Off: Ce que Nicolas Sarkozy n'aurait jamais dû nous dire de Nicolas Domenach, Maurice Szafran

Off: Ce que Nicolas Sarkozy n'aurait jamais dû nous dire de Nicolas Domenach, Maurice Szafran

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Economie, politique, sociologie et actualités

Critiqué par Madamedub, le 17 mai 2011 (Paris, Inscrite le 27 janvier 2011, 39 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 4 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (26 713ème position).
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Off: ce que sarkozy n'aurait jamais dû nous dire

"Off", dans le jargon journalistique, désigne ces moments où le reporter éteint son magnétophone pour une plus grande complicité, pour permettre des explications ou autres avec son interviewé. Plus généralement il s'agit de tous ces instants de vies partagés, de fait, entre deux personnes, dont on ne trouve trace dans les journaux ou reportages.
Alors pourquoi, se demande-t-on, un tel ouvrage, qui semble plutôt faire provocation ?

Notons d'abord que le sujet n'est pas des plus anodins: Nicolas Sarkozy, président de France, en fin de quinquennat.
Et le sous titre explicite: ce qu'il n'aurait jamais dû nous dire..."Nous" : il s'agit de deux journalistes-écrivains connus et reconnus dans le monde du journalisme politique, Maurice Szafran, PDG du journal Marianne, et Nicolas Domenach, son acolyte à Marianne et journaliste à l'Edition Spéciale et sur I-télé.

Ils nous décrivent un Nicolas Sarkozy rencontré il y a des années, jeune, alors que sa loyauté oscillait entre Jacques Chirac et Edouard Balladur, bravant les erreurs de jugement dignement, s'accrochant toujours à une ambition qui aurait paru à beaucoup démesurée. Nicolas Sarkozy n'a rien de l'énarque ou de l'aristocrate dont la figure est beaucoup plus courante dans la scène politique française. Sa jeunesse reste un peu floue, entre bohème et bourgeoisie.
Mais il s'agit aussi et surtout du portrait d'un homme d'affect, plus que de raison : qu'il s'agisse d'élans d'affection ou de colère, rien n'est, ou ne semble mesuré. Mais qui est finalement cet homme politique au tempérament exubérant, parlant sèchement, parfois même vulgairement, mais maniant des discours politiques non moins efficaces?
Certains épisodes laissent le lecteur mal à l'aise tant le président semble y être dévoilé, qu'il s'agisse de sa rupture avec Cécilia, ou de son remariage avec Carla Bruni...
Les deux auteurs n'avaient pas en tête de faire un (autre) livre de politique, mais de parler de psychologie, et de ses conséquences (mais là le lecteur est laissé libre de les appréhender sur la gestion d'un pays, les deux auteurs ne faisant pas le pont eux-mêmes entre les faits relatés et les conséquences sur le fonctionnement de notre vie politique).
Reste que beaucoup des débordements ici relatés demeurent connus des caméras et ont beaucoup tournés sur nos divers écrans (exemple le plus facile, le fameux "casse toi pauv' con" lancé à un agriculteur qui refusait de lui serrer la main).
Mais l'on pourra aussi s'interroger sur cette autre question: où, dans notre époque, et plus précisément dans notre monde occidental, se situe encore la délimitation entre le privé et le public?
Qu'est-ce que ce "off" devenu publiable, si ce n'est peut être la rupture de cette digue, qui délimitait ces deux domaines?
A une époque où explosent dans les médias les émissions de télé réalité, où les réseaux sociaux sont à leurs sommets (facebook, twiter...), on ne peut que se demander: Nicolas Sarkozy, exception ou symptôme? Est-il responsable d’avoir entraîné le monde politique dans certaines des dérives de la bulle médiatique de son époque ? On ne manquera pas pourtant de se rappeler que ce sont les président Pompidou et surtout Giscard qui, les premiers, ont fait entrer les caméras dans leur vie privée.
Les auteurs croient à l'exception de ce personnage hors normes, dans ses forces comme dans ses faiblesses. On ne saura jamais vraiment ce qui relevait de la maîtrise ou de la perte de contrôle dans ces moments secrets qui constituent la matière de ce livre.

Pour conclure, nous emprunterons la réponse du philosophe Emmanuel Kant (Qu'est ce que les Lumières?) sur la distinction entre les libertés de l'homme représentant une fonction et celles de l'individu: si l'usage public de la parole et de l'opinion est bien le chemin des Lumières, son usage dans le cadre d'un fonction étatique doit être clairement limité pour ne pas nuire à cette même liberté.

Et il y a fort à parier que cette nuance entre "fonction" et individu" ne s'estompe de plus en plus dans les années à venir...

Un livre sans détours, qui a le courage de soulever cette question.

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Le petit Monsieur

7 étoiles

Critique de Bernard2 (DAX, Inscrit le 13 mai 2004, 74 ans) - 8 août 2012

Peut-être dois-je préciser que je n'éprouve aucune sympathie pour N. Sarkozy, ni pour l'individu en tant que tel, ni pour les idées politiques qu'il défend. La liberté d'expression ne se comprenant qu'en respectant les avis contraires, je ne cherche nullement à offenser quiconque, mais simplement à éclairer mon propos.
Je n'ai pas voulu lire ce livre avant que N. Sarkozy ne soit éloigné du pouvoir, car mes opinions auraient nui à mon souci d'objectivité. Ce n'est plus le cas aujourd'hui.
Certes, on trouve ici confirmation de ce que l'on savait déjà. L'individu a un ego démesuré, un amour immodéré de l'argent, une soif de pouvoir sans partage allant jusqu'au mépris des autres, un manque évident de savoir-vivre et de culture, une incapacité à réfléchir, préférant la précipitation et l'agitation. Les auteurs parlent « d'irrationalité dans sa passion démesurée pour le pouvoir et pour lui-même »...
Mais est-il abject à ce point, sans une seule once de qualité ? Bien sûr, les auteurs étant des journalistes de Marianne, on ne pouvait pas s'attendre à des éloges ! Mais à trop exagérer, on risque de provoquer un effet inverse. Je retiendrai toutefois de ce livre un style élégant, des phrases fort bien écrites, subtiles parfois. Des journalistes, ça sait écrire !
Mais même si tout n'est pas aussi négatif que ce que l'on nous dit ici, on peut se demander, maintenant que la page est tournée, si le titre de ce livre doit être « Off », ou bien « Ouf »...

Une plongée de l'autre côté du miroir

8 étoiles

Critique de Chrisland (, Inscrit le 27 septembre 2011, 63 ans) - 2 novembre 2011

Relativement peu friand d'essais journalistiques sur la vie politique française, je suis tombé tout à fait par hasard sur ce document écrit à quatre mains par deux dirigeants de l'hebdomadaire "Marianne" (journal dont l'orientation politique ou, devrais-je plutôt dire, populiste, ne présente pour moi aucun intérêt).

J'ai commencé le premier chapitre et... je n'ai quasiment pas lâché le volume jusqu'à son terme, 300 pages plus loin. Pourquoi ? Deux raisons essentielles : c'est passionnant et c'est vraiment bien écrit.

Passionnant, car les auteurs ne déroulent pas ici un énième récit exclusif des petits détails croustillants de la vie politique française, mais cherchent plutôt à expliquer, démonter le personnage Sarkozy. Parfait proche de l'analyse psychanalytique, le récit explore le passé, les étapes de sa montée en puissance.

Ce n'est pas un portrait à charge, loin s'en faut, car si les auteurs vont, au fil du récit, décrire le lent relâchement des relations (professionnelles !) entre eux et le Président (à l'initiative de ce dernier), la première partie du récit apporte de nombreux éléments positifs sur sa personnalité. La deuxième moitié du document est, par contre, assez effrayante...

Bien écrit, car les auteurs ne sont pas d'humbles tacherons de l'écriture, pas du tout... Le style de la plupart des récits conçus par des journalistes politiques est assez effroyable, il faut le dire; mais ici, nous sommes en face d'un véritable travail littéraire. J'en remercie Nicolas Domenach et Maurice Szafran, qui me réconcilient avec le genre !

Résumons nous : un récit éclairant, nuancé et bien écrit sur un de nos dirigeants politiques.

OFF ou ce que les français ne devraient jamais avoir à lire...

7 étoiles

Critique de Papyrus (Montperreux, Inscrite le 13 octobre 2006, 64 ans) - 26 juin 2011

Qu’ont voulu nous dire ces deux journalistes en nous livrant des moments de confidences censées rester secrètes entre hommes politiques et médias ?
Qu’ils n’ont jamais rompu le pacte et respecté cette règle tacite de la discrétion, règle qu’ils revendiquent d’ailleurs comme un élément de déontologie journalistique « à la française », jusqu’à …Nicolas Sarkozy.

Cette règle à laquelle ils se sont toujours tenus, « se trouvant affranchis de la loi du silence par les nombreuses transgressions présidentielles » les deux auteurs vont l’enfreindre. Ils nous livrent donc des moments d’intimité dont ils ne cessent de nous dire qu’ils les ont mis dans l’embarras, stupéfiés, interloqués… Ce livre ambigu laisse une impression étrange nous offrant un regard inhabituel sur un monde politique hyper-policé en surface, mais terriblement, cruellement et banalement humain en coulisse.
Il nous éclaire également sur l'ambiguité des rapports que nourrissent ces mêmes hommes politiques et les journalistes. Il y a les adeptes de la connivence (cf: Mr le Président de FOG), il y a ceux qui les fréquentent et trient les informations en se référant à leur déontologie (nos auteurs) et parfois dérogent..., et ceux qui refusent toute promiscuité.

L’intérêt de ce qu’on y apprend est à mon avis mineur en ce qui concerne le caractère du Président, dont on perçoit bien toutes les failles, excès et autres dérapages au simple spectacle de la vie politique française « officielle » depuis son élection.

Ce qui m’a le plus consternée concerne davantage la teneur des échanges tenus en coulisses : les manœuvres politiciennes, les complots minables, les artifices mis en œuvre pour manigancer en sous main ou manipuler l’opinion, l'humeur de Cécilia... mais aucun échange retranscrit nous montrant les légitimes interrogations, voire doutes, d’un homme d’état investi d'une mission, dont les préoccupations devraient être uniquement centrées sur les grandes questions de politique extérieure et intérieure, sur le bonheur des français qui l'ont élu et sur l’avenir de la France, dont il est l'incarnation ! Mais est-ce un choix éditorial?

Cinq ans, c’est un engagement court au regard du destin d’un peuple, si court qu’il exige l’excellence et le dévouement total, absolu, exclusif de l’Elu du peuple français. Cinq ans, c'est même très court au regard de ce qui est exigé par exemple d'un simple professeur des écoles, de qui l'on exige probité, dévouement, comportement exemplaire, déontologie, impartialité, disponibilité, transmission des valeurs républicaines, ... sur l'ensemble d'une vie, avec ou sans divorce, et le tout sans espoir "d'avoir [après], une autre vie et de l'argent." Il en serait de même pour les qualités attendues d'une simple infirmière, d'un urgentiste, d'un journaliste, et de tant d'autres professions... Alors, le soi-disant dur monde de la politique qui justifierait tous les manquements, tous les excès, tous les coups bas, nous les simples citoyens, on en a soupé!

Ces coulisses ne sont donc que la confirmation d’une grande pauvreté d’âme, d’un immense désert humaniste, d’une lente agonie de la démocratie républicaine, minée de l’intérieure par la médiocrité des hommes sans grandeur qui en constituent la soi-disant Elite.
Pauvres de nous, donc!

Un mot sur le style: un peu décevant, pas mal de coquilles et tournures parfois peu fluides, avec un imparfait quasi constant qui tend à endormir le propos et un "nous" collectif comme un bouclier protecteur ("l'un de nous", souvent utilisé) un peu artificiel et désagréable à la longue...

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