Abélard - L'intégrale de Régis Hautière (Scénario), Renaud Dillies (Dessin)

Catégorie(s) : Bande dessinée => Légende, contes et histoire

Critiqué par Blue Boy, le 9 mars 2014 (Saint-Denis, Inscrit le 28 janvier 2008, - ans)
La note : 10 étoiles
Visites : 3 470 

Un bijou d’émotion pure dans le fumier du monde

Abélard passe ses journées à jouer à la belote et à pêcher avec ses amis dans les marais. Il ne s’y passe pas grand-chose et le jeune moineau s’ennuie un peu. Une rencontre inopinée avec des touristes égarés va lui fournir le prétexte pour concrétiser ses rêves de voyage. Parmi eux, une jeune et jolie femme pour qui Abélard va avoir le coup de foudre. C’est alors que sa vie va basculer, son obsession première étant de partir à la ville afin de retrouver l’objet de son amour…

En attaquant les premières pages de cette BD « animalière », on ne sait pas trop à quoi s’attendre. Un décor idyllique avec des personnages à tête d’animaux dans une mignonne petite cabane au bord de l’eau, le tout dans un style « cartoon », ça donne un côté enfantin, à la limite presque mièvre. Mais en même temps, ça tape la belote, ça sirote des « binouzes » et ça cause argot. Et puis il y a ces petits papiers contenant des citations qui mystérieusement sortent chaque jour du chapeau d’Abélard, une jolie trouvaille. Du coup, on est un peu titillé, ce décalage entre le dessin et le propos est pour le moins paradoxal, et on est pressé de voir de quoi il retourne… Abélard veut donc parcourir le monde pour retrouver sa belle, c’est ainsi qu’on va le suivre dans son périple où rien ne se passera comme prévu, mais je ne peux décidément pas en dire plus…

L’histoire est à ranger dans la catégorie « quête initiatique », mais une quête étonnamment sombre avec une toute petite lueur au bout d’un tunnel peu rassurant, avec à la clé une réflexion grave et désabusée sur le voyage, la solitude, le racisme, l’intolérance, bref, le monde comme il va en somme... C’est aussi et surtout une magnifique - et je pèse mes mots - histoire d’amitié entre deux êtres (Abélard le moineau candide et Gaston l’ours grognon) qui n’ont a priori rien à faire ensemble… Quant au trait stylisé et empreint d’une belle poésie de Dillies, il confère idéalement un peu de légèreté à l’ensemble.

« Abélard » s’est avéré être pour moi une énorme claque mais une claque d’une infinie tendresse qui m’a laissé chancelant, brisé par l’émotion, laissant chaque pore de ma peau, chaque fibre de mon âme, en totale empathie avec ce tout petit personnage de rien du tout qu’est Abélard. Mais attention, aucune sensiblerie de pacotille ici ! C’est juste incroyable à quel point l’alchimie d’un dessin « naïf » allié à des textes graves voire pessimistes fonctionne bien ici et peut produire quelque chose d’extrêmement bouleversant.

Ceci n’est donc pas une BD pour enfants, vous l’aurez compris. Il s’agit plus exactement d’une BD qui parvient à nous rappeler, avec intelligence, qu’on a été un jour un enfant… Je ne peux ainsi qu’exprimer mon infinie reconnaissance à Régis Hautière et Renaud Dillies de nous avoir offert ce petit bijou à côté duquel il serait vraiment dommage de passer.

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