Moi tout craché de Jay McInerney

Moi tout craché de Jay McInerney
(How it ended : new and collected stories)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Jlc, le 15 août 2013 (Inscrit le 6 décembre 2004, 80 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 4 étoiles (49 181ème position).
Visites : 2 987 

Narcisse à New-York,

Jay McInerney construit une œuvre littéraire fondée sur l’observation d’une certaine population new-yorkaise, celle qui navigue entre TriBeCa et Upper West Side, celle où le paraître signifie l’être (ou son absence), celle qui « commence mais ne finit jamais » un livre, une thèse, un scénario, celle qui s’épuise dans des nuits alcoolisées et « poudrées » avant de se retrouver au petit matin épave tremblotante ou au lit avec un inconnu « qui ronfle comme un camion poubelle ».

« Moi tout craché » est une suite de portraits de trentenaires frivoles et désinvoltes qui pourraient être les descendants (improbables et ayant mal tourné) d’Edith Wharton et de Fitzgerald et ne sont que « Les enfants de l’Empereur » de Claire Messud. C’est Pénélope qui se fait gruger par un candidat démocrate aux primaires présidentielles qui ne se souviendra même pas de « l’endroit où il échangea son âme sœur contre quelque chose qui lui tenait plus à cœur ». C’est ce couple qui, sous le prétexte de savoir rester amoureux, fréquente les clubs échangistes laissant le fantasme l’emporter sur la réalité pour mieux cacher une fêlure indélébile. C’est un fils qui pille sa mère, la croyant sur le point de mourir. C’est une famille qui se déchire sur le doute qui s’installe quand un des enfants suggère dans une pièce de théâtre que sa défunte mère eût un amant, transformant Thanksgiving, fête de la gratitude, en réunion hystérique. C’est une jeune fille, « au passé haut en couleurs », mais probablement abusée dans l’enfance, qui se « sent comme une carte Panini » qu’on échange entre copains. C’est une intrigante qui cherche à assurer ses vieux jours. Ce sont des hommes qui ne sont que des enfants apeurés, privés de leur doudou, dernier célibataire » ou politicien ayant un besoin constant d’être rassuré, narcisse de notre époque. C’est un infidèle, comptable de sa sexualité (« deux fois, ni plus ni moins tous les mardis matin de 9 à 11) « qui n’avait aucune raison de supposer que le monde serait mis sens dessus dessous » en ce mardi… 11 septembre.

Avec ce recueil, McInerney démontre qu’il est aussi bon nouvelliste que romancier. « Moi tout craché est un excellent recueil de nouvelles écrites entre 1982 et 2008. En revanche, faire de lui un proche de Raymond Carver est un peu rapide. Il y a chez ce dernier plus de tendresse, de fatalisme, d’empathie avec les personnages que chez McInnerney. Celui-ci est un témoin de notre société, plus ironique que Carver, plus cruel sans être méchant, plus caustique certainement, plus moraliste peut-être. Carver raconte les victimes d’une société qui se déglingue quand McInerney fustige les privilégiés d’une société sans âme.

Le titre original « How It Ended » qu’on peut traduire approximativement « Comment tout cela a-t-il fini » est plus approprié que « moi tout craché » car il annonce la fin d’un monde. Et donc peut-être l’espérance d’un autre, d’un nouveau monde?

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Les éditions

  • Moi tout craché [Texte imprimé] Jay McInerney traduit de l'anglais (États-Unis) par Agnès Desarthe
    de McInerney, Jay Desarthe, Agnès (Traducteur)
    Points / Points (Paris)
    ISBN : 9782757820032 ; 7,60 € ; 07/10/2010 ; 345 p. ; Poche
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Apologie du vide

5 étoiles

Critique de Antihuman (Paris, Inscrit le 5 octobre 2011, 41 ans) - 18 novembre 2013

Du mari dangereusement insatisfait de l'échangisme petit-bourgeois de sa femme en passant par ce couple qui s'étiole juste à cause d'un chat jusqu'au spleen insignifiant d'une gosse de riche junkie de la Vème avenue, McInerney multiplie les rôles (même ceux des filles) du haut de son triple-menton, l'essentiel étant qu'ils se ressemblent tous et que les clichés soient multipliés à l'infini. Quelques uns sortent néanmoins du lot, comme ce dernier célibataire, ou cette femme désespérant de sa solitude lors d'une manif en plein NYC, ce qui confirme qu'il y a du bobo chez Jay surtout s'il est suiveur(se) et stupide. Il y aussi ce catholique qui s'émerveille de la messe, et egalement du fait de changer de vie. Irais-je les recommander ainsi que leur descendance degénérée à mes amis lecteurs ? Je ne sais pas trop...

Ici on est chez les croquants et on ne ment pas, surtout s'il faut jouer à l'homme d'ailleurs ! Je mets 2,5 pour la franchise.

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