le récit.
Un roman bien construit qui transpire la terre d'Islande et le caractère bien trempé de ses habitants.
Un très agréable moment de lecture noté 5 étoiles par notre CLienne nationale !

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