Propaganda de Edward Bernays

Propaganda de Edward Bernays
(PROPAGANDA)

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Economie, politique, sociologie et actualités

Critiqué par Montréalaise, le 9 octobre 2011 (Inscrite le 7 août 2010, 30 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 10 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (1 288ème position).
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"LE manuel classique de l'industrie des relations publiques" (Chomsky)

"Edward Bernays, né à Vienne en novembre 1891, est mort plus que centenaire à Cambridge, Massachussets, en mars 1995. Son nom reste le plus souvent inconnu du grand public, et pourtant Bernays a exercé sur les démocratie libérales une influence considérable. (...) C'est qu'Edward L. Bernays est généralement reconnu comme l'un des principaux créateurs (sinon le principal) de l'industrie des relations publiques et donc comme le père de ce que les Américains nomment le spin, c'est-à-dire la manipulation - des nouvelles, des médias, de l'opinion - ainsi que la pratique systématique et à large échelle de l'interprétation et de la présentation partisane des faits" (Préface de Normand Baillargeon).

Ce manuel, publié en 1928 par le neveu de Sigmund Freud, est un véritable bijou machiavélique (dans les deux sens du terme). Il se lit d'une traite et à la fin, on a du mal à croire que toute la propagande moderne (encore très pratiquée aujourd'hui) découle de ce petit livre. Inspiré par la théorie psychanalytique de son oncle et la "fabrique du consentement" de son maître à penser Walter Lippman, Bernays élabore une manipulation basée sur l'inconscient des foules et guidée par ce qu'il appelle, dans les démocraties, un "gouvernement invisible" chargé de "stabiliser" la société (les conseillers politiques, les hommes d'affaires, les généraux, etc.).

"Un document édifiant où l'on apprend que la propagande politique moderne n'est pas née dans les régimes totalitaires, mais au coeur même de la démocratie libérale américaine. Incontournable en une époque où les modes de vie, autant que les opinions politiques, deviennent une affaire de perception".

L'exemple le plus édifiant du succès de Bernays est ceci. En 1929, l'American Tobacco Company, en faillite, demande à Edward Bernays comment inciter les femmes à fumer (à cette époque, c'était une pratique très mal vue) afin de trouver une nouvelle clientèle. En consultant le psychanalyste Abraham Arden Brill, il apprend que la cigarette est un symbole phallique représentant le pouvoir sexuel du mâle : s'il était possible de lier la cigarette à une forme de contestation de ce pouvoir, alors les femmes, en possession de leurs propres pénis, fumeraient (théorie freudienne!). Bernays décide de conseiller un groupe de femmes de cacher des cigarettes sous leurs vêtements lors de la parade de Pâques de New York et, à un signal donnée, d'allumer toutes en même temps ces "torches de la liberté". Les journalistes présents saisirent l'événement et cette pratique eut depuis lors un succès foudroyant.

On peut voir que la propagande peut servir à faire évoluer les mentalités (mais souvent en y cachant des intérêts économiques) comme elle sert à manipuler les foules (d'ailleurs, "Propaganda" inspirera Joseph Goebbels, le manipulateur de masse sous le régime nazi). Encore aujourd'hui, qu'on pense aux mensonges de la guerre en Irak, aux techniques médiatiques lors des campagnes électorales ou bien aux publicités omniprésentes des grandes entreprises, on voit que ce manuel ne vieillit jamais.

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"Créer de l'ordre à partir du chaos"

10 étoiles

Critique de Heyrike (Eure, Inscrit le 19 septembre 2002, 56 ans) - 30 septembre 2014

"La démocratie est le pire des régimes - à l'exception de tous les autres déjà essayés dans le passé." Winston Churchill

Le problème avec le système démocratique, c'est que chaque individu est en droit d'exprimer ses opinions aussi diverses et contradictoires soient-elles, cela entraîne très vite un chaos qui menace les intérêts des puissances d'argent, tout en compromettant la doctrine du pouvoir politique en place que le jeu démocratique oblige à faire entériner et légitimer par les électeurs (convaincre que telle ou telle mesure est nécessaire, même et si surtout elle est nuisible à l’intérêt commun). Et c'est là qu'intervient tout le talent d'Edward Bernays (neveu de Sigmund Freud) qui a su très tôt comprendre et maîtriser les mécanismes qui pouvaient permettre d'orienter l'opinion publique en mettant en œuvre toute une rhétorique structurée sur les bases de la psychanalyse et de la technique publicitaire qui donneront naissance à la fabrique du consentement.

"La manipulation consciente, intelligente, des opinions et des habitudes organisées des masses joue un rôle important dans une société démocratique. Ceux qui manipulent ce mécanisme social imperceptible forment un gouvernement invisible qui dirige véritablement le pays." Tout est dit, l'auteur préconise purement et simplement que le sort des citoyens soit mis entre les mains d'une élite intelligente et invisible qui manipulera les consciences. Car il est bien connu que le pire des dangers au sein d'une société démocratique c'est la masse populaire, qui la plupart du temps est trop ignorante pour savoir ce qui est bien pour elle.

Pour l'auteur, la clef de réussite de toute propagande est la mise en place de groupes d'influence capables de stimuler et de cristalliser l'instinct grégaire du peuple afin de le guider, tel un troupeau vagissant, vers une marque de savon ou une orientation politique qui correspond parfaitement aux intérêts particuliers des marchands ou des décideurs.

A travers différents exemples, l'auteur explique comment tout cela est réalisable grâce notamment aux progrès technologiques des médias et des moyens de transports en plein essor qui multiplient les canaux de communications à même de véhiculer, sans coup férir, la bonne parole de l'élite invisible auprès du bon peuple prêt a accueillir celle-ci docilement et avec ferveur. L'auteur sait de quoi il parle pour avoir lui-même participé à des campagnes de propagande pour des politiciens et des grandes sociétés industrielles, au cours desquels, il a su faire accepter des décisions de politique intérieure ou extérieure qui ont entraîné des catastrophes humaines et convaincre des milliers de foyers à utiliser tel ou tel produit manufacturé. Mais son plus grand fait d'arme est certainement d'avoir réussi à vaincre un tabou au sein de la société puritaine américaine en vendant l'image d'une femme devenue indépendante grâce à sa liberté de pouvoir fumer en public.




L'auteur dépeint sa vision d'une société idéale où régneraient l'ordre et la sérénité grâce à l'éducation de masse dispensée par des conseillers en relation publique relayant la parole de l'élite intelligente. Les idées qu'il expose sont tout simplement consternantes et effrayantes, il pose les bases de la manipulation de masse comme si cela relevait d'une loi divine, un processus naturel alimenté par les plus bas instincts de l'homme. Cette idéologie nauséabonde n'envisagea rien de moins que l'abêtissement et la servitude volontaire de la plèbe afin de la livrer parfaitement conditionnée entre les mains des faiseurs de pluie. D'ailleurs ce n'est pas par hasard si Joseph Goebbels a repris à son compte les écrits de Bernays pour mettre en place sa propre politique de propagande nazi (en 1933, apprenant cela, ce dernier se dira scandalisé … manque pas d'aplomb le gus !)

De nos jours, à bien y regarder de près, il m'apparaît que la pensée de Bernays s'est disséminée insidieusement dans toutes les strates de la société, une substance acide qui a liquéfié nombres de cerveaux devenus perméables à toutes les foutaises et les entourloupes du pouvoir politico-financier largement relayés par une grande partie des médias qui leurs servent la soupe pour mieux cracher dans les caniveaux de la désinformation.

Vade mecum de l'aspirant-citoyen

10 étoiles

Critique de Radetsky (, Inscrit le 13 août 2009, 80 ans) - 10 octobre 2011

Entreprise citoyenne, consommation citoyenne (avec sa variante "verte" : éco-citoyenne), recyclage citoyen...
On nous bassine en long et en large avec le concept de citoyenneté, d'autant plus que celui-ci est allègrement contredit par les pratiques sociales et politiques : mettre un bout de papier tous les cinq ans dans une boîte, pour être ensuite dépossédé de son pouvoir par une caste de professionnels du mensonge qui en fera ce que bon lui semble, ceci n'a rien à voir avec la citoyenneté. Eh bien ! cette vieille crapule de Bernays a élaboré le vade-mecum de l'anti-citoyen, le catalogue des manipulations utiles aux tenants du pouvoir, quel qu'il soit, afin de le garder. Plus besoin de miradors, de barbelés, de mitrailleuses : on va convaincre les peuples de se soumettre aux sollicitations des puissants par le biais d'un langage faussé, d'images fortes, de suggestions habilement dirigées vers les affects et les instincts de tout un chacun, et par voie de conséquence provoquer les réflexes, les attitudes, les suffrages, destinés à légitimer ce qui eût été refusé par le libre examen d'esprits libres.
Bernays (que son nom soit maudit) a tiré les conséquences logiques d'une lecture attentive de La Boétie, Machiavel et Freud : La domination de quelques uns (toujours les mêmes, malgré d'habiles travestissements) sur le grand nombre doit être poursuivie coûte que coûte, en provoquant artificiellement le consentement.
Tout est mis à contribution : la presse, l'édition (mais si, mais si : 95% de tout ce que nous lisons y participe), la radio, la télévision, le cinéma, internet, l'industrie du disque, distillent sous des formes variées et sublimement grimées à l'occasion en pseudo "contestations" les messages sub-liminaux qui feront du pseudo "citoyen" un abruti docile et résigné.
C'est fatigant la démocratie et la citoyenneté : il faut se battre sans arrêt, se "mouiller" comme on dit, prendre des risques, refuser la facilité, le "confort" et le reste, et surtout conspuer ceux qui vous promettent la lune en échange de votre accord. Alors on baisse les bras.
On commence par vous droguer, ensuite on vous viole, et enfin on peut déclarer en toute bonne foi que vous étiez d'accord, et que d'ailleurs vous en redemandez...n'est-ce pas ?
Si vous n'êtes pas d'accord, lisez la prose de ce salaud ; elle est édifiante dans sa simplicité, terrifiante dans ses conséquences.

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