Le bruit, l'odeur, l'espoir?

Voici une très intéressante étude publiée par la éditions Autrement dans leur collection Mémoire/Culture rédigée par Thibault Tellier, maître de conférence à l’université de Lille, professeur d’histoire contemporaine spécialisé dans l’histoire urbaine. Un pro donc.
Alors que notre nouveau président de la République a fait une partie de son succès sur l’idée de passer au Karcher les quartiers sensibles, les « cités », il est bon de se plonger dans l’histoire de ces constructions modernes à haute densité de population.
Après la guerre, la France est un pays en qui n’est plus que l’ombre de la puissance qu’elle était. L’état des infrastructures est lamentable et une grande partie de la population est à la rue, leurs habitations ayant été détruites par les bombardements. Il y a donc une grave crise du logement qui n’est pas résolue tout de suite car l’Etat veut avant tout relancer l’économie par la relance de son appareil de production. La priorité est donc donnée aux usines, aux entreprises, la reprise de l’activité devant, mécaniquement, provoqué une amélioration de la vie et l’enrichissement de l’Etat.
La construction des habitations en commun, des grands immeubles si l’on préfère, vise en premier lieu à parer au plus pressé. Il faut reloger ! Or, les français, de tout temps, on préféré le logement individuel au logement collectif ; c’est donc à l’encontre des désirs de la population que le gouvernement se lance dans un large projet de construction d’immeubles avec un argument simple et plein de bon sens : la surface disponible en France ne permet pas la création de banlieue à l’américaine. Construire des milliers de pavillons est impossible car on ne pourrait loger assez vite les habitants et le pays serait vite saturé. De plus, les infrastructures routières sont absolument insuffisantes pour permettre à ces banlieues d’être reliées à la ville.
Ce dernier point est intéressant car c’est l’un des plus importants dans le relatif échec des habitations en commun.
En effet, ces villes nouvelles, telle Sarcelles, dans lesquelles on pose ces cubes de béton sont souvent dépourvues d’un système de transport efficace ; les temps de trajet pour aller travailler sont extravagant : parfois 3 heures par jours avec 3 types de transports différents !
Autre aspects négatif, l’absence d’une véritable politique de vie. Les immeubles sont surtout un moyen de pour l’Etat de reloger vite et de faire de ces constructions une sorte de vitrine des derniers progrès technologique en matière d’urbanisme auprès des pays étrangers. Mais dans cette vision, l’aspect humain est mis au second plan même si les intentions de base sont louables. En fait, les bailleurs sont souvent à l’origine de l’absence de centres culturels.
La mixité sociale est inexistante car les habitants ne voient ces logements que comme provisoires, un passage en attendant d’accéder au logement individuel. De plus, les matériaux utilisés dans les constructions renforcent cette idée de passage temporaire.
Pourtant, au départ, les nombreux témoignages contenus dans ce livre le prouvent, l’idée a séduit. Le confort moderne apporté par les HLM était sans commune mesure avec le logement traditionnel que l’on pouvait encore trouver à l’époque en France. Même les cités qui font l’actualité, la Grande Borne à Grigny, les Courtillières à Pantin, les Mureaux…, était à l’origine des petits paradis.
Ce n’est qu’avec le départ des premiers résidents, que la situation a commencé à dégénérer. Le livre mentionne le projet de Valery Giscard d’Estaing : l’arrêt des constructions de masse et la mise en place de moyen pour que chacun puisse accéder à la propriété. Le gouvernement actuel propose de défiscaliser les intérêts liés à l’emprunt pour l’achat d’une maison ou d’un appartement ; la mesure doit encore être votée par l’assemblée mais le 1° août est la date prévue pour sa mise en œuvre. Il y a donc une continuité d’idée mais surtout, on peut voir là le grand échec de la politique sociale de tous les gouvernements de la France depuis 1945.Le rêve du logement individuel n’a pas disparu et plus personne n’a envie de logements de masse. La solution reste encore à un mystère.
Pour une version plus amusante de la chose, je vous conseille de lire le tome 3 des Bidochons, une illustration radicale et décalée de la vie en HLM.

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  Le temps des HLM 1945-1975 [Texte imprimé], la saga urbaine des Trente Glorieuses Thibault Tellier

  de Tellier, Thibault
  Éd. Autrement / Collection Mémoires (Paris. 2002)
  ISBN : 9782746709515 ; 20,90 € ; 17/01/2008 ; 219 p. ; Broché

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