Dix-sept ans de Éric Fottorino

Dix-sept ans de Éric Fottorino

Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances

Critiqué par Isis, le 12 octobre 2018 (Chaville, Inscrite le 7 novembre 2010, 79 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 6 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (11 713ème position).
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Un triptyque de vie

Dix-sept ans, c’est l’âge qu’Eric Fottorino avait lorsqu’il a fait la connaissance de son père naturel, un juif marocain, évoqué dans un précédent livre « Questions à mon père » ; c’est aussi l’âge que sa mère avait lorsqu’elle l’a mis clandestinement au monde à Nice le 26 août 1960.

Dix ans plus tard, elle épousait celui qui deviendrait son père adoptif et auquel l’auteur rend également hommage dans « L’homme qui m’aimait tout bas », après que ce dernier se soit « tué d’un coup de carabine », comme le mentionne d’emblée l’incipit de l’ouvrage en question.

Ce parcours assez tourmenté est à l’origine d’une quête identitaire menée depuis des années, par Eric Fottorino avec autant de délicatesse et de pudeur que de talent littéraire, « Dix sept-ans » représentant le dernier panneau de son triptyque de vie. « Deux pères ont effacé une mère, comme un drame peut en cacher un autre » écrit-il très joliment.

Cette mère qu’on lui avait enlevée en lui faisant croire qu’elle était sa sœur… or, « Une mère on l’aime sans réserve. Une sœur, on peut la détester », précise-t-il

Pour mettre définitivement un terme à cette ambiguïté et rendre justice à celle qui lui avait tout de même fait « le plus beau des cadeaux » il a donc écrit une première version de ce livre, quasiment achevée au moment où elle révèle à ses trois fils avoir accouché en 1963 d’une petite fille qu’on l’a, cette fois-ci, sommée d’abandonner dès le jour de sa naissance, sans autre issue possible.

Ce secret a obligé Eric Fottorino à reprendre entièrement son manuscrit, qualifié ici de roman, contrairement aux deux autres ouvrages évoqués plus haut, et à mener à Nice une enquête sur le douloureux cheminement de cette jeune femme que l’on a par deux fois privée, en tout ou partie, du bonheur d’être une mère tout à fait comme les autres.

Un livre profondément sincère et attachant à recommander vivement, si l'on n'est pas réfractaire au genre de l’autofiction.

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après les pères, la mère

9 étoiles

Critique de Cyclo (Bordeaux, Inscrit le 18 avril 2008, 78 ans) - 29 août 2022

Je comprends qu'on puisse ne pas aimer l'autofiction, d'autant que beaucoup sont médiocrement intéressantes sauf pour l'auteur.
Mais dans ce récit d'Éric Fottorino, "Dix-sept ans" (Gallimard, 2018), il poursuit la quête de ses origines. Après son père adoptif, reconnaissant le bâtard en épousant la mère ("L’homme qui m’aimait tout bas", comme fit autrefois mon oncle Maurice, ce qui me fit apprécier davantage apprécier ce père), puis le père biologique qu’il retrouva tardivement ("Questions à mon père"), il s’attaque ici à sa mère.
Lina a dix-sept ans quand elle accouche à Nice d’Éric. Sa propre mère l’y a emmenée là pour qu’on ne voit pas la honte d’une naissance hors mariage. Et, au bout de trois jours, le bébé est mis en nourrice et la mère séparée de son fils. Elle devra se battre pour le récupérer. Alors qu’il va atteindre 58 ans, le narrateur part à Nice sur les traces de cette naissance incongrue et finit par y amener sa mère. C’est émouvant, très beau, une véritable histoire d’amour filial et d’amour tout court, un hymne à la mère.
Je ne sais ce qui est autobiographique là-dedans, je l'ai lu comme un roman. Et comme un roman magnifique.

À qui s’adresse ce livre ?

6 étoiles

Critique de Bernard2 (DAX, Inscrit le 13 mai 2004, 74 ans) - 7 juillet 2022

Présenté comme un roman, ce livre est en fait une biographie déguisée, une sorte d’exutoire que l’auteur s’est senti le besoin d’écrire pour essayer de se libérer d’une douleur ô combien lourde à porter.
Mais trop de paragraphes ou de phrases n’apportent rien au lecteur. Elles sont l’expression d’une profonde tristesse, que l’on comprend certes, mais qui est trop personnelle pour qu’on puisse la ressentir véritablement.
C’est évidemment bien écrit, sincère et émouvant, mais trop intimiste pour être partagé simplement dans un livre.

Nice, bord de mère

8 étoiles

Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 65 ans) - 5 mai 2019

Un dimanche de décembre, Lina a tenu a réunir ses trois fils pour leur révéler un terrible secret.
À la suite de cette révélation, Éric, qui n’a jamais pu établir une vraie communication avec sa mère, part dans les pas de Lina alors qu’elle était une toute jeune fille de 17 ans, exilée à Nice pour cacher sa grossesse honteuse.
"Tu es moins que rien. Moi pareil. Nié avant d’être né."

Arpentant les rues de la ville, la "Prom’" quelques mois seulement après la tragédie, il reconstitue le cheminement de sa mère, aidé par des rencontres fortuites, comme celle d’un pédopsychiatre et ses Playmobil.
En essayant de reconstituer le parcours de sa naissance, il essaie et commence à comprendre le passé difficile de sa mère.
"On ne tuera pas le petit, on tuera la joie."
Et 57 ans plus tard, il établira enfin le contact, il retrouvera enfin sa "petite mère", qui lui confiera son enfance, et ses dix-sept ans.

J’ai retrouvé l’auteur qui m’avait tant touchée dans "Questions à mon  père". Cet homme qui a eu deux pères, qui les a perdus, qui veut comprendre, découvrir pourquoi il a vécu avec l'impression de ne pas avoir eu de mère.
Une grande sensibilité, une tendresse à fleur de peau, un sens de la formule (la défaite des pères...), font de ce "roman" un livre émouvant et attachant.

Le livre de ma mère

9 étoiles

Critique de Alma (, Inscrite le 22 novembre 2006, - ans) - 22 janvier 2019

Ce beau roman, récit des retrouvailles d'un fils avec une mère, rédigé à la première personne s'ouvre sur la révélation que la mère du narrateur Eric (toute ressemblance avec l'auteur n'a rien de fortuit ….) fait un jour à ses 3 fils adultes .

En 1963, âgée de 20 ans et déjà mère célibataire du narrateur né 3 années plus tôt, elle a donné naissance , dans un établissement médical tenu par des religieuses, à une petite fille qui lui a aussitôt été enlevée sans même qu'elle ait eu le temps de la voir, de la toucher ou de lui donner un prénom pour l'offrir à une femme entrée dans cette clinique avec un ventre postiche de femme enceinte et qui ressortira quelques instants plus tard avec ce bébé dans un couffin .
Un abandon qui lui a été imposé par sa propre mère, avec la complicité des « bons pères » sous la coupe desquels cette mère était tombée .
Une scène dont on a du mal à imaginer qu'elle a eu lieu en France en 1963, d'une cruauté qui nous étreint et dont l'aveu va déclencher chez le narrateur une véritable quête identitaire .

Déjà, à 7 reprises, il avait tenté de mettre sa mère au cœur de ses récits, une mère qui n'avait que 17 ans d'écart avec lui, une femme-enfant qu'il appelait Lina et non maman, dont on lui avait dit souvent qu'elle était sa sœur, mais ces essais littéraires n'avaient jamais abouti .

Il part alors à Nice là où elle lui a donné naissance 50 ans plus tôt . C'était là qu' on l'avait exilée pour accoucher , seule et bien loin des siens, afin que l'arrivée de cet enfant bâtard ne souille pas l'honneur familial.

Il se livre alors à une véritable enquête, parvient à retrouver lieux et personnes qu'elle a pu rencontrer , cherchant à imaginer et à comprendre ce que fut ce moment pour cette jeune fille à l'âge où l'on est encore insouciante et inconsciente de la vie .

C'est grâce à cette recherche que le fils qui avait toujours eu du mal à communiquer avec sa mère, à montrer ses émotions, qui se sentait bloqué quand il lui fallait échanger avec elle sur le passé , va retrouver le vrai lien qui les unit . C'est par ce roman que celui qui avait été si peu son fils ose enfin s'adresser à elle en l'appelant d'une façon récurrente « petite maman », traduisant ainsi ce qu'il n'avait jamais osé lui dire .

Eric Fottorino , interrogé sur cet ouvrage, reconnaît que sa rédaction a constitué pour lui un moyen de se libérer du malaise qui l'étouffait et de rendre à sa mère la dimension et la place qu'il lui devait .

Dans le sillon des ouvrages précédents que l'auteur a consacrés à son père biologique et à son père adoptif, DIX-SEPT ANS se présente comme roman puissant mais plein de délicatesse, d'émotion contenue dont le souvenir se prolonge bien au-delà de sa lecture .

Tout sur ma mère

8 étoiles

Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 46 ans) - 14 octobre 2018

Simple et joyeuse en apparence, Lina, mère de trois enfants cache de lourds secrets et des blessures. Elle annonce à ses fils qu'elle a dû abandonner une enfant à sa naissance, de peur de devenir fille-mère, statut fort mal accepté dans les années 1950 et 60. Aussi le fils aîné est-il né d'un père naturel, élevé par son père légitime.
Comme sa mère entame le déclin de sa vie, il entame une quête, en se rendant à Nice où il est né et qu'il ne connaît pas. Il tente de comprendre le cheminement des événements, les états d'âme d'une mère généreuse et si secrète, et de trouver des éléments, des détails qui pourrait évoquer en lui quelque chose, ce qui constitue une méthode quelque peu aléatoire. S'il ouvre plus de questions qu'il ne trouve de réponses, il comprend que cette petite femme fragile et généreuse a donné tout ce qu'elle pouvait, et cela représente fort probablement l'essentiel.
Cette quête de sens, parfois fragile en la forme, n'est pas vaine, puisqu'il y est question de rendre hommage à une mère qui s'en va doucement et de retrouver la paix avec soi-même.

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