Tu es une rivière de Chi Li

Tu es une rivière de Chi Li
( Ni shi yi tiao he)

Catégorie(s) : Littérature => Asiatique

Critiqué par Léonce_laplanche, le 25 octobre 2004 (Périgueux, Inscrit le 22 octobre 2004, 87 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (22 898ème position).
Visites : 5 551  (depuis Novembre 2007)

Bon livre et bel objet

Chi Li est chinoise et vit en Chine, elle est née en 1957 à Wuhan, elle a exercé la médecine quelques année avant de se consacrer à la littérature.
Elle est considérée comme l'auteur le plus représentatif du courant néoréaliste.
Chi Li nous présente l'histoire de Lala qui devient veuve à 30 ans alors qu'elle a déjà sept enfants, et en attend un huitième.
Nous sommes en 1964, les temps sont très difficiles en Chine, c'est la période de la révolution culturelle, et l’on va suivre l’évolution de cette "petite" famille pendant 25 ans.
Ce livre intéressant est écrit simplement, tout pathos est écarté. Seuls les faits et évènements sont présentés: la petite histoire de la famille dans la grande histoire de la Chine.
On ne peut s'empêcher de penser par moment à "Balzac et la petite tailleuse chinoise", mais je trouve Chi Li plus percutante et plus efficace que Dai Sijie, et ce avec une économie de moyen remarquable.
En bref, un bel et bon livre (format idéal, couverture magnifique!).

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Les éditions

  • Tu es une rivière [Texte imprimé], roman Chi Li trad. du chinois par Angel Pino et Isabelle Rabut
    de Li, Chi Pino, Angel (Traducteur) Rabut, Isabelle (Traducteur)
    Actes Sud / Lettres chinoises.
    ISBN : 9782742747658 ; 16,30 € ; 02/03/2004 ; 202 p. ; Broché
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La vie n'est pas un long fleuve tranquille

9 étoiles

Critique de BMR & MAM (Paris, Inscrit le 27 avril 2007, 64 ans) - 2 février 2008

Avec Triste vie, on connaissait Chi Li, auteure connue pour être une figure de proue du néo-réalisme chinois ...
Revoici dame Chi Li avec Tu es une rivière.
Et c'est pas plus gai que Triste vie, l'auteure ne renie pas son étiquette : Lala se retrouve veuve à trente ans, affligée de 7 gamins et c'est la dure et sordide vie de cette famille de la Chine profonde qui nous est contée ici, du début des années 60 à la fin des années 80.
En chinois, l'idéogramme qui signifie population représentait (avant la simplification de l'écriture) ... une bouche à nourrir !
La prose de Chi Li est toujours aussi simple, claire et fluide (les 200 pages défilent presque aussi vite que le minuscule Triste vie).
Elle convoque d'un ton très égal les menus soucis et les grand drames, les brosses à dents et les puces ou les poux, les amours folles et les morts cruelles. Bref, la vie, toute la vie et rien qu'elle.

[...] - Est-ce que l'eau courante a été installée au bout de la ruelle ?
Yanchun se précipita, d'un air docte, pour répondre par l'affirmative. On avait déjà commencé à vendre l'eau. C'est la femme de Sun Guai qui était chargée de surveiller le robinet, et elle percevait deux fen pour deux seaux d'eau. À la maison, ils avaient deux seaux moyens - plus grands que les petits mais plus petits que les grands -, si bien qu'ils payaient moitié prix, ce qui était avantageux.

Comme dans l'opuscule précédent, on retrouve ici aussi les enfants au centre du roman (et il y en a !). Ils ne sont pas qu'un décor et les relations parents/enfants sont décortiquées sous le scalpel de Chi Li, et c'est plutôt rude.

[...] Quand Wang Xianlang voulut lui répondre, il demanda à Lala si elle avait quelque chose à transmettre à sa fille :
- Oui, dit-elle : Dong'er, tu as vraiment le coeur trop dur; j'ai peut-être des torts envers toi, mais ça n'empêche, je t'ai portée pendant neuf mois, et c'est moi qui t'ai torché les fesses !
Wang Xianlang ne fit pas la commission.

Dans cet intéressante histoire de la famille de Lala, c'est aussi plus de trente ans de l'histoire contemporaine chinoise qui défilent avec les années de la Révolution Culturelle et la ruralisation forcée, tous ces événements qui n'en finissent pas de hanter la littérature chinoise.
Des événements sur lesquels Chi Li porte un regard presque nostalgique, comme d'ailleurs on avait déjà pu le relever dans Triste vie.

[...] Quelque soit la façon dont, plus tard, l'histoire raconterait ce vaste mouvement d'exode des jeunes instruits, Dong'er ne le renierait jamais.

Des événements vus par le petit bout de la lorgnette, depuis une petite ville de province (une écume qui témoigne ainsi de la violence de ces vagues de fond qui ébranlèrent ce pays gigantesque et son milliard d'habitants).
L'écriture facile et rapide de Chi Li accentue le mouvement : le torrent de la vie emporte tout sur son passage, certains se retrouveront abandonnés sur la rive, d'autres finiront noyés ou brisés sur les rochers, mais le flot tumultueux poursuit inexorablement son chemin, emportant avec lui ceux qui auront survécu.
La rivière de la vie c'est aussi l'histoire récente de la Chine : un pays démesuré et son innombrable peuple qui auront dévalé en moins de trente ans la route chaotique que nous avons mis plus d'un siècle à parcourir.
Comme celle de la vie, cette rivière-là n'aura pas été un long fleuve tranquille.
Triste vie prolonge ce flot en décrivant « la suite », les années 80/90, l'industrialisation et la modernité.

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