Quand je reviendrai de Marco Balzano

Quand je reviendrai de Marco Balzano
(Quando tornerò)

Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone

Critiqué par Septularisen, le 18 mai 2023 (Luxembourg, Inscrit le 7 août 2004, 56 ans)
La note : 6 étoiles
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LE DRAME DE L’ÉMIGRATION.

Au début de l’histoire nous sommes en Roumanie post-communiste, dans le petit village de Rãdeni, près de la frontière avec la Moldavie, ravagé par le chômage et la pauvreté. Un matin, Manuel, seize ans, et sa grande sœur Angelica, vingt-quatre ans, découvrent que leur mère, Daniela 47 ans, les a quittés en pleine nuit, sans en parler à personne. Elle est partie en autobus en Italie, à Milan où elle a trouvé du travail comme assistante de vie.

En effet, avec Filip son mari qui est aussi au chômage, elle n’avait d’autre choix que de se sacrifier pour aider sa famille à vivre, pouvoir financer les études de ses deux enfants et les travaux de rénovation de leur vieille maison. Le jeune Manuel supporte très mal cette situation, d’autant plus que bientôt c’est aussi son père, Filip, qui s’en va exercer le métier de chauffeur de camion en Pologne, et Angelica qui part suivre des études à l’université. Manuel, - malgré la nouvelle et relative aisance matérielle offerte par l’exil forcé de leur mère -, souffre de plus en plus de l’absence de celle-ci et se sent abandonné de tous… Très vite, entraîné par ses mauvaises fréquentations, Manuel «tourne mal»!..

L'adolescent ne trouve du réconfort et de l’affection qu’après de Papy Mihai, son grand-père maternel, qui l’initie aux métiers manuels, au jardinage et a l’agriculture. Malheureusement, ce dernier meurt de façon inattendue…

«Quand je reviendrai» est le cinquième roman de l'auteur italien son premier livre chorale à trois voix. Marco BALZANO (*1978), donne tour à tour la parole à Manuel (le fils donc), puis à Daniela (dite Moma, la mère) et enfin Angelica (dite Bumba, la fille aînée). Déjà, je dois dire que c’est dommage que l’écrivain italien n’ait pas aussi donné la parole à Filip Matei le père de famille, qui est quand même partie prenante, et qui revient tout au long du récit. Je pense que le récit aurait beaucoup gagné en intérêt et en «épaisseur», grâce à cela.

Si M. BALZANO nous restitue les trois voix de manière admirable, il nous les restitue trop de manière identique. Sur le même ton, un peu monocorde, tristounet, nostalgique, un peu distancié… On a donc beaucoup de mal à croire que ce sont trois personnes différentes qui parlent… C’est toutefois une très belle analyse des liens familiaux. Les relations entre la mère et sa fille, - qui a été obligée de prendre la place de celle-ci, après son départ -, notamment, sont aussi très finement décrites… La troisième partie du livre, qui nous présente la confrontation entre la mère et la fille, est d'ailleurs, - et de loin -, la plus intéressante et la mieux réussie du livre.

Que dire de plus? On peut aussi dire que l’écriture de M. BALZANO n’a rien d’exceptionnel. Ni dans le choix des mots, ni dans le style. Mais elle est belle, bien adaptée et suffisante au récit qu’il nous propose. Elle coule douce, délicate, sans accroc, sans nous heurter, même quand les pages deviennent «bouleversantes» et nous décrivent des situations très tragiques du cours de la vie.

Je dois être franc, je n’ai pas été très… disons «touché» par l’histoire elle-même! Je ne suis pas arrivé à «entrer» dans l'histoire, je n'ai pas réussi à croire à l'histoire... Je comprends que l’auteur veut ici nous faire partager une critique de la société, mêlée avec l’analyse psychologique d’une famille «explosée» par le phénomène de l’émigration. Je suis d’accord, et je n’ai rien contre cela… Mais pourquoi vouloir nous le présenter tout le temps avec toute cette tristesse, toute cette nostalgie, tout ces aspects négatifs, tout ce pathos?
On a vraiment l'impression qu'il y a deux camps. D'un côté les «méchants» employeurs italien, qui ne cherchent qu'une main d’œuvre pas chère pour s'occuper de leurs «vieux», corvéable et serviable à merci, et de l'autre les «gentils» immigrés roumains, qui ne pensent qu'à s'en sortir et qui passent leurs temps à se faire voler et exploiter... Un peu réducteur pour une critique qui se veut impartiale de la société, non?
A croire que M. BALZANO découvre le drame de l’émigration et les drames qui vont avec. A croire qu’il ne sait pas que l’Italie, après avoir été un pays d’émigration, est devenu un pays d’immigration? Que nos pays dit «riches» attirent aujourd’hui une immigration destinée à occuper tous ces métiers que les autochtones ne veulent plus occuper? Toutes ces personnes âgées et malades dont leurs enfants ne veulent plus s’occuper? Que cela entraîne des drames familiaux?

Je finis donc un peu déçu. Ce n’est pas mauvais, entendons-nous bien, mais ce n’est pas exceptionnel non plus! Disons aussi, que peut-être, - ayant lu tous les autres livres de l’écrivain italien traduits en français -, je m’attendais à mieux et que mes attentes étaient peut-être trop élevées… Est-ce que je conseille la lecture de ce livre? Oui, bien sûr sans hésiter une minute! Cela reste tout de même un très bon livre! Toutefois, si vous voulez avoir une idée de la véritable valeur de cet écrivain, je conseille de commencer par son livre «Je reste ici» (1).

(1) : Cf. ici sur CL : https://critiqueslibres.com/i.php/vcrit/57862

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