Pour un lectorat ciblé

Caroline a 60 ans. Pour fêter sa nouvelle dizaine et son départ à la retraite (elle était dentiste), ses filles lui offrent un abonnement à une association pour retraités:  « Nouvel Age » où elle pourra profiter de toutes les activités proposées, des traditionnels cours de poterie, d'aquagym, de marche, à des cours d'informatique et même d'œnologie.
« Et si moi j'avais envie d'avoir la paix, enfin? Et si, pour la première fois de ma vie, j'avais envie d'être inutile? De ne pas avoir un foutu emploi du temps à suivre à la lettre, pour oublier que c'est vers la mort que je vais tout droit? Et si je pouvais accomplir ce que j'ai envie d'accomplir?... »
« C'est bien de s'ennuyer, de méditer, de se demander qui l'on est, de se tromper. C'est bien d'avoir enfin quelques heures pour soi, totalement vides et vacantes. »

Elle ira pourtant pratiquer toutes ces activités et fera des rencontres inattendues, lui permettant aussi de confronter son univers bourgeois avec d'autres milieux et de remettre en cause les valeurs auxquelles elle croyait être attachée.

Choquée de l'image que son entourage a d'elle, elle la trouve décalée par rapport à sa propre perception de son corps, de son mental...
« C'est étonnant ce décalage que l'on peut éprouver en vieillissant entre la perception interne de soi et l'image que les autres ont de vous. »

Le roman la fera passer par une courte phase de découragement, entre les activités possibles d'une retraitée et celles d'une femme au foyer.
« Je pense à toutes les femmes au foyer dont les semaines sont rythmées par ces corvées quotidiennes.... Bon sang que je n'aime pas cette agitation parallèle au monde, cette sensation de se perdre dans des activités invisibles et si peu gratifiantes. Je ne pensais pas qu'un métier pouvait à ce point conférer le sentiment d'être utile et de jouer un rôle... »

Puis suivra une phase de découverte totale. Caroline va avoir envie d'un peu de folie, de vivre ses pulsions, ses envies. L'adultère qu'elle commettra avec une jeune homme de l'âge de ses filles l'emmènera dans une situation perturbante mais aussi cocasse.
« J'ai envie de me reconquérir, de me draguer un peu, avec l'espérance folle que je pourrais me plaire. »

Beaucoup d'humour dans cette jolie « comédie de mœurs »:
« Portrait tendre et désopilant d'une femme ni vieille, ni indigne, Une jeune fille aux cheveux blancs est aussi une satire aiguë sur la retraite. »

Ce livre qui m'a été offert pour mes 53 ans par une collègue et amie qui sait que j'attends la retraite avec impatience, m'a, pendant quelques pages démoralisé, puis m'a séduit par cette liberté, cette envie de faire autre chose, autrement, tout en craignant l'abandon du « monde du travail ».

Un livre drôle, facile à lire, pas compliqué, pour quelques petites heures de détente, un roman qui ne se prend pas pour de la littérature et que j'ai beaucoup aimé parce que je m'y suis personnellement retrouvée (ou projetée!).

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  Une jeune fille aux cheveux blancs [Texte imprimé], roman Fanny Chesnel

  de Chesnel, Fanny
  Albin Michel
  ISBN : 9782226208453 ; 6,91 € ; 02/02/2011 ; 216 p. Broché

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