La télévision : un danger pour la démocratie de John Condry, Karl Raimund Popper

La télévision : un danger pour la démocratie de John Condry, Karl Raimund Popper

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Economie, politique, sociologie et actualités

Critiqué par Tistou, le 20 juillet 2011 (Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans)
La note : 8 étoiles
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Un danger bien sous-estimé

Karl Popper, Autrichien de naissance, est mort en 1994 à Londres. Philosophe, sociologue – il fut éducateur également jusqu’aux prémices de la seconde guerre mondiale, à Vienne - il nous livre là, dans un chapitre intitulé « Une loi pour la télévision » sa vision de ce danger moderne. A noter que ceci a été publié il y a 17 ans.

« La démocratie consiste à soumettre le pouvoir politique à un contrôle. C’est là sa caractéristique essentielle. Il ne devrait exister dans une démocratie aucun pouvoir politique incontrôlé. Or, la télévision est devenue aujourd’hui un pouvoir colossal ; on peut même dire qu’elle est potentiellement le plus important de tous, comme si elle avait remplacé la voix de Dieu. Et il en sera ainsi tant que nous continuerons à supporter ses abus. La télévision a acquis un pouvoir trop étendu au sein de la démocratie. Nulle démocratie ne peut survivre si l’on ne met pas fin à cette toute-puissance. »

John Condry, Américain, est psychologue. Il fut codirecteur du Centre de Recherches sur les effets de la télévision. Il s’intéresse, dans son chapitre intitulé « Voleuse de temps, servante infidèle » à la manière dont la télévision formate les esprits, conditionne les téléspectateurs et notamment les enfants.

« La plupart du temps, si l’attention des enfants a du mal à se fixer, c’est parce que le contenu des émissions ne leur est pas totalement compréhensible. Les enfants saisissent une partie seulement de ce qu’ils voient, contrairement aux adultes. Ils ne peuvent pas comprendre les séquences longues ; les motivations et les intentions des différents personnages leur échappent en partie. Mais surtout, ils ne sont pas capables de faire des déductions, ni de comprendre ce qui est implicite.
Lorsqu’ils voient des scènes de violence, par exemple, il est probable qu’ils concluent à leur façon que « c’est le plus fort qui a raison ». Ils ont du mal, en revanche, à comprendre les messages les plus subtils, et que certaines actions sont plus justifiées que d’autres. »

Il apparait clairement que la responsabilité de l’outil « télévision » dans l’évolution insidieuse de nos sociétés est clairement sous-estimé. Et que la correction de cet état de fait est des plus compliqué. Karl Popper et John Condry ont le mérite d’essayer de mettre en lumière cette responsabilité, à la manière dont la dissection peut permettre de mettre au jour les réseaux d’artères et de veines qui irriguent un corps humain.
Karl Popper ne s’est pas contenté de mettre ce danger pour la démocratie en lumière, il a également suggérer quelques pistes pour tenter de juguler ce danger : censurer la violence, imposer un serment à ceux qui travaillent pour la télévision, instituer une autorisation révocable. C’est peu de dire qu’on est loin du compte dix-sept ans après, loin du compte et beaucoup plus enferré dans ce système télévisuel qui repose d’abord sur un aspect commercial, et donc financier.
Un court ouvrage éclairant qui permet de formaliser ce qu’on perçoit intuitivement et qu’il est difficile de formaliser !

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