Bolcho
avatar 18/12/2012 @ 17:52:12
Monde Diplo décembre 2012

- L'Europe face à l'hégémonie allemande (Perry Anderson)
Un article qui se penche sur les causes de la crise en Europe. Petite synthèse des conclusions, non dénuées d'ironie semble-t-il.
Dans tous les pays, les mesures prises se sont accompagnées de la réduction des dépenses sociales, de la dérégulation des marchés et de la privatisation des biens publics : soit le répertoire néolibéral standard, assorti d’une pression fiscale accrue. Pour les verrouiller, Paris et Berlin ont résolu d’imposer l’exigence de l’équilibre budgétaire dans la Constitution des 17 pays membres de la zone euro – une notion longtemps déconsidérés aux Etats-Unis comme une idée fixe d’une droite cinglée.
L’anxiété de la classe politique française, qui ne veut jamais être séparée des projets allemands dans l’Union rappelle une autre relation »spéciale » : celle des Britanniques qui s’accrochent à leur rôle d’aide de camp des Etats-Unis.

- Sourde bataille pour le temps (Mona Chollet)
Trois formes d’accélération se combinent : accélération technique (internet, TGV, four micro-ondes) ; accélération sociale (on change d’avantage d’emploi et de conjoint, on remplace plus souvent les objets) ; et accélération du rythme de vie (on dort moins, on parle plus vite, on fait plusieurs choses à la fois). Certes, l’accélération technique aurait pu permettre d’assurer à tous un quotidien paisible et nonchalant, mais, si elle réduit la durée des processus, elle en multiplie aussi le nombre. On écrit plus de messages électroniques que de lettres ; la voiture permet d’aller plus vite mais on se déplace plus loin et plus souvent, etc.
L'individu en sort avec l'impression de ne jamais pouvoir prendre de recul.
C’est le strict découpage du temps qui règle la discipline, à l’usine mais aussi à l’école, institution qui vise à dompter de façon précoce la future main-d’œuvre : en 1775, à Manchester, le révérend J. Clayton s’inquiète de voir les rues infestées d’ « enfants inoccupés en haillons, qui non seulement perdent leur temps, mais prennent en outre l’habitude de jouer ».
Remarque personnelle : il est vrai que c'est moins dommageable aujourd'hui puisque les enfants qui jouent utilisent des objets coûteux, sources de plantureux bénéfices...

- Un gendarme nucléaire bien peu indépendant (Agnès Sinaï)
Article un peu effrayant sur le manque d'indépendance de AIEA (Agence Internationale de l'Energie Atomique) par rapport au secteur de l'énergie atomique. De même pour le « Comité scientifique des Nations unies sur les effets des radiations atomiques » chargé d'évaluer les risques. Un seul exemple. Au Japon, le seuil acceptable avant l'accident de Fukushima était d'environ 1 Bq/kg d'aliments, mais il a été fixé à 500 fois plus au lendemain de la catastrophe, puis a rétrogradé à 100 Bq/kg au 1er avril 2012. Riz et légumes ont ainsi été initialement décrétés, pour la plupart, non contaminés...

- Fin de la « stratégie sudiste » aux Etats-Unis (Jérome Karabel)
Il s'agit de la stratégie du Parti républicain consistant à jouer sur la question raciale pour fidéliser l'électorat blanc. Cette stratégie buta en 1992 sur Clinton qui décla vers la droite le centre de gravité du Parti démocrate, une stratégie gagnante qui se traduisit par des baisses d'impôts pour les plus riches et la suppression d'un programme d'aide aux familles pauvres créé en 1935. Aujourd'hui, l'importance grandissante des « minorités ethniques » rend particulièrement inefficace la « stratégie sudiste ».
Il n'est d'ailleurs pas impossible que les Noirs, les Latinos, les Asiatiques et les femmes (célibataires, diplômées et actives) puissent constituer une coalition susceptible de dominer la vie politique américaine au cours des années à venir.
Mais sans doute faudrait-il qu'Obama déçoive moins. Même la réforme du système de soins laissera trente millions d'Américains sans couverture médicale en 2022 et Obama a renoncé à abroger les exemptions fiscales très coûteuses accordées aux revenus de la finance.

- En Amérique latine, des gouvernements affrontent les patrons de presse (Renaud Lambert)
Au Brésil, des patrons de presse occupent un siège sur dix à la Chambre des députés et un sur trois au Sénat. Le groupe Globo détenait en 2006 61,5% des chaînes de télévision et 40,7% de la diffusion totale des journaux. Au Chili, les journaux nationaux appartiennent tous à l'homme d'affaires Agustin Edwards ou au banquier Alvaro Saieh. En Argentine, le mastodonte Clarin représente environ 60% du secteur, tous médias confondus.
Les dirigeants latino-américains progressistes ont donc repris à leur compte l'idée d'un encadrement par l'Etat du secteur des médias. En 2004, Chavez signait le décret d'application de la loi de responsabilité sociale de la radio et de la télévision.
Plutôt que sur le contenu, c'est sur la propriété des organes de presse qu'il faudrait se pencher. En 2009, l'Argentine a choisi d'engager un processus de ce type et de répartir le spectre radioélectrique en trois tiers : un pour le secteur commercial, un autre pour l'Etat et un troisième pour le secteur à but non lucratif.

- Habitat coopératif, verrou contre la spéculation (Martin Denoun et Geoffroy Valadon)
En Allemagne dans les années 1980, puis dans les pays nordiques, l'existence d'un statut juridique spécifique et des politiques volontaristes ont permis un développement important de systèmes différents de propriété privée. En Suède, 18% du parc immobilier fonctionne sous un régime coopératif ; en Norvège 13%. Le modèle s'est répandu en Suisse, aux Pays-Bas, en Allemagne, au Québec et, récemment, en Catalogne. En France, des associations existent : Habicoop, Toits de choix, CLIP, Terre de Liens, expérimentent ds modèles semblables.
A chaque fois, il s'agit de séparer l'usufruit, attribué aux habitants, de la nue-propriété, transférée à une entité indépendante qui fait office de verrou antispéculatif. On a un nouveau type d'habitant : avec tous les pouvoirs de décision sur son lieu de vie, il est plus qu'un locataire ; sans pouvoir de spéculer sur son bien, il est moins qu'un propriétaire.
Néanmoins, en l'absence d'un statut juridique propre, ces montages présentent quelques fragilités : la justice pourrait requalifier les parts sociales en titres de propriété.
La réflexion annoncée par la Ministre du logement, Cécile Duflot, en vue de créer un statut spécifique, est encourageante, mais il faudra être attentif aux effets de cette éventuelle institutionnalisation et veiller à ce que l'on n'amalgame pas deux logiques : logement coopératif et logement social.

- Gérer les pas perdus, splendeur et décadence du hall de gare (Benoît Duteurtre)
Les trains modernes changent. leur vrai modèle, c'est l'avion, avec le système de réservation obligatoire, les tarifs variables selon l'offre et la demande, les cabines et les places de plus en plus étroites, l'obligation d'étiqueter les bagages (en attendant de les faire payer partout...), et surtout...l'édification de nouvelles gares en rase campagne, loin des agglomérations (comme les aéroports). Elles ne sont même plus reliées au réseau ferroviaire secondaire et sont entourées d'immenses parkings : le train au service de la voiture en quelque sorte.
Quand on ne délocalise pas les gares, on les transforme en centres commerciaux et en centres d'affaires en s'inspirant du très libéral modèle anglais illustré par St Pancras.
Cette métamorphose d'une gare en hypermarché invite les banlieusards à transformer leur temps d'attente en temps d'achat. Et chaque détail est conçu pour nous rapprocher des normes américaines. le moindre mètre carré est devenu payant, surveillé, rentable.
Les grandes gares parisiennes passent au grand nettoyage. Les usagers se réveilleront clients et Paris aura bientôt oublié ce qu'était une gare.
Dans la gare de l'avenir, on n'attend plus son train en lisant le journal, mais on rentabilise son temps et celui des entreprises, afin qu'il ne soit plus jamais question de « pas perdus »...

Tistou 18/12/2012 @ 18:01:17
Gros travail que tu nous fais là, Bolcho ...

Donatien
avatar 19/12/2012 @ 07:21:32
Là, je vais carrément m'abonner pour être certain de ne pas mourir idiot.
Courage, ne fuyons pas.
A+

Septularisen

avatar 19/12/2012 @ 17:01:40

Le groupe Globo détenait en 2006 61,5% des chaînes de télévision et 40,7% de la diffusion totale des journaux.


Ca c'est un fait très connu!...
Au Brésil tout le monde dit que ce groupe est le "faiseur" de Président... Si le journal Globo prends fait et cause pour un candidat celui-ci sera élu, tellement grande est leur puissance de frappe!...

Si Fernando Color De MELLO avait réussi à se faire élire président du Brésil en 1990, (avec la fin que l'on sait!...), c'est parce-que le Globo avait "fait" sa campagne électorale!...

SpaceCadet
avatar 19/12/2012 @ 18:08:28
Je me joint aux autres pour te faire part de mon appréciation Bolcho.

En ce qui me concerne, ta revue de presse est d'autant plus appréciée qu'elle me permet de varier/élargir le menu.

Saint Jean-Baptiste 19/12/2012 @ 18:31:17
« Les dirigeants latino-américains progressistes ont donc repris à leur compte l'idée d'un encadrement par l'Etat du secteur des médias... » (Le Monde)
 
Houlala ! Pauvre liberté de presse, pauvre média, pauvres Latinos !

Cela dit, j'admire toujours autant la qualité des articles du Monde. Mais leur anti-américanisme sournois me crispe toujours autant :
« Mais sans doute faudrait-il qu'Obama déçoive moins. » (le Monde)
Parce qu'il est établi une fois pour toute, fidèle lecteur du Monde, que tout président des US déçoit et décevra toujours !

« Même la réforme du système de soins laissera trente millions d'Américains sans couverture médicale en 2022 » (Le Monde)
On pourrait dire, tout aussi bien, que désormais plus d'un million d'Américains bénéficieront de cette couverture médicale grâce à Obama...

Et puis, à propos des équipements TGV en France, cet argument massue :
« ...Et chaque détail est conçu pour nous rapprocher des normes américaines ».


Bon, j'ergote un peu, mais il faut garder son esprit critique, n'est-il pas !

A propos de l'Europe, je trouve que la critique est facile : L'Europe a mis la charrue avant les bœufs en créant l'euro, mais la France comme les autres membres l'ont voulu et ce qui est fait est fait !
Il faut maintenant harmoniser les systèmes de sécurité Sociale et les déficits des États, ce qui suppose une rigueur et ce sera dur. Pour les États qui vivent au-dessus de leurs moyens, ce sera même très dur.

Je trouve que toutes ces critiques du Monde sont bien faites mais, comme dans toutes critiques, il y a à boire et à manger. Ce que je reproche au Monde c'est qu'il nous dise : si vous êtes malin, voila ce que vous devez penser !

Cela dit, j'attends ta prochaine revue de presse impatiemment.

SpaceCadet
avatar 20/12/2012 @ 09:37:43
Pour ceux/celles que ça intéresserait, il y a dans ce même numéro du Monde Diplo un article portant sur la littérature suisse romande.

SpaceCadet
avatar 20/12/2012 @ 09:49:39
Pour ceux/celles que ça intéresserait, il y a dans ce même numéro du Monde Diplo un article portant sur la littérature suisse romande.


On peut en lire un extrait sur le site web du journal...

Tu l'as peut-être lu Bolcho?

Elya
avatar 20/12/2012 @ 11:08:38
Le numéro de ce mois-ci m'a grandement plu.

En article non cité qui valent selon moi le détour (en fait, ils vont finalement tous êtres cités!), celui de Richard Monvoisin sur les dérives de la recherche publique et privée en France. Il reprend quelques idées véhiculées par ces livres critiqués sur CL :
La science à bout de souffle http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/24648
La recherche biomédicale en danger
http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/28846

J'apprécie le fait que Le Monde Diplo et ses auteurs renvoient souvent à des ouvrages de ce type.

Bolcho
avatar 13/01/2013 @ 17:49:14
Et si on passait au numéro de JANVIER 2013 ?

Mon petit choix mensuel ci-après.

- « Monarchies arabes, la prochaine cible ? », Hicham Ben Abdallah El-Alaoui, chercheur à Stanford
Les jeunes protestataires du « printemps arabe » (souvent citadins, de la classe moyenne et laïques) ont privilégié la rue comme espace d'expression politique au détriment des voies plus tièdes de la politique électorale : ils se sont privés de tout pouvoir et représentation dans les nouvelles institutions.
D'autre part, le « printemps arabe » a créé un espace de confrontation internationale. Le soulèvement à Bahrein a inauguré le processus au printemps 2011, lorsque, au nom de la nature confessionnelle de l'opposition dominée par les chiites, la monarchie sunnite a resserré son alliance avec ses voisins de même confession ainsi qu'avec les puissances occidentales au sein d'un front stratégique mené par l'Arabie saoudite, les Etats-unis et la Turquie, sans compter l'intervention plus discrète d'Israël. C'était une alliance contre des « suppôts » du bloc chiite incarné par l'Iran, la Syrie et le Hezbollah. La guerre civile syrienne a accéléré le processus, mais selon une dynamique inversée. Cette fois, c'est l'opposition populaire qui s'est retrouvée associée au camp « modéré » des puissances sunnites et de leurs alliés occidentaux.
L'Arabie, la Turquie, les Etats-Unis et Israël partagent le même souci de limiter l'influence de l'Iran, de la Syrie et du Hezbollah. La division confessionnelle de basse intensité s'est ainsi transformée en guerre ouverte aux conséquences explosives. Les Etats sunnites apparaissent dans les médias occidentaux comme des havres de modération et de stabilité, tandis que les chiites sont décrits comme des extrémistes et des fauteurs de troubles.
Le printemps arabe s'est laissé piégé dans les rets de la géopolitique.

- « Quand les avocats d'affaires écrivent les lois », Mathilde Goanec, journaliste
Des gens comme Eric Woerth, Jean-Louis Borloo, Christine Lagarde, Jean-François Coppé « concourent à la labilité des frontières entre les sphères publique et privée et œuvrent à la pénétration au sein de l'administration de logiques, d'intérêts, de catégories d'entendement et de dispositifs souvent pensés comme spécifiques au marché ».
Est-ce qu'une banque d'affaires peut conseiller l'Etat dans sa volonté de créer une banque publique d'investissement ? C'est pourtant l'option retenue par le gouvernement socialiste...
Les ministères appellent aussi des cabinets d'avocats lors de la préparation de projets de loi, par exemple, le cabinet Gide-Loyrette-Nouel en France : aide à la privatisation des autoroutes françaises, à la création de La Banque postale, etc. Ou « conseil » de Strauss-Kahn quand il était ministre des finances (1997-99). Ou encore de la ministre de l'économie Christine Lagarde pour préparer le plan de relance voulu par Sarko.

Ces mêmes groupes agissent auprès des parlementaires où le phénomène de lobby est encore plus marqué. Les entreprises contactent les cabinets et leur demandent de rédiger des amendements qu'ils passeront à un député. C'est un classique de l'Assemblée nationale. Il faut dire que les députés cumulent souvent plusieurs mandats et qu'ils n'ont pas beaucoup de temps...

Les avocats rencontrés disent se sentir légitimes : leurs clients et eux-mêmes ne sont-ils pas des acteurs majeurs de la société ? Mais ce système à pour défaut de favoriser encore et toujours ceux qui détiennent le pouvoir économique et financier, maîtrisent les canaux d'opinion, ont déjà l'oreille des puissants.
C'est une privatisation pure et simple du processus législatif, la forme la plus aboutie de la corruption.

Les représentants d'intérêts privés doivent, pour obtenir un badge et circuler dans l'enceinte du Parlement français, s'inscrire au préalable sur un registre rendu public. Les relations entre lobbyistes et parlementaires se déroulent toujours comme au bon vieux temps : déjeuners, voyages, clubs en tout genre, colloques payés par les entreprises... Et les cabinets de conseil savent d'autant mieux s'adapter qu'ils comptent dans leurs rangs des personnalités politiques de premier plan, anciens députés ou sénateurs, hauts fonctionnaires ou même ex-minitres. Jean-François Copé est l'idéal-type des adeptes de ces allers-retours entre les sphères publique et privée. Un décret émis juste avant les législatives de 2012 a facilité la procédure. Il permet aux « personnes justifiant de huit ans au moins d'exercice de responsabilités publiques les faisant directement participer à l'élaboration de la loi » de devenir avocat, sans passer l'examen du barreau.

- « Justice borgne pour les Balkans », Jean-Arnault Dérens, site Le courrier des Balkans
Les acquittements des généraux croates Ante Gotovina et Mladen Markac, puis des anciens commandants de l'UCK Ramush Haradinaj, Idriz Balaj et Lahi Brahimaj, ont fait l'effet d'une bombe, confirmant le doute qui pèse sur l'impartialité du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY).
En Serbie, les comptes sont vite faits : depuis sa création le TPIY n'a condamné que des Serbes. Institué le 22 février 1993 par la résolution 808 du Conseil de Sécurité des nations Unies, le TPIY devait jouer un rôle pionnier dans l'affirmation d'une justice internationale, objective et impartiale. Il devait aussi contribuer à la réconciliation régionale.
Or, la sentence d'acquittement de MM. Gotovina et Markac a ravivé le nationalisme : à Belgrade comme à Zagreb, la presse a retrouvé ses pires accents belliqueux.
M. Gotovina a bénéficié de la constante protection des services secrets français, et on sait également que l'armée croate a profité du soutien américain lors de l'opération « tempête » de reconquête de la Krajina. Les éventuelles complicités occidentales dans les crimes commis à cette occasion ne seront jamais examinées.

- « Ce rapport qui accable les médias britanniques », document
En proposant la création d'un organe de régulation de la presse, extérieur à la profession, on a suscité un débat très vif : un tel dispositif suggère en effet la possibilité d'une contradiction entre la liberté des entreprises de presse et l'intérêt général.
« Lorsque la presse est libre et chaque homme capable de la lire, tout est en ordre » selon la formule de Thomas Jefferson. En vertu de ce postulat, la presse s'est vu octroyer des privilèges considérables qui s'accompagnent toutefois de responsabilités particulières à l'égard du public : le respect de la vérité, la conformité à la loi et la prise en compte des droits et libertés de chacun.
Mais, quand un sujet se révèle vendeur et que le public en redemande, le respect de la vérité factuelle est trop souvent perçu comme une entrave, tandis que les représentations tendancieuses et les exagérations excèdent de loin les limites admises du libre commentaire.
Les formations politiques qui se sont succédé au pouvoir et dans l'opposition ont tissé avec la presse des liens incestueux qui ne répondent guère à l'intérêt général. Cela témoigne d'une volonté inébranlable de contrôler le flux des informations.
Les dirigeants politiques se trouvent dans une position délicate face au lobbying médiatique. La presse sait comment s'y prendre pour faire entendre ses propres intérêts, mais aussi pour enjoliver ou détruire la réputation d'un responsable politique. Les élus se montrent d'autant plus fragiles que les nécessités du marketing politique moderne les poussent à exhiber l' « authenticité » de leur vie privée...

- « Les beaux fantômes de la révolte », Evelyne Pieiller
« Ce qui fait les millénaristes, c'est la notion que le monde tel qu'il est peut avoir – et même aura – une fin, un jour, pour être entièrement reconstruit ensuite » (Eric Hobsbawm, Les primitifs de la révolte dans l'Europe moderne).
L'interprétation chrétienne (judaïsme et islam en ont aussi), c'est la croyance en l'avènement du royaume de Dieu sur Terre, pour mille ans de paix : le millenium.
Cette croyance en un changement complet radical ne se contente pas toujours d'une attente passive, mais cherche parfois à se concrétiser, à faire advenir ses valeurs, à établir ici-bas le royaume de la justice et de l'égalité entre les hommes appelé par le christianisme primitif.
Ainsi, c'est au XVIe siècle, temps de l'humanisme et de la Renaissance, que surgit un mouvement millénariste initiateur de « la plus grande révolte populaire entre Spartacus et la Révolution française » selon F. Engels : « La guerre des paysans en Allemagne », également connue sous le nom remarquable de « révolte de l'homme ordinaire » (1524-1526).
L'époque est marquée de fantastiques transformations (découverte du « Nouveau Monde », excommunication de Luther en 1521, Thomas More qui écrit « Utopia » en 1516) et l'on peut maintenant lire soi-même les textes sacrés. Une jacquerie de plus commence qui prend au sérieux l'espérance évangélique. Du Sud de l'Allemagne jusqu'en Suisse, en Lorraine et en Alsace se soulèvent des ouvriers des mines, des paysans, de petits artisans. Thomas Münzer (1490-1525) en prend la tête : « Dieu ne peut tarder davantage à se révéler, vous devez vous dresser ».
Leur manifeste comprend l'élection des pasteurs, le droit égal pour tous, la fin des privilèges de la noblesse...
Les insurgés sont vaincus et exterminés, Münzer est torturé et exécuté. Mais le rêve va ressurgir à plusieurs reprises : anabaptistes de Munster prônant la mise en commun de tous les biens (1534-1535), ou encore chez les Anglais pendant la guerre civile (1642-1649) avec les Levellers (Niveleurs).
Malgré le grand silence qui a cherché à faire oublier ces insurrections de l'idéal égalitaire, le vieux rêve remue encore.

Pieronnelle

avatar 13/01/2013 @ 19:13:52
Merci Bolcho !
Mais je suis encore plus démoralisée...

Heureusement il y a cette phrase :
"Malgré le grand silence qui a cherché à faire oublier ces insurrections de l'idéal égalitaire, le vieux rêve remue encore."
:-)

Bolcho
avatar 05/02/2013 @ 12:07:34
Bonjour à tous !
Voici ma lecture du Monde Diplo de février.
Et ça ne veut pas dire que c'est la meilleure lecture évidemment...
Ne vous gênez surtout pas pour ajouter/corriger/fustiger, etc.

MONDE DIPLOMATIQUE de février 2013

Mali
Au Mali, la France est allée au combat au nom de la guerre au terrorisme, refrain inusable qui permet tout. Pourtant, Obama lui-même avait fait remarquer en 2009 – il n'est jamais trop tard - qu'il était « stupide » de « faire la guerre à un mode d'action ».
Ben oui : et en négligeant d'étudier les causes politiques des incendies qu'on avait la prétention d'éteindre...après les avoir allumés. Comment y voir clair si l'on se contente de chausser les lunettes déformantes de la « lutte contre le terrorisme global » ?

Autre article à partir de la même réalité, Georges Corm, ancien ministre libanais, plaide pour une analyse profane des conflits.
Selon lui, nous avons changé d'époque. Avant, on combattait la subversion communiste d'un côté et on prônait la lutte des classes et l'anti-impérialisme de l'autre. Aujourd'hui, on convoque les luttes de communautés religieuses ou ethniques, voire tribales. Cela encourage un retour à des identités primaires. Les conflits sont réduits à leur dimension anthropologique et culturelle, faisant abstraction de la multiplicité des facteurs qui ont entraîné leur développement. On se contente de distinguer les « bons » et les « méchants ».
En fait, depuis en gros la révolution iranienne, le camp occidental essaie de susciter une rivalité entre chiites (Iran, Irak, Syrie, Hezbollah libanais) et sunnites. Les situations d'oppression ou de marginalité socio-économique sont passées sous silence.
L'instrumentalisation des identités dans le jeu des grandes et des petites puissances est vieille comme le monde. Les Etats qui se saisissent du religieux le mettent au service de leur politique de puissance, d'influence et d'expansion.
L'Occident justifie ainsi l'occupation continue des territoires palestiniens depuis 1967. Et les sanctions appliquées varient : châtiments sévères imposés par la « communauté internationale » dans certains cas (Irak, Iran, Libye, Serbie, etc), absence totale de simple réprimande dans d'autres (occupation israélienne, régime de détention américain à Guantanamo).
Faire cesser cette instrumentalisation et les analyses simplistes qui vident à dissimuler la réalité profane des conflits constitue un impératif urgent.

Le « capitalisme extrême » des Frères musulmans, Gilbert Achcar, université de Londres
En Egypte, le gouvernement à la volonté de remettre en cause les libertés syndicales conquises à la faveur du soulèvement : la multiplication des licenciements de syndicalistes va dans ce sens.
Les trafiquants de l' « opium du peuple » sont parvenus au pouvoir. La vertu soporifique de leurs promesses s'en trouve forcément diminuée. Maxime Rodinson, orientaliste, il y a plus de 25 ans : « L'intégrisme islamique est un mouvement temporaire, transitoire (...). Là où il n'est pas au pouvoir, il restera comme idéal tant qu'il y aura cette frustration de base, cette insatisfaction qui pousse les gens à s'engager à l'extrême. Il faut une longue expérience du cléricalisme afin de s'en dégoûter : en Europe, cela a pris pas mal de temps ! La période restera longtemps dominée par les intégristes musulmans. Si un régime intégriste islamique rencontrait des échecs très visibles, y compris dans le registre du nationalisme, et débouchait sur une tyrannie manifeste, cela pourrait amener beaucoup de gens à se tourner vers une solution de rechange qui dénonce ces tares. Mais il faudrait une solution crédible, enthousiasmante et mobilisatrice – et ce ne sera pas facile. »

Etes-vous de confession juive ?, Alain Gresch
Air France est assigné devant le tribunal par une passagère débarquée le 15 avril 2012 d'un vol en partance pour Tel-Aviv. Elle avait répondu négativement à deux questions : « Etes-vous titulaire d'un passeport israélien ? » et « Etes-vous de confession juive ? ».
Contexte. Des militants européens voulaient exprimer leur solidarité avec les Palestiniens mais Israël, « seule démocratie du Proche-orient » avait décidé d'interdire l'accès de son territoire et de celui de la Palestine à ces hommes et à ces femmes. Supplétifs de la police israélienne, les compagnies aériennes et les gouvernements européens avaient contribué à traquer les « suspects » et à les empêcher d'embarquer.
Air France se défend en révélant que les questions avaient été formulées « sur demande des autorités israéliennes ». Mais peut-on contrevenir ainsi aux lois françaises sur la discrimination ? Verdict le 21 mars.

Comment contourner l'impôt sans s'exiler, Alexis Spire, sociologue
L'article décrit les nombreux avantages des riches devant l'impôt. Je ne vous en cite qu'un qui vaut son pesant...d'or, forcément.
« Au moment de l'instauration de l'impôt sur les grandes fortunes (IGF), en 1982, l'interconnexion d'une douzaine de fichiers (ceux des contribuables, du cadastre, des assujettis à la taxe d'habitation, etc) avait été envisagée par le gouvernement socialiste, de façon à obtenir par traitement informatique la liste des quelque deux cent mille personnes susceptibles d'être concernées par le nouvel impôt. Ces velléités de constituer un fichier de 'gros possédants' s'étaient heurtées à l'opposition de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), 'préoccupée des risques d'arbitraire administratif'  ».

L'Inde nouvelle s'impatiente, Bénédicte Manier, journaliste
En Inde, la préférence pour les garçons est manifeste. Ils perpétuent le nom et le patrimoine familial, tandis que la présence de filles est jugée inutile, voire préjudiciable : les marier implique de verser une dot qui endette leur famille pour des années. Cette préférence se traduit par des millions d'avortements sélectifs qui laissent une population déséquilibrée : 940 femmes pour 1000 hommes (et même 866/1000 à New Delhi).
Le viol a plus que doublé entre 1990 et 2008 ; le surnombre d'hommes n'y est sans doute pas étranger.
Les protestations actuelles marquent l'arrivée dans la vie publique d'une génération instruite, mouvement qui fait naître l'espoir de futures normes sociales plus progressistes. Mais ces classes moyennes restent minoritaires et plus de 37% des Indiens vivent encore dans une pauvreté absolue, avec des écarts très profonds entre les nouveaux riches et les oubliés de la croissance.

En dépit d'une législation de 2005 qui leur accorde le droit d'hériter à l'égal des hommes, la plupart des femmes sont toujours privées d'héritage et exclues de la propriété des terres. En matière d'égalité homme-femmes, le PNUD classe l'Inde au 122e rang sur 146 pays (juste avant l'Afghanistan en Asie du Sud).

Et pour finir, un article aux vertus presque comiques :

De Robespierre à Charlton Heston, culture des armes aux Etats-Unis, Benoît Bréville
Aux Etats-Unis, la peur de la confiscation dope les ventes d'armes et profite aux armuriers.
Par le biais du deuxième amendement (1787), les Pères fondateurs ont voulu que chaque citoyen ait le droit de « détenir et porter une arme ». Pourquoi ?
Ce n'était à l'époque ni culturel ni individualiste mais politique. Le droit de résister à l'oppression, à la tyrannie, bref à un Etat qui tenterait d'outrepasser les prérogatives limitées que lui confère la Constitution, droit théorisé au XVIIe siècle par les précurseurs des Lumières (avant cela, l'arme, c'était la supériorité du seigneur). Robespierre, plus tard appela à ce que « des forges s'élèvent sur les places publiques où l'on fabriquera des armes pour armer le peuple ».
Délaissée par le camp progressiste, qui a opéré une forme de symbiose avec l'Etat, cette tradition de l'arme émancipatrice et du droit à la résistance a été reprise, aux Etats-Unis, par les conservateurs.
M. Larry Ward, militant du deuxième amendement et instigateur de la « journée d'hommage aux armes » (Gun Appreciation Day), dont la première édition s'est tenue le 19 janvier, affirmait sur CNN : « (...) l'esclavage n'aurait jamais constitué un aussi long chapitre de notre histoire si les Afro-Américains avaient eu le droit de porter une arme dès la naissance de ce pays ». Et M. Wayne LaPierre, vice-président de la NRA : « En Allemagne, le contrôle des armes à feu a permis le succès de la Shoah. ».

Bon, si j'ai bien compris - mais c'est sans doute une interprétation un rien naïve et trop personnelle - le parti conservateur et la NRA tiennent à préserver la capacité du peuple américain à faire une révolution prolétarienne...

Saint Jean-Baptiste 05/02/2013 @ 19:43:27
Ah ! Merci, Bolcho, voilà des beaux sujets de méditation mais, même si c'est le Monde Diplo qui le dit, restons critiques !

A propos du premier article sur le Mali c'est l'éternelle question : avons-nous le droit d'intervenir ?
Personnellement, en dépit du droit, je trouve que la France a bien agi. Les terroristes ont besoin d'un terrain. Ils sont brûlés en Afghanistan et ils essayent de se refaire une base en Afrique. Il faut les pourchasser partout où ils tentent de s'installer.
Entre parenthèses, la France n'est pas seule. Il y a, entre autres, des soldats Belges avec avions, hélicoptères et tout un logiciel. Je n'ai encore jamais entendu un média français qui en parlait ! Le grand chef de guerre Français aurait-il peur que ça lui fasse de l'ombre ?

Par ailleurs, dans cet article, ce qui m'a fait bondir c'est ceci (copier-coller) :
« Ben oui : et en négligeant d'étudier les causes politiques des incendies qu'on avait la prétention d'éteindre...après les avoir allumés. »
Alors, maintenant, c'est nous qui avons allumé « l'incendie » terroriste !?
Jusqu'où ira notre goût de l'auto-flagellation ?
Et puis, entre nous, n'est-ce pas le comble du nombrilisme que d'aller se prétendre la cause de tous les maux de la terre ?!


Je commenterai les autres articles plus tard.

Saint Jean-Baptiste 06/02/2013 @ 16:33:27
Dans le second article je ne vois pas très bien où Georges Corm veut en venir :
A mon avis ça ne changerait pas grand chose de faire une analyse profane des conflits. Tout le monde sait que les religions sont toujours le prétexte à faire des guerres – ce qui fait dire à d'aucuns que sans religions il n'y aurait pas de guerres !

Enfin, on peut toujours le répéter mais ça ne change rien au fait. On sait que la première victime des intégristes musulmans c'est l'Islam.

Par ailleurs, dire que « le camp occidental essaie de susciter une rivalité entre chiites (Iran, Irak, Syrie, Hezbollah libanais) et sunnites. », c'est, un fois de plus se servir de l'Occident comme d'un bouc émissaire ! Qu'avons-nous à voir dans cette galère, nous qui savons à peine pourquoi il y a des Sunnites et des Chiites.
C'est comme si, quand on faisait la guerre entre chrétiens romains et protestants, on avait dit : c'est la faute aux sarrasins !

Finalement, je crois que le but de tout ce baratin est de dire que nous protégeons Israël. En fait « d’instrumentalisation » on ne fait pas mieux !


Dans le troisième article, je trouve que Gilbert Achcar a tout à fait raison.
C'est toujours comme ça : tu te rappelles, la révolution française a servi la cause bourgeoise et la révolution russe a servi le communisme. Les révolutionnaires du printemps arabe ont servi l'intégrisme des Frères musulmans. Et à mon avis, ce qui se passe n'est encore qu'un début.


Dans l'article suivant d'Alain Gresch, je trouve que Israël et Air France ont bien raison. Il y a un acharnement à défendre la cause palestinienne qui est, en fait, une attaque contre Israël et un besoin de publicité. Israël a peut-être tort d'être là mais il se défend d'être rejeté à la mer et on peut le comprendre.
Que les ONG aillent délivrer les peuples de Corée du Nord, d'Iran, de Syrie ou d'ailleurs, pour un peu changer.


Pour les autres articles, ma foi, je suis d'accord et le dernier article m'a vraiment édifié.
Encore merci, Bolcho !

SpaceCadet
avatar 06/02/2013 @ 17:56:33
"Bon, si j'ai bien compris - mais c'est sans doute une interprétation un rien naïve et trop personnelle - le parti conservateur et la NRA tiennent à préserver la capacité du peuple américain à faire une révolution prolétarienne... "

:-))))

Deux commentaires.

Sur l'intitulé 'Etes-vous de confession juive': il me semble qu'au-delà du droit français invoqué dans l'article du MD, on devrait plutôt invoquer la chartre des droits de la personne. Non?

Sur l'intitulé 'l'Inde nouvelle...'. Je trouve réducteur, du moins dans ce cas-ci de parler de "l'Inde", je veux dire de généraliser donc, sans prendre la peine de nuancer alors que l'on sait que ce pays est culturellement et politiquement très morcelé et que d'une province à l'autre (voire d'un bled à l'autre) les circonstances sociales, économiques, culturelles, et politiques varient énormément. Je n'ai pas lu l'article en question, mais il me semble que vu comme ça, ça manque de profondeur.

SpaceCadet
avatar 06/02/2013 @ 18:07:40
Oups! Je voulais parler de la 'charte', bien sûr.

Bolcho
avatar 07/02/2013 @ 16:25:49
@SJB
Sur le Mali. Je suis un peu dérangé par le vocable « terroriste » qui fonctionne surtout comme une sorte d’insulte ou de propagande enfantine destinée à désigner les « méchants » contre qui les « bons » (que nous sommes, bien sûr) doivent combattre. Si le « terroriste », c’est celui qui provoque la terreur dans les populations, avouons que les Etats les plus puissants du globe sont très efficaces eux aussi et qu’ils massacrent avec beaucoup plus d’efficacité que les « terroristes »… Mais sans doute a-t-on le droit de massacrer quand c’est au moyen d’une armée officielle ? Et quand on envoie des drones sur la tronche des « vilains », ce n’est pas grave non plus puisqu’on est des « bons »…
Avons-nous (nous, les pays riches et puissants) contribué à allumer l’incendie « terroriste » ? Oui. Les causes des conflits sont multifactorielles et comprennent donc du socioéconomique, du géopolitique, du commercial, etc, tous domaines où l’intervention des grandes puissances n’est pas vraiment négligeable et souvent brutale. C’est notamment pourquoi il faudrait faire une « analyse profane des conflits », pour échapper au prisme infantilisant qu’on veut nous imposer.
Enfin, « Israël se défend d’être rejeté à la mer » ? Assez rares, dans nos contrées, sont les organisations qui proposent de rejeter Israël à la mer. Mais souhaiter que les Palestiniens puissent avoir un Etat eux aussi, c’est monstrueux ?

@SpaceCadet
D’accord avec tes deux remarques. D’ailleurs, l’article sur l’Inde est beaucoup plus précis que l’image qu’en donne ma petite synthèse, notamment en ce qui concerne les variations régionales et les écarts ville-campagne.

Merci à vous deux pour vos commentaires !

Saint Jean-Baptiste 07/02/2013 @ 17:55:48
Malgré toute ta force de persuasion, Bolcho, je n'arrive pas à mettre sur le même pied les terroristes et les soldats américains.
Dans la lutte qui nous oppose aux « terroristes », c'est eux qui nous déclaré la guerre et les Américains sont nos alliés. Ça, c'est un à priori, d'accord, mais c'est comme ça : je ne crois pas qu'un Américain viendra mettre une bombe en dessous de mon lit si je caricature un de leurs prophètes.

Ceux que tu appelles les vilains sont Al Quaeda, les jihadistes, les fondamentalistes,
ceux qui se jettent avec des avions sur des tours occupées par des braves gens et qui jettent des bombes dans des autobus scolaires, en bref, ceux qui tuent pour le plaisir de tuer.
Toi tu les appelles les vilains par dérision, parce que pour toi, ce sont des braves et ils ont des bonnes raisons profanes de faire la guerre.
Mais c'est eux qui, avant de se suicider en tuant les autres, proclament « Allah est grand », ce qui fait penser qu'ils n'agissent pas pour des raisons profanes. Mais peut-être qu'ils se trompent eux-mêmes et qu'ils nous trompent aussi.

Il y a sans doute des raisons économiques, sociales, géopolitiques qui entrent en jeux mais ces pays arabes sont beaucoup plus riches que nous et leur économie a besoin de la nôtre. Il n'y a pas de raison qu'ils nous déclarent la guerre.

En attendant, je ne vois pas pourquoi on aurait mauvaise conscience à appeler terroristes ces soudards qui ont répandu la terreur chez les Maliens qui ne leur avaient rien demandé, et je pense que c'est bien de les pourchasser.


Pour Israël, ce sont ses voisins qui ont juré de les rejeter à la mer et ils se défendent, c'est bien normal. Le peuple palestinien est mal traité et aurait droit à un État, je ne dis pas le contraire.
Ce que je reproche c'est cet acharnement des ONG en faveur des Palestiniens alors que tous les autres peuples de la terre opprimés et privés de liberté les laissent parfaitement indifférents. Alors, est-ce de l'anti-américanisme, puisque c'est la mode ? Ou est-ce un besoin de publicité ? Je n'en sais rien mais ça me hérisse le poil.

Pieronnelle

avatar 07/02/2013 @ 17:56:27
Je te lis Bolcho ! Même si je n'ose plus trop faire de commentaires...
L'article qui a particulièrement attiré mon attention c'est celui de Gilbert Achcar avec les propos de Maxime Rodinson :

" L'intégrisme islamique est un mouvement temporaire, transitoire (...)
La période restera longtemps dominée par les intégristes musulmans. Si un régime intégriste islamique rencontrait des échecs très visibles, y compris dans le registre du nationalisme, et débouchait sur une tyrannie manifeste, cela pourrait amener beaucoup de gens à se tourner vers une solution de rechange qui dénonce ces tares."
Je trouve cette analyse très juste et j'ai même le sentiment que ça va arriver plus vite que prévu vus les derniers évènements en Egypte et en Tunisie...On ne fait pas assez confiance aux peuples !:-)

Minoritaire

avatar 18/02/2013 @ 12:21:58
La religion m'emmerde, et les dogmatismes (avec ou sans dieu) encore plus. Mais je crois sincèrement que les extrêmismes de tous poils naissent et se développent dans le terreau de l'ignorance et de l'injustice sociale. Et ces injustices-là, en cautionnant des dictatures sanglantes, censées nous protéger du Mal bolchévique (signez-vous!), l'Occident les a nourries pendant des décennies. Et quoi? on s'étonne maintenant que le balancier nous retombe sur la gueule?
Vous vous souvenez? Dans les années 70, quand on parlait du "Tiers-Monde" (comme on disait le Tiers-Etat)? En gros, on s'arrangeait avec l'Ennemi pour ne pas se battre l'un contre l'autre directement( ah! l'équilibre de la terreur, quel beau souvenir!), mais par "révolutions" interposées; et pendant ce temps-là, on se goinfrait les richesses du Sud. Vous vous rappelez de l'Afghanistan, dans les années 80? on aurait soutenu n'importe qui pour faire chier les Russes. D'ailleurs, on l'a fait. Pendant ce temps-là un Ayatollah se la coulait douce dans la Patrie des Droits de l'Homme (pour faire chier qui?). Ca, c'est de la real-politiek!!! Je ne me fais aucune illusion: ici comme là-bas, Brassens reste d'actualité quand il chante "Mourir pour des idées"; ce sont toujours les mêmes qui vont se faire exploser pour "dieu et la patrie", et les mêmes qui vantent les jardins de dieu, mais lui préfèrent les paradis fiscaux (et s'explosent au foie gras!). Et je n'exonère de leurs responsabilités ni ces pauvres types ceinturés d'explosifs, ni les crapules qui les manipulent.
Mais à mes yeux, l'occident a sa part importante dans l'état du monde d'aujourd'hui, et nous restons encore prisonniers de nos modèles de développement et de nos arrangements douteux avec des régimes encore plus douteux que les nôtres. Sans compter Wall Street et la City qui ont sans doute plus de poids sur les décisions internationales que les décideurs politiques. Si les pauvres sont prêts à tout, c'est parce que les riches ne leur cèdent rien. Et même si c'est chaque jour un peu plus difficile pour vous et moi, à l'échelle de ce monde, les riches, c'est nous.
Ce n'est pas de l'auto-flagellation. Mais je me souviens. Je me souviens parfaitement de cette femme en larmes dans les rues de New-York ce 11 septembre-là (pas en 1973, donc), et qui demandait:" Qu'avons-nous fait pour mériter cela?" C'était une bonne question, intéressante. Je ne prétends pas avoir la réponse, mais ce dont je suis sûr, c'est qu'aucun chef d'Etat, aucun gouvernement avec tous leurs cabinets de spécialistes ne l'a reprise à son compte. Paradoxalement, ça ne les a pas empêchés de trouver des réponses. Toujours les mêmes, depuis 70 ans.
Je crois que je vais aller voir "Les chevaux de Dieu".

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