Eric Fottorino par Agnès Figueras-Lenattier, le 9 avril 2016

Journaliste, écrivain, Eric Fottorino a passé 25 ans au journal "Le Monde" qu'il a dirigé de 2007 à février 2011. En avril 2014, il fonde avec Laurent Greislamer et Natalie Thiriez l'hebdomadaire "Le 1". Il a publié son premier roman "Rochelle" en 1991 à 30 ans, et a obtenu de nombreux prix dont le prix Fémina en 2007 pour "Baisers de cinéma". Il vient d'achever "Trois jours avec Norman Jail", l'histoire captivante d'un écrivain qui répond aux questions d'une étudiante en littérature sur l'écriture et ses arcanes...

Vous avez publié votre premier livre "Rochelle" en 1991. Etait-ce autobiographique comme c'est souvent le cas lors d'un premier roman ?

Tous mes livres sont autobiographiques. Un peu plus que les autres écrivains, disons.

Vous avez également publié un livre sur vos 25 ans au journal "Le Monde" !

Oui, c'est un livre de 600 pages où je raconte mon parcours de journaliste, et ma découverte du métier. J'apprends ce qu'est un journal, je me familiarise avec l'Afrique, l'agriculture, la direction d'un quotidien. Ce sont tous ces moments là que j'évoque.

En tant que romancier, quels sont vos thèmes privilégiés ?

La quête d'identité à partir de l'enfance en particulier. C'est vraiment cela qui domine. Ce sont des thèmes qui me touchent, qui m'intéressent. Je les trouve inspirants pour un écrivain. Le regard de l'enfance, cette volonté de ne pas être dupe de ce que représente la vie d'adulte, et les mensonges qui l'accompagnent.

Vous voulez parler d'une certaine innocence !

Oui, et en même temps une forme de lucidité, d'exigence, voire d'intransigeance.

Vous avez obtenu de nombreux prix. Y êtes-vous particulièrement sensible ?

J'attache surtout de l'importance au prix des lecteurs, que ce soit le prix de "Elle", des bibliothèques ou des libraires. Ce sont des prix importants car ils sont réalisés d'après des coups de coeur de vrais lecteurs qui possèdent vraiment une sincérité et de l'enthousiasme. Cela dit, le prix Fémina est une très belle récompense, et je suis très heureux de l'avoir eu. Les prix servent à vous encourager, mais ce n'est pas une fin en soi non plus. C'est quelque chose qui permet au public de découvrir votre livre, votre travail et de ce fait, c'est toujours intéressant.

Avez-vous déjà jeté des manuscrits?

Il existe des textes que je n'ai pas gardés dans le sens où je ne les ai pas publiés. Certains sont maintenant anciens, et je ne pense pas qu'ils auront une vie très forte. Quelquefois, je jette sur le coup des choses qui ne me conviennent pas, mais lorsque ce sont des textes déjà construits, j'ai tendance à les conserver. De temps en temps, je les relis pour voir ce qu'ils pourraient donner par la suite.

Ecrivez-vous sur ordinateur ou au stylo?

Les deux. Il existe toujours un moment d'écriture manuelle, et un moment d'écriture sur ordinateur.

Plutôt le matin, le soir?

Je n'ai pas de règles. Par définition, je ne m'astreins pas à écrire tous les jours à telle heure. Il règnerait un côté mécanique qui me déplaît. On écrit quand on veut, quand on peut. Parfois c'est le matin, parfois le soir, ou la nuit. Dès lors que l'envie surgit, cette envie s'exprime à des moments que la vie permet.

Vous ne vous fixez donc pas comme objectif d'écrire un livre tous les ans, tous les deux ans!

C'est effectivement très variable. Cela se fait par images, par bribes. Ce sont des choses, des phrases que vous notez. Au départ, ce n'est jamais très construit. C'est un peu atomisé, atmosphérique, cela provient de l'air que vous respirez. Puis à un moment donné cela se cristallise, et l'envie prend le dessus. On ne démarre pas un roman comme ça. Il faut vraiment sentir derrière quelque chose d'assez dense et important. Cela demande de l'énergie que l'on ne peut pas canaliser pour tout et pour rien. Mais il peut y avoir des idées qui cohabitent, deux romans différents.

Par conséquent, vous n'êtes pas victime de la page blanche!

Non, la page blanche n'est jamais blanche. Il existe déjà ce que vous voudriez un peu mettre. Elle n'est donc pas si blanche que cela.

Faites-vous beaucoup de ratures?

J'écris un texte d'un seul jet, puis je le réécris. Partiellement, mais quand même en grande partie. Et puis après, je recommence encore. Disons que ce sont des jets entiers qui sont repris plusieurs fois quand même assez profondément, de manière assez bouleversée. Mais on ne peut malgré tout pas généraliser. Par exemple, pour " Trois jours avec Norman Jail", j'ai réécrit quatre fois. Au début, il il existe des réécritures importantes, et ensuite cela consiste davantage en un travail de rythme, d'élimination. En fait, écrire c'est éliminer beaucoup.

Est-ce que vous relisez à haute voix?

Oui, tout le temps. En tout cas quand je suis sur un intermédiaire, mais pas page à page. Quand j'ai fini, je relis à mi-voix, pas trop fort pour la musique du texte, pour entendre ce qui sonne faux. Si c'est le cas, cela veut dire que quelque chose n'est pas au point dans la construction.

Lorsque vous écrivez un livre savez-vous déjà la fin?

Ça dépend. Cela peut arriver, mais ce n'est pas systématique. Quelquefois au contraire, la construction se fait au fur et à mesure jusqu'à la fin. Pour " Caresse de rouge" par exemple, j'avais déjà la fin. D'ailleurs, celle-ci me troublait, et j'ai essayé de raconter comment l'on parvenait à cette fin.

Que ressentez-vous après avoir achevé un livre? Un soulagement?

Oui, un soulagement. Comme la sensation d'avoir terminé quelque chose. On n'est jamais sûr d'aller au bout d'un roman quand on le commence. L'expérience compte, mais en même temps elle ne suffit pas. Ce n'est pas parce que vous avez déjà écrit des romans, que vous les avez menés à bien, que vous allez pouvoir réitérer l'opération. Il règne toujours une incertitude. Je dirais même que plus on avance, plus c'est difficile. Je le ressens ainsi. Au départ, il règne peut-être une forme d'inconscience, on essaye sans trop savoir, et puis au fil du temps, on se rend compte de la difficulté. Sans doute aussi quand on a écrit un certain nombre de livres, on n'a moins de choses à dire, en tout cas sans risquer de les redire, ou d'être moins original, moins essentiel. Je ne dis qu'il faut alors s'arrêter, mais on n'est pas obligé de recommencer. Si on le fait, il faut avoir une bonne raison.

Est-ce le dernier livre que vous aimez le plus?

Je ne dirais pas cela. Mais ce qui est excitant, c'est lorsqu'un roman vous emmène là où vous n'êtes encore jamais allé. C'est le cas pour " Trois jours avec Norman Jail". Jamais, je n'avais considéré l'écriture comme pouvant être un objet romanesque. Et finalement, à force de prendre de petites notes, de remarquer des choses sur l'écriture, j'ai rassemblé les divers éléments, et j'ai ouvert un autre champ.

"Trois jours avec Norman Jail" est rédigé sous forme d'interview. C'est un peu votre expérience de journaliste qui ressort!

Une partie importante du récit, c'est vrai, c'est cette jeune femme qui va au devant d'un vieil homme. Cela fonctionne effectivement comme un entretien que l'on pourrait faire, même si ensuite le questionnement n'est pas vraiment journalistique. Est-ce que le fait d'être journaliste m'a servi. En tout cas pas consciemment. Cela m'a sûrement aidé pour certaines choses, mais probablement pas seulement pour ce livre là. Mais ce n'est pas la même temporalité, on ne cherche pas la même chose. Pour moi, ce sont plus des moyens qui me sont donnés, et le journalisme en fait partie. Mais ce n'est pas ce qui domine. Ecrire un roman, c'est faire surgir ce que l'on n'a pas l'habitude de lire ou d'écrire. Et là, on n'est pas dans le journalisme...

Dans ce livre, Norman Jail révèle ses secrets sur tout ce qui a trait à l'écriture. Est-ce que ce qu'il dit est le reflet de votre pensée ?

Oui, c'est assez largement ce que je peux ressentir ou penser. Et en même temps, c'est plein de contradictions. Donc ce que vous croyez un jour n'est plus nécessairement vrai le lendemain. Même au cours d'une journée, vous pouvez avoir une relation à l'écriture qui change. Celle-ci représente comme une sorte d'humeur bonne ou mauvaise. Le caractère de Norman Jail, qui est plutôt un mauvais caractère n'est pas vraiment le mien. Mais dans ce qu'il dit, il existe des ingrédients que j'ai puisés à travers ma propre expérience de l'écriture, ou dans la manière dont je me projette dans ce travail.

A un moment donné, Norman Jail parle d'un style qui va plus vite que lui. Un peu comme de l'écriture automatique. Avez-vous déjà ressenti cela?

Je ne sais pas si c'est de l'écriture automatique, mais c'est comme la sensation que la main ne va pas assez vite par rapport à ce que l'on a dans la tête, et ce que l'on a envie d'écrire. Cela m'est arrivé deux fois de ressentir que le livre existait déjà, et que la main était la greffière d'une écriture qui s'était formée ailleurs. Et qu'en quelle sorte, elle n'avait qu'à recueillir...

L'écriture comme le dit Norman Jail est-ce une manière de découvrir ce que l'on a en soi ?

Oui, elle met au propre quelque chose, elle met noir sur blanc des sensations, des révoltes. Justement ce que l'on n'a pas l'habitude de dire dans la vie courante, et que l'écriture révèle. L'écriture agit comme un révélateur. Les mots, il faut bien les décrire, et ils doivent dire quelque chose. Ecrire c'est avoir quelque chose à dire, et quelquefois c'est se rendre compte que l'on n'a rien à dire. Ce que Norman Jail dit là s'inspire pas mal de ce que je ressens.

Êtes-vous différent après avoir écrit un livre ?

Norman Jail affirme que l'on devrait être différent après chaque livre. Qu'un livre devrait nous changer. Cela dépend lesquels. Encore une fois c'est difficile de généraliser. Certains livres que j'ai écrits m'ont beaucoup marqué car j'étais arrivé au bout d'une histoire lourde ou complexe comme "Korsakov", " Caresse de rouge". D'autres ont laissé moins de traces en tout cas conscientes..

De quoi cela dépendait-il?

De la distance que j'avais avec le récit. Quand un livre émane de vous en profondeur et malaxe un peu tout votre être, vous en ressortez un peu essoré. Lorsqu'en revanche, même si vous y mettez de vous-même, vous maintenez une distance, vous êtes moins touché. Même si le récit est un peu difficile, vous restez toujours un peu en dehors. Disons qu'il existe des livres dans lesquels je reste plus extérieur, et d'autres où je m'implique complètement.

Et pour le dernier?

Je me suis beaucoup impliqué en tant qu'écrivain qui essaye de traduire ce que signifie le fait d'écrire. Mais je ne suis pas très proche personnages que j'ai mis en avant. Même ce vieil écrivain. Il peut dire des choses que je pense, et d'autres que je ne pense pas. Le personnage romanesque est assez loin de moi. Donc, l'engagement personnel est quand même moins fort.

Norman Jail est quelqu'un d'assez complexe!

Tout d'abord, il doit porter un autre nom comme écrivain, pour exister à ses yeux. Et puis c'est quelqu'un qui a eu une longue vie. Et l'on comprend que cette vie a vraiment été marquée par cette passion, cette rage d'écrire. Avec cette question écrit-on pour vivre ou vit-on pour écrire? C'est quelqu'un de complexe dans la mesure où tout ce qui constitue la vie, il le fait passer à travers le prisme de l'écriture.

Il affirme que l'on pense toujours que le livre que l'on va écrire plus tard sera le meilleur

En tout cas, c'est celui qui me donne le plus d'énergie, d'envie et d'appétit. Ce qui est passé est déjà mort, et à chaque fois que l'on sort un livre, c'est toujours un peu comme la lumière des étoiles. Il brille sur le moment, mais c'est déjà ancien dans notre esprit. On est déjà dans un autre, et il existe toujours cette notion d'inachevé, d'imperfection. Que l'on ne trouvera pas la perfection, mais que l'on va essayer à chaque fois de s'en approcher. Norman Jail dit pas mal de choses là-dessus qui sont assez justes de mon point de vue. C'est à dire qu'il règne toujours une déception plus ou moins grande autour d'un récit. Après, le temps fait son oeuvre, et l'on se défait un peu de ce récit puisqu'on lui a donné tout ce que l'on pouvait lui donner. Plutôt que de réécrire toujours le même livre, on va écrire une autre histoire. On met nos espoirs dans cette autre histoire, comme les a mis dans celle d'avant...

Il parle de l'égoïsme que constitue l'écriture

Il existe effectivement une part importante d'égoïsme, car l'on écrit d'abord pour soi. Dans ces périodes là, on se soustrait aux autres. L'écriture comme toute oeuvre de création artistique représente quelque chose que l'on donne aux autres, mais qu'on leur prend également. Cela va dans les deux sens.

Cet écrivain dit aussi que le fait d'avoir un métier à côté de l'écriture peut aider. Qu'en pensez-vous?

Oui, c'est mon avis. Quand l'écriture dépend de sa vie y compris matérielle, c'est une situation très difficile. Et puis même quand c'est possible, je pense que cela exerce une pression qui peut être néfaste. Ainsi, cela peut vous inciter à écrire des livres qui ne sont pas exactement ce que vous souhaiteriez qu'ils soient, du fait qu'il faut bien les vendre. C'est bien lorsque vous êtes dégagé des contingences économiques, quand vous n'êtes pas un écrivain qui écrit pour en vivre. L'écriture est d'autant plus vitale lorsqu'on n'en vit pas. Sinon, cela devient un métier, cela devient autre chose. Selon moi, si l'on veut garder cette liberté justement d'écrire ce que l'on a vraiment envie d'écrire, il faut surtout s'affranchir de toutes les contraintes possibles en particulier économiques et matérielles...

Comment opérez-vous avec les titres?

Certains titres s'imposent dès le début, d'autres n'apparaissent pas tout de suite. Il existe également des titres de travail importants pour travailler, chercher un peu son esprit. Mais on sait que ce ne sera pas le titre définitif. Et puis très souvent, le titre vient à la lecture du livre. Lorsque vous avez fini, que vous le relisez, un titre se dégage qui est déjà écrit dans votre texte courant.

Lisez-vous d'autres livres en pleine écriture?

Cela dépend, il y a lire et lire. Il existe des textes que je ne lirais pas quand j'écris. Des oeuvres très ambitieuses, de grands romans. Mais certains livres vous tombent un peu sous la main, et vous avez envie de les lire. On ne peut pas non plus s'interdire absolument de lire. C'est plus le choix des textes, de leur ampleur qui compte Je ne lis jamais d'ouvrages dont le thème pourrait être proche de celui que je lis. Je risquerais même d'aller y puiser des éléments qui me dévieraient de ma trajectoire. Or ne pas dévier, c'est important...

L'autre personnage de ce roman, l'étudiante en littérature possède une grande écoute!

Oui, et une certaine fraîcheur. Je ne dirais pas naïveté, mais elle se laisse prendre au jeu d'une certaine manière de cet entretien avec quelqu'un d'assez mystérieux. Elle voit qu'atour de l'écriture, il existe des éléments difficiles à cerner. Elle se situe un peu comme dans une chasse au trésor, elle a envie de comprendre. Et de savoir où se situe vraiment le fait d'écrire. Comment il naît, comment il disparaît, comment on le fait revivre. C'est vraiment quelqu'un de curieux, d'ouvert. On n'imagine pas son vrai statut dans le roman. Elle laisse percer un peu le trouble, pour faire penser au lecteur que derrière sa quête sur l'écriture, il règne une autre quête plus opaque, moins transparente.

Ce n'est qu'à la fin que l'on découvre pourquoi elle a été voir cet écrivain!

Ce que j'ai voulu c'est essayer de montrer en quoi un écrivain manipule son lecteur, et que l'écriture est une forme de manipulation. Et que l'on peut à un moment donné transgresser la réalité. Certaines choses se font, d'autres pas, et effectivement à la fin deux coups de théâtre vont mettre en abîme un peu tout le récit. C'est une manière de montrer que l'écriture est un matériau assez puissant. Il peut beaucoup bouleverser, c'est comme un jeu d'illusions. C'est presque une sorte de palais des miroirs où l'on ne sait plus à un moment donné où est le vrai, où est le faux.

On brouille les pistes!

Oui, même pour soi. Quand j'ai écrit ce livre, je ne savais pas du tout où il m'emmènerait exactement. Je savais qu'il y aurait une partie très romanesque et après une partie davantage axée sur une explication de l'écriture. Mais je n'aurais pas pu faire un livre qui n'était qu'une explication de l'écriture. Ou alors, cela aurait consisté en un essai, mais cela ne m'intéressait pas. Je voulais montrer que le matériau du roman pouvait être l'écriture en tant que tel. Qu'elle pouvait faire naître des personnages à qui il arrive des aventures, et pouvait vous entraîner vers des chemins complètement inattendus...

Vous dites que l'écriture est une forme de manipulation. Mais ça peut être dangereux!

Oui, bien sûr. On sort justement de la bonne compagnie d'un récit bien balisé qui vous emmène là où vous pensez que vous allez arriver. En écrivant, on peut effectivement dissimuler, désorienter. En en même temps, c'est en cela que c'est captivant.

L'écrivain a un chat. C'est le cas de beaucoup d'écrivains. Paul Léotaud, Colette etc. Cela peut-il être une source d'inspiration?

Il y a deux chats à la maison. J'aime bien leur compagnie car elle est silencieuse, autonome. Elle a quelque chose d'assez paisible et d'indépendant, ce qui est positif. C'est propice au calme, à la concentration. Ce n'est pas comme un chien que l'on doit tout le temps promener. Mais je pourrais écrire sans chat!...

Pourquoi un chat dans le roman? Qu'est-ce ajoute ?

Justement, il est silencieux, un peu mystérieux. Il dit quelque chose. Ce qui est intéressant, ce n'est pas tant qu'il y ait un chat, mais ce qu'il dit. C'est un chat qui griffe, qui observe, qui transmet une maladie. C'est un peu un passeur silencieux entre Norman Jail, son monde imaginaire et cette jeune femme qui est hébergée pendant quelques jours.

Norman Jail dit que le propre du grand livre c'est de pouvoir le relire avec la sensation de ne l'avoir jamais lu...

Oui, il nous a laissé des traces qui fait que l'on y revient et en même temps quand on le relit, les mots se réveillent et c'est comme une découverte. Il n'y a pas trop de trucs, de ficelles. Cela ne veut pas dire que le style soit flamboyant ou spectaculaire précisément. Ce sont quelquefois des textes plus sobres qui sont au fond plus marquants.

Vous aimeriez que l'on parle ainsi de vos livres!

Oui, ce serait formidable que l'on puisse sauver quelques pages de chaque livre. Dire "ces pages ressemblent à ça."

De manière générale, vous considérez-vous comme un écrivain qui a beaucoup souffert ?

Cela dépend des périodes de ma vie. Lorsque je raconte le suicide de mon père, on ne peut pas dire que c'est un livre léger...

Pensez-vous comme le disait André Gide que l'on ne peut pas faire de bons livres avec de bons sentiments? Ou qu'au contraire même les bons sentiments peuvent produire de bons livres?

Toutes ces phrases un peu péremptoires sont quelque peu glaçantes. En effet, cela voudrait dire qu'il existe un cadre dans lequel on peut faire de bons romans. Et que si on sort de ce cadre, on ne peut pas. Je ne crois pas cela.

Actuellement vous dirigez le journal "Le 1". Pourriez-vous nous en parler?

C'est un hebdomadaire à la fois littéraire et politique englobant un regard chaque semaine sur l'actualité. Il est éclairé à la fois par des écrivains, des poètes, des artistes et puis des chercheurs dans tous les domaines. Ce journal a au moins trois caractéristiques. Il ne contient pas de publicité, il se déplie pour devenir un grand poster, et il ne traite que d'un seul sujet. Cela peut être Daesh, le chômage, de grandes questions d'actualité du moment. "Le 1" considère que la littérature est aussi importante que la sociologie, l'économie, l'histoire pour donner du sens à l'actualité. Et l'on fait se rejoindre plusieurs disciplines pour mieux comprendre un sujet.

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