Werner Best de Ulrich Herbert

Werner Best de Ulrich Herbert
( Best : biographisches [sic] Studien über Radikalismus, Weltanschauung und Vernunft, 1903-1989)

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Histoire

Critiqué par Bolcho, le 17 juillet 2010 (Bruxelles, Inscrit le 20 octobre 2001, 75 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (13 108ème position).
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Comment peut-on être nazi ?

Ce livre imposant a l’apparence d’une biographie de dirigeant nazi.
Mais il va bien au-delà et répond en partie à cette question : comment des gens hyper-civilisés, cultivés, subtils, sont-ils devenus des criminels nazis ?

L’explication commence dans l’immédiat après-guerre, en 1918 et elle concerne essentiellement la génération d’adolescents de l’époque. Il y a une réaction quasiment unanime de la population allemande contre les forces d’occupation françaises, pour un ensemble de raisons : l’impression de non défaite militaire, l’attitude arrogante de l’occupant, l’exploitation économique subie, la tentative d’imposer le français dans les écoles, la censure des livres d’histoire et de la presse…
Cette présence française est largement à l’origine de l’inclination à juger des problèmes politiques sous l’angle patriotique.
Pour cette jeunesse, c’est la notion de peuple qui est centrale. C’est la pensée en termes völkisch, contre les forces destructrices de l’internationalisme, perçu comme menaçant (social-démocratie, SDN…). C’est une philosophie politique dans laquelle l’appartenance à un peuple est considérée comme le facteur déterminant pour la vie de l’individu comme pour l’évolution de l’ « Histoire ». Les antagonismes et les conflits ne s’établissent pas entre les classes sociales mais entre les peuples. La volonté du peuple ne s’établirait pas au travers de la volonté de la majorité mais via l’ « essence » du peuple et elle s’incarnerait dans les chefs de génie. Il est possible d’assimiler des fractions de peuples étrangers mais cela ne peut réussir que s’il s’agit de peuples apparentés. Le sujet de l’Histoire reste le peuple et non la race.
Cet accent mis sur le peuple fait passer au premier plan l’affinité entre tous les Allemands, au-delà de leurs différentes nationalités et par-delà les frontières, jugées arbitraires, qu’impose le traité de Versailles.

A l’inverse, il faut exclure du peuple allemand les citoyens qui ne sont pas d’extraction allemande. Les juifs constituent le seul groupe important. C’est assez différent de l’antisémitisme traditionnel en Europe : l’antisémite combat le Juif parce qu’il est juif, le Völkisch rejette le Juif comme il rejette les autres éléments d’extraction étrangère. Et il va même jusqu’à louer l’attitude « völkisch » des Juifs s’engageant dans le sionisme.
Après la tentative de putsch de Munich, les intellectuels du mouvement völkisch se tournent – avec une sorte de mépris pourtant – vers le mouvement de Hitler, plébéien et tourné vers l’action. Par exemple, en ce qui concerne la question juive, des gens comme Werner Best prennent leur distance avec le sentiment de haine. Pour eux, les querelles entre les peuples sont affranchies de toute préoccupation morale. On peut combattre l’adversaire, aller jusqu’à l’anéantir, mais sans le haïr, en se soumettant à l’accomplissement des lois de la nature et à la poursuite des intérêts de son propre peuple.

Plus tard, les appels répétés de Röhm (la SA) à la « poursuite de la révolution » alarment les groupes dirigeants conservateurs de l’économie et de l’administration : la perspective d’un « bolchevisme brun » les préoccupe d’où le démantèlement sanglant de la SA en 1934.

L’auteur nous conte par le menu le destin de Werner Best, successivement organisateur de la police politique, puis en poste à Paris et enfin au Danemark. Les lecteurs intéressés par les luttes de pouvoir entre les différentes factions du parti ou les différentes administrations policières se régaleront mais je conseille surtout l’ouvrage à ceux qui continuent à se demander pourquoi et comment des gens intelligents en sont arrivés là.

Avec, en arrière plan, l’angoisse sourde que d’autres folies, nées d’autres idées, entraînent des peuples entiers à s’exterminer. Il ne faut pas chercher bien loin, aujourd’hui (y compris dans de grands pays « démocratiques »), des exemples de réflexes identitaires, religieux ou idéologiques qui font peser des menaces.

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Werner Best un nazi de l'ombre

10 étoiles

Critique de Sknner06 (, Inscrit le 24 août 2010, 71 ans) - 24 août 2010

je suis en train de lire ce livre vraiment intéressant, très fouillé

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