La Fiancée du vent : L'histoire de la Corrivaux, née en Nouvelle-France et pendue sous le Régime anglais de Monique Pariseau

La Fiancée du vent : L'histoire de la Corrivaux, née en Nouvelle-France et pendue sous le Régime anglais de Monique Pariseau

Catégorie(s) : Littérature => Romans historiques

Critiqué par Libris québécis, le 14 novembre 2004 (Montréal, Inscrit(e) le 22 novembre 2002, 82 ans)
La note : 8 étoiles
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La pendaison d'une sorcière

Louis Hémon a louangé le modèle de la femme québécoise avec son personnage de Maria Chapdeleine. Depuis la publication de ce roman en 1910, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Anne Hébert a brossé dans Kamouraska le portrait d’une femme qui veut se libérer, commandant même l’assassinat de son mari pour y arriver. Marie-Josephte Corrivaux, un personnage historique qui habitait le village de St-Vallier au moment de la conquête anglaise en 1763, n’avait pas le cran de l’héroïne d’Anne Hébert, mais elle ne manifesta pas moins son mépris pour les conventions qui obligeaient la femme à l’effacement pour laisser toute la primauté à son mari. Plusieurs d’ailleurs payèrent chèrement leur affirmation.

La Corrivaux, comme on l’appelle au Québec, paya de sa vie les distorsions au code régissant la conduite féminine. Même le curé Leclair qui l’aimait bien l’avait avertie d’être plus réservée afin de se protéger des bobards des paroissiens qu’il savait très conservateurs. Défiant tous les quand dira-t-on, elle continua de chevaucher sa jument à cru (sans selle) pour se promener le long du fleuve, de danser avec des partenaires autres que son mari. Il n’en fallait pas plus pour se créer une réputation de femme de mauvaise vie, voire de sorcière quand elle refusa de croire que le passage des perséides était une manifestation diabolique. La population était loin de lui pardonner ses fredaines surtout quand elle s’est aperçue que la discorde régnait entre Joseph, le père de Marie-Josephte, et ses gendres. Au décès de son second mari, piétiné par un cheval, les soupçons se portèrent infailliblement sur la jeune femme et son père. Arrêtés, il furent accusés de meurtre devant une cour martiale composée d’un jury méconnaissant le français. Mal servis par la justice pratiquée par les nouveaux conquérants anglais qui avaient besoin d’exhiber leur autorité pour faire régner l’ordre au Canada, ils furent évidemment condamnés à la potence.

La légende déforma tellement cette histoire que l’héroïne est encore considérée comme une sorcière qui tua ses sept maris alors qu’elle n’en eut que deux. Il est heureux que Monique Pariseau remette la pendule à l’heure. Elle se sert de son personnage pour démontrer que le féminisme n’est pas un vain mot. Il faudrait surtout voir que le sort de la femme découle bien souvent de la bêtise humaine et que l’événement rapporté s’insère dans le cadre d’une colonisation menée par de nouveaux maîtres beaucoup plus préoccupés par notre assimilation que de justice.

Monique Pariseau a choisi des protagonistes qui ont réellement joué le rôle qu’elle leur assigne. Il ne s’agit pas d’un cours d’Histoire déguisé en roman. L’équilibre entre l’historicité des faits et l’art romanesque est assurée par un suspense axé sur la vie de Marie-Josephte. L’auteure ne s’attarde pas aux digressions caractéristiques du genre. Elle se montre même trop expéditive malgré les 400 pages du roman. Par contre, son héroïne demeure toujours dans sa lorgnette et l’enrichit au passage en la situant dans le cadre bien précis d’un village tout près de Québec. Attachée à la nature de ce coin pays, elle aime le vent venant du fleuve, les animaux et les emblavures. Elle ne veut pas s’affranchir des exigences de la vie agricole, elle veut être une femme libre. Malheureusement les obstacles la conduiront à l’alcoolisme.

Ce roman émouvant est bien écrit et bien construit. Et sa chute est magnifiquement préparée. C’est moins la conduite de l’héroïne qui va causer sa perte que l’achat d’une jument rétive autour de laquelle tourne tout le drame dont elle sera victime. Monique Pariseau signale le point de départ de la sente dangereuse suivie par les femmes qui veulent sortir des ornières alors que Francine Noël et Lise Bissonnette imaginent ce qui en sera l’issue.

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Les éditions

  • La Fiancée du vent : L'histoire de la Corrivaux, née en Nouvelle-France et pendue sous le Régime anglais de Monique Pariseau
    de Pariseau, Monique
    Stanké
    ISBN : 9782760409590 ; 17,00 € ; 01/02/2004 ; 395 p. ; Broché
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