Citoyen de seconde zone de Buchi Emecheta

Citoyen de seconde zone de Buchi Emecheta
(Second-class citizen)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone , Littérature => Africaine

Critiqué par Septularisen, le 9 avril 2012 (Luxembourg, Inscrit le 7 août 2004, 56 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (13 101ème position).
Visites : 4 925 

VIVRE, SURVIVRE, EXISTER MALGRÉ TOUT…

«Citoyen de seconde zone» est tout d’abord l’histoire d’une femme et de sa vie . Cette femme c’est Adah une jeune fille innocente mais volontaire, qui a une passion : l’école et qui veut absolument s’instruire, et un rêve qu’elle a repris de son père, émigrer au Royaume-Uni afin d’y élever et d’instruire ses enfants.

Mais, elle n’est qu’une jeune fille de paysan, vivant au Niger, dans une société dominée par les hommes, et où le seul rôle d’une femme est de rapporter une dot à sa famille par son mariage, et ensuite de servir son mari et sa belle-famille en ayant le plus d’enfants possible, et des garçons de préférence…
Adah décide de se battre pour se sortir de sa situation et de sa pauvreté. Elle va à l’école contre l’avis de ses parents (l’école est réservée en priorité aux garçons et donc à son frère Boy), et réussit d’ailleurs très brillamment.
Mais la brusque mort de son père remet tout en cause… Selon les traditions ancestrales sa mère doit se remarier avec le frère de son défunt père, et elle est placée comme servante dans une autre partie de sa famille.
Encore une fois Adah doit se battre pour terminer ses études, et voulant fuir sa famille qui la traite en esclave elle se marie un peu vite à Francis, un jeune étudiant en comptabilité qui n’a pas d’argent pour lui payer une dot, mais qui par ce mariage, la libère. A la fin de ses études, Adah travaille comme bibliothécaire à l’ambassade Américaine. Au regard des critères traditionnels de la société Nigériane, elle est une femme riche et enviée du fait de fait de son salaire élevé et qui d’ailleurs fait vivre toute sa famille. Adah pourrait s’arrêter là, mais son rêve est toujours de s’installer en Angleterre.
Elle parvient enfin à persuader sa belle-famille de laisser partir, d’abord son époux Francis, qui doit poursuivre ses études de comptabilité et leur trouver un logement à Londres et ensuite elle-même et ses deux jeunes enfants…

Quelques mois plus tard, à son arrivée à Londres, Adah doit vite déchanter. Francis les accueille dans un logement délabré d’une pièce et n’a réussi qu’un seul de ses examens de comptabilité…
Ce n’est que la première désillusion d’une longue série…
Londres n’est pas la ville qu’elle avait rêvée. Elle est confrontée à des problèmes de logement, de travail, de racisme ordinaire, d’injustices, d’hostilité, d’affronts…
Elle s'aperçoit très vite qu'elle qui était une femme enviée dans son pays natal n'est plus en Europe qu'un "Citoyen de seconde zone"...
Elle à qui on avait appris à respecter l'"homme blanc" et qui croyait que tous les blancs étaient gentils et honnêtes, s'aperçoit qu’ils sont tout autant que les autres menteur, méchants, roublards, malhonnêtes…

De plus toutes ses tentatives pour surmonter ses obstacles se heurtent très vite à la volonté de son mari, qui depuis son arrivée à Londres a dévoilé sa vraie personnalité: un fainéant cupide et égoïste, qui compte sur l’argent du travail de sa femme pour faire vivre sa famille, dénué de tout sens des responsabilités, qui passe ses journées à dormir, à courir d’autres femmes et à battre la sienne si elle ose s'opposer à lui….
Adah comprend très vite qu’elle doit reprendre les rênes de sa vie, même si pour cela elle n'a d'autre choix que de quitter son mari…

Ce récit autobiographie racontant la vie de l’auteur au Nigeria puis ses premières années à Londres est d’une authenticité extraordinaire. Le livre se lit vite et facilement, l’écriture est belle, les mots simples, sans sophistication, coulent d’eux-mêmes, les pages se tournent sans vraiment que l’on ne s’en aperçoive… On est tour à tour surpris, indigné, heureux, malheureux, par le récit, on se prend à chaque instant à être à côté de l’auteur, à vouloir l’aider dans sa quête, dans sa vie…
Ce qu’elle décrit est parfois absolument hallucinant (voir l’épisode où l’auteur s’aperçoit que les biscuits qu’elle recevait des patrons Anglais qui employaient son père étaient des biscuits pour chien !...), car non seulement on a ici des descriptions du racisme le plus ordinaire (p.ex. personne ne veut louer des chambres à des noirs même s’ils ont largement de quoi payer le loyer…), mais on découvre aussi des exemples de discriminations entre les émigrés Nigérians eux-mêmes, qui se répartissent et s’aident seulement entre ethnies Ibos ou Yorouba…

On tient ici un de ces écrivains (avec entre autres Ben OKRI, Salman RUSHDIE, Hanif KUREISHI, V.S. NAPUL, Warwick COLLINS,…) qui représente le mieux cette littérature que le Royaume-Uni a «rapporté» de son ancien empire colonial. Et ce n’est pas quelques lourdeurs dans le style, quelques digressions un peu trop longues ou une fin du livre un peu trop rapide et un peu trop bâclée, qui me feront changer d’avis : il s’agit ici d’un livre et d’un écrivain absolument à lire et à découvrir!...

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10 étoiles

Critique de Imani (Toulouse, Inscrite le 31 janvier 2008, 43 ans) - 24 juillet 2015

Ce roman est n condensé du meilleur De Emecheta Buchi.
elle réussit la prouesse de susciter rage, émotions, réaction, dans ce roman qui pour moi est une pure merveille.
le combat de cette femme, immigrée, qui pourrait s'éteindre de trop aimer son époux... a de quoi nous tenir en haleine.
et lorsque l'on a l'impression de toucher le fond, notre personnage se relève comme pour nous dire que dans la vie, il faut se battre malgré tout.

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