Lena de Virginie Deloffre

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Isad, le 27 novembre 2011 (Inscrite le 3 avril 2011, - ans)
La note : 4 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 6 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (14 497ème position).
Visites : 2 660 

De l’attente passive d’un autre à une vie pour soi

Le livre est d’un long et monotone récit qui se présente sous la forme d’une correspondance de 1987 à 1992 entre Léna d’un côté et Varia et Mitia qui habitent au nord de la Russie près de la mer.

Léna, jeune femme immobile et toujours dans l’attente, n’aspire qu’à la permanence. Le monde change autour d’elle mais elle reste dans sa bulle près de son arbre à rêver. Son mari est choisi comme cosmonaute et elle est obligée de s’ouvrir à cette nouveauté, de comprendre ce besoin qu’ont les êtres d’aller vers l’avant, leurs aspirations à découvrir autre chose que ce qu’ils ont. Elle devient ainsi un peu plus humaine, un peu plus autonome, moins dépendante.

En dehors de cette histoire, l’immensité russe est décrite avec ses conditions rudes où la chaleur humaine, voire la promiscuité, aident à survivre.. On ressent toujours une volonté de combattre et de vivre en dépit du climat, des privations, de la politique.

IF-1111-3809

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Touchant

10 étoiles

Critique de Lomegas (, Inscrit le 24 mars 2012, 34 ans) - 17 avril 2014

J'ai trouvé ce livre très touchant et il se lit d'une traite. L'évocation de la Russie et de ses habitants est tout simplement sublime. De plus toute l'histoire spatiale de l'Union soviétique y passe, un régal ! Alors oui, les personnages auraient mérité encore un peu plus de profondeur, mais je me demande si cela aurait réellement ajouté quelque chose au récit.

J'espère que Deloffre écrira encore d'autres livres parce que son livre est un vrai brin d'un frais dans la littérature contemporaine.

La tête dans les étoiles

9 étoiles

Critique de Alma (, Inscrite le 22 novembre 2006, - ans) - 2 mars 2014

Un roman qui peut surprendre dans la production littéraire actuelle ...On n'y trouve ni violence, ni drogue, ni sexe, ni adultère. Les personnages y sont touchants, pleins d’humanité et de sensibilité. Et si la tendresse y est le sentiment dominant, le roman n’a rien de fade.

Deux couples constitués chacun de membres opposés mais complémentaires. A la discrétion et à la patience du sage Mitia, répond le bavardage constant « la moulinette varvaresque » de Varva, la babouchka au grand cœur, pleine de bon sens, fidèle au communisme de sa jeunesse. A Lena, la contemplative enfermée dans sa gangue de silence,répond l’ambitieux Vassia, le cosmonaute.

La petite histoire de ces quatre personnages s’inscrit dans la grande Histoire de l’URSS, et on parcourt, grâce à eux près d’un siècle de l’histoire du pays, de l’époque des tsars aux années 90, chacun représentant une des étapes de sa transformation . Varvara y parle du servage qu’ont connu ses parents, d’avant la révolution d’octobre, mais elle est surtout celle qui défend avec vigueur et conviction les apports bénéfiques du communisme ( sa plaidoirie en faveur des élections pour un candidat unique est assez savoureuse …),
Vladimir, le rêveur et le taiseux, est le scientifique dont les thèses dissidentes lui ont valu d’être envoyé à la campagne. Lena est l'adoptée, originaire des tribus nomades de Sibérie qui conserve secrétement en elle les traces de sa vie d'enfant . Vassia est celui qui symbolise la puissance technologique du pays et des avancées de la science, celui qui, tel un griot, conte aux enfants de l’appartement communautaire la grande épopée de la conquête spatiale et de son héros Gagarine.

Ce roman a eu pour moi le charme poétique des toiles de Chagall et m’a mis la tête dans les étoiles .

Inégal

4 étoiles

Critique de Pacmann (Tamise, Inscrit le 2 février 2012, 59 ans) - 25 mai 2013

L’œuvre est tantôt poétique, tantôt politico-historique. On y perçoit l’envoûtement de l’auteur pour le pays et l’esprit sibérien, mais je n’ai pas réellement pu embarquer dans ce récit. L’émotion n’est pas transmise. Les changements de rythme et de style d’un chapitre à l’autre ne rendent pas la lecture aisée. On suit pendant quelques pages des parties intéressantes et ensuite le soufflé retombe. Désolé mais je n'ai pas pu m'accrocher.

Espace, Russie, URSS, Sibérie

9 étoiles

Critique de Ddh (Mouscron, Inscrit le 16 octobre 2005, 82 ans) - 1 août 2012

Léna est l’héroïne du livre. Une femme toute simple mais tellement riche intérieurement.
La Belge Virginie Deloffre signe avec Léna son premier roman. Une réussite car elle obtient en 2011 le Prix Première RTBF décerné par un jury de lecteurs et elle est lauréate du 25ème Prix du Festival du 1er roman de Chambéry. Prix amplement mérités grâce à l’originalité du style et l’intérêt suscité par ce passé récent de la Russie.
Le roman tourne autour de quatre personnages aux caractères différents mais qui éclairent bien le lecteur sur la situation en Russie ; celle qui était la sienne sous le régime communiste, celle de la conquête spatiale et celle des balbutiements vers une soi-disant démocratie. Léna la Sibérienne, poète, tellurique vit dans l’ombre de son Vassili, ivre de vols toujours plus hauts. Mitia, un contestataire du régime, envoyé en exil par la hiérarchie, retrouve une raison de vivre grâce à sa passion pour la géologie. Varia, fidèle au système communiste a évidemment moult discussions politiques avec son époux Mitia, mais comme ils s’aiment et comme ils aiment leur Léna qu’ils ont recueillie.
Virginie Deloffre étale une belle palette de talents. Elle aborde tantôt le style épistolaire avec une touche de poésie, tantôt le documentaire prend le dessus et permet au lecteur de revivre la conquête spatiale mais aussi de connaître la vie du Russe moyen dans la deuxième moitié du XXème siècle. Le romanesque n’est pas exclu pour autant car la trame du récit progresse linéairement avec une pointe d’inattendu.

Le Prix première 2012 (pour un premier roman) décerné par la RTBF

10 étoiles

Critique de Deashelle (Tervuren, Inscrite le 22 décembre 2009, 15 ans) - 27 février 2012

Et voici la lauréate du prix première:

Elle vient d'obtenir pour son premier roman "Léna" le prix Première de la RTBF (Belgique) décerné ce premier mars à la foire du livre de Bruxelles.

Virginie Deloffre est médecin à Paris... à mi temps, car elle écrit depuis un long moment et voici son premier roman. Fascinée depuis l’enfance par la Russie, elle signe un livre magnifique à l'écriture sensitive. La toile de fond est toute l’épopée soviétique depuis les années 20 jusqu’à l’effondrement de l’URSS à la fin des années 80. Une débâcle spectaculaire qui ressemble à celle du fleuve Léna lorsqu’il sort de sa rêverie hivernale et cause des conséquences catastrophiques quand craquent tous les barrages de glace.

La Léna dont la romancière retrace le parcours est une enfant rêveuse, traumatisée par la mort de ses parents disparus dans un trou de glace en Sibérie, recueillie par un vieux couple sans enfant, Dimitri, un scientifique exilé en Sibérie et Varvara une bonne vieille paysanne pragmatique au franc parler, fière de son communisme. Hélas sa chaleur humaine peine fort à dégeler l'enfant mystérieuse et secrète.

Léna les quitte pour épouser Vassili, un ardent pilote de chasse de l’Armée rouge, et se retrouve seule dans un nouvel environnement urbain. A quel malheur doit-elle se préparer ? Sa vie intérieure est marquée par la rêverie et l’attente perpétuelle des retours de mission de Vassia. Son immobilité lui suffit pour capter la permanence. Elle se complait dans l’inaction comme si bouger dans sa chrysalide allait tout faire basculer. A chaque départ et chaque retour de son mari elle écrit de longues missives nostalgiques à son oncle et sa tante restés dans le Grand Nord et se souvient : "La terre et la mer se confondent, uniformément blanches et plates l'une et l'autre, sans ligne de fracture visible. L’œil porte si loin dans cette blancheur, qu'on croit percevoir la courbure de la terre à l'horizon. A ce point d'immensité l'espace devenait une stature, imprégnant chacun des êtres qui l'habitent, une irréductible liberté intérieure qui fait les hommes bien nés, les Hommes Véritables, ainsi que ces peuples, les Nénètses, se désignent eux-mêmes." Elle se sent comme les paysages de sa tribu d’origine: sans limites, à la fois changeants et immuables, aussi désertiques.

La langue poétique dévoile peu à peu tous les replis de son âme vagabonde. Elle a aussi la distance pour décrire avec humour son nouvel environnement : "C'est la fameuse Laideur Soviétique, inimitable, minutieusement programmée par le plan, torchonnée cahin-caha dans l'ivrognerie générale, d'une tristesse inusable. Un mélange d'indifférence obstinée, de carrelages mal lavés, de façades monotones aux couleurs uniques -gris-bleu, gris-vert, gris-jaune-, témoins d'un probable oukase secret ordonnant le grisaillement égalitaire de toutes les résines destinées à la construction du socialisme avancé. Un genre de laideur qu'on ne trouve que chez nous, que l'Ouest n'égalera jamais, malgré les efforts qu'il déploie à la périphérie de ses villes. "

Soudain, rien ne sera plus jamais le même. « Elle est tombée sur moi, la menace que je sentais rôder. » Lorsque Vassia est sélectionné pour faire partie de mission de la station Mir, Lena, fille de l’immuable perd ses repères: la routine de son attente des retours-surprise du mari qui faisait tout son bonheur tranquille et solitaire explose et fait place aux incertitudes et au questionnement. Son monde solitaire est fracassé.
Elle est forcée au commerce avec autrui, confrontée par la réalité. Et de se demander ce que vont donc chercher les hommes dans l'espace. Quelle est cette force qui les lance vers l'inaccessible? Qu’ont-ils contemplé ces cosmonautes, face à face avec l'univers? Pourquoi ceux qui en reviennent ont-ils tous le même vide au fond des yeux ? « Je ne sais pas pourquoi les hommes veulent aller plus loin. Mais ils l'ont toujours fait, ils ont toujours marché droit devant eux. Ils se sont heurtés à des déserts, puis à des montagnes, et ils les ont franchis. Ils sont arrivés à la mer et cet obstacle leur a pris des siècles. Mais ils ont appris à construire des bateaux et ils sont partis sur la mer au milieu des tempêtes, droit devant vers l'inconnu. Vers l'inconnu terrifiant toujours. Chaque étape de leur progression était jonchée de cadavres et pourtant ils ont continué jusqu'à couvrir la surface de la terre, et maintenant la terre ne leur suffit plus. Ils sont ensorcelés par les lointains. C'est une force en eux, sans doute semblable à celle qui habite les oies sauvages au printemps. L'étendue les attire, elle les appelle. Et ils se mettent en marche. »

Le roman est construit avec le soin d’une lente distillation de l’art de dire, sans en dire trop, par petites touches successives, pour fabriquer des images inoubliables. Le plaisir de la lecture est total tant la langue soutient l’imaginaire, fait éclore l’émotion, et ouvre nos yeux sur la sensibilité de l’âme russe. Elle insiste sur le désir permanent de conquête de l’homme. Elle capte les différences ahurissantes entre l’homme et la femme dans les deux couples… qui malgré tout s’entendent. Le personnage de Léna est tout émotion: fine, pudique et délectable. Tous les personnages sont riches, la narration de l’histoire soviétique prend des allures de conte. Le lecteur de l’OUEST se sent transporté dans un monde inconnu et surprenant. L’écriture fluide et rythmée colle au roman, comme un vêtement mouillé car Léna au fur et à mesure fait fondre la glace qui l’étreint. Tout au long de l’histoire on assiste à une accélération dynamique de l’énergie et à une authentique mise à flots du vaisseau de la vie. Celle de Léna.

Le ravissement de l'éclosion.

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