Rockefeller ou le sacre de l'Argent

C'est une excellente biographie sur un homme tellement célèbre que son nom est devenu un nom commun : un Rockefeller c'est un homme impitoyable et démesurément riche.
Il avait commencé comme épicier, puis il s'était intéressé au transport et au raffinage du pétrole ; puis, en très peu de temps, il était devenu ce personnage de légende comme il ne pouvait en exister qu'en Amérique au XIXème siècle : le Roi du pétrole, l'homme le plus riche du monde !

Son biographe s'attarde sur sa personnalité : c'était un Baptiste de la plus stricte observance. Un dévot, un ascète. Il vivait comme un gagne-petit.
Mais c'est assez classique chez les Protestants. Il en existe encore de ces milliardaires ascètes, en Hollande, en Allemagne et sans doute ailleurs dans les pays protestants.
C'est que l'argent est une récompense distribuée par Jéhovah aux gens qui le mérite. Il doit être thésaurisé, éventuellement réinvesti pour donner encore plus d'argent, mais jamais dépensé pour le plaisir.

Toutes ces bonnes dispositions n'empêchaient pas Rockefeller d'être un tricheur, un menteur un malhonnête, et même un criminel ; il n'hésitait pas à mettre le feu chez ses concurrents qui lui faisaient de l'hombre.
Il avait compris que l'argent mène le monde : il achetait les consciences, aux plus scrupuleux les sommes les plus fortes...
Il était l'homme le plus haï du monde. Mais les plus assassines des campagnes de presse contre lui, s'étouffaient sous les sommes d'argent ou sous les menaces de destruction du journal.

Quelle époque ! Par moment, on retrouve, avec délice, le Tout New York de « Chez les Gens Heureux », cher à la romancière Edith Wharton. Un Tout New York dont Rockefeller était banni pour ne pas avoir respecté les convenances.
Le seul homme qui lui tint tête un certain temps, fut le Président Roosevelt ; mais sans pouvoir réellement l'abattre. Rockefeller était bien l'homme le plus puissant de toute l'Amérique.

Il eut beau, à la fin de sa vie, distribuer son argent aux oeuvres, créer la plus grande fondation charitable du monde, rien n'y fit, il resta toujours l'homme le plus haï d'Amérique.
Et personne ne sut jamais ce qu'il en pensait.

Cette biographie date de 1937. C'était encore l'époque où ceux qui prenaient la plume savaient écrire ; le style est impeccable, le mot est juste, la phrase est bien balancée. Le récit est parsemé de digressions sur la mentalité du temps, la vie à New-York, les événements qui préoccupaient le monde. On y ajoute une touche de romance, parfois de poésie, et ça vous donne un modèle de biographie.

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  John D. Rockefeller

  de Lamure, Pierre
  Plon
  ISBN : SANS000017609 ; 01/01/1937 ; 14,5 X 20,5