Chefs-d'oeuvre de la peinture française du Sterling and Francine Clark art institute : De l'école de Barbizon à l'impressionnisme de Jean-Louis Destans, James A. Ganz, Richard Robson Brettell

Chefs-d'oeuvre de la peinture française du Sterling and Francine Clark art institute : De l'école de Barbizon à l'impressionnisme de Jean-Louis Destans, James A. Ganz, Richard Robson Brettell

Catégorie(s) : Arts, loisir, vie pratique => Arts (peinture, sculpture, etc...)

Critiqué par Jlc, le 4 août 2011 (Inscrit le 6 décembre 2004, 80 ans)
La note : 9 étoiles
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Du bon usage des machines à coudre

A la frontière du Massachussetts et du Vermont, Williamstown est une petite ville de 8000 habitants célèbre pour son université d’histoire de l’art. Plus loin, au milieu d’un parc magnifique, un beau bâtiment blanc d’un seul étage abrite le musée et le centre de recherches du Sterling and Francine Clark Art Institute, détenteur de la collection d’art que les Clark ont constituée tout au long de leur vie. Ces merveilles ont peu voyagé mais, travaux de rénovation obligent, l’Institut a organisé une tournée internationale de ces chefs-d’œuvre. Après Madrid et Florence et avant Shanghai, les voici à Giverny (Eure) pour trois mois. C’est un enchantement dans le très beau (et peu fréquenté le jour où j’y suis allé) musée des Impressionnistes à deux pas de la maison de Monet et de son jardin, hélas fané par trop de touristes plus pressés de photographier que de tout simplement regarder.

Le catalogue est un excellent reflet des tableaux exposés, principalement des Impressionnistes. Il est construit comme les catalogues « à l’ancienne » avec d’une part le récit de la vie des Clark dans la première moitié du vingtième siècle, leur passion pour la peinture et d’autre part un commentaire très clair et pas pédant du tout de chacune des 73 œuvres présentées. Lui vient d’une riche famille américaine mais plus qu’un héritier, c’est un aventurier de la bourlingue notamment en Chine où « il reçut le baptême du feu lors de la révolte des Boxers ». Il se fixe ensuite à Paris où il rencontre Francine, actrice à la Comédie Française. Il est bourru, elle est charmante mais déterminée. Il se méfie des marchands et des experts mais se fie au jugement de sa femme. Il commence une collection sans choix précis car il « aime toutes peintures pourvu qu’elles soient bonnes », sans aucun snobisme et avec beaucoup de bon sens, avant de découvrir les impressionnistes et de se prendre de passion pour Renoir qu’il considère comme le plus grand coloriste. L’histoire de leur vie est passionnante. On y découvre comment le souvenir d’un grand père et le climat de guerre froide des années 50 furent décisifs pour le choix de Williamstown. On s’attriste aussi de voir comment la passion d’une collection peut conduire à une brouille familiale et à des ruses pour récupérer un objet tant désiré. Et surtout on comprend comment se construit une collection avec ses choix, ses hésitations, ses intuitions, l’évolution des goûts. C’était au fond des gens modestes, sauf financièrement parlant, auxquels les peintres qu’ils aimaient donnèrent sens à leur vie. Cette modestie se retrouve dans leur testament où, à l’inverse du Docteur Barnes à Philadelphie ou des sœurs Cone à Baltimore, ils ne mirent aucune clause restrictive à l’usage de leurs tableaux après leur mort , facilitant ainsi le développement de la collection.

Si « la peinture n’est pas une question de regret ou de mélancolie mais de désir »*, admirez « Baigneuse blonde » (n° 62 du catalogue) où Renoir peint Aline Charigot uniquement "vêtue" d’une alliance qu’elle ne portera que bien plus tard quand le peintre épousera le modèle.
Si « les couleurs ne sont pas des signes mais des sensations »*, regardez un champ de tulipes de Monet (n° 14), un coucher de soleil (n° 58) ou des pommes dans un compotier(n°65) de Renoir, ou la sublime jeune chrétienne de Gauguin (n°73).
Si « en regardant longtemps, on entre dans le temps de l’image regardée »* empruntez la route aux effets de pluie de Pissarro (n° 22) ou asseyez vous dans la loge au théâtre de Renoir encore (n°56).
Si « le grand peintre ne fait pas qu’imposer ses œuvres à nos esprits mais finit par changer tout notre paysage intérieur »*, laissez vous subjuguer par « La maison de Piette » de Pissarro (n° 24) ou l’ingénue de Renoir (n° 48).

Une exposition à voir, un livre à garder.

Mais au fait, que viennent donc faire ici les machines à coudre ? Eh bien parce que le grand-père de Sterling était l’associé de Mr Singer, l’inventeur des fameuses machines du même nom qui firent leur fortune.




* Les citations suivies d’une * sont extraites du roman d’Orhan Pamuk « Mon nom est rouge » qui relate notamment la confrontation au 16° siècle de la peinture de l’Empire Ottoman avec celle des peintres vénitiens.

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