La digue des veuves : Rescapée de l'enfer des Khmers rouges de Denise Affonço

La digue des veuves : Rescapée de l'enfer des Khmers rouges de Denise Affonço

Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances

Critiqué par Dirlandaise, le 27 février 2012 (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 68 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (13 104ème position).
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Quatre années d'enfer

En avril 1975, sur ordre des Khmers rouges qui viennent d’investir la ville, Denise Affonço doit quitter sa résidence de Phnom Penh en compagnie de son mari et de ses deux enfants pour partir vers les camps de travail forcé en pleine jungle cambodgienne. Avec leur victoire, les Khmers rouges mettent fin à cinq ans de guerre contre la république khmère pro-américaine dirigée par Lon Pol. Les Cambodgiens les accueillent en libérateurs mais la réalité ne tarde pas à amener d’immenses déceptions pour employer un euphémisme. Le mari de Denise est communiste et voue une confiance totale aux Khmers rouges. Denise ne tarde pas à regretter de ne pas avoir quitté le pays à temps. Elle et sa famille subiront les longues heures pénibles de travail aux champs sous un soleil de plomb avec pour seule nourriture une soupe claire de riz peu nourrissante. La débrouillardise est alors essentielle pour la survie. Il faut compléter ce maigre régime par tout ce qu’on peut trouver de comestible : insectes, vers, chenilles, grenouilles etc.

Denise raconte ces quatre années d’enfer avec réalisme et pudeur. Son regard d’adulte intelligente et instruite donne un bon aperçu de ce qu’était le régime infernal des Khmers rouges. Après avoir perdu son mari et sa fille, elle décide de s’accrocher et de survivre par tous les moyens. Elle deviendra une voleuse, une mendiante, une menteuse mais tant pis, elle tient à la vie plus que tout afin de pouvoir témoigner des atrocités subies.

Comme bien d’autres, sa délivrance sera pour elle une source de joie inépuisable. Les Vietnamiens libèrent le pays et viennent en aide aux réfugiés survivants dont la plupart sont très mal en point moralement et physiquement. Comment pourrait-il en être autrement lorsqu’on vous demande d’exécuter un travail très dur avec le ventre vide ? Seuls les plus résistants et les plus malins réussirent à survivre dans ces conditions terribles.

De retour à la liberté, Denise doit se refaire un semblant de vie normale. Mais sa seule idée est de quitter ce pays par tous les moyens. Elle possède la nationalité française et désire émigrer dans ce pays en compagnie de son fils de quinze ans afin d’oublier les horreurs du Cambodge.

J’aime lire ce genre de récits. Ils me font apprécier mon confort et mon bien-être et lorsque l’envie me vient de me plaindre au sujet de petits ennuis de la vie quotidienne, je repense à Denise et le courage me revient instantanément. Mieux que tous les livres de psychologie à mon avis.

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10 étoiles

Critique de T-Rexx (, Inscrit le 18 septembre 2014, 51 ans) - 31 mars 2016

Ce livre est le témoignage d'une jeune femme Franco-Vietnamienne qui, à l'aube de ses trente ans, se voit précipitée dans l'horreur absolue d'une révolution communiste en marche. Avec sa famille, elle prend le chemin de la 'campagne' sous la conduite des Khmers Rouges qui, le 17 avril 1975, vident systématiquement les grandes villes du Cambodge, dont Phnom Penh d'où Denise Affonço est l'habitante. Le récit de l'auteur s'attache ensuite à décrire sa survie jusqu'à la libération du pays par les troupes Vietnamiennes en 1979.

Ce livre se lit très vite. Il est écrit dans un style élégant car simple et factuel, parfois parsemé de jugements de valeur de la part de l'auteur, bien compréhensibles, à l'égard des Khmers Rouges. Si la monstruosité d'un régime devait être illustrée en images d'Epinal, celui de Pol Pot tiendrait le haut du pavé .

La narration est touchante et profondément humaine. Non seulement par le récit de ses souffrances, de la perte de sa famille, élément par élément, de ses doutes, de sa peur, de la négation totale de tout ce qui faisait la société à laquelle elle était habituée, de la violence extrême et intime qui caractérisait l'environnement des Khmers Rouges, ou encore de ce basculement brutal d'une vie bien huilée vers une existence cauchemardesque où l'objectif principal est de trouver de la nourriture et la force de survivre un nouveau jour, mais aussi, son livre est beau par le formidable ode à la capacité d'adaptation de l'être humain à son environnement. Par ailleurs, l'auteur reste digne, animée d'un espoir implacable malgré la tourmente. Elle s'en sortira, car elle l'a décidé. Même si la chance a, plusieurs fois, été de son côté, l'essentiel de sa survie est dû à sa capacité à puiser en elle-même les ressources nécessaires au maintien de son existence et de celle de ses proches sans attendre d'aide extérieur. Une sacrée leçon de vie pour nombre d'entre nous...

Et que ceux -et ils sont encore bien trop nombreux- qui croient toujours dans les vertus du communisme aujourd'hui lisent ce texte. Pour avoir vécu pendant plusieurs années au Cambodge, dans les années 90s, je ne connais pas de meilleur moyen de lutter contre la cécité de ces gens qui continuent à croire dans un système politique qui n'a créé que du malheur dans le monde, au même titre mais à une toute autre échelle -on l'oublie bien trop souvent- que son Némésis malfaisant, le nazisme, que de lire ce genre de livre, à défaut de se rendre sur place et d'y vivre, de s'immerger dans le cauchemar absolu de la "lutte des classes", véritable renoncement au chapitre premier de l'humanité : nous sommes tous des "individus sociaux".

Alternativement, ils pourraient lire s'ils préfèrent une version plus récente (années 2000) et Nord-Coréenne du même thème, le livre "Prisonnier du Camp 14" (j'en ferai prochainement la critique). A trente ans de distance, les mêmes maux produisant les mêmes effets, ils verront que cette abjection totale qu'est le communisme appliqué n'a pas changé d'un iota.

Mais ils ne le feront pas. Regarder la vérité en face nécessite le plus grand des courages, ce qui n'est pas donné à tout le monde.

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