Art poétique de Eugène Guillevic

Art poétique de Eugène Guillevic

Catégorie(s) : Théâtre et Poésie => Poésie

Critiqué par MOPP, le 22 mai 2005 (Inscrit le 20 mars 2005, 87 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (11 893ème position).
Visites : 4 893  (depuis Novembre 2007)

"Quanta de poésie"

La brièveté des poèmes de GUILLEVIC correspond à sa recherche de l"élémentaire"... Tout cela est bien expliqué dans une longue préface de Serge Gaubert.

Mais de quoi s'agit-il ? Vers 12 ans, GUILLEVIC fut contraint par sa mère d'écrire une lettre à l'adresse du Directeur de l'Assistance publique, lui demander d'accepter cet enfant si mal né (malgré son prénom). C'est ce fait qui conduira le poète vers l'écriture afin de tenter de se redresser.

Comment passer de l'horizontalité des marais à la verticalité des stèles ?

Dans ce gros recueil, vous trouverez d'abord :

PAROI (l'auteur est face à ce mur qu'il tente de renverser ou de transpercer...)

"Etre paroi.

Se confondre
Avec la paroi.

L'intégrer.
S'intégrer.

Rêver le temps
Devenu corps."

Ensuite vient ART POETIQUE, ce lent redressement:

"Quand un poème t'arrive,
Tu ne sais d'où ni pourquoi,

C'est comme si un oiseau
Venait se poser dans ta main,

Et tu te penches,
Tu te réchauffes à son corps.

On peut aussi partir
A la recherche de l'oiseau."

Ce poème dit bien ce qu'est un poète !

"Il n'aura pas,
Mon poème,
La force des explosifs.

Il aidera chacun
A se sentir vivre
A son niveau de fleur en travail,

A se voir
Comme il voit la fleur."

Car il n'est point question de concept, ni de grands mots, mais de vie, cette fois, avec la fleur, avec les nuages qui passent, avec ce chant qui peut être silence (p. 157, p. 159, ...) Notez aussi l'absence presque totale des adjectifs.

Alors arrive LE CHANT.

"Communion
Entre le chant du grillon
Et la mûre dans son buisson."

Chant de la simplicité, de l'élémentaire, des éléments du Cosmos.

"Par temps sec
Essaie de capter
Le chant des vers de terre."

"Le chant de l'oisillon -
Parent
Du chant de l'humus."

Tout est dit, poème tellement proche du haïku...

"Au mur lui-même
Il arrive

De chanter l'espoir."

Cet espoir, pour le poète, c'était de retrouver l'identité du père qui l'aimait, lui, GUILLEVIC, sans prénom.

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Jolie poésie contemporaine

9 étoiles

Critique de Nathafi (SAINT-SOUPLET, Inscrite le 20 avril 2011, 57 ans) - 15 octobre 2011

Ma crainte d'aborder une oeuvre de poésie contemporaine s'est envolée avec Guillevic.

On y trouve une jolie cadence, de belles images, des émotions pures, des sentiments assumés, aucune vulgarité, c'est un réel plaisir de lire ces trois livres réunis.

"Si tu m'aimais

Comme tu aimes
Le poème que tu cherches,

Peut-être
Tu n'écrirais plus."

A lire sans hésiter !

"La nature ignore l'adjectif."

8 étoiles

Critique de Lucien (, Inscrit le 13 mars 2001, 68 ans) - 22 mai 2005

Je n'ai pas lu ce recueil mais trouve très touchante la lecture de MOPP.

"Mais de quoi s'agit-il ? Vers 12 ans, GUILLEVIC fut contraint par sa mère d'écrire une lettre à l'adresse du Directeur de l'Assistance publique, lui demander d'accepter cet enfant si mal né (malgré son prénom). C'est ce fait qui conduira le poète vers l'écriture afin de tenter de se redresser." L'écriture comme exutoire ou catharsis, qui produit aujourd'hui, souvent, de longs textes pathétiques, chez Guillevic des poèmes brefs, retenus. Perec aussi parle dans tous ses livres de la fracture qui fonde sa vie sans jamais sombrer dans le pathos.



"Comment passer de l'horizontalité des marais à la verticalité des stèles ?"

"Les sourcils sont horizontaux
Le nez est vertical", dit la sagesse Zen... Les choses sont à leur place...



"Etre paroi.

Se confondre
Avec la paroi.

L'intégrer.
S'intégrer.

Rêver le temps
Devenu corps."

... comme un boddhisattva en zazen...



"Il aidera chacun
A se sentir vivre
A son niveau de fleur en travail,

A se voir
Comme il voit la fleur."

Thich Nhat Hanh propose cette méditation :

"J'inspire et je suis fleur,
J'expire et j'ai la fraîcheur de la fleur..."




"Car il n'est point question de concept, ni de grands mots, mais de vie, cette fois, avec la fleur, avec les nuages qui passent, avec ce chant qui peut être silence (p. 157, p. 159, ...) Notez aussi l'absence presque totale des adjectifs."

Claude Roy disait : "La nature ignore l'adjectif"...




"Communion
Entre le chant du grillon
Et la mûre dans son buisson."

"Le chant de l'oisillon -
Parent
Du chant de l'humus."

"Tout est dit, poème tellement proche du haïku..."

Oui, le haïku, comme écho des paroles de maître Dogen :

"Pratiquer la Voie du Bouddha, c'est s'étudier soi-même;
S'étudier soi-même, c'est s'oublier soi-même;
S'oublier soi-même, c'est s'éveiller avec toutes les existences."


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