La rose qui tue de Delly

La rose qui tue de Delly

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Antinea, le 13 septembre 2013 (anefera@laposte.net, Inscrite le 27 août 2005, 45 ans)
La note : 7 étoiles
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Clichés et eau de rose

Gemma et Mahault sont deux jeunes filles bien élevées issues d'une famille respectable mais peu fortunée. Au décès de la vieille tante qui avait leur charge, elles se retrouvent seules et démunies, les pauvrettes, et doivent trouver un moyen de subsister dignement. Gemma, la pragmatique, pense à une carrière de préceptrice tandis que Mahault, d'un tempérament plus artistique et rêveur, songe à user de ses talents de musicienne. Et voici que le destin les fait justement entrer au service d'une famille noble, les Camparène, en tant que professeures de Joyce et d'Auberte, les deux fillettes de l'héritier direct.

Au château de Brussols, forteresse austère de Provence, les jeunes femmes découvrent leurs employeurs : il y d'abord la comtesse Camparène, matriarche implacable, et son mari le vieux Comte, bonhomme sympathique tout absorbé par l'écriture de ses Mémoires. Puis Lionel, le petit-fils, déjà deux fois veuf, père des gamines et héritier du titre. C'est un être fragilisé par la faiblesse congénitale de ses membres inférieurs mais qui use de séduction pour asseoir son pouvoir. Enfin Laetitia, la belle et mystérieuse parente italienne dont les talents de chimiste sont de façon très caricaturale illustrés par une manie toute lucrétienne d'élaborer des formules... Passion que la jeune femme partage d'ailleurs avec Lionel, qui lui aime aussi, de son côté, cultiver les roses... Face à la noblesse, à l'argent, à la gentillesse – du moins apparente – de la famille, Mahault s'emballe tandis que Gemma se méfie. Le souvenir des deux premières épouses de Lionel, mortes rapidement, ne rassure pas la jeune femme...

Avec un titre pareil, je ne pouvais pas faire autrement que d'extirper ce volume de l'étagère sur laquelle il dormait depuis plus de... bon, ça c'est une autre histoire. Mais bref, un regard sur la tranche et ma curiosité me forçait à lire ce livre au titre délicieusement ringard... et puis c'est du Delly, alors quand il fait beau et qu'il me prend l'envie de secouer la naphtaline, autant le faire avec « du lourd ».

« La rose qui tue », c'est la quintessence du roman feuilleton à rebondissements, cousu de fil blanc bien épais et piqué de clichés... Le seul intérêt de ce roman en effet, c'est d'être passé de mode. C'est d'ailleurs pour cela que malgré tout j'ai bien aimé le lire, pour le petit voyage dans le temps qu'il permet. Mais on est bien loin de Rebecca de Du Maurier où l'ombre de la précédente Madame de Winter hante encore son mari et oppresse sa toute nouvelle femme. Ici, les jeunes épouses mortes sont presque réduites à de simples événements factuels qui enjolivent l'intrigue à grands coups de truelle. Le décor est chargée comme un papier peint fleuri : les jeunes préceptrices d'abord, toutes deux très accomplies et orphelines, comme dans tout roman à l'eau de rose qui faisait frémir le cœur des jeunes filles en fleurs de l'époque de ma mémé, je suppose ; la foule de personnages plus ou moins secondaires ensuite, qui vous donne l'envie d'attendre le prochain métro : de la poussive et folle naine Zora qui hante les couloirs du château au séduisant et rustre cousin Corse qui vit en contrebas et avec lequel Lionel est irrémédiablement fâché, en passant par les domestiques qui n'ont parfois qu'un tout petit rôle à jouer dans l'histoire, Delly ne fait pas l'économie de caractères. Enfin, tout cela est joliment mené mais sans aucun véritable sentiment, aucune émotion et j'en garde l'impression d'une magnifique pièce montée qui aurait manqué de sucre et dont la crème n'aurait eu aucun goût... Il reste que c'est tout de même très bien écrit, que cela se lit vite et que cela m'a fait sourire.

(A l'occasion de cette critique, je vois que le livre a été réédité en 1983. Mon exemplaire est bien plus vieux, pardi ! Il vient de la bibliothèque de ma grand-mère. Et cette couverture pour la réédition ! Mazette... )

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Les éditions

  • La Rose qui tue [Texte imprimé] Delly
    de Delly,
    Tallandier / Collection Delly (Paris, 1980)
    ISBN : 9782235014625 ; 3,94 € ; 12/10/1983 ; 186 p. p. ; Broché
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