Rienne de Rodica Draghincescu

Catégorie(s) : Théâtre et Poésie => Poésie

Critiqué par JPGP, le 29 avril 2023 (Inscrit le 10 décembre 2022, 77 ans)
La note : 8 étoiles
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Rodica Draghincescu : les mots et les choses

« Rien n’est éternel et immuable, l’objet pleure dans le jeu, avec le nom qui le compose ». Mais ce n’est pas tout plus les mots sont montés en  pleine lumière plus leur zone d'ombre est grande rappelle Rodica Draghinecu.

C’est pourquoi il faut toujours remonter à l’intensité lumineuse des mots même si plus on avance leur contour s’estompe. Leur rose devient incolore mais suscite toujours la même hypnose. Les mots peuvent dont devenir « l’image inversée de soi-même. Avec son propre nom dans tout autre chose ». Ils inscrivent donc un devenir qui se cherche à tâtons dans l’espoir de découvrir à travers eux un sens au monde et à soi-même.

Tels, eux-mêmes, des objets noirs les mots résonnent d’appel, sont producteurs de clés qui transforment le corps et l’âme. Entre lumière et éclipse tout projet poétique est donc le signe d’un manque projeté en fidélité à la recherche d’une zone « épidermique », sombre, confuse qui permet de s’interposer face à l’opacité de l’être.

Par ce que la poétesse nomme l’état « patibulaire » des mots un je plus transparent affleure peu à peu. A la condition suprême de ne pas faire de langage un simple miroir de l’âme ou du corps. C’est pourquoi la poétesse n’exclut pas les rebuts car ils risquent de faire parler ce qui se dit en angles morts de l’irrécupérable qui nous aveugle.

« Lignes / Mur de(s) mots. /Mots de(s) murs. /Démons de-mûrissez! / Succession de vagues / Plusieurs réalités exhaustives » écrit la poétesse. Sonder êtres et les choses rend possible au-delà des exercices des passions tristes de penser « l’arbre généalogique mène aux racines de l’au-delà » et aux vérités qui nous inquiètent. C’est le seul moyen qu’un réel ait lieu au-delà de tout ce qui sécurise.

C’est ainsi que « la chose des choses est indispensable au cerveau », elle permet hors mythologie d’atteindre la « choséïté » cher à Beckett. Ce n’est pas facile mais c’est bien là que la poésie a son mot à dire. Et si une voie ne réussit pas il faut au poète toujours essayer autre chose au-delà des préjugés. C’est le seul combat à mener ; « Je veux anéantir les choses » écrit Draghinescu et ce pour montrer ce qui se cache derrière. Le tout dit-elle avec les « rires qui arrachent l’infini ».

Jean-Paul Gavard-Perret

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