La vérité attendra l'aurore de Akli Tadjer

La vérité attendra l'aurore de Akli Tadjer

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par TRIEB, le 12 mai 2018 (BOULOGNE-BILLANCOURT, Inscrit le 18 avril 2012, 72 ans)
La note : 8 étoiles
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SOUVENIRS D'EN FRANCE

Mohamed est ébéniste au passage du Grand-Cerf à Paris. Il n’a pu résoudre l’énigme, la grande douleur de la disparition de son frère Lyes. Celle-ci est intervenue pendant les années de la guerre civile qui opposa les Islamistes du GIA à l’armée algérienne, causant la mort de plusieurs centaines de milliers d’Algériens. Le roman débute par la description d’une photo prise le 11 août 19993 au Cap Carbon, station balnéaire située sur la corniche kabyle. Mohamed a nourri, on l’apprend par la suite, de grands espoirs pour son frère, promis à une carrière brillante en préparant une grande école, un modèle d’intégration réussie …C’est leur mère, Aicha, qui a décidé de célébrer l’anniversaire de Lyes dans son village natal à Kseur. Vingt-cinq ans plus tard, Mohamed reçoit sur son compte Facebook un message d’une certaine Houria, dont on apprendra plus tard, à la fin du roman, qu’elle a des liens de parenté avec Mohamed : il est son oncle. Pourtant, ce qui est décrit dans ce tendre roman, c’est le pouvoir de la nostalgie : celle de l’enfance de Mohamed à Gentilly, dont le cinéma Le Gaîté-Palace est le cœur des souvenirs, des films vus avec Nelly, une amie de l’époque dont Mohamed est toujours resté très amoureux. Nous nous construisons avec nos souvenirs d’enfance, et ne pouvons nous permettre le luxe de les évacuer : « Longtemps, j’ai déserté mes souvenirs d’enfance parce que je les savais maussades comme un ciel de banlieue. Maintenant que Nelly m’est revenue, il me semble que ma petite vie ordinaire avait quelque chose d'insouciant de léger, d’heureux, presque. » Ce bonheur familial, Mohamed y a difficilement accès : il ne parvient pas à aimer sa mère qu’il appelle d’une manière froidement distanciée « la mère ».
On discerne aussi dans ce roman une chronique des rapports familiaux : le père de Mohamed, tanneur, s’épuise au travail. Souvent en conflit avec Aïcha, il s’irrite de ses achats excessifs, ce qui provoque la haine de Mohamed pour sa mère. Ce père souffre, aussi, du sort des travailleurs algériens : contraints de « gagner sa croûte par-delà les mers, chez les anciens maîtres (…) En quelques mois, mon père était passé du statut d’ancien colonisé à celui de nouvel immigré. » Ainsi, Takli Tadjer évoque-t-il en fait cette situation de la double culture, de la double appartenance qui impacte, qu’ils le veuillent ou non, qu’ils le revendiquent ou non, « cette schizophrénie normale «, selon le juste mot de l’auteur. On ne dévoilera pas la fin du roman, si ce n’est pour indiquer qu’elle laisse la porte ouverte au principe de l’espérance

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