Au-delà des illusions de Du'o'ng Thu Hu'o'ng

Au-delà des illusions de Du'o'ng Thu Hu'o'ng
(Bên kia bơ ̀ ảo vọng)

Catégorie(s) : Littérature => Asiatique

Critiqué par Rotko, le 5 mai 2003 (Avrillé, Inscrit le 22 septembre 2002, 50 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (24 245ème position).
Visites : 5 445  (depuis Novembre 2007)

A pouvoir corrompu, individus avilis.

Hanoï au Vietnam. En jeune femme intransigeante, Linh ne peut pardonner à son mari de serviles complaisances envers les autorités. Elle le quitte, ainsi que sa petite fille, mais peut-elle assumer son indépendance fraichement acquise ?En fait cette intrigue toute quotidienne met au jour la structure d'une société.
L'histoire d'amour montre certes l'itinéraire d'une femme qui se retrouve en délicatesse avec son milieu social et professionnel ; mais derrière ce voile de velours, c'est une charge contre un monde politique oublieux de tous ses devoirs. Pour faire carrière, il faut courtiser les dirigeants et encenser des incapables. Au nom de l'autorité, ceux-ci s'approprient les richesses, pillent la nation, violent, enferment. C'est, après la Révolution, le règne des copains devenus de francs coquins. Et de telles pratiques rejaillissent sur les vies privées : les dénonciations et les sanctions expliquent les hypocrisies et les lâchetés.
Duong Thu Huong fait saisissante galerie de portraits : révolutionnaires embourgeoisés, journalistes aux ordres, artistes officiels ou marginalisés, femmes tiraillées entre la modernité occidentale, la moralité pudibonde, ou les schémas traditionnels. Ce roman ne répond pas à nos critères habituels, et il n'en est que plus intéressant : l'auteur devient une sorte de récitant, et le récit garde une forme orale qui ferait merveille au théâtre ou en pièce radiophonique. Au final, un bon roman qui témoigne sur les sociétés totalitaires et les individus qui en souffrent. Sur un sujet voisin, La corruption, voir Pramoedya Ananta Toer: "corruption".

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Ne pas se trahir soi-même

8 étoiles

Critique de Bolcho (Bruxelles, Inscrit le 20 octobre 2001, 75 ans) - 11 août 2009

Un livre intéressant à plusieurs niveaux. A la fois regard sur la société vietnamienne, sa classe moyenne à la limite de la pauvreté, le poids de la bureaucratie, des règles sociales curieuses pour nous, notamment en ce qui concerne la politesse par exemple… Mais c’est aussi, et de manière très (trop ?) visible, un livre sur la dignité de l’individu en lutte constante pour affirmer ses principes et ses idées, pour assumer sa responsabilité individuelle et préserver sa liberté intérieure. Quelques citations qui illustrent assez bien cela :
- l’espace et le temps qui nous séparent de nos aspirations dépassent les capacités d’endurance des hommes ».
- « L’être humain est l’animal le plus sensible, le plus versatile de tous les animaux. C’est pourquoi, pour survivre, la société doit s’inventer des principes pour évaluer et contrôler la conduite des hommes, pour protéger les relations sociales. Ce qui importe, ce sont ces principes, non le bon cœur des individus. Aujourd’hui je suis honnête, mais demain je pourrais devenir malhonnête. Aujourd’hui nous sommes amis, mais demain, pour mes propres intérêts, je pourrais vouloir votre ruine. La société est saine lorsqu’elle repose sur des principes de justice et non sur le bon cœur de qui que ce soit. »
- « Comment défendre ses idéaux et survivre en même temps, comment garder intactes les espérances de la jeunesse au milieu des bouleversements et des catastrophes de la vie (…). »

Quant à moi, j’en garderai essentiellement le souvenir d’un plaidoyer contre le recours aux modèles et idoles : « L’être humain ne sera jamais adulte tant qu’il s’en remet à d’autres pour sa dignité, à des idoles nimbées d’étoiles et de lumière. Il ne doit croire et espérer qu’en lui-même, car ce sont ses propres pas qui l’amèneront au fin fond de son existence. »

Extrait touchant

8 étoiles

Critique de Elya (Savoie, Inscrite le 22 février 2009, 34 ans) - 22 février 2009

Un merveilleux extrait pour illustrer cette critique déjà complète et vous emmener un peu dans le style de cette romancière étonnante de sincérité : " Puis il va acheter les gâteaux et les fruits que Huong Ly aime. Les paquets enveloppés de toutes sortes de papiers s'entassent dans son cartable. L'homme les range péniblement, méticuleusement pour ne pas les écraser. Les fruits risquent d'aplatir les gâteaux, les bonbons risquent de casser la couche de crème glacée recouvrant les flancs. Vivre est aussi difficile que de ranger des marchandises si différentes dans un cartable si étroit. Comment défendre ses idéaux et survivre en même temps, comment garder intactes les espérances de la jeunesse au milieu des bouleversements et des catastrophes de la vie, comment protéger la vapeur d'eau qui s'exhale à l'aube des ruisseaux la splendeur des crépuscules sur les toits de la ville, le gazouillis des oiseaux dans les feuillages contre les voix, les paroles, les comportements méprisables qu'on doit supporter à longueur de journée."

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