Aucune étoile aussi lointaine de Serge Lehman

Aucune étoile aussi lointaine de Serge Lehman

Catégorie(s) : Littérature => Fantasy, Horreur, SF et Fantastique

Critiqué par Kaftoli, le 17 avril 2011 (Laval, Inscrit le 29 mai 2010, 58 ans)
La note : 6 étoiles
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Le voyage sans fin...

Une écriture maitrisée, agréable, au service d'une histoire qui manque de mordant. Dommage. Je pensais avoir découvert Lehman avec ce roman mais, après une courte recherche, je me suis rendu compte que l'auteur avait collaboré avec Bilal (pour le film Immortel), puis qu'il avait scénarisé quelques bandes dessinées que j'avais lues. Bref, Lehman est un auteur francophone de science-fiction avec un talent certain, affirmé et confirmé.
En abordant Aucune étoile aussi lointaine, le lecteur plonge dans un univers codifié; il doit évidemment accepter ces prémisses et plonger. D'habitude, s'il accepte ce pacte avec l'auteur, c'est qu'il y a un dosage d'éléments extraordinaires, teintés de quelques délires (fantasmes) technologiques ainsi que des éléments qui appartiennent au domaine du connu: un système politique, une attitude humaine, parfois un décor ou un paysage. Dans cet opéra de l'espace (du moins c'est ainsi que la jaquette qualifie le roman), si effectivement les rencontres du protagoniste sont assez fascinantes, cela se fait au détriment de la trame narrative, laquelle laisse en plan des personnages secondaires intéressants et des histoires prometteuses, tout cela pour proposer au lecteur des enjeux si colossaux qu'ils dépassent les personnages eux-mêmes et laissent un petit goût d'ésotérisme philosophico-mythique, qui fait moins bien passer le menu général.
On reconnait les tics propres au genre. D'abord, les noms à consonance étrange, sinon étrangère, voire à l'orthographe complexe (Arkadith, Hker'n, Iaelle, Linred, Anubis, Cheele, Hgle'n…) Dans ce lot de noms parfois imprononçables, on sourit à la présence (trop courte) d'Hector, le droïde de service. Ensuite, certains noms courants prennent la majuscule (un vieux tic qu'on voyait chez Rousseau et dont Roland Barthes abusait): l'Égide, le Noyau, le Bouclier, l'Intelligence, l'Algue…
Dans ce genre de roman, les moyens de transport permettent de couvrir de vastes territoires et même de jouer avec le temps. Les créatures extraterrestres, si elles ne sont pas humanoïdes, elles sont étranges et inquiétantes. Dans ce roman de Lehman, tous les ingrédients s'y trouvent.
Aucune étoile aussi lointaine se divise en huit parties, toutes introduites par un extrait des Humeurs du ciel d'un auteur fictif Orson Malaverne, qu'on retrouvera par ailleurs dans d'autres textes du même auteur (Le livre des ombres, par exemple, paru en 2005). Dans le premier tiers, le narrateur suit le parcours du jeune Arkadith, jusqu'à ses seize ans environ. L'histoire du jeune prince, descendant d'une lignée de grands voyageurs (navigateurs), commence le jour où sa planète inaugure un nouveau mode de transport: le toboggan. Ce dernier rendra caduque l'usage des vaisseaux traditionnels. C'est là son drame: il a toujours rêvé de piloter de tels vaisseaux, comme ses ancêtres. Il s'entraine d'ailleurs avec son grand-père depuis son plus jeune âge. Sa sœur, Iaelle, de quelques années son aînée, se destine à remplacer sa mère à la tête du pays. Le climat politique est tendu; la relation entre Arkadith et sa sœur, aussi. On pense que l'intrigue va aller dans ce sens, explorer la dynamique qui s'est installée entre les deux rivaux. Mais non. Le jeune Arkadith apprivoise sa sexualité, fait la rencontre d'une jeune fille avec qui il aura une brève relation, puis, alors qu'on s'intéresse au destin de ce personnage, voilà qu'on en introduit un autre.
C'est cette valse de personnages qui m'a le plus déçu. La plus longue relation qu'entretient Arkadith avec une entité intelligente, ce sera avec son Vaisseau, une mécanique aussi complexe qu'ancestrale, qui s'est donné la mission de retrouver et de détruire le Noyau, il y a quelques centaines d'années déjà. Le vaisseau a une personnalité et s'appelle Anubis.
Les échanges entre le pilote adolescent et l'entité Anubis sont empreints parfois de naïveté ou alors d'une trop grande familiarité loquace: ils minent la crédibilité d'ensemble:
Dis donc, murmura la voix de l'Anubis dans son oreille. Je t'ai déjà connu en meilleure forme. Qu'est-ce qui se passe ? (p. 194)
Malgré tout la quête du Noyau qui motive tout le périple d'Arkadith est semée de rencontres extraordinaires d'un certain intérêt. Il n'y a qu'à penser aux Basilics, formes insaisissables et colossales; à l'Algue, végétal planétaire doté d'une intelligence et d'une très grande puissance. Ces inventions, malgré le fait qu'on verse dans de trop longues discussions pas toujours utiles, compensent un peu l'impression que les pérégrinations du protagoniste auraient pu s'éterniser tant elles reposent sur un schéma narratif somme toute fort simple: A rencontre B, puis C, puis D, puis E, etc. dans le seul but d'atteindre Z.
Bref, ce roman, bien écrit, m'a fait découvrir un auteur francophone de science-fiction, qu'il pourrait être intéressant de suivre. Loin d'être un chef-d'œuvre du genre, le roman divertit, ce qui n'est pas rien.


Quelques courtes critiques en vrac, sur le même roman : http://noosfere.com/icarus/livres/…
Une critique dithyrambique: http://scifi-universe.com/critiques/…
Sur l'auteur:
http://www.fantastinet.com/serge-lehman/
http://fr.wikipedia.org/wiki/Serge_Lehman
Une critique que je partage: http://senscritique.com/livre/…

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Les éditions

  • Aucune étoile aussi lointaine [Texte imprimé] Serge Lehman
    de Lehman, Serge
    J'ai lu / J'ai lu.
    ISBN : 9782277260035 ; 3,38 € ; 01/11/1998 ; 370 p. ; Broché
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