Homme invisible, pour qui chantes-tu ? de Ralph Ellison

Homme invisible, pour qui chantes-tu ? de Ralph Ellison
(Invisible Man)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Jackobe, le 21 septembre 2004 (Inscrit le 8 juin 2004, 45 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 6 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 4 étoiles (54 902ème position).
Visites : 10 178  (depuis Novembre 2007)

Le cauchemar humain

L'Homme Invisible est l'unique roman publié par Ralph Ellison de son vivant. Selon ses propres dires, il aurait proprement passé sept années de sa vie a composer la pharamineuse trame de son récit. Particulièrement révélatrice qu'en à sa justesse idéologique, l'histoire décortique la condition de l'individu Noir aux Etats-Unis durant la période de l'après-guerre. Sous un angle subtil, soutenu par une faculté d'analyse distanciée proche de la perfection, se déroule sous nos yeux un drame humain diabolique d'exactitude.
Le narrateur, de nom inconnu, est un jeune homme Noir pétri d'humanisme naïf, croyant que chaque individu, fut-il noir, blanc, en arc-en-ciel, détient sa place dans le carcan sociétal de son pays pour peu qu'il fasse preuve d'assiduité, d'ardeur au travail et d'une certaine déférence à l'égard de l'Homme Blanc. De là, on comprend vite que l'Homme Invisible c'est lui : l'Homme Noir ; sensément libéré de son étreinte esclavagiste 80 ans plus tôt par le colon américain. Mais la réalité est toute autre, complexe et camouflée. Insidieuse, la ségrégation est toujours bien présente, bien organisé hiérarchisée à outrance, même dans les régions du Nord, historiquement plus progressistes mais où en réalité, le racisme est plus sournois que jamais, caché dans les failles du mythe américain, à disposition de l'Homme Blanc, retord et manipulateur, qui détient le pouvoir, recourant aux moyens les plus pernicieux pour préserver sa main mise sur l'équilibre précaire né de son activité, de ses mensonges orchestrés aux yeux de tous. Affabulation d'autant plus dangereuse s'il en est.
Au travers de son initiation à l'âge adulte, notre jeune narrateur, personnage brillant, orateur de talent, charismatique, se rend progressivement compte qu'aucunes de ses dispositions, qu'aucuns de ses talents, se sera jamais jugés à leurs vrais mesures tant lui-même est invisible dans un pays qui lui refuse sa place. Le Noir est translucide malgré lui.
La qualité proprement géniale du roman est de préserver ainsi la continuité du récit au milieu de la thèse qu'il défend : décrire de façon complexe, sans tomber dans les lieux communs, l'effrayante vérité sociale qui se décante sous nos yeux en des pages magnifiques, taillées d'une écriture inaltérable, conjuguées néanmoins à un certain classicisme hérité du XIX siècle.
La facture psychologique, en particulier, n'est pas sans rappelé Dostoïevski : étirement des scènes jusqu'à leur distorsion, absurdité des conflits verbaux entre personnages totalement dissemblables, scènes presque mystiques, ésotériques.
Le roman est Paru en 1952. Ralph Ellison est mort en 1994. Il travaillait à son second livre.

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Les éditions

  • Homme invisible pour qui chantes-tu ? de Ralph Ellison
    de Ellison, Ralph
    B. Grasset / Les cahiers rouges
    ISBN : 9782246323242 ; 13,30 € ; 06/11/2002 ; 574 p. ; Broché
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Bête et méchant

1 étoiles

Critique de ALF (Ondres (40), Inscrit le 13 mars 2004, 43 ans) - 13 août 2008

Classé dix-neuvième dans la liste des cent romans majeurs du siècle établie par le très sérieux Time, primé au National Book Award en 1953, et considéré comme un archi-classique de la littérature nord-américaine, Invisible Man raconte l'histoire d'un afro-américain à New-York et de son combat quotidien pour exister loin des clichés d'une société raciste.

Son choix est simple : rester le gentil noir obéissant à la Uncle Tom, ou tenter de devenir lui-même, au risque de s'exposer au rejet d'une Amérique pas vraiment prête à l'émancipation de ses minorités.

A chaque fois qu'il tentera de s'éloigner du rôle qu'on attend de lui, un méchant blanc viendra lui mettre des bâtons dans les roue. Il en va d'ailleurs du narrateur comme des autres afro-américains qu'il croise, dans la mesure où tous ne rencontrent (sur les millions d'habitants que comptait NY...) que des "salauds de faces de craie".

Alors je ne sais pas, peut-être n'ai-je pas su déceler la touche sarcastique qui aurait rendu la victimisation ambiante du roman moins insupportable, mais il m'a semblé relire Candide de Voltaire, l'ironie en moins.

Je ne me reconnais pas dans cette diabolisation de l'homme blanc méchant et fourbe qui cherche systématiquement à abuser son frère noir. Pire, j'ai eu l'impression, en tournant les pages d'Invisible Man, d'être tombé sur le bouquin le plus raciste qu'il m'ait été donné de lire.

Tout ce qui émane de l'homme blanc s'avère idiot ou corrompu, et le génie évident de son frère noir sans cesse brimé et détruit par le système (cf le personnage de Tod Clifton, supérieur aux autres membres de la Confrérie et donc rejeté, puis assassiné par la Police).

Reste une foultitude d'idées intéressantes et pertinentes, comme lorsque le narrateur expose les limites de l'idéologie, ou le danger des combats trop stéréotypés.

Bref, lecture très désagréable, parce qu'il ne me semble pas qu'on puisse combattre une injustice immonde et démontrée (le racisme de certains blancs envers les noirs) par une autre idiotie tout aussi puante (le sentiment que tous les blancs sont des ordures).

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