Tistou 13/11/2004 @ 10:38:22
Quelques clés pour comprendre le contexte et certains passages qui suivent :
- La SaintéLyon est une course qui se court en décembre (le 05 décembre cette année), entre ST ETIENNE et LYON, comme son nom l'indique. Elle traverse les Monts du Lyonnais sur 68 km avant d'arriver à Gerland, à Lyon. Particularité, elle part à 00H, donc s'effectue de nuit, et principalement sur sentiers vallonnés.
- Les Coteaux. Ce sont les Coteaux de Chartreuse. Imaginez des parois calcaires qui tombent à pic sur 200 à 500 m et au bas, dans la plaine, une zone à 45° de pente, d'alluvions, où la végétation a poussé ; bois et vignes vers le plus bas. Terrain idéal pour courir sur de la terre et dans un environnement de nature.
- Le texte qui suit n'a pas vraiment valeur littéraire. Il vise à me rassembler des supporters pour me soutenir, moralement, à partir du dimanche 5 décembre 00H dans la quête du ... non pas du Grâal quand même! Bref, je chauffe un public. Moi, je m'entraîne, les supporters doivent se préparer aussi!
- Euh! Vous avez remarqué? Ce n'est pas du tout de la fiction!
- Pour éviter toute accusation de plagiat, j'informe tout à fait officiellement que ceci a également été mis public sur le site de mon club de course à pieds. Sous le même pseudo pour que les choses soient claires.


8H45 ce dimanche. Contre toute attente, il fait quand même beau en cette matinée de début novembre. Froid, mais beau.
Nous avons attaqué les Coteaux depuis 15 minutes. Les Coteaux ne nous ont pas encore attaqués mais ça viendra ! L’air est vif. Plein de senteurs d’automne ; de feuilles en décomposition, de terreau, de mousse, sûrement de champignons, … Le sol est souple sous nos pas rapides.
Nous sommes à la queue-leu-leu et la brutale déclivité que nous venons d’entamer a coupé court aux discussions. On n’entend que le souffle de celui qui nous précède et de celui qui nous suit. De temps en temps, une pierre roule, un pied bute sur une racine et le rythme se fait plus saccadé. Pas de chasseurs dans les Coteaux. Tout à l’heure on a bien entendu des coups de feu dans la plaine, au loin, mais les maïs n’étant pas encore coupés, les sangliers sont toujours en bas.
Ca redescend. Du coup, ça reparle aussi.
« Et il faudra surveiller l’alimentation. Faire le plein de sucres lents »
Ca y est. Guy va nous refourguer les pâtes liquides !
« Tu sais Guy, moi je suis volontaire pour préparer les pâtes carbonara la veille. Avec beaucoup de lardons et de crème fraîche ! » … Non. Apparemment ma proposition ne cadre pas avec l’éthique précourse de Guy ! Et de loin !
Jean Louis prend le relais. « Il parait que la meilleure préparation pour le marathon, ce n’est pas de faire des distances longues, mais de courir tous les jours 45 minutes ? »
Scepticisme général et esprit pratique de Laurent ; « Enfiler la tenue puis se doucher pour 45 minutes, ça ne vaut pas le coup. » Je dirais bien que le Père Noèl c’est le 24 décembre mais je m’abstiens !
Je m’abstiens car déja ça remonte. Ah les Coteaux ! On voit déja ceux qui sont bien et qui n’ont pas baissé de rythme. Les écarts se creusent avec l’arrière où l’on pioche un peu. En contrebas –ça parait loin déja- les premières habitations. Tout semble fermé et dormir encore. Il y a une certaine jouissance à galoper là haut et à imaginer les volets clos en bas, les corps frileusement recroquevillés dans les lits, la grosse flemme … Le soleil est monté et le sommet, là haut, la Dentd s’éclaire encore davantage. On est les rois du monde. Enfin … on est bien !
Les organismes sont maintenant bien chauds et la cadence d’endurance se trouve naturellement. Plaisir du coureur à sentir son corps se mouvoir sans effort, sans attention. Du moins tant que ça ne monte pas trop. Plaisir aussi à se sentir en harmonie avec ses compagnons, à poursuivre un but commun.
« Le 5 décembre il ne vous restera plus que 58 kilomètres à courir ! » Motivation, quand tu nous tiens ! C’est Patrick, qui souffre sous la plante des pieds et qui venait de nous informer qu’il se proposait de nous assurer la logistique jusqu’à ST ETIENNE, puis pendant la nuit et jusqu’à l’arrivée à LYON. Qui a dit que la course à pieds était un sport solitaire ?
On passera sur les quelques histoires de blondes qui font paraître le trajet plus rapide. Véronique, qui venait de tomber, avait pris une déviation pour arriver plus vite au Chateau, plus bas. Pas de risque d’incidents diplomatiques donc ! On aura bien dû tchatcher sur quelques membres éminents du club. Faut bien causer hein ? Il a dû y avoir un épisode sur les tous récents résultats des courses, Marathon de Lausanne notamment. Oui Laurent, il me semble qu’on a parlé de toi ! Un autre épisode sur tout ce qu’on peut envisager, qu’on ne fera probablement pas mais qu’on fait quelquefois. Et la Sainté-Lyon, tiens par exemple ?
Le soleil a fini par percer sérieusement, laissant entrevoir la promesse d’une belle journée. Nos souffles ont commencé à devenir plus courts (surtout qu’après le Chateau … !), les discussions moins nombreuses. Les négociations ont été entamées pour savoir par où l’on continuait ; Manival, ST NAZAIRE, ST ISMIER? On a dû reparler pâtes liquides. Enfin on ? Guy, je veux dire. Je n’ai pas remis mes carbonaras sur la table. Pourtant c’est bon les carbonaras, non ?
Quand je pense au nombre de gens qui me disent ne pas aimer courir parce que ce n’est pas ludique, qu’on s’embête, … Ils ne connaissent pas tout ce qui peut passer, tout ce qui peut s’échanger lors d’une séance d’entraînement!
Voilà , on courra encore une heure derrière. Ca deviendra plus dur, moins ludique justement. Mais bon, 68 kilomètres, faut les préparer non ? On rentrera entamés, un peu cuits, à envisager l’après midi plus cool que travaux de jardin (étonnez vous que nos femmes se plaignent après ?). On aura une pensée émue pour ce 5 décembre à minuit où, dans la solitude glacée de ST ETIENNE nous partirons avec nos lumignons sur la tête pour un effort de … beaucoup d’heures. Mais bon, on sera ensemble. Combien ? 4_5_6 ? On ne se quittera pas, on souffrira ensemble, on arrivera ensemble. Ce n’est pas de l’amour, mais ça forge sacrément l’amitié. Certainement aussi fort que souffrir ensemble sur un terrain de rugby.

Tistou 13/11/2004 @ 10:40:21
Evidemment, à partir de "8H45", ça n'aurait plus dû être en italiques! Fausse manoeuvre.

Bluewitch
avatar 13/11/2004 @ 13:01:56
Tistou, je suis essoufflée... Faut dire que la course à pieds et moi (merci périostite). J'aime beaucoup les premières lignes, la tentation du lieu me donnerait presqu'envie de courir. Pour le style, ça coule naturellement, ça ne trébuche pas, tout s'emboîte, ça fait "nature".
Mais, dans le fond, c'est un thème qui ne me touche pas beaucoup, question de sensibilité personnelle, c'est évident...

Bolcho
avatar 13/11/2004 @ 17:20:06
Moi j’aime bien Tistou. Me sont remontés plein de souvenirs de courses hivernales où, effectivement, cette sensation de corps qui fonctionne est un plaisir en soi. Il vient même un moment – exactement entre les premières fatigues dépassées et les dernières indépassables…- où l’on a un peu l’impression de s’élever par l’esprit au-dessus de la machine qui court en dessous : c’est tout ce que j’ai jamais connu comme expérience mystique.
Bon, je suis passé plus du côté carbonara que pâtes à l’eau, mais ces souvenirs que tu ravives si bien, c’est du plaisir. Je te soutiendrai moralement pour ton pèlerinage à toi (c’est fou ce que ça marche et que ça court sur Critlib, à croire que les lecteurs ont souvent besoin de se dégourdir les jambes) mais j’attends en échange une relation aussi bien ficelée que celle de l’entraînement.

Bluewitch
avatar 13/11/2004 @ 17:47:07
C'est clair qu'il y en a pas mal à qui le sujet devrait évoquer quelque chose... ;o)

Yali 13/11/2004 @ 17:58:18
Le 5 décembre entre Sainté et Lyon, quel temps fera t'il ?
Fouilla, mais t’sais qui f’ra pas chaud, alors, a tandis qui courateront ces bazus, à s’écorpeler, à s’écratouiller à l’eborgnette, à s’estrapaner la vie, ben mé, j’fiolerai un jus au canit à la santé de Tistou, et si on m’y zazieutte pas au canit, ben c’est que je minaterai au pieu achiné à ma gâtée. Moilà, allez bon viron Tistou, sûr que tu va gueniller et pas qu’un peu, mais nous fait pas peine, t’acacassonne pas avant Lyon.

Tistou 13/11/2004 @ 18:11:54
Fouchtra! Mais t'es d'où toi, Yali!

Yali 13/11/2004 @ 18:27:14
C'est du Gaga mon gars = 100% Stéphanois

Tistou 14/11/2004 @ 16:19:43
mais j’attends en échange une relation aussi bien ficelée que celle de l’entraînement.
Je tâcherai Bolcho.

Sibylline 14/11/2004 @ 20:16:18
Texte intéressant. Je n'ai jamais couru moi-même, mais je connais quelqu'un qui fait de la course à pied, (plutôt du semi-marathon) avec l'entraînement presque tous les jours. Je comprends bien ce qu'il ressent, comme toi. Il paraît qu'un café 1/2h avant le départ est bon... Tuyau que je te donne sans savoir ce qu'il vaut, n'étant pas coureur.
Je ne vais pas venir du bout de ma Normandie pour te crier des encouragements du bord de la route, mais c'est comme si. Donc, imagine nous tous, là, sur le côté, à ronchonner si tu ralentis.

Sido

avatar 14/11/2004 @ 20:56:30
nuit glaciale, brouillard, lumières blafardes et bruineuses du départ, humidité 100%, les pieds dans la boue, les montées merdiques, le sol qui fuit sous les godasses dans les descentes, la fatigue, l'envie de vomir, l'envie de dormir, le km qui en fait deux, les chaussettes trempées et j'en passe. Je la referait pas celle-là, dailleurs je l'ai jamais terminée. Bon courage, et cette fois t'auras pas un boulet à traîner. : )

Tistou 14/11/2004 @ 22:26:49
Il y a des choses plus graves que le froid, la boue, l'humidité et la fatigue. Surtout si ceux là on les accepte au départ.

Sido

avatar 14/11/2004 @ 23:21:00
Il y a des choses plus graves que le froid, la boue, l'humidité et la fatigue. Surtout si ceux là on les accepte au départ.

Tu veux dire quoi là ? quelles sont les choses plus graves ?

Tistou 15/11/2004 @ 10:14:57
Courir sur de longues distances est un acte têtu. En contradiction avec notre mode de vie occidental, qui n'encourage pas l'acte physique. Têtu parce que rapidement il faut vaincre la résistance d'un corps qui fait savoir qu'il se sentirait mieux dans un fauteuil, têtu aussi parce qu'il faut résister à l'abaissement de la volonté, cette volonté qui, seule, nous pousse à toujours continuer. Résister au froid, à la boue, à la fatigue, ce n'est pas le plus grave puisqu'on sait, en s'engageant sur une épreuve telle la SaintéLyon qu'on y sera confronté. Le tout, c'est d'accepter l'épreuve, de s'y préparer au mieux pour que ce soit moins dur, et de serrer les dents quand on est dedans. Purement masochiste. Mais pas en vain. Puisque vaincre là signifie victoire, signifie pouvoir vaincre ailleurs, sur soi.
Quand nous l'avons tenté ensemble Sido, tu n'étais nullement un boulet (même si je l'ai déja dit, pour rire car j'aime l'image). Je dirais même que si tu ne t'étais pas dévouée, sacrifiée, à l'époque, je ne l'aurais pas tenté seul et il n'y avait personne d'autre à l'époque pour se lancer là dedans autour de moi. Je t'en serai toujours reconnaissant car tu as dû passer sur beaucoup de choses pour le faire. En plus, décidé peu de temps auparavant, nous n'avions pas pu suffisamment nous préparer. Ca ne reste pas un bon souvenir pour toi (c'est le moins qu'on puisse dire!), c'est un mauvais point pour moi car j'en suis responsable. Excuse moi et oublie.
Ce qu'il peut y avoir de plus grave que froid, boue et fatigue, ce sont le froid de l'âme quand on a été abandonné, la boue de la trahison et la fatigue d'avoir à vivre sans le supplément d'âme que procure l'amour et la tendresse d'un être cher. Voilà, contre ça, il est beaucoup plus difficile de lutter.

Sido

avatar 17/11/2004 @ 11:00:58
Chaque jour nous trahissons et abandonnons. Chaque jour nous sommes trahis et abandonnés. Une multitude l'est jusqu'à en mourir.

Tistou 03/12/2004 @ 13:30:03
Un peu de narcissisme, ça ne fait pas de mal!
Est-ce que vous vous rendez compte que c'est dans moins de 36H? Est-ce que vous savez que je compte sur vos ondes positives dimanche 05 décembre 00h01 mn (à vrai dire plutôt vers 3_4H00)?
Nous serons 4 finalement à partir ensemble, pour le pire sûrement et le meilleur à la fin. C'est vrai que souffrir à 4 n'est pas souffrir seul.
Oui, je compte sur vous. C'est l'esprit qui déplace les montagnes, et avec vos esprits, c'est ... c'est mieux!

Yali 03/12/2004 @ 13:50:04
Suis avec toi Tistou !! Devant mon café, les croissants, mais c'est l'intention qui compte, non ?!
Alleeeeeeeeeeeeez Tistou

Fee carabine 03/12/2004 @ 14:39:55

Est-ce que vous vous rendez compte que c'est dans moins de 36H? Est-ce que vous savez que je compte sur vos ondes positives dimanche 05 décembre 00h01 mn (à vrai dire plutôt vers 3_4H00)?
Nous serons 4 finalement à partir ensemble, pour le pire sûrement et le meilleur à la fin. C'est vrai que souffrir à 4 n'est pas souffrir seul.
Oui, je compte sur vous. C'est l'esprit qui déplace les montagnes, et avec vos esprits, c'est ... c'est mieux!


Des ondes positives?
Le décalage horaire aidant, promis, je t'en enverrai au moment du départ... avant d'aller me glisser sous ma couette. Après quoi, je suis sûre que les Européens prendront le relais devant leurs croissants ;-).

Bon courage!

Provis

avatar 03/12/2004 @ 16:27:27
Vas-y Tistou, on sera avec toi.. Pas difficile d'imaginer que sur 68 km on doit avoir de grands moments de solitude, sans parler des ampoules aux pieds .. Pour les ondes, positives de toute façon, ne compte quand même pas trop sur moi avant 7 heures ! à moins que dans mes rêves..

Bolcho, ton expérience mystique, c'était pas des endorphines ?? (:-)

Mitzuko
avatar 03/12/2004 @ 17:00:39
Va pour les ondes positives, Tistou!
Je ne dis pas que je tournerai comme une toupie à cette heure-ci, pour tout dire, je serai surement en train de dormir...
Mais VAS-Y TISTOUUU!!!

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