La grande guerre (1914-1918) de général Niox

La grande guerre (1914-1918) de général Niox

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Histoire , Sciences humaines et exactes => Essais

Critiqué par JulesRomans, le 19 janvier 2014 (Nantes, Inscrit le 29 juillet 2012, 65 ans)
La note : 6 étoiles
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Le général Niox est mort à côté de l’exilé de Sainte-Hélène, fils de Léon (c’est pas bidon), avec une ceinture en cuir de baleine

Le général Niox est né à Provins, alors que son père est lieutenant au 2e régiment de cuirassiers caserné dans cette ville. Après avoir fait nombre des guerres menées sous le Second Empire (le prince Louis-Napoléon avait pourtant prédit "L’Empire c’est la paix"), il a enseigné la géographie et la cosmographie à l'École d'état-major. Ensuite Gustave Léon Niox est directeur du Musée de l’Armée de 1905 à 1919.

Mort en 1921, il ne risque pas d’avoir été « directeur du musée de l’Armée dans les années 1920 » et il aurait été bon de dire que la première publication de cet ouvrage date de 1921 pour en conclure qu’il a été écrit à chaud. Le fait que le livre s’adresse, parait-il aux surdoués, ne doit pas être prétexte pour confier la rédaction de la quatrième de couverture au plus sous-doué de la maison France-Empire qui écrit une phrase à la fois d’un ton apologétique totalement désuet et contenant une erreur historique majeure:

«ce livre a été écrit par l’un des héros de cette épopée».

Heureusement la présentation de l’ouvrage passée, on est face à un livre qui visiblement terminé peu de temps après la signature du Traité de Versailles (il signale que la guerre a repris en Turquie et en Russie avec les interventions alliées), fait preuve de qualités pédagogiques certaines, tant par les cartes fort lisibles d’un secteur que par le choix de certaines formules claires et justes:

« Le 15 mai, le général Pétain fut nommé commandant en chef en remplacement du général Nivelle, et remplacé lui-même par le général Foch dans ses fonctions de chef d’État-Major.
Il fut décidé qu’on s’abstiendrait de toute opération de grande envergure jusqu’au moment où les Armées auraient acquis la supériorité sur l’ennemi. Cette situation ne pouvait être réalisée que vers le mois de juillet 1918, par l’arrivée des Armées américaines dont l’entrée en guerre était annoncée ». (page 126)

Il est en outre d’une rare capacité de prédiction (s’appuyant sur l’analyse du passé) :

« Les alliances des nations de l’Entente ne peuvent survivre aux causes qui les ont amenées ». (page 237)

Après une introduction de 20 pages sur le contexte européen en 1914 et l’enchaînement vers la guerre, on a neuf chapitres sur le front en Belgique et en France, un sur la situation des combats en Russie, un autre pour le front italien, deux sur la guerre dans les Balkans (avec pages 207-209 les circonstances amenant l’abdication du roi Constantin au profit d’Alexandre) et un sur le Proche-Orient. Les opérations en Afrique, Asie et Océanie qui voient les colonies allemandes tomber en des mains hostiles diverses (Anglais, Français et Japonais selon l’endroit) ne sont pas évoquées sauf dans leurs conséquences et donc à propos du contenu du Traité de Versailles.

Les explications des désastres de l’armée russe manquent de données parfois très pertinentes sur le succès allemand à Tannenberg. Elles ont le mérite toutefois de remettre en lumière l’importance de l’espionnage allemand au plus haut niveau de l’armée et du gouvernement russes (Soukhomlinof et Sturmer), même si qualifier Lénine d’agent allemand marque les limites de la compréhension d’une situation que l’auteur ne connaît que très peu.

N’est évidemment traitée ici que la dimension militaire du conflit, sans même que soit vraiment abordées les questions diplomatiques, et quand elles le sont incidemment c’est par un manque d’information qui permet éventuellement une médisance peu élégante (sur le sujet voir pages 347-348 et 353 de "Guillaume II" de Charles Zorbige) dont il est l’objet le Kaiser :

« Le 28 juillet 1914, dans un grand Conseil de l’Empire tenu à Postdam, les décisions définitives avaient été prises. Pour se soustraire aux instances dont il serait l’objet, le Kaiser s’embarqua pour une croisière de plaisance sur les côtes de Norvège, laissant à son chancelier de faire le nécessaire pour que la rupture fût inévitable ». (page 23)

Une deuxième configuration cette fois sociale, s’est faite jour après la Seconde Guerre mondiale, on s’intéresse à la vie des poilus et par exemple aux employés dans les usines d’armement. La troisième dimension intègre le culturel en lien avec l’histoire des représentations et explore la façon dont toutes les catégories sociales et tous les courants de pensée ont vécu le conflit. Si un ouvrage global sur la Grande Guerre pour un lectorat du XXIe siècle doit permettre de donner des clés sur le sujet, il doit comporter tous ses volets.

Se pose la question du lectorat possible pour ce livre, pour le non-spécialiste il aurait mérité d’être donné annoté. De la bataille de Verdun en matière de chiffres des pertes, il nous est dit:

« Du 15 au 16 décembre 1916, les lignes allemandes furent emportées. Les pertes furent relativement légères, celles des Allemands d’environ 25 000 hommes, dont 11 000 prisonniers et une centaine de canons ».

Toujours dans le même ordre d’idée, la carte de l’Europe livrée page 238-239 ne tient pas compte des conclusions des conflits sovieto-polonais (paix signée en mars 1921) et des limites de la Turquie (fixées en 1923 par le traité de Lausanne).

Ce livre n’a vraiment d’intérêt que pour l’historiographe de la Grande Guerre, il est un des premiers récits qui suit la fin du conflit à destination d’un lectorat adulte ayant un niveau culturel au moins du niveau du certificat d’études.

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