Les pensées d'un ortieculteur de Eric Dejaeger

Les pensées d'un ortieculteur de Eric Dejaeger

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Kinbote, le 25 novembre 2006 (Jumet, Inscrit le 18 mars 2001, 65 ans)
La note : 9 étoiles
Visites : 4 403  (depuis Novembre 2007)

Vues du fiel

Voici quelque cinq cents apophtegmes dont certains, tôt ou tard, trouveront place dans des anthologies consacrées au genre.
Ils sont le fait d’un « anarchiste impur et moi » « cultivant l’oisiveté comme un forcené » et « pressé de perdre son temps » qui « écrit court par altruisme, pour ne pas emmerder les gens » et qui ne refuserait pas d’ « être réincarné dans un orteil aimé ». Il ne craint pas d’écorner les statues des idoles, souvent pour le plaisir d’un bon mot.
C’est d’entrée de jeu la « démocratie » qui en prend pour son grade :
« La démocratie n’est jamais que le partage du pouvoir entre plusieurs dictateurs. »

Sur un sujet proche, on trouve :
« Le néo-libéralisme est le symbole de la solide aridité sociale »

Dans la tradition satirique, les attaques touchent la religion, l’Etat et l’armée, le roi, les milieux financiers et politiques.
Mais aussi les intouchables, les vaches sacrées, ceux dont on pourrait croire qu’ils ne sont plus soumis aux jugements des contemporains en vertu de leur statut d’icône d’une culture prémâchée.

« Pour ma prochaine omelette, je me casserais bien Jean-Paul D’œufs. »

« Tintin n’est jamais que le fils de Herr G. »

« Le premier miracle de Baudouin 1er : en mourant, il a fait une reine-mère. »

« Les politiciens, c’est comme les friteuses : on n’arrive jamais à les garder propres très longtemps. »

« 31/08/97 : je fête mes 39 ans. Mon plus beau cadeau : Lady Dies. Depuis, mes anniversaires ont été bien fades. »

« Pourquoi m’empêcherait-on de déposer un platane sur la tombe d’Aerton Senna ? »


Aux « proverbes nuls », il préfère les dictons détournés.

« On n’est jamais prophète que dans l’Ancien Testament »

« Les voyages déforment la vieillesse »

« Mourir un peu, c’est manquer de volonté »

« Quand la critique est Thésée, l’art ne tient qu’à un fil. »

L’auteur retourne sa plume contre lui-même quand il s’agit de se moquer de ses ridicules, de ce qui pourrait l’entraîner sur la voie du contentement de soi, de la bêtise, pour tout dire.

« Avec moi, la valeur risque d’attendre un fameux nombre d’années… »

« Quand je serai poussière, y aura-t-il encore du vent ? »


Parmi d’autres de ses sujets fétiches, signalons l’enseignement…
« Les banques investiront dans l’enseignement quand il y aura plus de casseurs que d’épargnants. »

… et la poésie :
« J’adore la poésie. L’unique difficulté, c’est d’en trouver »

Il y a les aphorismes qui épinglent l’actualité nationale et internationale, les faits de tendance.

« Peur de la vache folle ? Essayez le bœuf gay »

Les plus aboutis sont, pour moi, ceux où plusieurs de ses cibles favorites sont touchées à la fois, dans un feu d’artifice verbal.

« Les blondes incendiaires ont-elles une influence sur le réchauffement de la planète ? »

« Je suis un escrimeur nautique, c’est-à-dire un spécialiste de coup d’épée dans l’eau. »

Deux sections complètent ce recueil, l’une consacrée à l’alcool et l’autre au sexe.

« Avant de goûter à l’au-delà, profite du vin d’ici. »

« Faites l’amour avec votre temps : électro-niquez ! »

Les dessins sont signés Anne-Françoise Quoitin et représentent sous un trait fin, délicat, l’auteur muni d’une plante en pot ou d’un arrosoir, dans quelques situations tirées des aphorismes et en compagnie de quelques silhouettes remarquables, parmi lesquelles on reconnaît Einstein, Bush, Stallone… Des lèvres serrées sur une clope, à moins que ce ne soit un cigarillo, masquant, pour sûr, un sourire malicieux.
Sur la plupart, on le voit prendre soin de cette plante à la mauvaise réputation, proliférant sur les ruines et les décombres mais aux vertus cachées et revigorantes, qui va rosir bras de jambes de ceux qui se seront aventurés dans ce champ de mots piquants. Pendant un temps, ces téméraires ressentiront les brûlures puis, ce qu’ils retiendront, c’est le contact salutaire avec la réalité de la nature… humaine.

L’ouvrage est dédié à Jacques Sternberg et est édité aux Ateliers du Tayrac (66 rue Julien Lacroix - 75 020 Paris)

Connectez vous pour ajouter ce livre dans une liste ou dans votre biblio.

Les éditions

»Enregistrez-vous pour ajouter une édition

Les livres liés

Pas de série ou de livres liés.   Enregistrez-vous pour créer ou modifier une série

Forums: Les pensées d'un ortieculteur

Il n'y a pas encore de discussion autour de "Les pensées d'un ortieculteur".