Envoûtant

On suit la vie étudiante d’une prestigieuse école privée de la petite ville d’Haddan dans le Massachusetts, où le cadavre d’un étudiant solitaire sera découvert. La mort du jeune homme laisse plusieurs questions en suspens, le directeur veut étouffer l’affaire pour ne pas tacher la réputation de l’école, un policier est cependant bien décidé à découvrir la clé du mystère.

Le roman mélange le fantastique à la réalité comme Daphne du Maurier et l’action est subtile, tenue, ce qui rend le tout mystérieux et atmosphérique. La première centaine de pages est surtout consacré à peindre la vie des personnages principaux et à construire l’atmosphère de l’école. L’écriture de Hoffman a un grand pouvoir d’évocation. J’adore sa façon de dessiner les personnages, profonds et attachants.

J’ai vu le film en premier (avec Edward Burns), que j’avais aimé (j'ai toujours trouvé fascinant les fraternités, l'ambiance des écoles privées) ce qui m’a donné le goût de lire le livre, mais le livre est meilleur, bien meilleur. Un roman à la hauteur des grands comme Edgar Allan Poe, Antonia Susan Byatt, Daphne du Maurier et Patrick Süskind. Un livre que j’ai savouré.

« La Haddan School fut construite en 1858 sur les berges escarpées de la rivière Haddan, un terrain boueux et instable qui s'était avéré d'emblée un choix désastreux. La première année, à l'époque où toute la ville sentait les copeaux de cèdre, il y eut une énorme tempête, avec des vents si violents que quantité de poissons remontèrent à la surface des roseaux, puis se déversèrent sur le village en un nuage brillant d'écailles. Des torrents d'eau tombèrent du ciel, et au matin la rivière avait débordé, laissant les constructions en bardeaux fraîchement peints en blanc à la dérive, dans une mer sombre de lenticules et d'algues.
Durant des semaines les étudiants avaient été conduits en barque à leurs cours; les poissons-chats nageaient dans les jardins de vivaces submergés, observant le désastre de leurs yeux froids et vitreux. Chaque soir au crépuscule, le cuisinier de l'école s'installait en équilibre sur le rebord d'une fenêtre au deuxième étage, puis lançait sa canne pour attraper des dizaines de truites argentées, une espèce que l'on ne trouvait que dans le courant de la rivière Haddan, charnue et tendre, particulièrement délectable revenue à la poêle avec des échalotes.
Quand l'eau se retira, cinquante centimètres de vase épaisse et noire recouvraient les tapis dans les dortoirs; dans la maison du directeur, les moustiques commencèrent à éclore dans les éviers et les commodes. Les points de vue raffinés et ravissants sur le site, un paysage regorgeant de saules pleureurs et de nymphéas, avaient tant séduit les administrateurs qu'ils n'avaient pas réfléchi et fait construire trop près de la rivière; cette erreur architecturale n'avait jamais été réparée. Aujourd'hui encore, on trouve des grenouilles dans les tuyaux, les draps et les vêtements dans les placards dégagent une odeur caractéristique de plante aquatique, comme s'ils avaient été lavés dans l'eau de la rivière et n'avaient jamais bien séché. »

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  Le roi du fleuve [Texte imprimé] Alice Hoffman trad. de l'anglais (États-Unis) par Florence Bellot

  de Hoffman, Alice Bellot, Florence (Traducteur)
  Flammarion / Fiction étrangère
  ISBN : 9782080681553 ; 20,30 € ; 16/04/2004 ; 346 p. ; Broché

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