Protopoèmes de Christophe Manon

Protopoèmes de Christophe Manon

Catégorie(s) : Théâtre et Poésie => Poésie

Critiqué par Sahkti, le 18 mai 2009 (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans)
La note : 8 étoiles
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A l'origine de la Terre, le langage

Les textes qui composent ce recueil ont été écrits entre 1999 et 2009; certains (la plupart) sont inédits, d'autres ont été publiés dans diverses revues. Des textes suivant un ordre chronologique et/ou thématique de manière à ce que le lecteur puisse appréhender l'oeuvre de Christophe Manon dans son évolution, avec ses modifications et ses ruptures. Il ne s'agit pas ici de donner un panorama du talent de l'auteur mais de mieux cerner les changements qui se sont opérés et l'évolution d'un langage en adéquation avec l'avancée dans le temps du monde qui nous entoure.

En entamant ce parcours avec "Fieffé soleil", Christophe Manon revisite la Terre et ses formes organiques, que celles-ci soient terre, pierre, galet ou écorce. La Terre Mère est explorée, fouillée, secouée afin d'en extraire les sucs qui vont nous permettre de connaître une création plus intériorisée, celle des "Totems intérieurs" qui succèdent à ces premiers poèmes. Notre rapport aux gestes et aux symboles est poétiquement passé au crible, décortiqué de manière à laisser le langage danser sous nos yeux et exprimer cette force qui nous anime. Il ne s'agit pas ici de s'appesantir sur un monde qui ne tournerait pas rond mais plutôt de nous intéresser à ses fondements et ses repères que nous pouvons réutiliser dans sa (re)construction. Le Monde se fait conscience et notre être prend conscience de lui-même en s'intériorisant; les deux finissent par s'imbriquer pour vivre ensemble. Un peu à l'image de ce que la partie "Cuisine métaphysique" nous propose, recettes de vie sur un ton ironique et parfois humoristique, mêlant langages novateurs et rapports de force entre le monde et nous.
La dernière partie "Ici et maintenant" met en mots des vidéogrammes extraits du film "Octobre" (Serguei Eisenstein). Une manière de clôturer ce lent processus de prise de conscience de soi et du monde, de l'intériorisation à l'extériorisation, pour aboutir à une forme de revendication politique pour justement faire tourner ce monde dont nous venons d'établir des contours, pas forcément précis mais palpables.

Textes rugueux, bruts mais aussi aboutis et ciselés, mélange des formes et des genres... étrange et étonnant!


Quelques lignes:
"le souffle de Lascaux la langue
le bruit de la caverne et ses
parois trempées oui la gorge
et le poème serti de brumes l’
enfant que nul n’effraie et
lui pauvre figure cherchant
dans les livres des mots des
couleuvres et dans ses mains la
luzerne de vivre point attaché
à ses frusques ni rayonnant de
nulle joie toujours la tête penchée
et l’œil toujours enfoncé dans les os"

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