Yali 11/04/2005 @ 01:01:58
    Ça déménage

    Je débutais des nouvelles, des romans, que je laissais tomber tour à tour. Le manège durait depuis six mois et par moments, je désespérais que la situation s’éternise. J’avais perdu l’inspiration et la cherchais à tâtons dans les plis du quotidien. Elle était quelque part dans le coin, me disais-je, et je fouillais plis, replis et contre plis, mais que dalle. Il n’en restait plus trace et pas le moindre signe qu’elle ait jamais été là, qu’elle ait jamais existée, jamais.
    J’ai appris depuis qu’elle va faire un tour quand ça lui chante. On n’est pas marié, elle fait ce qu’elle veut, et pourquoi pas… La garce.
    Ma Douce venait de décrocher un poste dans une petite ville de province. Il nous fallait trouver un appartement, déménager, emménager. Je le voulais au centre ville, là où la circulation est interdite. Je le voulais avec fenêtres sur rue pour lever le nez des mots et jeter un œil sur le pavé de temps à autre, histoire de mesurer ma chance, de m’en délecter. Et de la chance, j’en avais, puisque je disposais d’un an, douze mois pendant lesquels je ne serais pas contraint d’accepter n’importe quels petits boulots merdiques pour des salaires tout aussi merdiques. Une année pleine où je n’aurais même pas à faire semblant d’en chercher. Trois cent soixante-cinq jours où l’on me foutrait la paix, pendant lesquels je vivrais en marge, enfin libre. «Allez vous faire foutre tous autant que vous êtes : ANPE, BOITES D’INTERIM, ASSEDIC et tout le MERDIER !» je gueulais.
    Nous avions fait nos calculs, sa paye suffirait à nous faire vivre. Je pouvais désormais écrire et ne faire que ça. Elle m’y encourageait, elle croyait en moi.
    Ç’était ma chance. Elle semblait n’être pas réel. Ça fait toujours cette impression lorsque l’on ne sait pas trop à qui l’on a à faire. La chance et moi n’étions pas franchement deux vieux potes, alors je la regardais de travers, la surveillais, lui collais au cul des fois qu’elle me fasse un coup de pute, ou, qu’in extremis, elle foute le camp. J’en avais vu d’autres, pourquoi pas ça ?
    — Ne t’inquiète pas, tout ira bien.
    Elle disait ça, triant nos affaires, emballant, m’emballant, et je me laissais faire, j’imaginais…
    Voici comment je voyais les choses :
    Tout d’abord et cela va sans dire, l’appartement est superbe, haut de plafond, bien éclairé, et la pièce dans laquelle j’écris est isolée des bruits. Là je rêve, je sais. Laissez tomber pour l’isolation phonique. N’empêche que l’endroit est tranquille puisque haut perché et dans un quartier piéton. Je m’impose des horaires de travail et je m’y tiens. L’inspiration est rentrée d’escapade, nous nous sommes rabibochés tant bien que mal, c’est pas si mal. Je bosse un gros bout de nuit, un petit bout de matin pour, épuisé, abandonner aux lueurs de l’aube. C’est une tranche horaire silencieuse, sereine. Elle débute par le coucher des fêtards et s’achève par le lever des travailleurs et ne se trouble que du crissement de la plume courant sur le papier. Ouais, je suis passé en mode manuel. Pour changer un peu, et puis de cette manière, j’allie l’acte intellectuel à l’effort physique. Je pratique le combiné. Je tiens la forme en plus d’avoir du style. Je suis le plus grand !
    Et c’est exactement ce que je me dis ce matin en m’arrachant de ma chaise. Je me le dis sans vraiment y croire, mais ça, c’est la fatigue. Six plombes que je compose, ça décompose, je dispose.
    Nous sommes vendredi, — ça m’arrange— nous sommes vendredi donc et il est sept heures trente. Les clochers de la ville sont d’accords et balancent leurs assentiments à la volée. Je m’étire en baillant et vais réveiller ma Douce en douceur. Je la tripote un peu, elle aime bien, on est deux, plein de câlins. C’est un chouette réveil, un de ceux qui donnent envie de rester au lit, mais, la vie.
    Pendant qu’elle se douche, je gagne la cuisine et prépare le petit-déjeuner.
    L’odeur des crêpes, celle du café, embaume le petit matin. Et s’ajoute bientôt celle de son parfum mêlé à sa peau, elle m’a rejoint.
    Assis l’un en face de l’autre nous déjeunons en causant un peu, parcimonieusement. Elle se réveille doucement. Nous évoquons le boulot, le sien, le mien, le programme de la journée… Elle sourit, tout va bien, elle est heureuse. Je ne suis pas loin de ça non plus. Le petit-déjeuner au chaud, en paix, on l’a pas volé. On l’a même payé cher. À ce prix-là, on peut sourire.
    Elle se roule une cigarette juste après avoir bu son bol de thé, juste avant de se verser une tasse de café. Elle a ses habitudes, ses petites manies. Je l’aime ainsi. Ainsi soit-il.
    Voilà, à présent elle est tout à fait au monde. Elle fout le feu à sa clope, en aspire une longue bouffée, semble l’apprécier, exhale un nuage de fumée et murmure un « Je t’aime » auquel je réponds en prenant sa main. Le temps toussote, se bloque, repart en vacillant, ivres de passion.
    Elle a peint ses lèvres en framboise, et le mégot qu’elle écrase, et le bord de sa tasse, et ma bouche qu’elle embrasse, et, il est l’heure d’aller au boulot.
    Dehors, il fait un froid de canard. C’est sûr, c’est l’hiver, de ce genre d’hiver qui se prend au sérieux. On se les gèle, des mois que ça dure. Je l’enlace, j’aime cette fille depuis tout le temps. Tout le temps, c’est pas rien. Elle me repousse doucement, enfonce son bonnet de laine jusqu’aux oreilles, ça lui donne l’air d’une collégienne. Écharpe, gants, manteau serré, dernier baiser, elle est parti par l’escalier. Dans deux minutes, le cul dans sa voiture, elle remettra du rouge sur ses lèvres, le précédent, elle me l’a collée sur la peau comme un cadeau.
    Bon, je vais attraper la crève si je reste sur le palier. Il fait gris, presque nuit, il est dans les huit heures trente et j’ai sûrement un million de choses à faire. Je vais y réfléchir sous la douche. Au passage, j’enclenche le bouton radio. « Il est huit heures trente-quatre ! », précise-t-elle.
    Prise sur le monde.
    Immonde.
    Je ne m’y fais pas. Devoir admettre jour après jour que chaque jour est pire que le précédent, c’est un truc qui me débecte. Pas vous ?
    J’hésite à vous raconter l’actu vu que quand vous lirez ceci, elle ne sera plus. …D’un autre côté, si par un hasard des plus circonstanciels vous avez en mémoires les événements d’alors, c’est-à-dire ceux d’aujourd’hui, peut-être que ça préciserait le tableau, le déflouterait un brin, situerait l’époque. J’hésite…
    Pas longtemps, parce qu’écouter les infos sous la douche n’est pas pratique, tout sauf commode. J’ai de l’eau dans les oreilles, la tuyauterie s’époumone en borborygme, j’entrave que dalle. Toutefois, je peux sans comprendre et sans risque de me tromper de beaucoup, dresser un petit topo de la situation planétaire : c’est la merde! De la vrai merde humaine et qui sent salement mauvais. Le monde est à feu et à sang, les pauvres sont de plus en plus pauvres, les riches de plus en plus riches, tout augmente, les salaires y compris, pas dans les mêmes proportions, vous l’aurez compris.
    Ce pourrait être n’importe quand, n’importe ou, débouillez-vous.
    On avait inventé l’eau chaude, si ça peut vous aider.
    Je referme la porte d’entrée sur le gong radiophonique de neuf heures. L’horreur sort victorieuse du combat nocturne et gagne sur la vie par K.O. Elle en a l’habitude, elle est invaincue et remet son titre en jeu dans un spectacle grandiose, pas plus tard que tout de suite. L’horreur n’a peur de rien, même pas du petit matin.
    Putain, c’est vrai qu’il fait froid.
    Malgré ça, j’aime cette ville. Je m’y sens bien.
    Aux détours d’une rue, il n’est pas rare de croiser un bonhomme en salopette bleue labeur et face rougeaude, le mégot débordant des dessous d’un pif explosé, une casquette élimée vissée sur le crâne. Aussi bien, ce peut-être une madame roulée comme un tonneau, emballée dans un tablier à fleurs avec fichu sur la tête, ou chapeau rétro, ou coupe de cheveux d’outre temps.
    Ce matin, il y en à plein, c’est jour de marché. L’esplanade déborde d’étals sous bâches, de monde, de mots, de courant d’air. On se les gèle vraiment. L’ambiance est bonhomme, et même si ça gueule par-ci par-là, faut pas s’y fier, ça fait partie du jeu. De l’autre côté de la place est un café. Vous ne pouvez pas vous tromper, c’est le plus décrépi, le plus ancien aussi. Sa façade s’étiole, elle est à l’image de la clientèle, un peu branlante, très fatiguée. C’est un bistrot, un vrai, l’un de ceux qui alignent encore dés six heures du matin, les blancs cassés, cassis, citron, les communards. Le café/croissant oubliez-le, ici on vit de la vigne. Ici on vide la vigne aux premières lueurs de l’aube. Pas de tasses donc, mais des verres à pied et ballon dressés comme autant de rampes de missiles à dynamiter les tronches. Derrière, se tiennent de vieux messieurs en salopettes – ceux de tout à l’heure – parlant au passé, toujours au passé. La porte d’entrée grince, cinquante piges qu’elle grince. Elle grinçait, grince, grincera encore longtemps. Les habitués promettent de s’en occuper, demain, la semaine prochaine, ont promis, promettrons. C’est pas qu’ils trichent, mais en ces lieux le temps c’est arrêté. Saisis en pleine course, il s’est suspendu voilà un demi-siècle façon Lamartine. Pourtant, l’horloge tourne, indique neuf heure et quart. C’est une horloge émaillée vantant les qualités d’une boisson alcoolisée depuis longtemps disparue. Oubliée la bibine Dubonnet, son quinquina, et les neuf heure et quart de ses années là.
    C’est un bistrot qui pique les yeux quand on le pénètre, ou l’on pousse les ivrognes pour accéder au comptoir, chouette.
    C’est aussi le plus beau zinc de France. Parfaitement. Vous disant ça, je me dégoûte même pas. Il court sur six mètres au moins, décrit un arc de cercle avançant dans la salle. Il est en noyer, massif s’il vous plait, marqueté de bois de roses, de violettes, de santal. Les volutes s’entrelacent en arabesques, cerclent des miroirs aux couleurs défraîchies ; bleu de Prusse, vieux rose, vert bouteille. Le style est mitigé, art déco, nouille, rococo, tout ce que vous voulez. Un long tube chromé ceinture l’ouvrage pour y poser sa godasse. Ça vaut le coup d’œil pour peu que les jambes des consommateurs dégagent la vue. Dessus, repose un plateau de zinc. Du zinc, pas l’un de ses matériaux aseptisé à la con, du zinc, du vrai. Celui-ci noircit quand on le frotte et si tu fais ton boulot à fond, que tu finis le ponçage au papier journal, il brille comme un miroir. Avec, posés dessus quelques verres, quelques coudes, c’est du plus bel effet. Avec quelques blancs dans le corps, c’est tripant.
    Disons que la patronne s’appelle Mathilde, qu’elle est moitié moins âgée que son bistrot, c’est pas trop vu la clientèle. Elle les portes bien ses trente piges, un peu ronde, jolie, bourrée d’énergie. C’est une fille qui rit, qui vit, comme si rien n’était grave. Faut pas la faire chier non plus, elle possède le plus joli répertoire de jurons de la régions, des autres aussi, sûrement. Et si ça suffit pas, elle sort un rouleau à pâtisserie des dessous du comptoir.
    Faut voir quand l’un d’eux se retrouve avec ce machin qui navigue au-dessus de sa tronche. Ça paye, pire que s’il avait un flingue rivé sous le pif. Il écarquille les yeux, d’abord incrédule, puis, réalisant la distance qui sépare la plaisanterie d’un rouleau à pâtisserie, il les baisse, honteux, penaud. Ça lui rappelle vaguement quelque chose la forme de cette menace au-dessus de sa tête, un truc qui remonterait à loin, mais quoi ? Ça lui chiffonne les neurones, alors il sort pour y réfléchir un peu, aérer tout ça, accepter.
    Quand il revient, - car il revient toujours - on voit bien qu’il n’y croit pas encore. Il interroge la salle du regard. Putain, il n’est pourtant pas homme à fuir devant un engin de cuisine. Hein les gars… ?! Mais nul ne répond, alors il baisse la tête, vaincu, et rentre dans la mêlée. Là, il se fait un peu prier pour boire un verre parce que tout de même, il a sa fierté. Il maugrée quelques phrases désobligeantes, pas trop fort, vide son verre, puis un autre, et un autre, et finalement, il promet de graisser la porte parce que vraiment : « Ça peut plus durer ! C’est insupportable ce grincement. Demain, ou la semaine prochaine… Faut voir. »
J’allume une cigarette en m’interrogeant sur le repas de midi. Je ne sais trop de quoi j’ai envie et j’ai oublié de lui demander ce qui lui ferait plaisir, comme souvent. Je me promets de guérir de ma distraction, mais pour l’instant, il me faut faire face à mes responsabilités d’écrivain au foyer.
    Je me défile pas, moi.
    D’un doigt tendu, je commande un blanc Le blanc aide à la réflexion. Le premier, les suivants, forcément, ça se gâte. La bouteille décrit deux sauts périlleux avant que de basculer une ration dans mon verre, la cascade est vertigineuse, étire un bon mètre de jurançon sec. Mathilde a débuté en station dans des bars à cocktail branchés, ou des bars branchés à cocktails, je ne sais plus. Elle pratique ce genre de pitrerie dés qu’elle en a l’occasion, c’est-à-dire rarement, parce que les vieux ça les dérange qu’on fasse joujou avec leur pinard quatre étoiles.
    — T’as quoi au menu ? Je lui fais.
    — Tu me poses la question tous les jours, ou presque, et tu ne manges jamais ici… Dis, vous êtes tous comme ça dans votre corporation d’écrivailleurs ?
    — Non, la réalité est pire. Je suis le plus sain, le meilleur quoi ! Alors ?
    — Paupiettes de veau Richelieu. Je te réserve une table ?!
    — Un autre jour peut-être…
    Je vide mon verre en me demandant ce que le cardinal avait à voir avec des paupiettes de veau ? C’est une manie d’homme et de femmes de pouvoir que de fréquenter les dictionnaires culinaires. C’était peut-être au fond, le but réel de leur vie. Ça se réfléchit comme idée. Si ça se trouve, Isabelle de France rêvait qu’une poularde porte son nom, Mazarin œuvra pour lier son patronyme à des artichauts. Et Richelieu, complota, louvoya, manœuvra sa vie durant pour accoler son nom à des paupiettes de veau. Sans parler de Colbert…
    Cette perspective historico culinaire me fascine, m’ahurie. Je souris béatement, ça l’intrigue.
    — Je t’offre un verre si tu me dis EXACTEMENT à quoi tu penses.
    Je le lui dis, EXACTEMENT.
    Elle se bidonne, puis elle me sert en haussant les épaules.
    — Si t’es le plus sain de ta corporation, je préfère pas imaginer les autres.
    — Moi non plus, je lui fais. Moi non plus…
v Je me perds un peu dans la déco en sirotant mon blanc, juste pour le plaisir. La plupart des objets et des meubles appartenants à ce lieu sont chargés d’histoire. Si vous fermez les yeux un moment et fouillez l’air de vos narines, des fragrances inconnues vous assaillent, c’est le parfum des jours anciens. Il m’arrive en les rouvrant brusquement, de voir un môme en culottes courte et socquettes blanches, traverser le carrelage de damier jaune et blanc. Il pousse devant lui un cerceau de fer blanc en fredonnant un air de bal musette. Je répertorie ce souvenir dans les années cinquante, ce qui est, entre nous soit dit, complètement con, vu que je n’étais pas né.
    Passons.
    Dans ce genre de bistrot on claque la langue, on choque son verre sur le zinc et on s’essuie d’un revers de manche viril pour signaler que l’on s’en va. Je fais tout ça et je m’en vais dans un grincement.
    En traversant la place, je pense : Paupiettes de veau Richelieu. Ça m’a l’air pas mal comme idée les paupiettes de veau Richelieu… Je croise et j’accroche la file d’attente d’un boucher ambulant. Il me faut des paupiettes !
    Dans les files d’attente, je pense simple. La crainte d’être dérangé m’interdit les réflexions profondes et de natures philosophiques et donc : paupiettes de veau, retirer du blé, carottes, poster le courrier, pommes de terre, prendre le journal, les clopes, le pain, tomates. Putain, mais j’ai une vie palpitante moi. Je n’ai pas le temps d’y penser plus avant, le boucher ne rigole pas et débite les clients comme les côtelettes. « Deux paupiettes de veaux s’il vous plait. Non ! Plutôt celles-ci. Voilà. Oui ce sera tout. Merci et bonne journée.»
    Ah oui, ne pas oublier les croquettes du chat ! Quand je vous disais que j’avais une vie palpitante… D’ailleurs ça se confirme, car survient la première épreuve de la journée : dégotter les tomates du Cardinal.
    Richelieu savait se débrouiller. Il avait de bonnes adresses, ou un filon, ou des serres au Louvre, peut-être tout ça à la fois. En tout cas, sûr qu’il n’était pas du coin et qu’il manquait pas de pognon. En hiver, les tomates vous explosent le porte-monnaie en un rien de poids.
    Tant pis, c’est fait.
    D’une file d’attente à la suivante, j’en arrive à boucler ma liste. Ouais, je suis un prodige du shoping rural. J’ai acheté un bouquet de fleurs pour ma Douce et… J’ai oublié la bouffe du chat, je m’en rends compte en ouvrant ma porte. Tant pis, le chat mangera comme nous, ça le changera pas beaucoup. Je vous parie un bifton qu’il dort sur le clavier de la bécane. C’est un chat lettré qui aime les claviers, les feuilles couvertes d’une écriture illisible, les bouquins. Il est taquin et s’allonge volontiers sur tout ce dont vous avez besoin. Il le fait exprès, vous voyez le genre… genre un chat comme un autre, enfin, une chatte comme une autre. Elle s’appelle Kity. Nous l’appelons Kity, parce qu’évidemment elle, elle feint de l’ignorer et ne répond pas, elle s’en fout comme de sa première portée. Manger, dormir, baiser, câliner, jouer avec ses petits, passer la nuit dehors, manger, discuter, dormir, foutre ses petits dehors, baiser…
    Kity à la belle vie.
    Quelquefois je l’envie.
    La radio est restée allumée. Je me reprends une rincée d’infos tandis que je mets les fleurs dans un vase. C’est un peu comme si je fleurissais la mémoire de tous les types disparus ce matin. La radio dit qu’ils étaient un paquet, un sacré paquet même, et aussi que ça ne c’est pas passé dans les meilleures conditions. Si on peut appeler ça des conditions…
   À l’heure qu’il est, quelque part en haut, — j’imagine en haut — les victimes s’interrogent, se posent des flopées de questions pour tenter de comprendre où ça a merdé. Elles démêlent le fouillis des destinées interrompues, recoupent les événements, statistisent, analysent, comparent, dressent le bilan histoire de découvrir si tout compte fait, il n’y aurait pas une bonne raison de vivre au beau milieu de tout ce merdier, ou en tout cas ; d’y avoir vécu ? Vous savez quoi ?! Elles ne trouvent pas. Des raisons, des bonnes, à proprement parler, il n’y en a pas. C’est à peine et vaguement si l’on distingue une cause, et encore pas toujours.
    Dans cette réunion d’âmes en transit, un type assis à l’écart se prend la tête entre les mains. Du moins se l’imagine-t-il, parce que des mains, évidemment, il n’en a plus. Ce qu’il se demande, c’est pourquoi ce matin le train lui roulait dessus ? Ç’aurait été UN train, bon, mais c’était pas Un train, pas n’importe quel train. C’était LE train, LE train qu’il prenait tous les matins. LE même train, LA même ligne à la même heure, cinq jours par semaine, quarante-sept semaines par an, dix piges que ça durait. Merde, plus de cinq milles trajets passés l’un dans l’autre c’est normalement pas le genre de train à débouler à l’improviste, à vous surprendre… Ben si ! Et pourquoi ce matin précisément ? Pourquoi pas hier matin, juste avant qu’il ne rencontre cette fille par exemple.? Il ne peut soupirer, il ne soupire donc pas, mais le cœur qu’il n’a plus, y est. Vraiment, ça le turlupine cette histoire d’horaires. Enfin merde, s’il était mort hier, il n’aurait rien à regretter. Hier matin, il songeait même à en finir, c’est dire… Putain, comme c’est pas de chance. À bien y réfléchir, c’est pas de chance tout du long, et pas très long : vingt-huit ans. Putain !
    La mort est déconcertante.
    Il est mort.
    Il est déconcerté.
    Mais je m’égare.
    — Kity, BOUGE TOI DE LÀ, BORDEL !
    Croyez bien que je suis conscient des difficultés qu’implique la compagnie d’une chatte dans une cuisine sitôt que l’on y officie. Mais c’est un peu comme l’inextinguible succession des malheurs du monde, je ne m’y fais pas, pire, je me plais à croire que ça pourrait s’arranger en faisant un peu gaffe. Je vous ferais remarquer que si la théorie est simpliste, rien pour autant ne vient formellement la contredire, et donc, pourquoi pas ?! Je suis consensuel, diplomate, j’abreuve l’un et l’autre. Je satisfais les deux parties et naturellement une certaine complicité se pointe et s’installe l’air de rien. Et si par hasard les buveurs sont de bonne humeur, la discussion peut débuter.
    Ouais, ben vous imaginez pas des choses, Kity parle, comme tous les chats et toutes les chattes, c’est-à-dire pas avec n’importe qui et seulement quand ça lui plait, voilà tout.
    Généralement, c’est elle qui engage la conversation. Elle se pose au milieu de la table, des ustensiles, des légumes à la découpe, se drape dans sa queue, très digne, façon statuaire égyptienne. Elle a dû tomber sur une illustration, une photo, parce qu’elle n’y est jamais allé en Egypte. J’en suis certain, je l’ai vu naître. Bref, elle se pose et pose, et lâche un truc du genre
    — Quel foutu monde dans lequel tu vis… J’aimerais pas être à ta place.
    — Dans lequel NOUS vivons !
    Elle est un peu hautaine, regarde ailleurs et se passe nonchalante une patte derrière l’oreille.
    — Ne me menace pas, je lui fais, et puis de toute manière, il pleut déjà.
    — T’es con !
    — Ouais. Pousse-toi et arrête de loucher sur les paupiettes.
    — N’empêche que nous ne sommes pas du même monde. Tu sais la différence. T’es jaloux, pas content. Tu m’en veux. C’est pas joli joli. Allez … juste un petit bout pour goûter ?!
    — Non ! Bien sûr que nous ne sommes pas du même monde, t’es une chatte perdue dans les étages inférieurs de l’évolution. La preuve c’est que tu ne parle pas… enfin, je veux dire… et puis merde bouge-toi, tu fous des poils plein les oignons.
    — Je ne comprendrais jamais les humains, dit-elle en se poussant d’un bon millimètre.
    — Moi non plus, mais j’emmerde personne avec ça.
    — Et pour les paupiettes ?
    — C’est non !
    Elle semble réfléchir quelques instants. « Semble » parce qu’avec les chats rien n’est jamais évident. Elle pourrait ne penser à rien que ça m’étonnerait pas plus que ça.
    — Qu’est-ce que c’est que cette histoire d’évolution ? Elle me fait.
    — L’humain est la perfection du genre animal.
    — Me fais pas marrer.
    — Ben justement !
    Je vide mon verre d’un trait, envois les oignons et les lardons se faire cuire ailleurs. Je rassemble mes arguments, les ordonne. Si je me démerde bien, je la mouche. Avoir le dernier mot avec un chat, je vous jure que ça n’arrive pas tous les jours. Ça ce mérite, et quant ça arrive, ça fait vraiment plaisir.
    — Ben justement Te marrer, tu peux pas ! Je lui dis.
    — Qu’est ce que t’en sais ? Là si ça se trouve, je suis pliée. Tu ne vois rien parce que t’as la vue basse. Comme tous les humains, c’est connu.
    — Ouais, ben t’as pas de mains
    — Pour quoi faire ? Travailler ?
    Elle est ironique, quelquefois cynique, bien entendu, tous les félins sont ainsi.
    — Les chats ne tombent pas amoureux !
    — Enorme avantage ! Caractéristique indiscutable d’une évolution avancée. C’est un progrès, la souffrance abandonnée, non ?
    Bordel, elle en profite pour s’approcher des paupiettes. J’ai peut-être la vue basse, mais je ne suis pas aveugle. Je les range dans un plat, bascule la poilée d’oignons et lardons dessus, aligne les tomates, sou poudre d’épices, thym, laurier, mouille d’une rasade de blanc et enfile le tout au four. Et maintenant, à nous deux ma belle. Voyons ce que tu vas répondre à ÇA :
    — Vous n’avez pas inventé Dieu !
    — C’est quoi ce truc ?
    — Ha ! Je lui fais, pas peu fier.
Et je profite de sa stupéfaction, — me semble t-il — pour me resservir un blanc frais. La cuisine est minuscule, le four à fond, on crève ici. Je la tiens, bien joué. Santé.
    — C’est compliqué, lui dis-je entre deux goulées.
    — Ça m’aurait étonné…
    — C’est compliqué disais-je, mais cela démontre sans équivoque la supériorité de l’espèce humaine sur le genre animal. Nous croyons ! Enfin, certains croient, quelques fois trop, beaucoup trop, et font le contraire de ce qu’ils prêchent, mais ils ont la foi et, heu…. » Hé j’aimerais bien vous y voir ! Vous expliqueriez ça comment à votre chat ? Je poursuis : « Nous ne croyons pas seulement en Dieu mais en toutes sortes de choses dont il est le gardien. Tu comprends ? »
    — Dieu, c’est le patron du concept ?
    — Si tu veux.
    — Il inclut quoi ce concept ?
    — Je te l’ai dit, un tas de choses, enfer, paradis…
    — Haaaaaaaa, elle me fait, ce genre de conneries. Tu m’a fait peur, j’ai cru VRAIMENT que vous aviez inventé quelque chose. Nous avons un paradis également. C’est un peu comme ici, sauf que les rôles sont inversés.
    — Inversés ?
    — Ouais, les humains sont les animaux domestiques.
        — Tu déconnes ?!
    — Et de temps en temps, il nous est permis d’en manger un ou deux.
    Elle se fout de ma gueule, c’est sûr, mais rien ne l’indique ni ne la dénonce. Elle ne cille pas d’un poil, immobile, impassible, les moustaches figées. La garce. Je ne trouve rien à dire alors je hausse les épaules comme si je m’en fichais.
    En réalité je m’en fiche pas du tout ! La vie est bien assez compliquée comme ça sans avoir à imaginer des humains tenus en laisse. Sans sous-vêtement de cuir, fermetures éclairs clinquantes et baballe dans la bouche, je veux dire.
    — Ton patron, reprend-elle, « Dieu », il m’a tout l’air d’être le gérant d’un truc vieux comme le monde : l’espoir. Y a pas de quoi pavoiser, tout le monde espère, rêve, même les oiseaux rêvent. C’est pour dire…
    — Ha ouais, Madame-je-sais-tout, et à quoi ils rêvent les oiseaux ?
    — Ils rêvent que les chats n’existent pas.
    Onze heures trente, je commence à avoir sommeil, foutu métier. En plus de penser aux rêves nihilistes des oiseaux, je dois penser au repas. Dans une heure ma Douce sera là. Je souris, elle me fait sourire, toujours. Il me reste à mettre l’eau sur le feu pour les tagliatelles. J’ai le temps… et puis qu’est-ce que c’est que ces rêves à la con ? Les oiseaux ?! Et puis quoi encore ?!
    — Et les poissons ? Je lui fais.
    — J’en sais rien moi, on a jamais habité en bord de mer, t’es bien placé pour le savoir. Et puis les rêves des boîtes de conserves sont difficiles à saisir, un peu comme ceux des surgelés…
    — Attends, tu ne t’imagines pas que je vais croire une seconde à tes histoires de paradis félin, de rêves à oiseaux et à boîtes de conserve ?!
    — Ben, ç’est pas plus con que ce que t’écris. Alors je me disais…
    Je fais le type imperturbable, pas affecté du tout. J’y arrive moins bien qu’elle, forcément, j’ai pas ça dans le sang.
    — Dis donc, tu le savais toi, que les paupiettes de veau se remplaçaient avantageusement par des paupiettes de chat, dans le Richelieu ? Je lui fais.
    — T’es susceptible aujourd’hui.
    — Je suis susceptible tous les jours que Dieu fait. Enfin, que l’espoir me le permet. Et merde, dégage, je dois nettoyer la table.
    — Miaou.
    — J’aime pas quand tu fais semblant de ne pas comprendre, VIRE !
    Elle se tire sans se presser, le trou de balle bien en vue, dédaigneuse, râleuse :
    — La fine fleur de l’évolution tu parles un peu…
    Quant je vous disais que j’ai une vie palpitante… J’héberge une chatte critique littéraire, vous y croyez vous ?! En plus, je sais même pas si elle sait lire.
    Bordel, elle m’a foutu de mauvaise humeur. Je m’assieds pour me calmer, en griller une et jette un coup d’œil alentour. Je n’ai rien oublié, le repas sera prêt à l’heure. Ça me tranquillise un peu de constater que la routine ne fout pas le camp, elle aussi. Rassuré, je mets le feu à la dernière cigarette du paquet. J’ai une pensée émue pour ce que m’a coûté cette merde, et une pour ce que rapporte cette merde à cette bonne société qui ne désire qu’une chose : me conserver le plus longtemps possible en bonne santé, afin que, si par chance, je ne meurs pas tout de suite d’un cancer, je rembourse celui de mon voisin. C’est beau l’équité sociale.
    Imaginer ça me colle une baisse de tonus. Je me lève et vais grignoter deux trois trucs dans le frigo. La tête au frais, je repense au roman qui m’attend à côté. En réalité, ce n’est pas un roman, c’est un recueil de nouvelles. Celle-ci en fait partie, elle me pose souci. L’histoire du chat surtout, et puis, je ne suis pas très sûr de mon style.
    Est-on jamais sûr de son style ?
    Je me demande ça en avalant une olive.
    Est-on seulement jamais sûr d’en avoir un ?
    Et pendant que j’y suis, je me demande s’il est indispensable d’en avoir un, et j’engloutie une autre olive.
    Vous n’imaginez pas à quel point la condition d’écrivain est contraignante. Douter avant, pendant et après, et malgré ça, poursuivre, c’est éreintant. Il faut être endurant, ou inconscient, ou les deux. Normal ? Non, sûrement pas !
    Je remplie une casserole au robinet. Elle se retrouve peu après sur la cuisinière, chapeautée, débordante, et le feu au cul. Pendant qu’elle se fait lécher par les flammes, je nettoie la table à grands coups d’éponge et c’est pire parce que j’ai oublié de rincer ladite éponge, qu’elle rejette de la mousse comme un canon à neige et redépose sa précédente récolte. Je m’en tire en pourrissant deux torchons qui brièvement passent du propre au sale. Il faut que je fasse une machine de blanc, me dis-je, en mettant la table. Ceci fait, je passe au salon et monte le son de la radio. Il est midi, j’écoute les titres de la mi-journée. L’impuissance me suffit comme handicape, je ne veux pas y adjoindre la surdité, la cécité, l’ignorance.
    Je ferais mieux pourtant
    Jingle.
    L’horreur poursuit sa carrière internationale remportant combat sur combat, tandis que le cynisme domine la compétition nationale, et, ces deux-là remettent leurs titres en jeu dans un show grandiose et continu pas plus tard que : tout de suite.
    Jingle.
    J’éteins la radio, la lumière du salon, et repasse en cuisine pour éteindre le four. Je songe un bref instant à la loi des séries, rien d’important et j’éteins le four. J’entends la porte d’entrée claquer, le bruit des souliers déposés, du manteau accroché, du bonnet roulé dans la poche, de l’écharpe qu’elle décroche de son cou.
    — Ça sent bon, lance t’elle hors champs.
    Je ne réponds pas, le plat me crame les mains au sortir du four, j’ai autre chose à penser, crier par exemple.
    Lorsqu’elle se pointe, je suis en train de me ventiler les doigts en les agitant avec frénésie. Je me retiens de hurler et danse d’un pied sur l’autre.
    — Ça va ? Dit-elle.
    — Je suis éreinté, j’ai le bout des doigts ravagés des suites d’un incendie, j’ai explosé le budget-repas à cause d’une rencontre avec l’histoire de France, j’ai perdu une joute rhétorique avec le chat, je doute de mon style, et l’horreur, le cynisme, poursuivent implacablement leur chemin vers l’ultime marche du podium. Sinon ça va. Et toi ?
    Elle me regarde et c’est, comment vous dire… chaud. Puis elle s’approche, m’enlace, me serre contre elle et glissent ses mains sous mon tee-shirt.
    — On mange et au lit, propose-t-elle, j’ai mon après-midi de libre.
    — Tu veux me crever à mort ?!
    — T’inquiète, je m’occupe de tout. Tu te laisse faire une fois ou deux, ensuite je te masse et tu peux faire de beaux rêves.
    — Je ne rêve jamais ! …Hé, on pourrait sauter le repas ?
    — Là tu rêve. Et plus, il faut que je prenne des forces pour deux.
    Elle s’assied, et dans un sourire prometteur, m’invite à l’imiter.
    Ce que je fais.
    Vivement le café.
    Putain, c’est vrai que j’ai une vie palpitante moi.
    Enfin, que j’aurai… Quand nous aurons déménagé.
   
    Elle avait fini de scotcher un carton et coupait le ruban adhésif avec ses dents. Moi, je la dévorais des yeux, fouillais son décolleté si ouvertement proposé, ne pensais plus qu’à ça lorsque nos regards se sont croisés. Dans le sien, naquît une étincelle comme une évidence s’impose. Alors, elle s’est redressée en se tenant les reins, en bombant la poitrine, puis, elle m’a balancé un sourire et deux trois mots :
    — Maintenant, au milieu des cartons ?!
    — Pourquoi pas ?
    — J’adorerais ça !

Yali 11/04/2005 @ 01:11:28
Texte ressorti du catalogue, histoire de se présenter aux d’jeuns. Allons les vieux !

Felixlechat

avatar 11/04/2005 @ 01:23:56
Bonsoir Yali,

Ta vie, je la trouve agréable. Il y a certes quelques soucis, mais sans eux, qu'en resterait-il ? J'ai l'intuition aussi qu'une grande partie de ton écrit existe réellement.
Bonne nuit. FLC.

Mentor 11/04/2005 @ 09:17:24
Il y aurait tant de choses à dire sur ce texte! J'aimerais être critique professionnel pour parvenir à exprimer tout ce qu'il m'inspire. Car il est très "riche": en descriptions, en ressentis, en qualité d'écriture, en rythme. Déjà le narrateur est vite attachant. On sent une sorte d'auto dérision dans l'explication de la vie qu'il a décidé de mener. L'humour est toujours présent, de bon aloi. Pas une seconde d'ennui à la lecture. Les disgressions ne perturbent pas la fluidité de la lecture parce que courtes. C'est très bien écrit et le style Yali est bien là. Je ne sais pas de quand date cette écriture (reprise?) Toujours est-il qu'il y a eu une évolution depuis si j'en crois les derniers que j'ai lu. Evolution, mais je ne saurai pas dire si c'était mieux "avant"! J'aime ce texte et ceux d'aujourd'hui aussi. Il sont toujours parsemés de réflexions intelligentes jetées comme ça, l'air de rien, mais elles font mouche. Le dialogue avec Kity est savoureux.
Je trouve qu'il y a là à l'évidence la possibilité d'un roman complet, ceci en étant le départ. Tu aimes écrire Yali, tu veux écrire, tu réussis bien à écrire. Persiste, insiste, c'est ton truc.
Je meurs d'impatience de découvrir tous tes textes, tous vos textes, mais le temps manque. J'y arriverai.
Celui-ci est tout bon Yali, tu as bien fait de le sortir des "oubliettes".

Tistou 11/04/2005 @ 10:08:31
Relu, avec bonheur. Tranche de vie yalienne découpée au fil du coeur. J'aime bien les vies sans esbrouffes, les vraies vies des vrais gens quoi. L'écriture a changé, dit Mentor ? Moi je dirais non. Plutôt une réorientation sur des textes plus courts, sur de la poésie avec des mots qui doivent percuter sur une toute petite distance. C'est plutôt cela qui a changé. Mais pour l'essentiel ça reste de l'écriture qui vient d'abord du coeur. Et donc, mais je l'avais déja dit, je suis fan et plutôt inconditionnel.
La partie bar m'a rappelé un texte qui m'était venu comme une envie de p..., dans un bar aussi et que je ressors, pareil que Yali ; Champagne que ça s'appelle.

Et maintenant, voyons voyons ce que j'avais pu mettre comme critique le 26 juin 2004 ?

"En préalable, plutôt que des tagliatelles, du riz c'est mieux avec les paupiettes. Enfin, à mon avis.
Comment tu fais Yali? Tu fais que ça ou quoi? Comment obtiens tu cette prolixité?
Je m'étais promis de te faire un hit parade de tes écrits sur C.L. mais plus j'attends et moins j'y crois, ça devient titanesque. SISYPHE n'est pas loin! Allez je le ferai promis. (Mais je ne sais pas si je tiens mes promesses)
Beaucoup m'ont touché. Toujours le même problème, je m'attache plus à ce qui me fait entrer en résonance qu'à l'exercice pur et dur.
Et celui ci c'est le cas. Une question : il y a beaucoup de la vraie vie du vrai Yali là dedans ou tu as réussi à dépasser cela?
Donc celui ci c'est le cas, la relation amoureuse et sa fragilité, la chatte et le café me parlent plus que CAC 40 ou conneries sarkoziennes.
Dommage, les tagliatelles!

Pour mon avis sur les tagliatelles plutôt que le riz, je persiste.
Pour le fait que je sois plus touché par mes fibres qu'on arrive à faire vibrer plutôt que par la technique, évidemment je persiste.
Donc, je signe !

Mentor 11/04/2005 @ 10:56:08
Tu as raison Tistou. Quand je dis évolution, c'est sans doute dû aux textes courts. Mais la "patte" est bien là. Il ne faudrait d'ailleurs pas que ces petits textes freinent Yali qui a (sans doute?) le souffle pour tenir sur la longueur d'un roman. En tout cas on ne peut que l'y encourager.

Zou 11/04/2005 @ 11:50:11
Je m'en étais déjà remonté un pour moi toute seule (La Ballade de Pablo) que j'avais adoré. J'ai aimé ces rencontres imaginées et puis l'état d'esprit de Pablo tout du long. Pas très en forme, le Pablo mais j'aime ces ambiances un peu glauques, perturbées, lorsque la réalité n'est plus qu'un vague souvenir auquel rattacher ses délires. Bref, je l'ai lu il y a plusieurs jours et c'est le sentiment que j'en conserve.
Venons-en à celui-ci que je déguste en public. Tout d'abord, extraordinaire la description des habitudes de chat. C'est tellement ça ! Dormir sur le clavier et daigner négocier à grand renfort de frotti-frotta et de balayage de queue un recul de quelques millimètres...Le mien tout craché.
Et le dialogue avec la chatte. Un délice. Je vous voyais et vous entendais tous les deux dans la cuisine.
Et puis cette Mathilde, à croire que je la connais. A moins que ce ne soit sa soeur.
Ce texte a cela de "touchant" qu'il est fait de quotidien universel, de notre quotidien. Si ce n'est le chat c'est la Douce, le boucher ou la Mathilde. On les a tous rencontrés un jour. A lire comment tu bichonnes les états d'âmes, les petits bonheurs, les agacements, les questionnements et les coups de gueule, on te pretterait volontiers les nôtres qui sont jumeaux pour que tu t'en fasses l'interprète.
Et une mention spéciale aussi pour Kitty sauf que son paradis des chats, ben il me plait pas trop. Suppose qu'elle avait lampé un peu de blanc !

Yali 11/04/2005 @ 13:34:15
[quotes]Je trouve qu'il y a là à l'évidence la possibilité d'un roman complet, ceci en étant le départ. Tu aimes écrire Yali, tu veux écrire, tu réussis bien à écrire. Persiste, insiste, c'est ton truc. [/quotes]

Mentor, si tu repasses par là :
http://critiqueslibres.com/i.php/forum/…

Loupbleu 12/04/2005 @ 17:03:12
Je ne suis pas tellement client d'atmosphère intimiste ni de récit de forme autobiographique, pourtant j'ai beaucoup aimé. Ca se lit très facilement, avec toujours l'appétit de connaître la suite, ce qui n'est pas si facile pour un texte sur le quotidien.

Il y a vraiment une grande qualité d'écriture, légèrement ironique juste ce qu'il faut. Les détails sonnent juste. Parfois on frôle un cliché, mais on l'évite toujours.

Les deux grands moments pour moi restent la conversation eschatologique avec le chat et les digressions sur les paupiettes Richelieu (qui sont savoureuses). Si je peux émettre un avis différent de Tistou, j'aurais fait avec les carrotes et les pomme de terre qui étaient dans la liste de course, légèrement caramélisées les carrotes, mais chacun son goût.

Kilis 13/04/2005 @ 21:52:37
Relu et... oui, toujours autant séduite... et, ça, quand la chatte sort ça:
— Dieu, c’est le patron du concept ?

C'est.... !!!

Felixlechat

avatar 14/04/2005 @ 00:14:09
Bsr Yali, ne te fais pas de soucis, l'inspiration revient toujours. FLC.

Killgrieg 17/04/2005 @ 10:16:07
pas de souci pour yali, même le manque d'inspiration l'inspire.

J'avais déjà lu ce texte et me souviens avoir pensé que la première partie était si dense qu'elle aurait mérité plus de développement, devenir un roman à part entière… Depuis, j’ai lu Babylone.

Et ce chat, quel bonheur ! à cause de lui, j’ai fait la gueule au mien parce qu’il refusait de me parler.

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