Jacques Kober : Jasmin en dominante

Jacques Kober écrivait en 1947 : "trop longtemps les jeunes artistes ont vécu l'air raréfié du chef-d'oeuvre. Ils peignaient sur la toile de fond des musées, écrivaient dans l'itinéraire des biographes. Ils ont tourné en rond jusqu'à devenir eux-mêmes pommes, mais rien de bombé qui remplit et repousse ce moule de théâtre". Or, justement, l'auteur est aux antipodes de la nature morte ou de l'itinéraire des biographes. Cette "édition du cinquantenaire" de Jasmin tu es matelot le prouve et ce sera pour beaucoup une révélation tant l'oeuvre donne un coup de sang, un coup de neuf à la poésie ambiante.

Se moquant des genres, surgissent ainsi ce qu'on appellera des stances rares ou des moments privilégiésà propos de la Femme qui n'est pas ici une idée mais un condensé des femmes aimées par le poète. Qu'on se rassure : rien de platement biographique ici, tout est métamorphosé au nom de Celle que le poète entend et voit dans son sommeil profond car il n'est pas de sommeil si profond qu'il l'empêche de la voir et de l'entendre. Échappant à tout effet de dilatation feinte elle devient éclatement du réel au moment même où elle semble échapper :
"mystère pour moi que des échasses de sable me séparent de la chair sans duvet, voile que déjà le jasmin éventre",
il ne s'agit pas, alors, d'entrer en surréalité mais en réalité, en réalité confondante.

Jean-Paul Gavard-Perret

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  Jasmin tu es matelot

  de Kober, Jacques
  Rafael De Surtis
  ISBN : 9782912271297 ; 01/01/1998 ; 60 p.