Bonneville de Laurent Saulnier

Bonneville de Laurent Saulnier

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Débézed, le 24 août 2016 (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 76 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (41 284ème position).
Visites : 2 569 

La belle américaine

Bonneville, c’est la Pontiac Bonneville 1969 achetée par le père du héros, le narrateur, sur un coup de tête qui lui fit perdre son rôle de chef de famille, sa femme, passionnée par l’élevage des gallinacées, lui ayant, à cette occasion, confisqué la gestion des comptes familiaux. Désormais, la Pontiac, elle, est clouée au garage, elle ne roule plus, des pièces sont défaillantes et des pièces de voiture de ce type on n’en trouve pas en France surtout dans la campagne profonde où la famille a trouvé refuge dans une gare désaffectée. Le narrateur, jeune homme baraqué mais inoffensif, n’a pas brillé à l’école qu’il n’a pas fréquentée très longtemps, il a vite trouvé un boulot dans une station-service où il se plait bien et travaille assidûment.

Depuis que le père est mort, il vit seul avec la mère au rythme des trains qui ne s’arrêtent plus devant leur gare. Il n’a plus qu’une idée en tête, remettre Bonneville en état pour sillonner les routes du coin. Pour réaliser ce projet il faut de l’argent qu’il n’a pas, après mûre réflexion, il pense que des petits larcins commis dans les belles voitures en stationnement lui apporteraient les fonds nécessaires sans nuire beaucoup aux propriétaires détroussés. Mais voilà, le papillon qui bat des ailes au-dessus de la baie de Rio pour déclencher un ouragan en mer de Chine est de passage par la région, tout part en vrille, rien ne se passe comme prévu. Les événements imprévus et indésirables s’enchaînent les un aux autres prenant une tournure de plus en plus dramatique.

L’auteur évoque le célèbre inspecteur Columbo, considérant le nombre de cadavres qui jonchent les pages de ce petit roman, j’ai plutôt l’impression d’avoir traversé une série comme Barnaby, une série où l’on ne lésine pas trop sur le nombre de victimes. Bien sûr, il est un peu particulier le jeune homme, il se relève chaque nuit pour s’installer au volant de Bonneville avec Mister B, un énigmatique passager qui le guide et la belle Julia aux gros seins, la livreuse de carburant. Ensemble, avec Bonneville, ils parcourent la campagne environnante jusqu’au jour où tout foire.

Ce texte m’a rappelé un roman de Chris Womersley, « La mauvaise pente », j’avais alors écrit « Le roman de deux vies qui ont dérapé lorsqu’un grain de sable s’est coincé dans la mécanique de leur destinée ». Et dans ce texte, la destinée semble avoir pris la même mauvais pente même, même si le roman de Saulnier est beaucoup moins noir que celui de l’Australien, il est plutôt fataliste. C’est l’histoire d’un pauvre gars dont les muscles remplacent, sans qu’il s’en rende bien compte, la cervelle et qui est emporté par des événements qui le dépassent malgré tout ce qu’il entreprend pour remettre le cours de son existence dans le bon sens.

Les passions de l’enfance peuvent prendre une tournure imprévisible et générer des situations dramatiques comme dans cette histoire presque drôle qui ressemble plus à une parodie de roman noir qu’à un texte réellement noir. Des doux dingues qui partent en vrille n’existent pas que dans les guerres larvées, il peut y en avoir partout même dans les gares désaffectées.

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Bonneville

7 étoiles

Critique de Hcdahlem (, Inscrit le 9 novembre 2015, 64 ans) - 20 septembre 2016

« Bonneville a fêté ses quarante cinq ans cette année. Modèle quatre portes sorti des chaînes en 1969, huit cylindres en V et plus de trois cent chevaux sous son long capot crème jadis aussi brillant qu’un miroir impeccablement astiqué, au moins les jours de soleil. » Si cette voiture, totalement incongrue dans cette campagne française, joue un si grand rôle dans la vie du narrateur, c’est qu’il n’a quasiment plus qu’elle pour s’imaginer un avenir radieux. Son père, qui a fait la folie d’acheter ce véhicule consommant un maximum et qui n’a jamais vraiment fonctionné, est décédé. Sa mère n’a d’intérêt que pour ses poules et sa sœur s’active à changer d’amant presque comme de chemise.
Après une scolarité difficile, passée par un lycée technique où seul l’ami Albéric, qui s’amusait à trancher la tête des animaux qui croisaient sa route, le distrayait un peu, il a fini par trouver un emploi à la station-service de l’autoroute. Là il imagine la destination des clients qu’il croise et rêve de les rejoindre au volant de sa belle américaine. Mais pour cela, il faudrait réparer Bonneville et avoir davantage d’argent.
C’est à partir de ce constat que les choses vont commencer à se gâcher. Il pense avoir trouvé la solution en crochetant des voitures en stationnement et en dérobant leur contenu. Facile à dire, moins facile à faire. Le premier larcin est un… petit cercueil accompagné d’une menace de mort. Par un jeu de circonstances aussi cocasses que dramatiques, ce vol va l’entraîner à commettre un meurtre, puis un autre… Un engrenage dont il ne va pas pouvoir se sortir.
Laurent Saulnier réussit à nous faire aimer ce jeune homme à tel point qu’on lui pardonnerait même ses méfaits. Plus comédie dramatique déjantée que chronique de la misère sociale, son roman est une sorte de road-movie à la française. Sauf que la voiture ne fait que sortir du garage, que la grande évasion se limite à une virée chez le boucher de la ville voisine et que le grand amour n’est qu’un fantasme, une charmante jeune fille à la poitrine généreuse qui poserait ses pieds nus sur le tableau de bord et qui s’appellerait Julia.
Au fil des pages, on se dit que le pire est de plus en plus sûr. Ce qui ne nous empêche nullement de nous régaler à suivre les pérégrinations de cet assassin malgré lui. Un petit bijou loin du politiquement correct. Un vrai régal !
http://urlz.fr/461w

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