Le projet Lazarus de Aleksandar Hemon

Le projet Lazarus de Aleksandar Hemon
(The Lazarus project)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone , Littérature => Voyages et aventures

Critiqué par Nothingman, le 21 novembre 2010 (Marche-en- Famenne, Inscrit le 21 août 2002, 44 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 6 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 4 étoiles (48 836ème position).
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Réveiller Lazare

« Je suis le citoyen de deux pays, d’une loyauté raisonnable envers l’un et l’autre ». Ainsi commence ce roman
En 1908, Lazarus Averbuch, un jeune juif des quartiers pauvres de Chicago, survivant du pogrom de Kichinev, se rend au domicile du chef de police pour une raison inconnue. Croyant avoir affaire à un anarchiste venu attenter à sa vie, le policier abat le jeune homme sur le champ, sans avoir tenté d’élucider les raisons de sa présence. Aucune parole n’a été échangée. À un siècle de distance, cet évènement aussi absurde que tragique va inspirer un autre résident de Chicago, Vladimir Brick, un écrivain bosniaque qui a eu la chance d’émigrer aux États-Unis avant le début du siège de sa ville natale, Sarajevo, dans les années 90.
Vladimir s’identifie au destin de son ancien compatriote. Lui aussi provient du même pays et a émigré à Chicago, sauf que pour lui tout s’est bien passé. Il a trouvé en Mary une épouse compréhensive. Tout juste a-t-il du mal à percer en littérature, à trouver le sujet de son premier grand roman. Et cela lui donne un certain complexe d’infériorité face à sa femme et sa famille. Il a l’impression qu’il doit prouver quelque chose pour que la société américaine l’accepte définitivement. Or, l’histoire de Lazarus va trouver écho en lui. Voilà le sujet de son livre. Il va donc revivre le parcours de Lazarus avant son émigration aux états Unis. Pour cela, bénéficiant d’une bourse littéraire, il va parcourir l’Europe centrale avec son ami Rora le photographe, à la recherche d’indices des Averbuch. «Il fallait, dira-t-il, que je remonte sa trace jusqu’au pogrom de Kichinev, à cette époque d’avant l’Amérique. Il fallait que je réimagine ce que je ne pouvais récupérer. Il fallait que je voie ce que je ne pouvais imaginer. J’avais besoin de sortir de ma vie à Chicago et de passer du temps dans la profondeur désertique de l’ailleurs.»
Ensemble ils traversent la Bosnie, différents pays de l’Est et rejoignent l’Ukraine. Une Ukraine misérable, arriérée, avec ses prostituées, ses mafieux, ses hôtels miteux, bordels et casinos, où subsiste partout le fantôme de l’ancienne URSS. Tout au long de ce voyage épique, Brick ne cesse de poser des questions à Rora sur la guerre qui a déchiré son pays, sur les atrocités commises, sur la vie des trafiquants et la corruption... C’est finalement sur lui-même, sur l’humaine condition de l’émigrant, ses blessures ouvertes, que Brick s’interroge.
Ce roman n’est pas sans rappeler le destin de l’auteur lui-même, puisqu’Aleksandar Hemon est né à Sarajevo en 1964.Il se trouve aux États-Unis quand, en mai 1992, l’état de siège est déclaré dans la capitale bosniaque. Il est aujourd’hui marié à une Américaine et vit à Chicago, où il écrit et enseigne.
Mon seul bémol réside dans la construction pour le moins complexe du roman. Les chapitres décrivant le périple du duo Vladimir- Rora alternent avec ceux, imaginés par Vladimir, relatant les évènements ayant vraisemblablement suivi la mort de Lazarus: le désespoir de sa sœur Olga, la traque aux anarchistes menée par des policiers. Tandis que le récit de voyage des deux complices est un mélange dans lequel la narration d’évènements vécus s’amalgame à celle de souvenirs de la vie américaine de Vladimir. De plus, chaque chapitre est précédé d’une photo. Certaines sont l’oeuvre de Velibor Bozovic, un ami de l’auteur. D’autres proviennent des archives du Chicago Daily News, entre 1904 et 1919. Aucun texte n’accompagne les photos. Difficile donc de les mettre en relation avec les textes qui suivent. Toutes ces digressions font que ce roman est par moment difficile à suivre. Il exige donc attention et concentration.

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Les éditions

  • Le projet Lazarus [Texte imprimé] Aleksandar Hemon traduit de l'anglais (États-Unis) par Johan-Frédérik Hel Guedj avec des photographies de Velibor Božović et de la Chicago Historical Society
    de Hemon, Aleksandar Božović, Velibor (Illustrateur) Hel-Guedj, Johan-Frédérik (Traducteur)
    R. Laffont / Pavillons (Paris. 195?)
    ISBN : 9782221111888 ; 12,71 € ; 22/04/2010 ; 381 p. ; Broché
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Si le destin de la Bosnie vous intéresse...

6 étoiles

Critique de Tanneguy (Paris, Inscrit le 21 septembre 2006, 84 ans) - 21 novembre 2012

C'était mon cas au début du livre, raisonnablement, mais je suis perplexe au moment de rédiger cette critique. L'idée de départ est excellente, comme le souligne Dirlandaise à juste titre, mais le style de l'auteur est déroutant c'est le moins qu'on puisse dire et il faut s'accrocher pour achever ce volume.

Le narrateur ( l'auteur ?) est-il bosniaque ou américain, c'est l’ambiguïté du système communautariste des USA qui donne à réfléchir.

J'ai apprécié les témoignages sur l'état du pays aujourd'hui après ces guerres cruelles et interminables. J'avais fait la connaissance de Sarajevo en 1955 et avait retenu l'image d'une omniprésence de l'armée avec ses calots frappés de l'étoile rouge. La reconstruction du pays semblait à l'ordre du jour. Qu'en est-il aujourd'hui ?

Entre lassitude et ennui...

6 étoiles

Critique de Dirlandaise (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 68 ans) - 7 décembre 2010

En 1908, un jeune juif ukrainien est abattu au domicile du chef de la police de Chicago, celui-ci l'ayant pris pour un dangereux anarchiste venu dans le but de le tuer. Lazare laisse donc sa sœur Olga pour pleurer sa mort absurde. Un siècle plus tard, l’écrivain Vladimir Brik, lui aussi un immigré ayant trouvé refuge aux USA après avoir fui son pays natal la Bosnie, prend connaissance de cette histoire et décide de partir en Europe afin de retracer la vie du jeune Lazare et peut-être découvrir les motivations qui auraient pu expliquer les circonstances ayant entraîné sa mort.

L’idée de départ est excellente mais le style d’Aleksandar Hemon est assez pénible. J’ai même passé à un cheveu d’abandonner mais j’ai tenu le coup malgré ma lassitude et mon ennui. Car de l’ennui, j’en ai éprouvé beaucoup au cours de ma lecture. Par contre, le talent de l’auteur est indéniable mais il se perd dans toutes sortes de digressions qui ont eu le don de m’irriter et de gâcher mon plaisir. L’histoire de Lazare passe au second plan et monsieur Hemon nous décrit une foule d’événements et d’incidents pas réellement importants et qui ne font nullement avancer l’histoire. Durant leur périple en Europe, Vladimir et son ami photographe Rora, son compagnon de voyage, se racontent toutes sortes d’histoires, surtout Rora qui aime les blagues et ensuite, Vladimir nous entretient de ses problèmes conjugaux. Les deux compères descendent dans des hôtels minables, visitent des musées poussiéreux retraçant l’histoire locale, s’attablent dans des cybercafés, dérouillent un proxénète et ainsi de suite. Le lecteur est comme pris en otage par l’auteur qui profite de l’intérêt du thème de départ pour assouvir son goût de raconteur. Ce n’est pas que ce soit entièrement mauvais mais cela est irritant ce vilain procédé et je n’aime pas quand un auteur l’utilise.

Les chapitres alternent entre l’histoire de Lazare et celle de Vladimir pour en venir à se mélanger vers la fin. Les problèmes de l’immigration à Chicago dans les années 1900, la peur des bien-pensants qui voient en chaque immigré un anarchiste en puissance, la pauvreté et la misère qui sont le lot de la plupart d’entre eux sont des thèmes fort bien exploités. Le pèlerinage de Vladimir est plus vague et se révèle souvent assez ennuyeux. Il faut sans doute apprivoiser le style de monsieur Hemon afin de bien l’apprécier. Un lecteur averti prendra plus de plaisir à cette lecture que je n’ai pu le faire.

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